LaG@zette Nucléaire sur le Net!
N°282, décembre 2016
DEUX FIRMES EN DIFFICULTÉ et une politique énergétique jamais mise en place
La France est mal partie et les citoyens avec

Information en provenance de la CLI de CIVAUX
Pour comprendre la décision d’arrêt du réacteur n°1 de Civaux


 
    Vous avez certainement eu connaissance de l'actualité récente (l'information m'est parvenue mardi en fin d'après-midi) concernant les arrêts de plusieurs réacteurs du parc nucléaire français.
    Je tenais à vous communiquer les éléments qui m'ont été fournis pour vous aider à mieux comprendre la décision d'arrêt du réacteur n°1 de Civaux demandée par l'ASN, conjointement à 4 autres réacteurs: Fessenheim 1, Tricastin 2 et 4, Gravelines 4.
    1/ Voici quelques mois, une concentration excessive de carbone (ségrégation carbone) est détectée au niveau du générateur vapeur de la cuve du réacteur EPR de Flamanville.
    2/ Le GV est situé à l'intérieur de l'enceinte de confinement; c'est une pièce de très grandes dimensions: 22 mètres de haut environ, 5 mètres de diamètre et un peu plus de 400 tonnes si l'on prend l'exemple de Civaux. Sa robustesse doit être sans faille puisqu'il n'est pas possible de concevoir une parade efficace à une éventuelle fracture qui engendrerait un accident nucléaire grave.
    3/ Une concentration excessive de carbone dans l'acier expose le métal à des risques de fracture.
    4/ EDF et AREVA mènent alors des analyses sur l'ensemble du parc nucléaire français au niveau des pièces des générateurs de vapeur fabriqués par Creusot Forges et par une entreprise japonaise, JCFC (Japan Casting and Forging Corporation). Il s'agit en tout de 46 générateurs de vapeur installés dans 18 réacteurs du parc nucléaire français.
    5/ EDF avait informé l'Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) à partir de septembre 2015.
    6/ Les premiers résultats des mesures sont envoyés par l'ASN pour les réacteurs contrôlés et ce avant toute remise en service du réacteur afin que le réacteur soit préalablement arrêté pour maintenance ou rechargement du combustible.
    7/ Ce sont les pièces des générateurs de vapeur fabriqués par JCFC (Japan Casting and Forging Corporation) qui montrent les taux de carbone les plus élevés alors que les mesures effectuées sur les générateurs de vapeur fabriqués par Creusot Forges montrent des concentrations de carbone acceptables. Or les fonds des 4 GV de Civaux (deux par réacteur) ont été usinés par la firme JCFC.
(suite)
suite:
    8/ Au vu des résultats, sur les 18 réacteurs concernés au niveau de l'ensemble du territoire, 6 d'entre eux ont déjà obtenu de l'ASN une autorisation de redémarrage, 7 autres sont à l'arrêt et ont été ou vont être contrôlés; tel est le cas du réacteur n°2 de Civaux qui abrite deux générateurs de vapeur et qui est actuellement en arrêt pour maintenance: les concentrations de carbone dépassent légèrement les valeurs limites fixées par l'ASN. Le dossier a été adressé à l'ASN qui doit l'instruire avant d'autoriser le redémarrage de Civaux 2. Les participants à la réunion publique de la CLI du 14 octobre à Lussac les Châteaux ont appris par le représentant de l'ASN qu'EDF devait apporter la preuve de la robustesse des générateurs de vapeur.
    9/ Il reste donc sur le parc nucléaire français 5 réacteurs en cours de fonctionnement qui devaient être contrôlés. Tel est le cas du réacteur n°1 de Civaux qui contient lui aussi deux générateurs de vapeur dont l'acier a été fabriqué par la firme japonaise. Il avait été initialement prévu de faire les contrôles de concentration de carbone lors de l'arrêt pour maintenance prévu au mois de mai 2017. L'élément nouveau intervenu depuis notre assemblée générale publique est que l'ASN a demandé à EDF de réaliser ces contrôles dans un délai de trois mois, ce qui va donc imposer l'arrêt du réacteur avant la date prévue.
    10/ Tel est l'état actuel de la situation. La réalisation de ces contrôles pose aussi la question de savoir, en fonction des autorisations de redémarrage ou des décisions de maintien d'arrêt qu'édictera l'ASN, si l'approvisionnement en électricité du territoire français pendant cet hiver posera ou non des problèmes.

    COMMENTAIRE
    Force est de constater une amélioration dans l’information diffusée aux CLI. Dommage qu’il y ait encore des  couacs...
p.25b


Inspection juillet 2016 à PENLY
pp.26-28


Golfech: “inacceptable dissimulation” par EDF, selon Sortir du nucléaire
AFP paru le 25 oct. 2016



      L'association Sortir du nucléaire a dénoncé mardi une "inacceptable dissimulation des informations par EDF" concernant un incident à la centrale nucléaire de Golfech (Tarn-et-Garonne) qui a émis des rejets dépassant "le seuil réglementaire" pendant deux minutes le 19 octobre.
     "Cette déclaration tardive est inacceptable. EDF, qui se targue de transparence, apporte ainsi la preuve de son opacité et de sa fâcheuse habitude à pratiquer la rétention d'information", indique l'association dans un communiqué transmis à l'AFP.
"EDF n'a pas communiqué la quantité de radioactivité rejetée, se contentant de mentionner le dépassement de la limite, fixée à 4 millions de Becquerels par m3. De combien a été dépassée cette limite? Quelle a été la quantité de radioactivité rejetée? Quels ont été les gaz radioactifs rejetés?", s'interroge Sortir du nucléaire.
     Même critique de la part de la Criirad (Commission de recherche et d'information indépendante sur la radioactivité): "EDF attend 48h pour déclarer le rejet à l'ASN et 5 jours pour informer le public. Informer est un bien grand mot".
     Dans un communiqué diffusé lundi, EDF avait indiqué que lors d'une opération de mise en service d'un "équipement de traitement des effluents liquides issus du circuit primaire", une augmentation de l'activité radiologique avait été constatée.
     "Le seuil réglementaire de rejet à la cheminée (fixé à 4 MBq/m3) a été dépassé. L'intervention en cours a donc immédiatement été arrêtée", précisait l'électricien, selon qui le dépassement de seuil "a duré 2 minutes".
     "Les balises de surveillance de l'environnement situées en zone nucléaire et autour de la centrale n'ont détecté aucun impact sur l'environnement ni pour le personnel du site", ajoutait EDF. L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a été avisée.
     Paul Bougon, chef de la division de Bordeaux de l'ASN, a expliqué mardi sur France 3 que l'incident est survenu au cours d'une manoeuvre normale d'exploitation.
suite:
     "L'exploitant purifie régulièrement le circuit primaire, il retire de l'eau du circuit primaire de manière contrôlée par un circuit dédié et traite cette eau primaire pour, soit la réinjecter dans le circuit primaire, soit la rejeter", a-t-il poursuivi.
     "C'est au cours de cette opération que l'exploitant a détecté que la quantité de radioactivité contenue dans les gaz rejetés à la cheminée de la centrale était supérieure de 2 fois à la limite autorisée", selon M. Bougon.
     C'est "un type d'évènement assez rare", "c'est un évènement que nous considérons comme significatif", a-t-il ajouté.
     La centrale de Golfech compte deux réacteurs d'une puissance de 1.300 mégawatts chacun.

Centrale nucléaire de Golfech: rejet d'eaux usées
de la station d'épuration dans la Garonne
Publié le 21/09/2016 - Environnement (La Dépêche)

     Les eaux usées de la station d'épuration de Golfech dans la Garonne
     Environ 46 m3 d'eaux usées de la station d'épuration de la centrale nucléaire de Golfech se sont écoulés dans la Garonne. Cet incident qui a eu lieu le 15 septembre dernier et déclaré à l'ASN le 19 septembre a été classé événement significatif environnement.
     "Au lieu de passer par le premier étage des lits de roseaux filtrants, ces eaux usées ont été rejetées directement dans le bassin d’orage de la centrale, où elles ont été diluées, puis rejetées en Garonne", confirme Frédéric Piquet, responsable de la communication du site nucléaire Tarn-et-Garonne. Et d'insister: "Les eaux usées en question n’ont aucun lien avec l’exploitation industrielle des installations. Leur passage en Garonne sans filtration a entraîné le rejet de matières organiques biodégradables."
p.29a

La France embourbée dans le nucléaire
http://ici.radio-canada.ca/
Un texte de Sylvain Desjardins

 
    Parc de centrales vieillissantes, défectuosités dans certains réacteurs plus récents et problèmes d'entreposage de déchets radioactifs. La France, l'un des pays les plus dépendants de l'énergie nucléaire, doit relever de sérieux défis d'ordre économique, écologique et sécuritaire.
    Portrait de la situation
    Le pays hôte de la 21e Conférence des Nations unies sur les changements climatiques, qui a présidé l'an dernier la conclusion d'un accord international historique sur la réduction des gaz à effet de serre, peine à se convertir aux énergies renouvelables.
    Plus du tiers des 58 réacteurs nucléaires français sont à l'arrêt: pour des contrôles, des réparations ou des changements de pièces. La majorité des centrales en activité ont été construites dans les années 1970 et 1980 et elles approchent de la retraite forcée.
    Un exemple souvent évoqué en France: la centrale de Fessenheim, en Alsace. Entrée en activité en 1977, c'est la plus vieille centrale du pays.
    Or, la durée de vie d'une centrale est estimée à 40 ans. Le président Hollande avait promis, lors de la campagne électorale de 2012, de la fermer pendant son quinquennat. Elle n'est toujours pas officiellement fermée, même si ses deux réacteurs sont à l'arrêt, l'un pour des travaux de réfection et l'autre pour des anomalies graves sur un GV.
    Ce genre de problème risque de se répéter en rafale parce que la majorité des réacteurs ont été construits avant 1985.
    Mais ce n'est pas tout. L'Autorité de la sûreté nucléaire (ASN), le chien de garde public en France, a ordonné l'arrêt de cinq réacteurs pour des anomalies détectées dans l'acier de certaines cuves et dans une autre composante essentielle de base qu'on appelle les générateurs de vapeur. Il y a trop de carbone dans l'acier, il est donc moins résistant et pourrait se rompre en cas de choc thermique.
    Dans ce cas, le problème n'est pas dû au vieillissement, mais plutôt à un défaut de fabrication. Plusieurs autres réacteurs pourraient être également mis à l'arrêt prochainement, selon Julien Collet, directeur général adjoint de l'ASN.
    La présence de carbone dans l'acier a été détectée sur 18 réacteurs.
    Il faut avoir en tête que les conséquences de la rupture de ces pièces ne sont pas étudiées dans les démonstrations de sûreté de ces réacteurs. Il est indispensable qu'on puisse garantir que ces pièces ne subiront pas de rupture. Cela pourrait poser un problème durant l'hiver selon Julien Collet, directeur général adjoint de l'ASN.
    «Si les réacteurs à l'arrêt ne redémarrent pas, on pourrait avoir des situations difficiles au niveau du réseau électrique» ajoute M. Collet.
    Électricité de France (EDF), le producteur et fournisseur d'électricité public, propriétaire des 58 réacteurs nucléaires du pays, n'a fait aucun commentaire sur cette situation, que beaucoup jugent alarmante.
    EDF souhaite prolonger la durée de vie de ses vieux réacteurs à 50 ans, voire plus. La société publique, propriété de l'État à près de 90%, qui jouit d'une situation de quasi-monopole, n'a présenté aucun plan pour la fermeture de ses centrales les plus âgées.
    Risque d'accident nucléaire?
    Électricité de France a refusé de répondre aux nombreuses demandes d'interview.
    L'ingénieur à la retraite Bernard Laponche, spécialiste de la physique des réacteurs nucléaires et ancien employé du Commissariat à l’énergie atomique (France), pense que le risque existe. Celui qui est devenu expert indépendant mentionne que même avant la découverte de ces nouveaux défauts, l'Autorité de sûreté nucléaire expliquait que le type d'accident de Fukushima survenu au Japon était possible en France et ailleurs en Europe. Et c'était avant qu'on ne découvre tous ces défauts.
    Une partie du parc nucléaire en France est en état de sûreté dégradé parce qu'il y a des pièces réputées parfaites qui ne le sont pas. S'il y a rupture de cuve, il y aura une quantité incroyable de radioactivité, [...] risques d'explosions, c'est une situation gravissime!
     De plus, on sait maintenant que la société Areva, principal partenaire d'EDF, également à propriété publique majoritaire, spécialiste de la construction des réacteurs nucléaires, a falsifié des rapports sur la sécurité de certains composants d'au moins un de ses réacteurs dont elle a la charge. Une affaire qui est devant les tribunaux: l'Autorité de sûreté nucléaire a porté plainte  contre Areva.
suite:
     M. Laponche est devenu avec le temps un adversaire farouche de l'industrie nucléaire française. Cette dernière mauvaise nouvelle le fait bondir.
    Un pays qui dit depuis 50 ans que le nucléaire est la huitième merveille du monde [...] Et tout d’un coup, vous vous apercevez qu’il y a des anomalies de fabrication incroyables et qu’en plus, il y a des falsifications, ça devrait être un scandale public! Pas un mot, pratiquement. Il y a une omerta sur le nucléaire en France!
    Le député Bertrand Pancher, de l'Union des démocrates et indépendants (UDI), un parti dans l'opposition, et membre de la Commission parlementaire sur le développement durable, est d'accord: «Il y a dans notre pays une résistance politique à s'opposer à l'industrie nucléaire parce qu'après 40 ans de production massive, c'est devenu notre ADN
    La commission parlementaire où siège Bertrand Pancher a récemment dénoncé l'absence de directives claires sur le nucléaire en France et l'incapacité du gouvernement à enclencher une véritable transition énergétique.
    C'est en partie dû à la peur de bousculer le pouvoir d'achat des électeurs et des entreprises, explique Bertrand Pancher, député de l'UDI. M. Pancher ajoute que «la puissance industrielle de la France se mesure depuis longtemps par ses industries énergétiques et par EDF, notamment. Il y a une complicité du politique avec les entreprises qui disent qu'on est plus compétitifs vis-à-vis de l'Allemagne à cause de notre bas coût de l'énergie, et l’on voit bien que tout ça crée un ensemble de résistances qu'il est difficile de bousculer
    En 2015, le gouvernement français s'est engagé, par l'adoption d'une loi sur la transition énergétique, à favoriser le développement des énergies vertes. Le plan du gouvernement français énonce bien l'intention de réduire la part du nucléaire de 78% à 50%, pour faire plus de place aux énergies renouvelables. Mais la mise en oeuvre de la loi, présentée récemment par la ministre de l'Environnement Ségolène Royal ne prévoit aucune fermeture de réacteurs nucléaires.
    Fort de ses succès à la conférence de Paris l'an dernier, le gouvernement est concentré sur ses objectifs de réduction des gaz à effet de serre.
    Comme l'énergie nucléaire ne produit pas de GES (FAUX!)*, elle joue un rôle important dans l'atteinte des objectifs de réduction de carbone.
*


    Le saviez-vous?
    En Europe, la France arrive en 16e place sur 28 pour sa production d'énergies renouvelables, très loin derrière la Suède, l'Allemagne et l'Autriche, entre autres. Elle a même reculé de trois rangs depuis 2010, en se laissant devancer par l'Italie et la Grèce.
    Selon beaucoup d'observateurs, cette lenteur s'explique par la situation de quasi-monopole d'EDF, producteur d'énergie nucléaire, et unique distributeur d'électricité.
    C'est ce que pense par exemple Cyrille Cormier, porte-parole de Greenpeace France. Selon lui, ce n'est pas sain pour développer la transition énergétique. Il faut diversifier le tissu industriel et économique en France.
    L'État possède EDF, donc, l'État a les moyens d'imprimer à EDF une nouvelle orientation industrielle. Ils ont refusé de le faire, ils se sont soustraits à leurs obligations et responsabilités, et aujourd'hui, ils se retrouvent dans une impasse complète.
p.29b


CODEP-DTS-2016-044539
Contrôle des transports de substances radioactives
Inspection no INSSN-DTS-2016-0750 du 7 novembre 2016
Fabrication des emballages de transport de substances radioactives sur les 19 sites EDF


 
    Réf.: Code de l’environnement, notamment son chapitre VI du titre IX du livre V
    SYNTHESE DE L’INSPECTION
    La société Areva Creusot Forge intervient de longue date comme sous-traitant de la société Areva TN pour la fabrication de certains composants d’emballages de transport de substances radioactives couverts par un agrément de l’ASN. Ces pièces, principalement des viroles, font partie de l’enceinte de confinement des emballages et présentent donc des enjeux de sûreté importants.
    Des irrégularités de plusieurs types ont été détectées sur certaines pièces forgées par Creusot Forge (1): des dérives lors de la conduite d’essais mécaniques de résistance à la traction, des incohérences entre les dossiers remis aux clients et certains dossiers internes à Areva Creusot Forge (les dossiers barrés) et des concentrations de carbone trop importantes dans certaines pièces. La société Areva TN a déclaré à l’ASN que des emballages de transport étaient concernés par les deux premiers types d’irrégularités. L’inspection en objet visait à examiner l’organisation mise en place par la société Areva TN, en tant que donneur d’ordre de la fabrication, pour s’assurer que l’ensemble des irrégularités affectant, des composants d’emballages de transport soient détectées et traitées.
(suite)
suite:
    Les inspecteurs ont examiné l’organisation générale mise en place par la société Areva TN pour la surveillance de ses sous-traitants et ont contrôlé par sondage sa mise en œuvre. Ils ont examiné les dispositions prises par la société Areva TN et son sous-traitant Areva Creusot Forge pour recenser les pièces d’emballages de transport concernées par les essais de résistance à la traction non conformes et la présence de dossiers barrés dans les dossiers internes Areva Creusot Forge. Enfin, ils ont examiné par sondage quelques dossiers de fabrication, y compris les documents internes à Areva Creusot Forge.
    Au vu de cet examen, les inspecteurs prennent note des actions déjà engagées par la société Areva TN mais estiment qu’elles n’ont pas permis de détecter l’ensemble des irrégularités touchant les composants d’emballages de transport fabriqués par la société Areva Creusot Forge.

    A. DEMANDES D’ACTIONS CORRECTIVES
    Identification des sous-traitants pour chaque emballage.
    Les inspecteurs ont demandé que leur soit fournie une liste exhaustive des emballages couverts par un agrément ASN en cours de validité et sur lesquels l’usine Creusot Forge est intervenue. Il leur a été indiqué que la société Areva TN travaillait à l’élaboration de cette liste qui n’existe pas à l’heure actuelle.
    En l’absence de cette liste, la société Areva TN ne peut pas vérifier que la revue des dossiers effectuée par la société Areva Creusot Forge a couvert l’ensemble des emballages. De plus, dans le cadre du système de management demandé par le § 1.7.3 de l’ADR, j’estime que la société Areva TN devrait être en mesure d’identifier rapidement les pièces assurant une fonction de sûreté ayant été construites par un sous-traitant donné.
p.30

 
    Demande A1: Je vous demande d’établir pour tous les emballages couverts par un agrément de l’ASN en cours de validité une liste des sous-traitants (de rang 1 ou supérieur) ayant effectivement fabriqué les principaux composants importants vis-à-vis des fonctions de sûreté. Cette liste devra permettre de retrouver pour un sous-traitant donné tous les emballages sur lesquels il est intervenu. Dans un premier temps, vous établirez cette liste pour les composants forgés constitutifs de l’enveloppe de confinement, en identifiant les forges les ayant réalisés.
    Non-conformités découvertes dans les dossiers de fabrication
    Les inspecteurs ont découvert plusieurs non-conformités non détectées par la société Areva TN dans les dossiers de fabrication de l’usine Creusot Forge.
    Dans le dossier interne de l’emballage TN 12/2 n°238, datant de 1999, les inspecteurs ont découvert un procès-verbal d’analyse chimique barré qui n’avait pas été transmis à la société Areva TN. Les résultats de ces analyses ne sont pas cohérents avec ceux des analyses transmises à la société Areva TN. Ce document barré n’a pas été identifié lors de la première revue menée par la société Areva Creusot Forge.
    Dans un dossier interne relatif à l’emballage TN 12/2 n°241, datant de 2000, les inspecteurs ont découvert un procès-verbal d’essais mécaniques officieux donnant des valeurs de résilience à -101°C non conformes aux exigences de la norme applicable. Il n’a pas été présenté aux inspecteurs de pièce justifiant que cette non-conformité avait été traitée et soldée durant la fabrication.
    Dans le dossier de la virole du TN 24 BHL n°3, datant de 2004, les inspecteurs ont constaté que le traitement thermique de détensionnement appliqué aux coupons d’analyse ne respectait pas les attendus des spécifications client du fait d’une vitesse de refroidissement trop faible. Cette vitesse était indiquée dans le dossier client remis à la société Areva TN mais l’écart n’avait pas été détecté.
    Demande A2: Je vous demande de traiter chacun des cas identifiés ci-dessus comme une non-conformité. En particulier, une analyse de leurs conséquences potentielles devra être effectuée et, le cas échéant, des actions correctives adaptées devront être mises en place. Il vous est rappelé que tant que ces non-conformités n’auront pas été soldées, les emballages concernés ne pourront pas être considérés conformes aux certificats d’agrément de leurs modèles et ils ne pourront donc pas servir au transport de substances radioactives. Vous me transmettrez les fiches de non-conformité une fois soldées.
    Les irrégularités relevées par les inspecteurs montrent que les actions mises en place par la société Areva TN et la société Areva Creusot Forge à ce jour n’ont pas été suffisantes pour détecter l’ensemble non-conformités, dans les dossiers barrés ou en dehors, affectant des emballages de transport.
    Demande A3: Je vous demande en conséquence de participer, pour ce qui concerne les dossiers relatifs aux emballages de transport, à la revue exhaustive des dossiers mise en place par la société Areva Creusot Forge. Tous les dossiers, barrés ou non, d’emballages couverts par un agrément ASN en cours de validité devront être examinés à cette occasion. Avant de commencer cette opération, vous me présenterez la méthodologie de vérification que vous utiliserez. Elle devra prendre en compte les spécificités des dossiers transport mais aussi le retour d’expérience global acquis par la société Areva Creusot Forge pour les dossiers relatifs aux autres pièces nucléaires.
        Cette situation montre également une défaillance du système d’assurance de la qualité dont il convient de tenir compte afin d’éviter la répétition de ces irrégularités à l’avenir.
    Demande A4: Je vous demande d’engager une réflexion sur la façon de prendre en compte ce retour d’expérience pour adapter la surveillance de vos sous-traitants.

    B. DEMANDES D’INFORMATIONS COMPLEMENTAIRES
    Non-conformités potentielles découvertes dans les dossiers de fabrication Dans le dossier interne relatif au forgeage de la virole de l’emballage TN 24 BH n°3, datant de 2004, les inspecteurs ont constaté qu’un PV d’essais de résistance à la traction officieux portait une mention manuscrite demandant d’usiner les éprouvettes de traction au diamètre maximum. Ces essais ont été réalisés par le laboratoire ATSE. Cet élément seul ne permet pas de conclure à une non-conformité mais sa présence n’a pas pu être expliquée aux inspecteurs.
(suite)
suite:
    Demande B1: Je vous demande de m’expliquer la signification de cette mention manuscrite. En particulier, vous vous assurerez que le diamètre des éprouvettes ayant subi les essais de traction correspond bien au diamètre à partir duquel les propriétés mécaniques ont été calculées.

Surveillance des laboratoires effectuant les essais de résistance à la traction.
    À la suite des non-conformités touchant les essais de résistance à la traction réalisés par le laboratoire Vulcain de la société Creusot Forge, de nouveaux essais ont été commandés par la société Areva TN au laboratoire ATSE de la société Industeel. Il a été déclaré aux inspecteurs que la société Areva TN avait audité récemment ce laboratoire, notamment afin de s’assurer de la conformité des machines utilisées pour réaliser les essais. Le rapport d’audit n’était pas finalisé à la date de l’inspection et n’a donc pas pu être examiné.
    Demande B2: Je vous demande de me transmettre le rapport d’audit lorsqu’il sera finalisé.
    Demande B3: Je vous demande, de plus, de m’indiquer les dispositions que vous prendrez pour vous assurer qu’un problème similaire n’affecte pas les essais de résistance à la traction réalisés par les autres laboratoires auxquels vous, ou vos sous-traitants, avez recours.

Concentrations de carbone excessives
    Il n’a pas pu être présenté aux inspecteurs d’analyse justifiant que les pièces forgées constituant les emballages de transport fabriqués au Creusot ne pouvaient pas être concernés par les problèmes de concentrations excessives en carbone affectant certaines pièces du parc nucléaire français. Or, les inspecteurs ont noté que les lingots d’acier utilisés pour la fabrication des emballages étaient très massiques, certains atteignant les 150 tonnes, et que certaines pièces, comme les fonds, sont écrasées sans être percées. Ces situations sont favorables à la persistance de concentrations excessives résiduelles de carbone dans la pièce finale.
    Demande B4: Je vous demande de m’indiquer comment le risque d’une concentration excessive de carbone dans les pièces forgées constituant les emballages de transport dont vous assurez la fabrication est maîtrisé.

    Procédure de surveillance des fournisseurs et sous-traitants
    La procédure mise en place par la société Areva TN pour surveiller ses fournisseurs et sous-traitants a été présentée aux inspecteurs. Elle prévoit notamment un classement en trois catégories, verte, orange et rouge, en fonction de la note du fournisseur ou sous-traitant. La société Areva Creusot Forge a été classée en orange depuis l’entrée en vigueur de cette procédure, en 2013, puis est passée en rouge depuis 2015. Les conséquences concrètes de ce classement ne sont pas claires.
    Demande B5: Je vous demande de me préciser quelles sont les conséquences pour un fournisseur ou un sous-traitant d’un classement en orange ou en rouge. Vous me préciserez comment cela s’est traduit concrètement pour vos sous-traitants ou fournisseurs classés dans ces catégories.
 
    Vous voudrez bien me faire part sous deux mois, à l’exception de la demande A3 pour laquelle le délai est fixé à un mois, de vos remarques et observations, ainsi que des dispositions que vous prendrez pour remédier aux constatations susmentionnées. Pour les engagements que vous prendriez, je vous demande de les identifier clairement et d’en préciser, pour chacun, l’échéance de réalisation.
Enfin, conformément à la démarche de transparence et d’information du public instituée par les dispositions de l’article L. 125-13 du code de l’environnement, je vous informe que le présent courrier sera également mis en ligne sur le site Internet de l’ASN (www.asn.fr).

L’adjoint au directeur du transport et des sources, Ghislain Ferran
p.31

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