La G@zette Nucléaire sur le Net! 
N°75

Conférence de presse du «Comité Stop-Nogent»
L'alimentation en eau de Paris
Quelques problèmes posés par la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine


     La majeure partie de l'eau potable de l'agglomération parisienne provient d'usines situées sur la Seine et la Marne EN AMONT de Paris (Seine et Marne: 3 millions de m3 par jour; eaux souterraines: plus d' 1 million de m3; Oise: 300.000 m3).
     En cas d'accident majeur à Nogent-sur-Seine, il n'est pas difficile d'imaginer une contamination des bassins versant de la Seine et de la Marne. Dans ce cas, l'alimentation en eau de Paris pourrait être compromise pendant plusieurs jours ou plus.
     Les travaux d'interconnection des différentes usines sur la Seine et la Marne financés pour le compte de l'Agence Financière de Bassin Seine-Normandie risquent de ne pas être suffisants pour assurer la continuité de l'alimentation en eau de l'agglomération parisienne. Or aucune étude à ce sujet n'a été rendue publique par EDF.
     En cas d'accident majeur une des procédures dite «ultime» (procédure U 5) consiste à dépressuriser l'enceinte de confinement à travers un «filtre rustique». Ceci est rendu nécessaire car d'après les experts de l'IPSN (Rapport de Mr Bussac, Cogné, Pelcé; février 1986)[1] le dôme de confinement des PWR ne résiste pas à la phase finale de l'accident majeur, attaque du radier (plancher) du bâtiment par le corium (coeur en fusion). Ils indiquent clairement que la traversée du radier est un phénomène concevable au sens de l'ingénieur et que les effets sur les eaux souterraines sont difficiles à prévoir.
     Il est loin d'être évident d'ailleurs que le dôme puisse résister à la phase initiale (rupture des canalisations primaires suivie d'une explosion d'hydrogène). Les organismes de Sûreté ne donnent aucune précision sur les quantités de radioactivité relâchées dans l'atmosphère et de leur effet sur la contamination des eaux de surface.
     En cas d'accident majeur le site de Nogent est loin d'être le plus favorable. En effet la traversée du radier par le corium étant un phénomène concevable au sens de l'ingénieur, il aurait été extrêmement important que la nappe phréatique sous le bâtiment soit à une grande profondeur ce qui n'est pas le cas.

Problème des agressions externes
     Toutes les possibilités d'agressions externes n'ont pas été prises en compte par EDF. En particulier nous avons trouvé un rapport peu diffusé de l'EDF concernant le risque de toxicité présenté par le transport ferroviaire d'ammoniac au voisinage du site de Nogent-sur-Seine. (Rapport EDF; mai 1981; A. LANNOY) «l'ammoniac est transporté liquide sous pression à température ambiante (8,6 bar, 20°C) dans des wagons de 49.800 kg de charge utile. A Nogent, le transport s'effectue par trains complets à raison de 3 trains complets par semaine. La voie est située à 640 m des parties sensibles de la centrale.»[2]
     L'étude faite par EDF est une étude probabiliste portant sur le risque de toxicité dans la salle de commande, le critère choisi portant sur l'irritation de la vue des opérateurs de la salle de commande avec comme conclusion une probabilité très faible. Quel crédit faut-il accorder à ces études probabilistes quand le Rapport de Mr Bussac, Cogné, Pelcé indique: «En France nous n'accordons guère de crédit aux calculs probabilistes pour classer les accidents graves car nous estimons que l'estimation de ces valeurs très faibles ne reposent pas sur une assise scientifique suffisante. Nous préférons nous en tenir à la notion d'événement «concevable» ou «plausible» au sens de l'ingénieur

suite:
La qualité de l'eau à Paris
     Qui est responsable de la qualité de l'eau à Paris? D'après les règlementations officielles, seul le SCPRI du Pr Pellerin est habilité à effectuer des mesures significatives. Son manque de crédibilité à la suite des événements de Tchernobyl doit susciter l'inquiétude. Il est nécessaire que les organismes chargés de la gestion du Bassin ainsi que les producteurs d'eau aient les moyens d'effectuer des contrôles en continu, sous leur propre responsabilité, sans l'imprimatur du SCPRI.

Le problème des rejets des substances chimiques
     Les autorisations de rejets d'effluents radioactifs dans l'eau ne tiennent pas compte des rejets de produits chimiques non radioactifs. (Ce n'est pas spécifique à la centrale de Nogent).
     EDF a le droit sans autorisation de rejeter des quantités importantes de produits chimiques (droit que les autres industries n'ont pas) alors que la toxicité de ces produits n'a pas été étudiée, alors qu'aucune mesure de ces produits n'est faite dans l'environnement, que la présence de certaines espèces chimiques peut modifier considérablement la migration des produits radioactifs dans l'environnement jusqu'à son transfert chez l'homme. Aucune étude ne semble avoir été publiée en France sur ce dernier point.
     Les problèmes liés à la contamination des eaux et des aliments reposent sur les estimations de la CIPR 26 de 1977. (Commission Internationale de Protection Radiologique).
     Mr Pellerin veut fixer la barre le plus haut possible en Europe alors que certains pays comme l'Allemagne sont prêts à fixer des normes plus basses, fidèles au concept ALARA de la CIPR «As Low As Reasonably Achievable».
     Ceci est inquiétant car tout semble se passer comme si Mr Pellerin essayait d'imposer à l'Europe des normes de contamination les moins contraignantes possibles pour la France au cas où un accident grave se produirait sur notre territoire.

Paris, le 5 novembre 1986
GSIEN

1. Rapport de l'Institut de protection et de Sûreté nucléaire (IPSN), J. Bussac, F. Cogné et J. Pelcé. Approche française en matière d'accidents graves et de problématique du terme source.
2. Rapport EDF. Département Fonctionnement des centrales. A. Lannoy. Estimation du risque toxicité présenté par le transport ferroviaire d'ammoniac au voisinage du site de Nogent (mai 1981).

Comité Stop-Nogent, 14 rue des Goncourt, 75011 Paris.



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