La G@zette Nucléaire sur le Net! 
G@zette N°252
Le nucléaire: toujours la marche en avant aveuglément...

info CIVAUX
Associatifs de la CLI
http://stopcivaux.free.fr/


I-Voici une brève chronologie des premiers jours de juin 2008 à Civaux

     Un incident sur le transfo principal a conduit à l'arrêt du réacteur lequel a encore été accompagné de  cafouillages.
     Ce matin j'ai assisté à une réunion sur les amibes (bilan annuel 2007) et évidemment j'aurais aimé avoir des explications mais le directeur du CNPE n'était pas là.
     Quand j'ai demandé à la fin de la séance comment il se faisait que la tranche 1 n'ait pas redémarré, l'unique personne présente n'a pas donné beaucoup de détails mais simplement dit qu'elle redémarrerait probablement à la fin du mois quand le pôle du transfo serait changé.
     Jusque-là on nous avait assurés que ce genre d'événement sur les transfos était rarissime. Or chez nous cela fait 3 fois depuis nov 2006!  Il semblerait que le fabricant (Jeumont) soit responsable à nouveau et que, d'une façon générale, il ne donne plus satisfaction. À la question de savoir si c'était le mode d'exploitation ou la puissance du réacteur qui sollicitaient trop les transfos, on m'a répondu que non, qu'un réacteur n'excédait jamais sa puissance mais que Jeumont était une entreprise qui avait atteint ses limites et qu'EDF allait changer ses transfos. Je ne sais pas si c'est une info autorisée. Il faut donc qu'elle soit confirmée.
     Qu'est-ce que cela vous inspire?
     Je ne suis pas du tout à l'aise pour poser les bonnes questions car je n'entends rien aux problèmes de puissance électrique et de transfos. Mais je vais écrire à l'ASN -et peut-être voulez vous le faire aussi- pour en savoir davantage, car cela me semble très sérieux pour la sûreté, et à plus d'un titre, puisque cela peut initialiser une série d'incidents difficiles à maîtriser (cf ce qui s'est passé en Suède) et que même sans cela, c'est suivi chez nous de plusieurs gags.
     Je me demande qui va être bénéficiaire du changement de transfos.
     Il n'y a pas eu de publicité à ce sujet sur les sites de l'ASN. Et la presse locale qui avait juste publié le contenu des communiqués EDF, n'a jamais repris.

Civaux Incidents juin 2008
     - 2 juin, 5h du matin(source Centre-Presse, du 3 juin 2008 , informé par un communiqué EDF):
     CIVAUX: Un sifflement entendu autour du site
CENTRALE NUCLEAIRE [de Civaux]: défaut sur le transfo.
     "... un défaut est survenu sur le transformateur principal de l'installation dans la nuit de dimanche à lundi, à cinq heures du matin, alors que l'unité de production était en puissance."
     Situé à côté de la salle des machines dans la partie non nucléaire de l'installation, ce matériel transforme l'électricité produite à 20.000 volts à la sortie de l'alternateur, en une électricité de 400.000 volts facilitant l'acheminement sur le réseau. "Le système de protection automatique a bien fonctionné et a déconnecté l'unité de production n°1 de réseau électrique. Le réacteur a été mis à l'arrêt par les équipes de conduite de l'installation conformément aux procédures prévues."
     Durant un laps de temps la vapeur résiduelle de la turbine a été évacuée "vers l'extérieur par des vannes prévues à cet effet, générant un sifflement audible aux alentours de la centrale."...
     Les expertises sont en cours afin de déterminer les causes de ce défaut. L'unité... sera à l'arrêt pendant plusieurs jours. Par ailleurs depuis le 30 mai 2008, l'unité de production n°2 est à l'arrêt... pour renouvellement du combustible.
     - QUESTION
     Cause  On attend toujours les explications, idem  pour les "défauts" précédents.
     * 2 juin: tranche 1, entre 17 et 19h30: sortie du domaine de fonctionnement par dépassement de la pression primaire autorisée en API (source: déclaration d'incident du CNPE à la CLI)
     - Causes humaines et techniques: lesquelles? Y a-t-il eu une incidence sur l'extérieur (ouverture de vannes pour dépressuriser)?
     * 4 juin: 3-4h du matin (source: Nouvelle République du 6 juin 2008): INCIDENT DE NIVEAU 1- [refroidissement]:
     Le service de communication du centre nucléaire de Civaux a informé la presse hier soir d'un incident survenu le mercredi 4 juin. D'après les éléments fournis par EDF, "alors que l'unité de production n°1 de la centrale de Civaux était à l'arrêt suite à un défaut sur un transformateur, deux circuits de refroidissement de secours [RIS] du réacteur ont été déconnectés de façon anticipée... "Ces circuits doivent être disponibles lorsque le réacteur est en marche, mais également dans les heures qui suivent l'arrêt de celui-ci tant que la pression du circuit primaire n'est pas redescendue à la valeur réglementaire. Ce n'est qu'après avoir atteint cette valeur que les circuits doivent être déconnectés..."
     Ce dernier incident a été classé niveau 1 par le CNPE.

suite:
2- Compte-rendu associatif  de la CLI - Civaux du 1/4/2009

     Il y a donc eu le 1er avril, une CLI restreinte. EDF n'avait envoyé que son responsable environnement et sa communicante. Et je ne parle pas du représentant syndical (CGC, je crois) qui leur est tout acquis. Du côté des élus : 4 ou 5 personnes, + 1 toubib et un pharmacien et 3 associatifs.
     La séance a consisté à présenter les événements depuis la dernière CLI et comme d'habitude ils ont "soporifié" l'assistance (maigre) en délayant complaisamment les détails sans importance.
     Deux points ont été soulevés par l'UFC qui me paraissent (non, j'en suis sûre) être de la plus haute importance:
     1) Le 11 février à une heure du matin le réacteur 1 a connu un arrêt automatique parce qu'un coup de vent a fait des vagues dans le bassin de l'aéroréfrigérant et un creux de vague a découvert un capteur qui a "cru" que le niveau d'eau était trop bas et a engagé un arrêt de turbine puis du réacteur. Evidemment, on pourra dire que tout va bien, que les systèmes de sûreté ont marché, etc...
     Ce que ne dit pas EDF, et c'est toujours le plus intéressant, c'est que cela s'est produit à quelques heures de l'arrêt automatique de Blayais, qui a vu ses 4 réacteurs mis en carafe par des boues et des embâcles qui ont bouché sa prise d'eau, toujours au cours de la même tempête.
     Si on a appris l'incident de Blayais, on n'a pas fait beaucoup de bruit sur celui de Civaux. La CLI doit être prévenue dans les 48 heures, or le courrier ne nous est parvenu qu'une dizaine de jours après et le détail de l'événement un mois après.
     Cela aurait fait très mauvais effet, si quelqu'un avait pu faire le lien entre Blayais et Civaux. En effet si les deux arrêts automatiques s'étaient produits en même temps, cela aurait fait potentiellement 1.400 + 4 x 900, soit 5.000 MWe brutalement en moins sur un réseau qui n'est pas fait pour supporter beaucoup plus qu'une chute brutale de 3.000 MWe. Nous sommes donc passés à côté d'une chute possible du réseau avec toutes les conséquences redoutables qu'on peut imaginer pour les centrales nucléaires qui ont besoin de courant à l'arrêt.
     Voilà ce qu'il faut que nous, associations mettions sur la table quand en face on dit que tout va bien.
     Ceci n'est pas étonnant qu'on ait mis la sourdine. Voilà qui montre encore une fois la vulnérabilité du nucléaire à des aléas extérieurs extrêmement banals (imaginez, une vague dans un bassin) mais pas prévus, ou imprévisibles.
     En matière de nucléaire, n'avons nous pas épuisé nos jockeys? Jusqu'où aurons-nous de la chance?
     2) Mon 2ème point concerne l'étanchéité des gaines (qui pourtant ont reçu l'agrément de l'ASN, qui vont être soumises à plus de contraintes, etc...). Le représentant EDF n'en a pas parlé. Évidemment, il peut toujours dire que ce n'est pas un événement au sens propre mais cela touche la sûreté. Si on n'avait pas mis la question sur le tapis, cela serait encore ignoré.
     L'autorité de sûreté a publié une lettre d'inspection faite à Civaux et portant sur la première barrière (lettre DEP-Bordeaux-0414-2009, datée du 10 mars 09). On y apprend:
     a) qu'à la suite des dégradations constatées sur les assemblages au cours de 2008, une inspection télévisuelle a eu lieu pour rechercher des corps migrants se baladant dans la cuve. Et l'ASN mentionne par exemple, une investigation d'EDF sur le circuit de refroidissement à l'arrêt en relation avec "une partie du ressort d'assemblage encore présente dans le circuit primaire" (c'est donc au moins un "corps migrant" identifié, et qui, si je comprends bien, concerne le RRA, finalement un système de sécurité ultime qui est menacé. On se souvient du résultat des chocs thermiques qui se sont produits dedans en 1998, ...thermiques seulement? on peut maintenant se poser des questions).
     b) Cette lettre d'inspection mentionne aussi un autre fait de grande importance: un des crayons de la tranche 1 a subi une "rupture de guillotine de son bouchon" lors du cycle n°8. Or nous avons déjà demandé si des ruptures de gaines avaient eu lieu en recevant toujours la même réponse: il ne s'agissait toujours que d'infimes fissures.
     Bien que niées par le représentant EDF, les implications d'une rupture sont grandes : risque de contamination en éléments alpha du circuit primaire (il paraît que ce n'est pas le cas), risques mécaniques au déchargement et risques pour les intervenants.
     Déjà en 2007, notent les inspecteurs, un dépassement d'activité avait été constaté à la cheminée à cause du dégazage des assemblages fuitards. Ça c'était pour la pomme des populations. (Mais comme dit à peu près le représentant CGC: Regardez-moi, j'habite à Cubord. Est-ce que j'ai l'air de ne pas aller bien?)
     c) Enfin, l'ASN demande au CNPE de lui faire le point sur les fameux crayons de type M5 soudés au TIG avec double passage en chambre de soudure (c'est dans ce lot que se trouvait la majorité des crayons fuitards) et elle demande aussi "le nombre de crayons de ce type prévus au rechargement lors des prochains arrêts", prévus pour le 11 avril et le 11 juillet.
     Ceci veut donc dire que le stock existant de ces crayons dont la technique de fabrication a été depuis modifiée va être écoulé. Tant pis pour les fuites et le risque lié aux ruptures. C'est un peu comme l'histoire du sang contaminé.
     C'est scandaleux étant donné le risque encouru par les intervenants et les gens de l'extérieur et mérite d'être su.
En toute connaissance de cause (il faudra s'en souvenir, car il n'y a pas d'irresponsabilité dans ce domaine, ni d'EDF, ni du fabricant de combustible), le nucléaire fait prendre des risques à tout le monde.

p.30

Enquête publique DARPE  - 5 novembre 2008
Remarques et questions adressées par l'association Stop-Civaux à la Commission d'Enquête
(Première partie, à suivre dans la Gazette N°253).

     Nous souhaitons préalablement attirer l'attention de la Commission d'Enquête sur les faits suivants:
     - En dépit des limites inhérentes au site, la centrale n'a cessé, par aménagements successifs de monter discrètement en puissance
     - Le dossier initial d'EDF (demande de Déclaration d'Utilité Publique, janvier 1981) prévoyait la construction de 4 réacteurs à Civaux, sur une rivière, fait unique en son genre. Au regard des difficultés hydrologiques, le projet a été réduit à 2 tranches dès 1982 car le débit moyen annuel de la Vienne (74 m3/s) ne permettait pas d'assurer le fonctionnement de plus de deux réacteurs. 
     Cet extrait d'une des réponses d'EDF à la Commission d'Enquête en date de mars 1995 est à cet égard un aveu éloquent: «Les conférences administratives préalables à l'enquête d'utilité publique ont mis en évidence l'importance des problèmes hydrologiques...» 
     Il est à noter combien ceci contraste avec l'optimisme du présent dossier en ce qui concerne le choix du site.
     - Les deux réacteurs de 1.300MWé autorisés en 1984 se sont ensuite  mués en un projet de 2 tranches N4 (1.400 MWé environ) sans que la hausse de puissance fasse l'objet d'une nouvelle enquête publique (1987).
Année
Débit
moyen
1991
 48,6
 2000
 112
 1992
 72,0
 2001
 106
 
 
 1993
 86,4
 2002
 72,4
 1985
 71,6
 1994
 145
 2003
 67,2
 1986
 91,9
 1995
 108
 2004
 71,6
 1987
 75,2
 1996
 78,6
 2005
 46,9
 1988
 113
 1997
 66,9
 2006
 75,7
 1989
 39,8
 1998
 86,6
 2007
 91,1
 1990
 50,8
 1999
 90,8
 
 
Tableau 1: Débits moyens mensuels à Lussac-lès-Châteaux, en amont de Civaux (en m3/s) (chiffres Banque Hydro)

     Ceci aurait-il été possible si le débit moyen de la Vienne présenté à 74 m3/s lors de la première enquête n'était miraculeusement passé à  82 puis 83 m3/s.
     Ce chiffre, obtenu par un calcul acrobatique différent, ne s'avérait-il pas nécessaire à la dilution des rejets supplémentaires engendrés par l'augmentation de puissance  ? 
     Le tableau 1 montre sans ambiguité que depuis 1985 ce débit n'est pas atteint plus de la moitié du temps. 
     - Une première enquête publique sur les rejets d'effluents liquides en Vienne s'est tenue entre le 12 décembre 1994 et le 10 février 1995. Voici les conclusions de la Commission d'Enquête d'alors pour les effluents radioactifs: «La Commission d'Enquête estime que les limites annuelles des rejets et celles de l'activité volumique demandées ne sont pas compatibles avec les débits de la rivière Vienne, même corrigés par le volume d'eau tenu en réserve par EDF, et ne tiennent pas compte des importants progrès réalisés depuis une dizaine d'années».

suite:
     Quant à l'enquête sur les rejets physico-chimiques menée simultanément, la Commission donnait aussi «un avis défavorable à la mise en fonctionnement de deux tranches de 1.400 MWe» en estimant «que les ressources en eau sont suffisantes pour... une tranche de 1.400 MWe» sous certaines réserves. Finalement deux tranches seront quand même mises en fonctionnement mais sous condition d'un soutien d'étiage assuré par EDF en amont de la centrale et d'autres mesures.
     - Aux alentours de 2002, les volumes moyens annuels d'eau prélevés et évaporés augmentent et dépassent  souvent les limites autorisées: les explications fournies à ce sujet  par EDF -Doc. 1, pièce B, chap 2, p.7/11- qui s'exonère en prétextant des arrêts de plus courte durée et d'une erreur de calcul  du volume d'évaporation, sont-elles vraiment convaincantes?
     Ces limites sont reportées dans le tableau 2 (dépassement en gris) ce qui correspond à un fonctionnement avoisinant souvent une puissance de 1.600 MWé (Au fait, les arrêtés ne prévoyaient-ils pas des tranches de 1.400MWé?...).
 
 Activité rejets tritium liquide (TBq)
 1999
 3,6
 2000
 26,0
 2001
 16,0
 2002
 17,8
 2003
 24,2
 2004
 32,0
 2005
 42,7
 
 dont 1er trim. 2005: 30,5 TBq en 4 mois!
 2006
 53,9
 2007
 24,08
Tableau 3: activité annuelle des rejets en tritium liquide (rappel de la limite 80 TBq/an)

     On voit simultanément augmenter la production de tritium,  proportionnelle à la production électrique qui bat des records en 2006 (tableau 3). (Sans compter les effluents chimiques qui augmentent eux aussi avec la puissance.)
     - Aujourd'hui, les rejets du tritium du palier N4 sont déjà beaucoup plus importants que ceux des autres centrales. Et, ils augmenteraient encore (+30% environ) avec le nouveau mode de fonctionnement.
     De plus, avec l'allongement des cycles, les deux réacteurs se retrouveraient à fonctionner simultanément pendant les périodes d'étiage, c'est-à-dire à des moments de plus grande vulnérabilité de la Vienne. Alors que les conditions hydrologiques n'ont pas changé, les sollicitations d'EDF elles, devraient fortement augmenter, l'enjeu étant d'accroître encore la productivité.

p.31
 Année
 1998
1999
2000
2001 
 2002
2003
2004
2005
2006
2007
 Volume prélevé
 76,4
82
107,9
92,8
111,8
106,3
111,8
105,2
113,3
102
 Volume évaporé
2,1
6,0
31,0
23,4
41,0
42,0
47,9
40,5
45,7
40,4
Tableau 2: Volumes annuels prélevés et évaporés par la centrale en millions de m3
(Pour mémoire: volumes actuellement autorisés - respectivement prélevés et évaporés - 107,2 et 36,3 millions de m3 -Volumes demandés dans la présente enquête publique: 120,2 et 51 millions de m3 en mode actuel et 124,4 et 52,8 millions de m3 en mode ALCADE)

     Or si théoriquement il n'est pas interdit à un industriel d'augmenter la rentabilité de ses installations, peut-on parler d'une «optimisation» des performances quand cela s'accompagne de risques supplémentaires pour la sûreté et d'un impact plus grand sur la santé et l'environnement?
     - En effet, une série d'incidents exemplaires montre clairement que les aménagements visant à maximiser la production sont sources de risques graves pour la sûreté et la santé.
     Trois exemples suffiront. Leur examen révèle que la recherche d'une toujours plus grande productivité met gravement en jeu la sûreté, c'est-à-dire augmente la probabilité d'un accident nucléaire. 
     - En mai 1998, Civaux 1 fait l'expérience d'une fuite sur un circuit de refroidissement à l'arrêt. La cause admise est un défaut de conception: des circuits conçus pour des réacteurs de 1.300 MWé, ne présentent pas une distance de mélange eau chaude - eau froide suffisante pour des réacteurs du palier N4. Des chocs thermiques occasionnent des fissures qui ont pour conséquence une perte de liquide primaire, et une situation de crise grave qui dure plusieurs semaines, inédite sur un réacteur neuf. 
     Une technologie poussée aux limites de sa résistance a failli. Les équipes de Civaux ont eu chaud. Nous avons eu de la chance.
     - Plus récemment, le même incident se répète sur trois années  consécutives! Un des pôles d'un transformateur de sortie grille (août 2006, juin 2007 et juin 2008). L'explication donnée est la défaillance d'un isolant du transformateur. Il semble que le matériel ne soit plus adapté aux sollicitations qui lui sont aujourd'hui infligées. Par trois fois ce même matériel ayant atteint ses limites a connu des défaillances mettant en péril le fonctionnement de  la centrale. Les équipes présentes sur le site ont eu chaud. Nous avons eu de la chance.
     - Enfin, depuis plusieurs années une hausse considérable des rejets d'iodes et de gaz radioactifs dans l'environnement résulte de défauts d'étanchéité des gaines du combustible, pourtant censées constituer la première barrière de sûreté! 
     Les chiffres élevés sont dus à l'inétanchéité des gaines. (voir aussi les tableaux ci- joints des Rapports de l'ASN pour 2006 et 2007). Seule une partie du problème a été expliquée par un défaut de fabrication; pour d'autres gaines défectueuses aucune explication n'a encore été fournie par EDF.
Année
Gaz rares
(en GBq)
Halogènes (Iode surtout)
en GBq
2002
1.200
0,027
2003
1.490
0,059
2004
2.436
0,066
2005
1.520
0,036
2006
2.156
0,552
   
dont 0,310 en décembre*
2007
4.236
0,550
 
dont 2.764 en mars*
dont 0,295 en janvier*
Tableau 4: Rejets gazeux et halogénés (iodes surtout)
* pannes de la balise IRSN de mesure de radioactivité dans l'air (cf Bulletin Stop-Cvaux n°81, pp.4-5)

     Est-il normal qu'un tel  problème dure depuis plusieurs années?
     Peut-on s'inquiéter de voir multipliée par 15 l'activité en iode entre 2005 et 2006 avec des rejets extrêmement concentrés dans le temps (plus de la moitié de l'activité annuelle rejetée en 1 mois)?
     Est-il normal que l'unique balise de contrôle qui n'appartienne pas à EDF (celle de l'IRSN) soit tombée en panne à des moments d'émissions d'iode importantes ? (cf Bulletin Stop-Civaux n°81, p.5)
     Est-il normal qu'une vanne soit restée ouverte entre novembre 2006 et janvier 2007 sans que personne ne s'en aperçoive? (cf Bulletin Stop-Civaux n°81, p.4)
     Nous apprenons dans les rapports de sûreté 2006 et 2007 de l'Autorité de Sûreté nucléaire, 
     - qu'EDF poursuit plusieurs programmes expérimentaux destinés à améliorer les performances du combustible,
     - et que, depuis 2005, l'ASN a autorisé l'irradiation de recharges de combustible à gainage et structure en alliage M5 sur les deux réacteurs de Civaux entre autres.

suite:
     Devons-nous conclure que les populations ont été exposées  à une multiplication de l'activité des rejets gazeux et des iodes pour des raisons expérimentales ayant pour fin une plus grande productivité?
     Quelles preuves avons-nous aujourd'hui de la fiabilité de la première barrière en mode ALCADE?
     A l'heure actuelle, les gaines M5 ont-elles fait l'objet d'une validation?
     Certains crayons fuyards sont toujours dans le réacteur. Quel est le diagnostic et l'impact sur les rejets? Combien de temps est-ce que cela va durer?
     Nous demandons à la Commission : Comment la hausse des limites demandée par EDF pour lui permettre  de mettre en œuvre sa gestion ALCADE (qui de fait est d'ailleurs déjà engagée),  pourrait-elle être accordée alors que les gaines de combustible M5 n'ont toujours pas fait la preuve de leur fiabilité et que les pertes d'étanchéité n'ont toujours pas été expliquées?
     En conclusion:
     Comme le suggèrent ces dysfonctionnements graves d'équipements poussés à leurs limites, Civaux n'est plus la centrale pour laquelle ont été menées les premières enquêtes publiques.
     Avec le nouveau mode de gestion du combustible envisagé par EDF, elle s'en éloignera encore.
     C'est pourquoi nous demandons:
     1 - qu'aucune relève des limites d'autorisation ne soit accordée au pétitionnaire car accorder cette hausse, c'est-à-dire permettre le fonctionnement en mode ALCADE, n'équivaudrait-il pas:
     - à faire fi des raisonnements sur lesquels étaient fondées les décisions de la première enquête publique;
     - à donner, sans preuve d'innocuité, un feu vert à la fois à un impact accru à l'environnement et à la santé, ce qui est contraire au principe d'optimisation;
     - à accroître le risque d'accident?
     2 - que la Commission insiste pour que la rédaction des nouveaux arrêtés, dont il faut se souvenir, qu'ils seront définitifs;
     - soit faite en des termes non équivoques (une moyenne annuelle n'est pas la même chose qu'une moyenne interannuelle par exemple):
     - et ne fasse pas état de moyennes vagues, mais de limites à ne pas dépasser.
     3 - que la Commission insiste pour une plus grande fiabilité des mesures et des contrôles.
Civaux: rappel de quelques étapes 

* 1er semestre 1981: consultation de l'Administration locale et centrale, préalable à l'enquête publique. EDF présente un dossier portant sur la construction de 4 tranches de 1.300 MWe sur la Vienne à Civaux.
* 30 juillet 1981: le Gouvernement décide de suspendre les travaux et les procédures administratives de certains sites, dont Civaux, dans l'attente du débat parlementaire sur l'indépendance énergétique. Mais à l'issue de celui-ci, en octobre 1981, le projet repart.
* 17 décembre 1981: Civaux se voit doté d'une CLI (Commission locale d'information).
* 14 juin 1982: autorisation ministérielle d'ouverture de l'enquête publique sur un projet réduit à 2 tranches. 
* 14 septembre au 29 octobre 1982:  L'enquête se déroule avec différents volets: utilité publique - modification du Plan d'occupation des sols - enquête locale relative aux installations nucléaires de base et aux installations classées comprises dans leur périmètre.
* 20 avril 1984: signature du décret d'utilité publique pour deux tranches de 1.300 MWe.
* 2 octobre 1987: permis de construire pour les deux tranches du palier N4 (i.e . 1.450 MWe sans nouvelle enquête publique malgré le changement de puissance!)
* L'arrêté du 9 août 1991 autorise un ouvrage de prise d'eau et un barrage-seuil et fixe les débits moyens prélevés . Les autorisations sont valables 18 ans.
* Octobre 1991-décembre 1992: point zéro radioécologique établi par l'IPSN. 
* 6 décembre 1993: décret d'autorisation de création de deux tranches de 1.400 MWe.
* 1994: demande d'autorisation de rejet des effluents radioactifs liquides pour 2 tranches de 1.?400 MWe.
* 8 septembre 1997: arrêtés relatifs aux rejets d'effluents radioactifs liquides et gazeux de Civaux.
* 29 novembre 1997: divergence de la tranche 1 et couplage au réseau le 24 décembre 1997.
* 12 mai 1998: fuite de liquide primaire sur un circuit de refroidissement à l'arrêt.
* 9 septembre 1999: redémarrage de la tranche 1 après reconception du circuit.
* 27 novembre 1999: divergence de la tranche 2 et couplage au réseau le 24 décembre.

p.32

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