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N°137/138

Objet: Nouvelles normes de radioprotection,
application de la CIPR 60, naissance de l'OPRI


     Récemment la France s'est singularisée pour la prise en compte des recommandations de la Commission Internationale de Protection Radiologique (CIPR). Il est à noter que cette prise de position est l'oeuvre du Professeur P. Pellerin.
     Les publications successives de la CIPR et de l'UNSCEAR ont conduit ces instances à recommander un abaissement des normes. Le Professeur Pellerin estime, quant à lui, que cet abaissement ne se justifie pas et a défendu sa position en traduisant de manière erronée les textes de l'UNSCEAR.
     Le compte rendu des membres français présents à la 43ème séance de l'UNSCEAR ne représente pas l'opinion du comité mais la conviction des participants, Messieurs les Pr Pellerin et Masse. Sur deux points essentiels, le Professeur P. Pellerin a travesti la réalité.
     Sa lettre du 18 mars 1994 prétendait que l'UNSCEAR avait:
     - acté, à l'unanimité, le fait qu'il n'existe, dans ses rapports, aucun élément susceptible de justifier une proposition d'abaissement des normes.
     - souligné l'importance des processus de réparation qui atténueraient les effets des faibles doses de radioactivité.
     Or le rapport de l'UNSCEAR considère:
     - dans son paragraphe 15... toujours valables les arguments de la CIPR 60 en faveur de l'abaissement des normes,
     - dans son paragraphe 34... prématurée la prise en compte d'éventuels processus de réparation dans la fixation des normes.
     Une lettre du 21 juillet du Président de la commission de l'UNSCEAR confirme cette position au secrétariat de l'AIEA.
     Il n'est pas acceptable et même inquiétant que les représentants nationaux dans une instance internationale ne fassent pas à leurs autorités de tutelle un compte rendu fidèle et au contraire les induisent en erreur.
     La mise en place de l'OPRI, nouvel organisme chargé de la protection des populations et des travailleurs contre les radiations ionisantes nous avait semblé un facteur positif. Malheureusement le directeur pressenti de cet office est un des acteurs de ce qui a conduit les autorités à commettre ce faux pas international.
     Nous nous inquiétons d'un tel manquement aux règles de déontologie et mettons en garde les ministères de la Santé et du Travail d'avoir des représentants dans les instances internationales incapables de rendre compte des recommandations des dites instances sans y apporter des modifications que l'on peut qualifier de faux.

     Copie
     Monsieur le Premier Ministre; Madame le Ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville; Monsieur le Ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle; Monsieur le Ministre de l'environnement; Monsieur Claude Birraux, Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

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Projet d'avis du groupe de travail
du conseil supérieur de la sûreté et de l'information nucléaires
sur la radioprotection des travailleurs des entreprises extérieures
 
1. Rappel de la mission confiée au groupe de travail
     Le conseil Supérieur de la Sûreté et de l'Information Nucléaires, dans sa séance su 15 octobre 1991, a crée un groupe de travail sur la radioprotection des travailleurs des entreprises extérieures, chargé d'une part d'analyser la situation actuelle de ces personnels - qui de plus en plus fréquemment interviennent dans les installations nucléaires de base lors des opérations de maintenance - et d'autre part de vérifier dans quelle mesure ils bénéficient de la même protection que les autres travailleurs.
     Par ailleurs, le groupe peut faire des propositions tendant à améliorer tel ou tel aspect de la situation, étant entendu que sa mission ne consiste pas à les formaliser ou à les finaliser.
     Cette réflexion trouve sa justification dans l'importance des effectifs en cause et des opérations concernées. Le phénomène, loin d'être marginal, tend même à s'amplifier.
     Il n'est pas certain pour autant qu'il faille s'en inquiéter même s'il convient de s'en préoccuper. Il serait d'ailleurs excessif sur le fondement d'une simple analyse sectorielle, nécessairement limitée au nucléaire, de formuler des conclusions qui apparaîtraient hors de propos avec les réels enjeux de la sécurité du travail dans ce domaine.
     Le groupe constate à cet égard que son domaine d'intervention relève pour l'essentiel du droit du travail et qu'en l'espèce d'autres instances compétentes, telles que le Conseil Supérieur de la prévention des risques professionnels devront, sous l'égide du ministre du travail, reprendre à leur compte certaines des orientations qui pourraient ainsi être dégagées.

2. Principaux objectifs
     A l'issue des réunions qu'il a tenues au cours du mois de décembre 1991 et du mois de janvier 1992, le groupe a traduit les objectifs qui lui étaient assignés en tentant de répondre aux trois questions suivantes:
     2-1- Compte tenu de la nécessité d'apprécier le risque encouru par un travailleur à partir de l'ensemble des expositions auxquelles il a été soumis au cours de sa carrière professionnelle, un suivi de chaque travailleur au cours de ses différentes affectations à des travaux sous rayonnements, est-il actuellement possible? Et si oui, est-il réalisé pour l'ensemble des intervenants extérieurs dans les installations nucléaires?
     2-2- A quelles procédures doivent se soumettre les travailleurs avant de pénétrer en zone contrôlée (où l'exposition aux rayonnements ionisants peut devenir significative)?
     2-3- Comment la radioprotection des travailleurs est-elle effectivement assurée en zone contrôlée?

3. Définitions préalables
     Afin de répondre à ces questions, il convient de rappeler certaines définitions. Les responsabilités et les modalités d'application des règles afférentes à la dosimétrie et la surveillance médicale sont en effet différentes, selon que l'on s'adresse à des travailleurs salariés directs ou à des travailleurs d'entreprises extérieures intervenant dans une installation nucléaire.

suite:
     L'expression «travailleur des entreprises extérieures» utilisée dans le domaine nucléaire recouvre en réalité deux catégories de salariés dont la situation juridique est différente:
     - D'une part les salariés des entreprises de travail temporaire qui sont souvent appelés, dans le langage courant, «intérimaires»:
     Ils sont salariés des entreprises de travail temporaire qui les mettent à disposition des entreprises utilisatrices pour effectuer des «missions». La plupart du temps de courte durée; pendant la durée de ces missions, ils exercent leurs fonctions sous l'autorité et la responsabilité des entreprises utilisatrices; les entreprises de travail temporaire ont vocation à mettre des salariés de toutes catégories et de toutes qualifications à la disposition d'entreprises utilisatrices dans tous les secteurs de l'activité professionnelle;
     - D'autre part les salariés des entreprises extérieures: ils sont salariés d'entreprises chargées d'exécuter une opération pour le compte d'une autre entreprise dite «entreprise utilisatrice»: ces entreprises extérieures sont spécialisées dans un secteur professionnel déterminé et sont amenées à faire travailler leur personnel ponctuellement pour une prestation déterminée, dans les locaux de l'entreprise utilisatrice: pendant la durée de leurs fonctions, les salariés sont sous l'autorité et la responsabilité de l'entreprise intervenante.
     Par ailleurs, les personnels détachés ou mis à disposition dans un autre contexte juridique que ceux définis ci-dessus, sont considérés, du point de vue de l'hygiène et de la sécurité du travail - et par conséquent de leur radioprotection - comme des personnels à part entière des entreprises ou des établissements d'accueil.

4. Constat de la situation
     La réglementation en vigueur, spécifique au domaine des rayonnements ionisants ou de droit commun, apporte déjà nombre de réponses aux trois questions évoquées au 2 ci-dessus. Toutefois, certaines des règles sont récentes ou sont sur le point d'être adoptées et n'ont pas, par conséquent, pu donner leur plein effet. Elles sont parfois méconnues.
     Il convient donc de rappeler, au regard du dispositif réglementaire actuel, quelles sont les dispositions qui s'appliquent respectivement aux différentes catégories de travailleurs en matière de protection technique contre les rayonnements, de surveillance médicale et de dosimétrie.

4-1 Protection technique
     La protection technique, qui regroupe l'ensemble des mesures de prévention à l'exclusion de la dosimétrie et de la surveillance médicale, est applicable à tous les travailleurs intervenant en milieu nucléaire, quel que soit leur statut. Elle est mise en oeuvre sous la responsabilité de l'exploitant nucléaire, c'est-à-dire du chef de l'entreprise «utilisatrice» et est prévue respectivement par le décret du 28 avril 1975 modifié, si l'entreprise utilisatrice est une installation nucléaire de base, et par le décret du 2 octobre 1986, dans tous les autres cas.

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4-2 Surveillance médicale
     Pour comprendre les raisons pour lesquelles une réglementation spécifique a été adoptée, en matière de surveillance médicale, en faveur des travailleurs temporaires et des salariés des entreprises extérieurs, il convient préalablement de rappeler les dispositions en vigueur dans le droit commun:
4.2.1 Dispositions de droit commun:
     Tous les salariés, quelque soit leur statut, sont soumis à une surveillance médicale exercée par un médecin du travail (examen médicaux d'embauche, examens annuels, examens de reprise après absence pour maladie etc..). Cette surveillance a pour objectif d'une part de déterminer l'aptitude du candidat ou du salarié à un poste de travail déterminé, d'autre part d'éviter toute altération de la santé des travailleurs de fait de leur travail, d'éviter les maladies professionnelles etc. Par ailleurs, le médecin du travail est chargé d'une action sur le milieu du travail.
     Les salariés affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers sont soumis à une «surveillance médicale spéciale» qui comporte, notamment, des examens périodiques plus rapprochés, ainsi que des examens médicaux complémentaires spécifiques.
     Dans le droit commun, les salariés sont en principe suivis par un médecin du travail déterminé, qui fait partie du service médical dont relève l'entreprise où ce salarié est employé, et qui connaît bien les postes de travail de cette entreprise.
4.2.2 Dispositions réglementaires en vigueur pour les travailleurs temporaires et les salariés des entreprises extérieures.
     Le cas de ces deux catégories de salariés pose un problème particulier car ils exercent leurs fonctions dans une entreprise qui n'est pas celle avec laquelle ils ont signé un contrat de travail.
     Dans la plupart des cas, les entreprises de travail temporaire, les entreprises extérieures et les entreprises utilisatrices relèvent de services médicaux différents. Les médecins du travail des entreprises dont dépendent juridiquement les salariés ne connaissent donc pas les postes de travail des entreprises utilisatrices.
     On ne peut cependant adopter une solution consistant à confier au seul médecin du travail de l'entreprise utilisatrice, qui connaît bien les postes de travail, la surveillance médicale des salariés en question.
     En effet, ces salariés ne sont affectés dans les entreprises utilisatrices que pour des périodes déterminées. Il est donc important que leur suivi médical soit assuré de manière permanente tout au long de leur carrière professionnelle et quel que soit leur lieu temporaire d'affectation, par le médecin du travail de l'entreprise qui les emploie; de plus, c'est l'entreprise employant le salarié responsable juridiquement, notamment en cas d'inaptitude du salarié.
     Mais bien entendu, il est également important que l'avis du médecin du travail de l'entreprise utilisatrice soit pris en compte, puisque c'est lui qui connaît les postes de travail.
     Les solutions adoptées par la réglementation permettent de concilier ces deux impératifs (cette réglementation étant applicable à tous les secteurs professionnels):
4.2.2.1 Echanges d'informations entre les entreprises et les médecins du travail
     Qu'il s'agisse des salariés temporaires ou des salariés des entreprises extérieures, la réglementation exige que l'entreprise utilisatrice fasse connaître à l'entreprise «employeur» les caractéristiques du poste de travail, et notamment les risques attachés à ce poste. Par ailleurs, les deux médecins du travail correspondant échangent les informations nécessaires à l'exercice de leur mission.
     Enfin des dispositions spécifiques permettent aux médecins du travail des entreprises de travail temporaire et des entreprises extérieures d'avoir accès, dans certaines conditions, aux postes de travail des entreprises utilisatrices.
4.2.2 Suivi médical:
     Dans le cas où les postes ne présentent pas de risques particuliers, c'est le seul médecin du travail de l'entreprise d'origine qui détermine l'aptitude du salarié.
     En revanche, lorsque le poste de travail présente des risques spécifiques, les solutions adoptées sont les suivantes:
     a) Salariés des entreprises de travail temporaire:
     Le décret du 23 juillet 1991 dispose que le médecin du travail de l'entreprise de travail temporaire détermine l'aptitude générale à l'emploi, tandis que le médecin du travail de l'entreprise utilisatrice fait effectuer les examens complémentaires et détermine l'aptitude du salarié au poste de travail.
     b) Travailleurs des entreprises extérieures
     Le décret en cours de signature prévoit que les examens complémentaires sont effectués par le médecin du travail de l'entreprise utilisatrice qui en transmet les résultats au médecin du travail de l'entreprise extérieure, celui-ci étant chargé de la détermination de l'aptitude.
suite:
4-3 Dosimétrie
     Pour tous les travailleurs intervenant en zone contrôlée, la dosimérie individuelle est obligatoire et mensuelle.
     Seules les modalités de cette dosimétrie réglementaire sont différentes selon le statut des travailleurs concernés.
     En ce qui conceme les installations nucléaires de base, les règles applicables sont décrites à l'article 25 du décret du 28 avril 1975 modifié:
     - Pour les travailleurs salariés de l'exploitant, c'est le dernier qui est responsable de la dosimétrie; EDF, le CEA et la COGEMA sont autorisés à pratiquer eux-mêmes cette surveillance et doivent en rendre compte au SCPRI qui vérifie la qualité des mesures.
     - Pour les travailleurs extérieurs, l'employeur (qui n'est pas l'exploitant nucléaire), est tenu de faire effectuer la dosimétrie par le SCPRI ou par un organisme agréé. Actuellement aucun organisme n'est agréé pour réaliser cette mission.
     - Pour les travailleurs temporaires qui sont mis à disposition de l'exploitant nucléaire (entreprise utilisatrice), par contrat, et qui par conséquent doivent être assimilés aux salariés de l'entreprise, la dosimétrie est effectuée par cette entreprise.
     En tout état de cause, les résultats de la dosimétrie sont consignés au dossier médical.
4-4 La carte de suivi médical
     Cette carte instituée par l'arrêté du 31 juillet 1991, remise par le médecin du travail à tout travailleur affecté à des tâches l'exposant directement aux rayonnements ionisants (catégorie A au sens de l'article 3 du décret n° 86-1103 du 2 octobre 1986), a pour finalité d'attester que son titulaire bénéficie d'une surveillance médicale spéciale en relation avec son exposition, et de permettre ainsi, du fait de son enregistrement au niveau national, un suivi des travailleurs au cours de leur carrière.
     Cette carte, lorsqu'elle sera opérationnelle, constituera pour l'ensemble des membres du groupe, une réponse satisfaisante pour permettre aux médecins du travail de suivre les différentes affectations des travailleurs exposés.
     Il convient, au demeurant, de rappeler que concurremment avec cette carte, deux mesures ont (ou auront à court terme) pour effet d'améliorer la circulation des informations:
     - d'une part l'article 25 (paragraphe IV) du décret du 28 avril 1975 dispose que les résultats des évaluations de l'exposition doivent être communiqués par le médecin du travail au travailleur.
     - et d'autre part le futur article R 237-18 du code de travail prévoit un renforcement des informations réciproques entre les médecins du travail des entreprises utilisatrices et extérieures.
5. Efficacité du dispositif réglementaire actuel
     L'analyse de la réglementation en vigueur montre que globalement celle-ci est satisfaisante même si le groupe constate certaines difficultés d'application qui ont conduit pratiques telle que la dosimétrie «d'opération».
     Le groupe estime que ce type d'initiatives doit faire, à court terme, l'objet d'une étude plus approfondie.
6 - Conclusions, perspectives et propositions
     Cette analyse fait apparaître une situation contrastée; à la question de savoir s'il fallait apporter d'autres réponses réglementaires, le groupe a estimé qu'il était probablement prématuré de formuler des propositions précises. Néanmoins, il est apparu nécessaire:
     a) de privilégier dans l'avenir toute initiative tendant à harmoniser les règles de radioprotection sur un site, et ce, quel que soit le statut des travailleurs concernés;
     b) de développer l'enregistrement centralisé des données dosimétriques;
     c) de renforcer le rôle des responsables des sites nucléaires en matière de radioprotection de tous les personnels;
     d) d'améliorer la circulation des informations entre les médecins du travail et en particulier de tout mettre en oeuvre pour que, d'ici la fin de l'année 1992, la carte de suivi médical soit réellement opérationnelle;
     e) en ce qui concerne le dosimétrie d'opération, d'engager les moyens de suivi dosimétrique à l'échelon national et européen;
     f) de mettre en place un système unique national et infalsifiable d'identification permettant le suivi de tout travailleur exposé pendant sa carrière;
     g) de renforcer l'information des médecins du travail sur les règles applicables en matière de radioprotection des personnels intérimaires et extérieurs exposés aux rayonnements ionisants
     h) enfin, achever de prendre les mesures d'application prévues par la réglementation.
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Encart
LEMI "Schistes" de Revin
(Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire, 15 août 1992)
 
     Les Laboratoires d'Etudes Méthodologiques et instrumentales (LEMI) de l'institut de Protection et de Sûreté Nucléaire ont pour objectif de faire des études fondamentales sur les différents milieux géologiques et plus particulièrement sur les modalités d'écoulement des eaux souterraines, la géochimie et tous les facteurs susceptibles de les influencer (mécaniques, thermiques, etc.); ils ont aussi pour but de développer les méthodes et appareillages de mesure nécessaires à l'investigation des caractéristiques généralement mal connues des roches très peu perméables. Les LEMI de l'IPSN ont donc un caractère exclusivement générique et excluent toute application industrielle.
     L'IPSN ayant envisagé un programme d'études sur les schistes, le choix de l'emplacement d'un LEMI s'est porté sur la centrale hydroélectrique d'EDF à Revin car ce site était le seul, à notre connaissance, où l'on pouvait disposer d'une galerie pénétrant profondément à l'intérieur d'une formation schisteuse. La galerie prêtée par EDF est, en effet, située sous une couverture de roches de 170 m d'épaisseur, qui appartiennent à une épaisse formation de schistes d'âge Paléozoïque (Cambrien supérieur); les schistes sont entièrement saturés d'eau, du fait notamment de l'existence d'une importante retenue d'eau à la surface de la colline (bassin supérieur de l'usine).

Objectifs et nature des études menées à Revin
     Roches réputées peu perméables, les schistes ont été peu étudiés du point de vue hydrogéologique; les hydrogéologues classiques s'intéressent en effet aux roches perméables, susceptibles de contenir des ressources en eau. Afin de développer les connaissances dans ce domaine, l'IPSN a donc fait porter son programme d'étude, dans le LEMI de Revin, sur les modalités d'écoulement des eaux souterraines. On vise, en particulier, à étudier une spécificité des schistes parmi les autres roches: le rôle des hétérogénéités du matériau résultant de sa foliation dans la circulation des eaux. En effet, d'une part les formations schisteuses sont souvent constituées d'alternance de niveaux argileux, quartzitiques, etc. et d'autre part, la perméabilité peut varier en fonction de la direction de la schistosité.
     Le programme, qui est donc exclusivement hydrogéologique, a compris les opérations suivantes:
     1. L'étude structurale détaillée de la formation schisteuse dans la galerie elle-même (relevé des failles, fractures, etc.).
     2. Un forage vertical de 200 m de profondeur (forage F1), en carottage continu, implanté en haut de la colline (en aval de la retenue d'eau de la centrale) et destiné à recouper l'ensemble de la formation schisteuse, jusqu'à une profondeur de l'ordre de celle de la galerie.
     3. Trois forages de 100 m de long dans la galerie, en carottage continu, destinés à l'étude de l'influence de la schistosité sur les circulations d'eau en profondeur. L'un des forages est perpendiculaire à la schistosité (forage F4), un autre est oblique (forage F3) et le troisième est parallèle (forage F2).
     Les buts de ces différents forages sont:
     - l'étude pétrographique précise de la formation schisteuse,
     - l'étude de sa perméabilité à différents niveaux,
     - la mesure de la pression d'eau souterraine à différents niveaux,
     - l'installation de capteurs de pression à différents niveaux dans tous les forages avec transmission à l'IPSN des données par télémesure.

suite:
Principaux résultats
     Un grand nombre d'essais d'eau, de types différents, a été réalisé le long des quatre forages, afm de déterminer la perméabilité des schistes.
     On a tout d'abord procédé à des essais Lugeon (injection d'eau entre obturateurs); il s'est avéré rapidement que ce type d'essais donnaient des résultats qui sortaient du champ d'application habituel de la méthode (K entre 10-10 m/s et 10-9m/s).
     On a réalisé alors des essais par Injection-Relaxation, qui consistent à injecter de l'eau à débit constant pendant un temps déterminé, contrôler la pression dans la chambre d'injection, arrêter l'injection et mesurer ensuite la relaxation après fermeture. Les perméabilités trouvées varient de 5,2.l0-8 m/s et 4,5.10-11 m/s.
     On a enfin réalisé des Pulse-tests qui sont un type d'essai bien adapté aux très faibles perméabilités et qui ont fourni des valeurs du coefficient K de perméabilité comprises entre 10-12m/s et 10-11m/s.
     Afin de prendre en compte certains facteurs susceptibles d'altérer la représentativité des essais d'eaux, comme l'effet de peau, on fait appel, pour une interprétation plus précise, au logiciel SAPHIR, développé pour les besoins de l'industrie pétrolière.
     Dans le forage de 200 m, on a procédé en continu à l'étude de la fracturation au moyen du BHTV (caméra sonique), ainsi que l'examen détaillé de la lithologie et de la fracturation des carottes. De même, les carottes des trois forages réalisés en galerie ont fait l'objet d'études identiques.
     Dans le forage de 200 mètres, sept capteurs de pression sont en place, répartis tout le long du forage à différents niveaux, isolés par des bouchons étanches. La centrale d'acquisition de données doit être installée dans un abri situé sur la colline.
     Dans chacun des forages de 100 mètres en galerie, quatre capteurs de pression ont été installés, également à différents niveaux. Le système de télémesure des capteurs des trois forages en galerie doit être installé dans un algéco, dans une galerie technique située à proximité.
     Il faut noter que la réalisation d'un grand nombre de bouchons étanches successifs dans un seul forage, chargés d'isoler des capteurs reliés à la surface par des câbles, n'est pas une opération simple a priori; elle a pu être menée avec succès, ainsi qu'en témoigne les contrôles de l'étanchéité effectués.
     Un programme de mécanique des roches, venant en support du programme d'hydrogéologie avait été également lancé et a dû être décommandé in extremis pour des raisons budgétaires.
     Il avait été aussi initialement envisagé d'effectuer une étude hydrogéologique complémentaire dans la galerie, visant d'une part à étendre les mesures de perméabilité à un volume de roche croissant, afin de déterminer s'il existe un "effet d'échelle" et d'autre part à étudier l'âge des eaux souterraines, en mesurant les isotopes naturels qu'elles contiennent. L'étude de l'effet de l'hétérogénéité des schistes sur la propagation de la température avait été aussi envisagée. Actuellement, ces projets d'études complémentaires sur les schistes sont abandonnés faute de financement et le programme de travaux sur site s'est arrêté à la fin de la phase qui vient d'être décrite.
     A l'avenir, seul le système de télémesure restera en fonctionnement pour une durée d'environ 2 ans et nécessitera, pour sa maintenance, des visites occasionnelles.
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Pour tout renseignement complémentaire:
A. Barbreau - institut de Protection et de Sureté Nucléaire, BP n° 6, 60-68 Avenue du Général Leclerc - 92265 Fontenay-aux-Roses Cedex.
Tél: (1)46.54.70.76. Fax: (1)47.35.14.23

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