La G@zette Nucléaire sur le Net! 
G@zette N°223/224

Jean PIGNERO n'est plus....


     Jean Pignero, notre vieil ami nous a quitté le 15 juin 2005.
     Je me souviens du soutien inconditionnel qu'il a apporté au GSIEN, à sa création en 1975.
     Sa lutte durait depuis les années 1950: tout d'abord contre le nucléaire militaire, puis contre le nucléaire civil. Il a lutté pour faire prendre les précautions indispensables lors des examens sous rayons X, il s'est battu pour une radioprotection de qualité.
     Et surtout il pensait et l'écrivait récemment qu'il fallait stopper tout recours au nucléaire parce que les hommes ne dominaient absolument pas cette technique, pire cette technique était forcément une entrave à la démocratie et à la participation citoyenne.
     Jean croyait en les humains et espérait l'avènement d'une démocratie participative. Force est de constater que nous en sommes encore loin.
     Pendant des années Jean a présidé l'APRI (Association de Protection contre les Rayonnements Ionisants). Il éditait un journal, des plaquettes explicatives de façon artisanale car il n'a jamais eu d'aide (hormis ses amis D. Parker,  le docteur  P. Pizon, Pierre Cuesta,  ...)
     Militant de la première heure, il a continué à défendre ses idées en dépit de la maladie.
     C'est notre ami à tous et la Gazette le salue avec émotion et respect: Au revoir, cher Jean, nous continuerons ton combat.
Georges David se souvient:
     Tous les anciens militants antinucléaires de France et de Belgique notamment, connaissaient bien, voire très bien Jean Pignero et l'APRI qu'il présidait.
     A la fin des années soixante et au début des années soixante dix, à une époque où l'information sur les dangers des rayonnement ionisants se faisait rare, il était celui à qui on s'adressait pour se procurer cette information. Grâce à lui et aux nombreuses plaquettes qu'il a fait éditer il a été plus facile, aux militants de base que nous étions, de nourrir le débat et de l'élargir toujours plus.
     La littérature de l'APRI était fort appréciée et se trouvait toujours en bonne place sur nos tables de presse : “Les règles médicales et légales de la protection contre les radiations ionisantes”, “mémorandum des médecins dénonçant la nocivité et les dangers de l'industrie nucléaire”, “relance nucléaire, santé publique et environnement”, “Les pollutions et l'énergie nucléaire”, “manuel du biologiste antinucléaire”, “nous allons tous crever”, “commentaires antinucléaires”, “Écrits d'un militants”, etc.
     Saluons, enfin, la ténacité, dans la discrétion et l'efficacité, de ce militant de toujours.

     Jean ne pouvait plus écrire depuis une année mais il dictait encore des lettres dans sa maison de retraite.
     Il m'avait en 2003, envoyé un petit écrit à propos de l'ONU et des démocraties. Je vous le livre tel quel. 
p.3a

ONU; Démocratie(s)
Jean PIGNERO
17 avril 2003
     On parle souvent de l'ONU, de la démocratie, des démocraties, pas des onuistes ou même des universalistes.
     On écrit aussi, souvent, que l'ONU est la seule organisation internationale connue dans le monde où se rassemblent les hommes (très peu de femmes) qui sont dits les représentants des nations composant l'ONU. Je note que l'adjectif démocratique n'a pas été inclus dans le titre qui aurait pû être écrit: organisation démocratique des nations unies. Alors que les hommes qui se savent libres - ou qui croient l'être- aiment naturellement la démocratie.
     Est-ce que les Grands Hommes qui ont créé l'ONU pensaient inutile ou dangereux de la qualifier démocratique? Les représentants des nations sont nommés et non élus démocratiquement. L'ONU n'est pas définie comme une démocratie. Son fonctionnement n'est pas démocratique. L'ONU n'est même pas qualifiée d'internationale, même si internationale veut dire ici seulement entre les nations, c'est à dire réservée aux nations pas aux peuples.
     Quand les nations, et lesquelles, se sont-elles unies pour s'organiser? Jamais, ce sont Roosevelt et Churchill qui ont déclaré le 12 janvier 1941, à Londres, sans en avoir reçu la mission qui auraient dû être votée par les électeurs de leurs pays respectifs que, la paix revenue, une nouvelle organisation des nations - pas des peuples... -, remplacerait la SDN, Société des Nations. La Charte des Nations Unies, décidée et définie par les seuls représentants des nations alors membres de l'ONU, sans aucun débat démocratique préliminaire, est entrée en vigueur le 21 octobre 1945. Son article 2 est essentiel: l'ONU n'est pas autorisée à intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un État.
     Ainsi une nation (il n'existe pas d'États étrangers-Unis dans le monde) peut sortir de l'ONU à son gré, selon sa compétence qu'elle est seule à juger valable, sans cesser d'être une Nation dite Unie! Est-il prévu que la Cour Internationale de Justice juge une Nation de ce fait? Une réponse négative à cette question autoriserait et autorise les nationaux à constater qu'ils sont bernés par l'ONU. Existerait-il un organisme supérieur à l'ONU qui pourrait juger si une nation a forfait à son devoir internationaliste? Une Nation unie peut même engager une guerre préventive contre une autre des Nations Unies sans être mise au ban de celles-ci! On constatera ainsi la superpuissance de la Nation attaquante et la lâcheté de toutes les autres.
     En 2002, presque toutes les nations avaient adhéré à l'ONU. Mais qu'est-ce qu'une nation? Mon dictionnaire propose plusieurs définitions, notamment: “Ensemble des individus composant une nation”, l'individu étant l'unité d'une espèce particulière, ici l'espèce des animaux humains. Mais, en fait, ces individus ne sont souverains que de leurs corps, sous certaines conditions de conformismes. Les nations se déclarent souveraines de tous les individus, en application de leurs lois, décrets ou ordonnances. L'ONU n'est pas souveraine des Nations (art 2 de la Charte). Elle a adopté à sa création, en 1945, ce Déni majeur de justice.
     État de fait généralement et inconsciemment accepté par les peuples: comment des Nations souveraines peuvent-elles accepter une ONU qui ne l'est pas?
     L'ONU (7000 employés) vote-t-elle des lois qui s'imposeraient à toutes les nations sans exception, et sanctionne-t-elle les Nations désobéissantes? De quelle façon? L'ONU ne vote que des recommandations, non contraignantes, pas plus que les résolutions adoptées par l'Assemblée générale.
     Ce serait un excellent prétexte, le premier de renier l'ONU, et de créer une Organisation nouvelle, enfin démocratique, dont tous les membres seraient élus par les électrices et les électeurs de toutes les communes de cette nouvelle Organisation mondiale des peuples, et non pas par des représentants nommés, comme le sont ceux de l'ONU (j'ai déjà publié plusieurs écrits sur ce sujet depuis 1962).
     Seuls, les candidates et les candidats à la nouvelle Organisation, à condition qu'ils ne soient pas élus par ailleurs, pourraient se présenter à cette élection, individuellement ou sur une liste universelle de leur choix. Les assemblées générales successives de l'Organisation devraient entériner le choix par les électrices et les électeurs communaux de l'âge électoral, valable pour toutes les assemblées, par exemple de 18 à 60 ans. La parité entre hommes et femmes serait fixée, non pas entre les candidates et les candidats, mais entre les élues et les élus, conformément au nombre de voix obtenues sur chacune des listes des élues et des élus. L'élue ou l'élu à l'Organisation universelle ayant obtenu le plus grand nombre de voix serait automatiquement reconnu(e) président(e). Pour les présidences importantes, celles de l'Organisation universelle, mais aussi celles des organismes particuliers mais toujours universels (par exemple l'organisation universelle de la santé), deux ou quatre personnes seraient présidentes, en respectant la parité des sexes. Idem pour les vice-présidences, les ministères et autres divisions de chacune des institutions de l'Organisation. Toutes les élues et tous les élus ne le seraient que pour la durée de chaque assemblée et que pour une seule assemblée choisie par la candidate ou le candidat. Ils ne pourraient être réélu(e)s dans la mandature suivante que si elles ou eux auraient été élu(e)s dans le courant de la mandature actuelle (cas des habitants des pays acceptant la fusion dans l'Organisation universelle après le vote primitif.
     C'est un service civique universel qu'acceptent les élu(e)s. En même temps qu'ils ou elles voteront pour des élu(e)s, ils voteront leur rétribution mensuelle, maximale pour tous les élus, plus les frais divers variables (logement, voyages, etc.) suivant la distance de leur lieu habituel de vie.
     Cette organisation universelle consacrerait la démocratie directe et refuserait de tenir compte des convictions personnelles des candidat(e)s (idéologiques, politiques, religieuses ...), respectables, personnelles, sans être des moyens de propagande religieuses. Cette démocratie serait donc laïque.
     Jusqu'à présent, l'ONU a été et est toujours composée de gouvernants, pas de gouvernés. L'organisation nouvelle se déclarerait universelle, laïque et résolument démocratique.
L'APRI redémarre
     Son flambeau est repris par Gérard Pierrot, nouveau Président de l'APRI, dont voici le communiqué:
     “C'est la perte d'un Ami que nous subissons tous de plein fouet, et, celle d'un homme, pionnier de la lutte antinucléaire,  dont toute l'oeuvre a été vouée au bien de l'humanité.
     Jean Pignero était un homme d'une grande dignité, et d'un  courage exemplaire, sachons lui rendre honneur en continuant le chemin sans baisser les bras.”
Site: http://apri.fr.free.fr
p.3b

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