La G@zette Nucléaire sur le Net! 
N°191/192
"Le solaire, est-ce… vraiment rentable (à tel ou tel endroit)?

Yves Renaud
webmaistre de la Gazette Nucléaire, ancien Président du SOLAR Club du CERN
(Genève)
texte écrit lors d'un voyage... en TGV!
     Le SOLAR Club du CERN reçoit fréquemment des questions que l'on pourrait regrouper sous le titre générique:
     "Le solaire, est-ce… vraiment rentable (à tel ou tel endroit) ?
     J'ai donc décider de synthétiser les réponses possibles à partir de plusieurs messages… "éclairants" provenant d'une personne s'étant définie comme "physicien retraité" et sceptique quand au prix à payer pour alimenter en solaire un «radiateurs à la noix» de 1 kW.

Du solaire dans les Hautes-Alpes? Naturellement !

     Au risque de tomber dans la polémique, permettez-moi d'être étonné de voir qu'un «physicien retraité» ne se soit pas aperçu que sa région était particulièrement pourvue en soleil!
     Dans un précédent courriel que je vous avais adressé, j'avais posé la question de connaître votre ancienne activité professionnelle, ce qui aurait permis:

1) d'éviter une telle évidence,
2) de répondre plus précisément aux reproches sous-jacents à votre question, reproches néanmoins précisés dans le message laissé aussi sur mon répondeur,
3) d'éviter aussi la longueur et la teneur quelque peu critique, voire ironique de cette introduction…
     Excusez aussi ma déception de voir mon site n'avoir pas su répondre à vos interrogations et de le voir appelé "club de loisirs"! Ayant trouvé mon adresse, vous auriez pourtant dû voir que certains chapitres - "Pourquoi?" et "Controverses" en particulier - ne le définissaient pas ainsi et rien que la présentation de la page d'accueil auraient dû vous guider…
     Bon, il se trouve que je suis dans le train et que je vais avoir un peu de temps pour développer; et je pense que, retraité, vous aurez aussi le temps de me lire!

     Je ne pensais pas commencer par cela mais votre formulation "club de loisir" met en lumière que pour la plupart le soleil n'est principalement que… de la lumière et pour beaucoup le paramètre essentiel pour un lieu de villégiature ou… de retraite. Le malheur du soleil serait donc plutôt de faire partie du quotidien depuis toujours, avec à la fois son évidence et son immuabilité, les deux cachant le fait que notre vie sur terre en dépend irrémédiablement. Ceci pour résumer le fait que la teneur d'une telle demande n'est pas nouvelle et témoigne de la méconnaissance (ou d'un manque de temps de réflexion à cause de l'emprise de ce quotidien) sur la problématique énergétique, entraînant que l'on oublie presque toujours qu'en pratique on a d'abord besoin d'un service (du chauffage en l'occurrence) et non pas spécifiquement de telle ou telle source d'énergie, "déformés" que nous sommes par les messages tronqués et viciés de la publicité.
     Pour vous, je ne sais donc pas, mais pour moi, la physique est inséparable du monde de l'énergie; seulement, pour la majorité - au CERN "évidemment" (voir PS 1) comme probablement comme dans votre "sphère" - l'énergie se limite encore trop souvent à l'électricité. Alors nous en arrivons au paradoxe - source de votre interrogation, nous y voilà! - d'oublier que la "chaleur solaire" disponible à profusion dans votre région est oubliée et qu'on "s'amuse" à transformer un minerai (l'uranium) en chaleur, pour le retransformer en électricité, pour finalement la dégrader (au sens entropique) en chaleur, "oubliant" au passage l'incroyable et inégalée perte en… chaleur qui, pour le nucléaire est irrémédiablement inutilisable (mais savez-vous pourquoi… voir PS 2).
     Le propos s'y prêterait mais le temps d'un voyage en train ne le permet pas, il aurait fallu rappeler l'histoire du nucléaire français (d'origine militaire, filiation qu'il n'est hélas pas prêt de quitter…) qui "nous" à amené à produire les 3/4 de l'électricité en France. Vous remarquerez le souligné venant du fait - largement occulté, voire volontairement caché - que seul environ 1/3 y est consommé

suite:
     Alors, martelé par la publicité éhontée d'EDF (en surcapacité), vous avez choisi comme tant d'autres le chauffage électrique (mais pour la "clim." c'est la même chose…) avec ses "vulgaires" grille-pain («radiateurs à la noix», selon votre juste formule, même si je suppose que ce n'était pas avec la même acception dans votre esprit…), basés - rappelons-le - sur le rédhibitoire défaut des résistances électriques…
     LA SOLUTION (Ah quand même!), pour ne pas retomber dans l'aberration de l'électricité pour faire du chauffage chez vous ne vient pas du PV avec son «rendement stupide» (quoique plus proche de 20% actuellement… mais avez-vous fait le calcul global (comptable et économique) de toute la chaîne du nucléaire, intégrant la durée de la construction, le retraitement, le traitement des déchets, le démantèlement, etc.?! - voir PS 3) mais du SOLAIRE THERMIQUE qui alimentera - via un "cumulus", l'ECS* (100% en été) et un ou des radiateurs basse température; tout ceci avec un temps de retour inégalé par toute autre technique, quand on sait que les subventions atteignent 65% (voir l'ADEME et PS 2). Il serait hautement improbable et même dommage que vous n'ayez pas du bois pour une cheminée d'appoint (pour appoint au cumulus) pour les pics de froid: c'est même LA solution préconisée par EDF dans ses contrats anciennement appelés EJP!!!).
     Pour le peu d'électricité qui vous restera (le plus gros poste étant celui du froid, surtout dans votre région), après avoir choisi des appareils économes et fait la chasse aux "veilles" de toutes sortes (représente la production du quart d'une centrale nucléaire, soit encore la consommation annuelle des villes de Nice et Lyon réunies!**) - ce qui est un effort nécessaire quelque soit la source d'électricité, nucléaire, fossile ou renouvelable -, vous pouvez évidemment garder le réseau, soit tel quel, soit en y réinjectant la production - facilement excédentaire - d'une installation PV.

     Voilà, mon voyage se termine; je n'ose pas penser vous avoir convaincu sur l'ensemble de mon propos, mais j'espère avoir apporté un… éclairage différent, voire constructif sur votre problème, toujours mal posé donc mal résolu en France, et sur une solution toujours rentable et, contrairement à une idée reçue et… véhiculée, plus rentable au fur et à mesure de l'augmentation de latitude (voir PS 4)!
     Tout en ne doutant pas que vous saurez trouver un installateur dans votre belle région, n'hésitez pas à me contacter pour toute information, question, ou… critique complémentaire.

PS:
     * ECS: Eau Chaude Sanitaire
     ** source ADEME
     1) n'attendons pas de miracle (dans tous les sens du mot) des satellites ou autres technologies prometteuses, telle celle du "nouveau nucléaire Rubbia" du CERN (peut-être disponible vers 2100?!): nous avons certes besoin d'innovations technologiques (au prix de leur complexité ou plutôt de leur complication, les scientifiques confondant souvent les deux…), mais plus encore d'imagination en termes d'efficacité énergétique, de comportements et donc en terme de politique…
     2) Il n'y a pas d'utilisateurs proches - par réseau de chaleur, par exemple - sachant que - théoriquement - on n'installe pas de centrale nucléaire trop près des villes: mais voir - entre autres Superphénix!...)
     3) si vous comptez en plus le fait que la filière nucléaire  engouffre 90% de la recherche dans le domaine énergétique; et même au point de vue environnemental, avec le "fameux" effet de serre pour lequel le nucléaire n'est pas LA réponse, mais là encore il faut savoir s'affranchir de la publicité… nationalisée: si vous avez des doutes, regardez les sites à ce sujet dans la page "Controverses" déjà citée. (Alors, notre Club: toujours "de loisirs"?!).
    4) quand on sait que les plus nombreuses maisons solaires sont installées dans le Nord de l'Europe!

p.27

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