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N°279, mars 2016

40 ANS DU GSIEN ET DE LA GAZETTE NUCLEAIRE

Déchets nucléaires
La martingale d’EDF


 
    EDF a enfin trouvé la solution pour les faire disparaître. Il est temps car les déchets nucléaires posent un sacré problème de gestion aux exploitants nucléaires compte tenu de la durée de vie de certains d’entre eux.

    Les différents déchets radioactifs
    Pour les déchets de haute activité et à «vie longue», aucune solution n’est en vue si ce n’est le fort contesté projet Cigeo, aussi illusoire que flou. Les déchets dits à «vie courte» disposent eux d’un exutoire: le Centre de stockage des déchets radioactifs de faible et moyenne activité à vie courte (CSFMA) situé dans l’Aube et géré par l’Andra. Dans sa communication, l’Andra indique que: «Les colis de déchets FMA contiennent essentiellement des atomes radioactifs à vie courte (période radioactive inférieure ou égale à 31 ans). Du fait de la décroissance radioactive, ces déchets ne présenteront plus de risque radiologique pour l'homme et l'environnement au bout de 300 ans»(1). Des déchets qui disparaissent dans le temps du fait de leur courte période radioactive, essentiellement, le mot est important. Car le tri des déchets nucléaires est très approximatif. En effet, les atomes radioactifs à vie longue sont intimement liés aux éléments radioactifs à vie courte. On retrouve le tout au CSFMA.

    L’enfumage
    EDF gère ses déchets par l’intermédiaire de l’application informatique DRA (gestion des Déchets Radioactifs) qui crée les caractéristiques des colis envoyés au centre de stockage. Les données présentent dans l’application DRA sont en lien direct avec le CSFMA. Lors d’un «Contrôle sur colis» l’Andra demande à EDF des renseignements sur quatre colis de déchets radioactifs issus de la centrale nucléaire de Saint-Laurent-des-eaux. Prenons l’un d’entre eux au hasard, le colis n°3141113. C’est une coque en béton qui contient des boues radioactives issues de l’exploitation des réacteurs. Ces boues proviennent principalement de la sédimentation des effluents liquides des circuits de purges, évents et exhaures nucléaires (RPE). En tout, 372 kg de boues sont conditionnés dans le colis en question et expédiés au CSFMA. L’application informatique DRA recense d’une part, l’activité radioactive totale du colis de déchets avec les principaux radioéléments présents au moment du conditionnement et, d’autre part, l’activité qui restera au bout de trois cents années. Le colis n°3141113 contient 64.000.000.000 becquerels en juin 2015 lors de son envoi au CSFMA; 300 ans plus tard au «08/06/2315», DRA a calculé que l’activité totale serait égale à zéro...

Activité par radionucléide au 08/06/2015
Activité totale béta/gamma: 6439+1MBq
Activité  totale alpha: 0
Donc Activité totale: 6439+1Mbq
Débit Dose déchet nu à 3m: 0,14843 mSv/h
(suite)
suite:
Activité par radionucléide au 08/06/2315
Activité totale béta/gamma: 0000+ 0MBq
Activité  totale alpha: 0
Donc Activité totale: 0000+ 0Mbq
Dépassement alpha: non
Dépassement LMA (Limite Maximale Admise): non

    Si le colis contenait uniquement des éléments de courte période radioactive tel le cobalt 60 ou l’argent 110m, il n’y aurait rien à redire ou presque: au bout de 300 ans, il ne restera plus que 500.000 Bq de strontium 90 (28,8 ans de période) soit 1,4 Bq/g d’activité massique. Mais la fantaisie du calcul réalisé par l’application DRA apparaît lorsqu’on se penche sur les éléments radioactifs à vie longue contenus dans le colis. En effet, on y trouve en quantité significative du carbone 14 et du nickel 63 qui ont respectivement 5.730 ans et 100 ans de période radioactive. Ce sont plus d’un milliard de becquerels qui subsisteront réellement dans le colis trois siècles plus tard (voir en annexe). Ce qui ramené à la masse du déchet réel (372 kg) correspond à une activité massique de l’ordre de 3000 Bq/g. Ce qui n’est pas rien. Pourtant, chez EDF, d’un coup de "DRAguette" magique les déchets enquiquinants ont disparu.
    Le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) participe également à l’enfûtage en règle de la durée de vie des déchets à vie longue présents au CSFMA. La définition des colis de «faible et moyenne activité» est précise: «le niveau de radioactivité de ces déchets se situe en général entre quelques centaines et un million de Bq/g, dont moins de dix mille Bq/g de radionucléides à vie longue. Leur radioactivité devient comparable à la radioactivité naturelle en moins de trois cents ans» (2). Le CEA qui explique pourtant par ailleurs que la radioactivité naturelle est comprise entre 0,4 et 8 Bq/g selon la nature des sols (sédimentaire ou granitique) (3).

    Conclusion
    À l’issue de la fin de la période de surveillance du centre de stockage de l’Aube, les déchets radioactifs à vie courte seront effectivement comparables à la radioactivité naturelle, selon la déclaration d’activité d’EDF du colis n°3141113. Par contre, du fait de la présence des éléments à vie longue dans les déchets, il subsistera une radioactivité de plusieurs ordres de grandeur supérieure à la radioactivité naturelle.
    Espérons que les générations futures ne se contenteront pas de la communication officielle des exploitants nucléaires pour comprendre les dangers persistants du CSFMA.

    Notes
(1) Les déchets de faible et moyenne activité à vie courte – Andra, 21 octobre 2015
http://www.andra.fr/
(2) Clefs CEA – N° 53 – Hiver 2005-2006
(3) Quelques repères sur la radioactivité – CEA, 1er septembre 2013
http://portail.cea.fr/

Voir en complément: http://www.lopinion.fr/
p.23

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