La G@zette Nucléaire sur le Net! 
N°14
40 questions pour les élections législatives
5. GERER LES INVESTISSEMENTS NUCLEAIRES ACTUELS,
SUSPENDRE OU... ARRÊTER?

     La Gazette Nucléaire a depuis sa parution exprimé la nécessité que se déroule un débat public sur l'énergie nucléaire. De nombreuses organisations ont préconisé la solution du moratoire comme une halte qui permettrait, pour certains, de faire le point sur l'ensemble du problème énergétique, pour d'autres de résoudre certains problèmes techniques immédiats, portant sur des difficultés actuelles. Pour nous, il est bien clair que, outre la nécessité d'apporter des solutions aux questions techniques mal résolues, il faut faire porter les efforts d'analyse et de réflexion sur l'ensemble.
     C'est pourquoi nous pensons qu'une pause est nécessaire et qu'elle permettra l'instauration d'un vrai débat sur la politique de l'énergie de notre pays dans la mesure où les conditions suivantes sont remplies:
     - instauration de débats contradictoires à tous les échelons du pays:  municipal (pour les communes concernées de près ou de loin), régional, national;
     - possibilité de diffusion d'informations contradictoires et paritaires entre opposants et défenseurs;
     - mise sur pied de structures de décision appropriées dans la mesure où seront connus et appréciés les enjeux techniques, économiques, écologiques et les impliçations politiques.
     Pour permettre un débat largement ouvert, il faut que des commissions d'enquête réparties sur l'ensemble du territoire, de par leur structure et leur composition, laissent la possibilité d'audition à toute personne ayant un avis sur le sujet, ceci afm que le débat ne tourne en une discussion entre spécialistes cbargés de résoudre au coup par coup les problèmes techniques(11).
     Tous les problèmes evoqués dans cette Gazette(12) devront être exarninés. De plus, pour sortir du raisonnement fataliste «on ne peut faire autrement», des études approfondies devront être menées contradictoirement sur les alternatives énergétiques:
suite:
     - diversification des approvisionnements en gaz naturel et en pétrole;
     - énergies renouvelables: solaire (voir Gazette N°2), géothermie (voir Gazette N°13). Dans ce domaine, il est important que soient portées à la connaissance des débatteurs les réalisations déjà existantes et les possibilités immédiates ou réalisables. La connaissance pleine et entière de ces informations permettrait de proposer d'autres scénarios énergétiques.
     Aucun doute que l'espace des choix s'en trouverait considérablement agrandi.
     Il est important, de plus, que le temps de réflexion durant ce moratoire amène à se poser la question primordiale en matière énergétique: «de l'énergie pour quoi faire?»
     Ce n'est qu'en approchant de plus près ce problème, par des coûts énergétiques comparés au niveau global, que les économies d'énergie apparaîtront comme la «médication» de notre soif énergétique. Les économies d'énergie, notons-le, sont une «source d'énergie nationale» et chaque franc investi dans ce domaine est automatiquement indexé sur le coût de l'énergie!
     Répétons une nouvelle fois que l'arrêt momentané du programme pour un temps de réflexion ne constitue pas une panacée miracle, et peut très bien au contraire permettre à toute la mécanique nucléaire de repartir de plus belle sans qu'aucun des problèrnes de fond ait été résolu. D'autre part, il est clair que ce ne sont pas des créations du style du conseil de l'information sur l'énergie électronucléaire qui peuvent résoudre les nombreuses questions qui se posent (voir encart 3).
     Notons pour finir sur ce point qu'il y aura lieu dès le début de ce «moratoire» que les pouvoirs publics se préoccupent de la situation de l'emploi. A cet égard, des études analogues à celle rapportée dans l'encart 5 devront être envisagées.
11. Principe des «hearings» anglais, américains, etc.
12. Et dans les autres numéros...!
p.8

ENCART 3
CONSEIL DE L'INFORMATION
SUR L'ENERGIE ELECTRONUCLÉAlRE

     Le décret n° 177-1233 du 10 novembre 1977 institue le Conseil de l'Information sur l'Energie Electronucléaire, placé sous la présidence de Mme Simone Veil, actuel ministre de la Santé. Est-ce la fin de l'information unilatérale? On peut en douter et s'interroger sur l'indépendance de ce conseil. Qu'on en juge:
     Article 2: le Conseil de l'Information sur l'Energie Electronucléaire veille à ce que le public ait accès à l'information sur les questions relatives à l'énergie électronucléaire dans les domaines technique, sanitaire, écologique, économique et financier.
     Il donne son avis au Gouvernement(13) sur les conditions d'accès du public à l'information. Il propose au Gouvernement(14) les formes et les modalités de la diffusion de l'information.
     Il adresse chaque année(15) au Premier Ministre un rapport sur l'ensemble de ses travaux. Ce rapport est rendu public(16).
     Article 3: ... le secret militaire et le secret industriel ne peuvent lui être opposés que par décison motivée(17).
     Article 4:  le conseil de l'information sur l'énergie électronucléaire comprend, outre son président, dix huit membres:
     - Quatre élus locaux, désignés par le Premier Ministre(18), parmi les maires des communes directement concernées par l'installation des centrales nucléaires;
     - Six représentants d'associations ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement, désignés par le Premier Ministre(18) sur proposition du Haut Comité de l'Environnement;
     - Deux membres de l'Académie des sciences et un membre de l'Académie des sciences morales et politiques, désignés en leur sein(18) par chacune de ces académies, ainsi qu'un membre de l'Académie de médecine choisie par cette assemblée;
     - Quatre personnalités qualifiées dans les domaines de l'énergie, de l'économie et des techniques de communication, choisies par le Premier Ministre(18).


13. Il n'a qu'un rôle d'avis au gouvernement.
14. Il est clair que c'est toujours ce même gouvernement qui décide des formes et modalités de la diffusion de l'information!
15. Son travail: un rapport annuel, croyez-vous que cela va être un bouleversement?
16. Ouf, on a eu peur.
17. Sic.
18. En dehors des académiciens, tout le monde est de fait designé par le premier ministre. A votre avis, les débats de ce conseil seront-ils animés?
     Le moins qu'on puisse dire est que le programme nucléaire actuel pose de nombreuses questions d'ordres technique, écologique, économique, militaire et politique; dans ces conditions:
33. Etes-vous décidé à contribuer à la mise en place d'un processus de décision démocratique en ce qui concerne la politique énergétique de la France? Comment envisagez-vous ce processus: Referendum? Discussions au parlement?
34. Si votre formation vient au pouvoir, cherchera-t-elle à continuer les investissements nucléaires, à les ralentir, à se contenter de gérer ce qui existe, à arrêter... Est-elle d'ores et déjà décidée à confronter sa propre option à l'expression de la volonté populaire?
35. Si la stratégie de votre formation consiste à poursuivre les investissements ou à gérer les équipements actuels, quelles mesures de sécurité seront prises:
     - pour les travailleurs du nucléaire,
     - pour les populations habitant près des sites.
6. VERS UNE AUTRE POLITIQUE DE L'ENERGIE
     S'interroger sur la place de l'énergie nucléaire, réclamer un débat sur la politique énergétique conduit à s'interroger sur les alternatives énergétiques, leur possibilités, leur spécificités. Pour finir cette Gazette, il nous est apparu intéressant d'indiquer quelques sujets de réflexion sur ce point. Dans de prochains numéros, nous y reviendrons plus largement (20).
     · Quelques considérations rapides
     - Le développement de l'industrie s'est fait depuis un siècle par l'utilisation de plus en plus massive d'énergies fossiles, donc épuisahles 'charbon, pétrole; l'uranium, avec ou sans surgénérateur, ne rompt pas avec ce processus.
     - L'énergie a jusqu'ici été essentiellement considérée du côté de la production (mines, forages, centrales...), ce qui a conduit chacun des partenaires (mineurs. pétroliers, électriciens) à essayer d'imposer son vecteur le plus massivement possible.
     - Depuis une trentaine d'années, on vit sur l'illusion que l'énergie doit être abondante et bon marché et que par conséquent les gaspillages sont un phénomène peu important.
     - On considère qu'il existe des «ères» de ceci et de cela et qu'il y a lieu de passer de l'une à l'autre de plus en plus rapidement (tout pétrole, tout uranium, tout plutonium...).
     - La croissance énergétique est inéluctable, au moins jusqu'à la fin du siècle.
     Face à cette espèce de logique qui devrait se poursuivre, il faut remarquer que:
     - Il existe des énergies renouvelables en abondance sur terre (soleil, hydraulique...).
     - L'énergie doit aussi et surtout être considérée côté utilisation.
     - Le prix directeur de l'énergie a toutes les chances d'être fermement à la hausse.
     - La  diversification des sources d'énergie est toujours plus intéressante que tous les systèmes monoénergétiques.
     - Une politique volontariste d'économie d'énergie devra de toutes façons être mise en place tôt ou tard.
suite:
          Si nous voulons aller vers une autre politique de l'énergie, il faut développer études et réalisations permettant de proposer d'autres scénarios dans les différents domaines du solaire(21), de la géothermie(20), de l'hydraulique(22), des économies d'énergie(23).
     Mais cela nécessite la mise en place d'une politique volontariste se dotant de structures réelles d'actions. Tant que le secteur énergétique sera dominé par deux grands blocs (pétrole d'un côté, électronucléaire de l'autre), les alternatives ne seront envisagées que comme des appoints et de nouvelles utilisations de sources alternatives ne seront pas réellement prises en compte. Il est nécessaire que soient créés des offices régionaux et nationaux de l'énergie, permettant la mise en valeur des potentiels locaux et réfléchissant au problème du côté de l'utilisateur. Il pourrait également être créé un Commissariat à l'énergie.

20. La Gazette N°13 consacrée à la géothermie constitue le premier maillon d'une série de numéros consacrés aux énergies alternatives.
21. Rappelons que l'énergie solaire s'envisage de plusieurs façons:
     - thermique chauffage de locaux, production d'eau chaude. production d'électricité,
     - effet photovoltaïque: transformation directe rayonnement-électricité
     - biomasse: utilisation de la photosynthèse pour produire des carbures hydrogénés,
     - photo-catalyse: pour réaliser des synthèses chimiques à faible coût énergétique.
22. L'hydraulique peut s'envisager de plusieurs façons: marémotrice, au fil de l'eau, barrage de retenue, pompage permettant le stockage. On pourra lire à ce sujet le Rapport Pinta (Ministère de l'industrie et de la Recherche, Documentation Française, Dossier de l'énergie, N°9, 1976). Les possibilités françaises de l'hydraulique, Organisations Syndicales EDF, Région d'Equipement Hydraulique Alpes-Nord, 3 et 5 rue Ronde, 73000 Chambéry.
23. A propos, qu'est devenu le rapport Gruson qui, en 1974 (sic), avait traité de la lutte contre le gaspillage? Ce rapport de 100 pages avait été demandé par le Ministre de l'environnement de l'époque, M. Poujade, suite à la «crise de l'énergie».
p.9-10

ENCART 4

LE RAPPORT MAILLET

     Electricité de France a demandé une étude à M. Pierre Maillet, professeur de Sciences Economiques à l'Université de Lille. Celui a rendu son rapport en mai 1977 intitulé: «Analyse des répercussions sur l'économie francaise d'une modulation temporaire du programme de construction de centrales nucléaires».
     A la suite de cette étude, on a entendu ici et là des évaluations du coût d'un moratoire pour la France. En fait, les chiffres avancés ne correspondent pas à grand chose. En effet, quelles sont les hypothèses:
     - moratoire complet pendant 5 ans
     - même fourniture d'électricité que s'il n'y avait pas de moratoire et pour cela on ne fait appel qu'au fuel
    - puis de nouveau nucléaire (après 5 ans) au même rythme que dans le plan actuel.
     On voit tout de suite à quoi peuvent conduire ces hypothèses. On se demande quel intérêt il peut y avoir à faire une telle étude!... Est-ce sérieux de vouloir à tout prix continuer la même politique de pénétration de l'électricité, en particulier dans le chauffage et de ne pas faire plus appel aux énergies nouvelles?
     Le lecteur jugera.

36. Dans l'hypothèse d'un moratoire, votre formation a-t-elle élaboré un programme de recherche sur les énergies alternatives? Quelle serait l'importance d'un tel programme?
37. Pensez-vous possible l'utilisation d'énergies alternatives, renouvelables? Dans quels délais?
38. Que propose votre organisation dans le domaine des énergies nouvelles?
39. Que pensez-vous de la création d'un Commissariat à l'énergie?
40. Etes-vous favorables à la création d'offices régionaux et nationaux de l'énergie?

ENCART 5

ISOLATION THERMIQUE

     D'après une note interne du Ministre de l'Industrie et de la Recherche(19), un investissement de 50 F par m2 permettrait plus de 30% d'économie de chauffage. Un programme sur 10 ans entraînerait l'emploi de 80.000 personnes. Si on accepte de payer 120 F, l'économie d'énergie atteint 50% et demanderait 20.000 personnes. Ces chiffres sont peut-être contestables, mais ce qui est intéressant, c'est que de telles études existent et indiquent des voies de recherche à approfondir.


19. Note de septembre 1977.

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