La G@zette Nucléaire sur le Net!  
G@zette N°263, février 2012

La Cour des Comptes et l’ASN bousculent le nucléaire français

Nouvelles en vrac
PPI de Dampierre-PPI de Fessenheim-PPI de Saclay,
la même question est soulevée sur le périmètre
des 10 km.

     À cette distance, des communes ont une partie du territoire qui est concerné, mais le bourg étant hors périmètre, ces territoires sont exclus du plan d'urgence.
     Pour exemple, prenons Dampierre:
     - une commune a un hameau pris en considération, mais le bourg est hors zone, comment expliquer aux habitants qu'ils devraient être évacués, en cas d'accident, et en poussant le ridicule à l'extrême les accueillir dans le gymnase situé à quelques encablures de leur résidence.
     - Une autre commune a des habitations qui sont dans le périmètre des 10 km et ne sont pas prises en compte dans le PPI, le bourg étant à 13 km.
     Cette anomalie ne peut-être modifiée qu'au niveau national, donc avec l’ANCCLI.
     Pouvons-nous demander que toute commune, ayant une partie dans ledit périmètre soit éligible dans le PPI afin de pouvoir participer à l'élaboration du PPI et aux décisions locales?
     Cela mettra tous les administrés au même niveau.
     Cette question des 5 et 10 km doit impérativement être revue.
     En effet, ces distances ont été actées dans les années 1970 et jameis revues. Or, tous les accidents ont démontré que ces distances ne sont pas cohérentes avec les rejets possibles.
     Demandez tous une révision de ces distances «tabou».


NUCLEAIRE AU JOUR LE JOUR

     17 novembre - Selon l'IRSN qui a publié un rapport ce jour-là, plusieurs centrales françaises doivent rapidement procéder à des modifications des installations. Notamment en ce qui concerne les réserves d'eau pas assez importantes en cas de problèmes sur les générateurs à vapeur. Idem pour des systèmes de tuyauteries risquant de se briser en cas de séisme. «Ce sont des petites fautes mais qui pourraient avoir des conséquences énormes» a dit en substance Jacques Repussard directeur de l'IRSN. Concernant les séismes, l'IRSN demande de tenir compte dans les calculs des secousses les plus importantes dans l'état actuel des connaissances, faisant référence au séisme de 1356 de Bâle qui avait servi de base pour les calculs de Fessenheim.(Badische Zeitung) 
     18 novembre - Une réunion de la Commission Locale d'Information et de Sécurité (CLIS) a lieu ce jour à la Préfecture du Haut-Rhin. 
     18 novembre - Depuis l'accident nucléaire de Fukushima, les autorités japonaises tentent d'évaluer le coût de la décontamination de la zone interdite de 20 km autour de la centrale. Le directeur du centre radio-isotope de l'université de Tokyo estime quant à lui que «l'Etat japonais a très mal évalué les moyens pour cela» et que dans certaines zones les 50.000 personnes évacuées auront du mal à s'y réinstaller.«Le retour sera impossible avant des décennies...». 
     19 novembre - Dans une interview parue dans les DNA du 19 novembre sous la plume de notre consoeur Elodie Bécu, Jean Marc Jancovici, ingénieur spécialiste des questions d'énergie et de climat et défenseur de l'énergie nucléaire est catégorique: «arrêter le nucléaire est plus risqué que de continuer». Il devait débattre le lundi 21 avec Jean-Marie Brom directeur de recherche au CNRS et porte-parole du réseau "Sortir du nucléaire" dans le cadre des Rendez-vous citoyens du climat organisés à Strasbourg par l'association "Objectif Climat". 
     20 novembre - Remis en route le 6 novembre, le réacteur n°1 de Fessenheim a été mis à l'arrêt ce jour pour une intervention sur une tuyauterie sur la partie non nucléaire de l'installation. Le réacteur n° 2 est arrêté depuis début avril pour subir sa troisième visite décennale. 
     22 novembre - Eric Besson ministre de l'Industrie a affirmé que l'avenir de la centrale nucléaire de Fessenheim sera tranché par l'ASN. Sa collègue Nathalie Kosciusko-Morizet ministre de l'écologie a, quant à elle, estimé que le réacteur n°1 de Fessenheim était apte à être exploité dix années supplémentaires mais "«ne vaut pas prolongation». Selon elle «toute décision du gouvernement devra intégrer aussi l'audit post - Fukushima».(Le Monde). 
     22 novembre - TEPCO, la compagnie exploitante du site de Fukushima a du mal à indemniser les quelque 160.000 victimes qui attendent toujours. En cause une paperasserie sans nom et des difficultés financières compensées en partie par des aides de l'Etat japonais. À la date du 18 novembre, un millier de personnes ont été entièrement dédommagées pour une somme de 336 millions €. 
     23 novembre - Le 13e et dernier convoi de déchets nucléaires à destination de l'Allemagne et le site d'enfouissement "provisoire" de Gorleben a quitté vers 16h le terminal du groupe AREVA de Valognes. Des violents affrontements ont eu lieu entre les CRS et les militants antinucléaires déterminés à bloquer le train. Sans succès, mais en provoquant des retards considérables sur l'ensemble du trajet. Le train a passé la frontière allemande le 25 novembre dans la matinée où il était attendu sur le parcours allemand par des milliers de manifestants qui ont tout fait pour gêner la progression des onze wagons "Castor" (Cask for Storage and Transportation of Radioactive Material).

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     Tout au long du parcours il y eut des échauffourées entre manifestants et plus de 20.000 policiers. Le convoi est enfin arrivé à Dannenberg après 92 heures de marche. Les 11 conteneurs ont été transbordés sur des camions pour les 20 derniers kilomètres jusqu'au site d'enfouissement où ils sont arrivés le 28 novembre en début de soirée.
     26 novembre - Une réunion organisée par les associations «Stop transports-Halte au nucléaire, CSFR et Stop Fessenheim» a eu lieu à Strasbourg contre la poursuite de l'exploitation nucléaire en Alsace. Un "appel solennel au Président de la République" a été signé par 422 élus alsaciens. D'autre part 55 communes françaises, 68 communes allemandes et 43 communes suisses ont officiellement dit non à la prolongation de la centrale de Fessenheim et oui à sa fermeture immédiate.(DNA). 
     5 décembre - La centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine dans l'Aube a fait l'objet d'une intrusion par neuf membres de Greenpeace qui ont réussi à déployer une banderole. Deux autres militants ont réussi à s'introduire dans les installations de la centrale de Cruas ( Ardèche). Tous ont été arrêtés. Reste que selon Greenpeace, la preuve est faite: «les installations nucléaires françaises sont vulnérables à une intrusion humaine».
Les effets de la catastrophe de Fukushima sur la santé
Pierre Fetet

     Depuis le début de la catastrophe de Fukushima, Pierre Fetet tient un BLOG où il recense les témoignages de la population japonaise. 9 mois après la catastrophe, la situation semble alarmante. 
     Extraits.
     Les mères de Fukushima avaient alerté le monde dès le mois de juin: les enfants avaient des saignements de nez, des diarrhées, de la toux, des thyroïdes enflées... Elles n’ont eu cesse d’informer et d’agir pour que tous les enfants soient évacués de la région de Fukushima. Encore dernièrement, elles se sont mobilisées à Tokyo pour sensibiliser la population, mais en vain pour l’instant. Pourtant, l’actualité semble leur donner raison. Un grand nombre d’informations convergentes indiquent que, suite à la catastrophe nucléaire, l’état général de la santé des Japonais vivant dans une vaste région correspondant au moins à 8% du Japon est en train de se dégrader.
     Tweet d'un habitant d'Ibaraki: «Je travaille dans un hôpital d'Ibaraki. Il y a eu des patients avec des saignements de nez perpétuels en avril. Il y en a eu sans raison avec de la diarrhée et de la fièvre en juillet. Maintenant même les membres du personnel de l'hôpital souffrent de diarrhée sans raison...Ça commence à craindre.» Tweet d'un habitant de Fukushima: «Mon ami vit à Iwakashi. Il vient finalement de commencer à avoir de l'hématurie (sang dans les urines). Mes petits enfants ont des saignements de nez. Ils ne peuvent évacuer parce qu'ils n'ont pas assez d'argent.»" 
     Même si ces tweets n’ont aucune valeur statistique, ils se rencontrent de plus en plus souvent et sont à mettre en relation avec l’augmentation de certaines pathologies, visible sur des graphiques mis en ligne par le gouvernement japonais : conjonctivites, pneumonies, et diverses autres maladies sont en nette augmentation en 2011.
(...)
     On avait déjà remarqué chez les enfants de Fukushima que leur thyroïde avait été affectée. Un groupe de chercheurs, sous la direction du Professeur Satoshi Tashiro de l'Université de Hiroshima, avait contrôlé la glande thyroïde de 1.149 enfants de la préfecture juste après l'accident, en mars, de la centrale nucléaire. De l'iode 131 avait été détecté chez environ la moitié des enfants. Les enfants, que l’on a affublé de dosimètres, semblent ainsi être devenus des sujets de recherche!
     Chez les jeunes évacués, on avait aussi remarqué des dysfonctionnements de la glande thyroïde. Plus au sud, dans la préfecture de Gunma, 80% des patients atteints de problèmes thyroïdiens voient aujourd’hui leur état s’aggraver. Devant l'inquiétude et la pression des parents, une étude à grande échelle sur les problèmes de thyroïde a commencé le 10 octobre: 360.000 enfants de la région de Fukushima seront suivis de manière régulière tout au long de leur vie.
     D’autres anomalies ont été remarquées pour ces enfants vivant en zone contaminée comme la perte de poids, le ralentissement ou l’arrêt de la croissance et même des attaques cardiaques, ce qui peut être mis en lien avec la grande toxicité du césium-137. L’ACRO, laboratoire français, a aussi fait des mises en garde à plusieurs reprises, à partir d’analyses effectuées sur l’urine des enfants de Fukushima: 100% des prélèvements révèlent la présence des césiums radioactifs. Ainsi, plus de 4 mois après les rejets massifs de radioactivité dans l’environnement, ils étaient toujours contaminés alors que leurs parents font des efforts pour limiter cette contamination interne. Il est fort probable que cela est dû à la nourriture.
     Et pourtant, cette nourriture contaminée, on la vante et on en fait la promotion pour ne pas laisser tomber la région de Fukushima et son économie agricole. Mais... un présentateur vedette de la télévision japonaise, Norikazu Otsuka, qui mangeait des produits irradiés devant les caméras «pour montrer leur innocuité», a dernièrement été diagnostiqué par son médecin comme ayant contracté une leucémie aiguë.

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L'empereur du Japon hospitalisé
     Un autre promoteur et consommateur des légumes de Fukushima, l’empereur du Japon lui-même, vient également d’être hospitalisé, ainsi que deux autres membres de sa famille. Akihito souffre d’une pneumonie, la princesse Aiko a contracté une Mycoplasma pneumoniae, et la princesse Masako serait victime de fièvre et de toux: ils ont tous les trois des symptômes communs. Or la pneumonie, nous l’avons vu, est une maladie qui augmente fortement au Japon cette année; Takeo Nishioka, Président de la Chambre des conseillers de la Diète du Japon est d'ailleurs décédé d’une pneumonie le 5 novembre 2011 à l’âge de 75 ans. Même si les cas de l’empereur et de sa famille n’auront pas forcément la même issue, on peut s’interroger sur ces cas à répétition. En avril, on tentait d’expliquer l’augmentation des cas de pneumonies dans la région de Tohoku par l’ingestion d’eau de mer: au moins 11 personnes étaient mortes de pneumonie et environ 150 avaient été hospitalisés dans la préfecture de Miyagi, le nombre de patients étant de cinq à six fois plus élevé que d’habitude. Mais aujourd’hui, comment expliquer cette augmentation? Comme pour Tchernobyl, il est probable que les radionucléides, en contamination interne, provoquent ces maladies respiratoires.
     Le problème, ce sont ces irresponsables qui se bousculent à la télévision japonaise pour faire croire aux gens que la situation n’est pas grave. Ainsi, d’après plusieurs scientifiques médiatisés, le plutonium ne serait pas si dangereux. La radioprotection pour tous n’est pas un concept avancé au Japon. Et la population, quand elle ne s’organise pas de manière autonome, en fait les frais. Une télévision alternative, OurPlanet-TV, informe de manière indépendante en diffusant des émissions sur le sujet même de la santé. Par exemple, en juillet dernier, l’émission ContAct a invité Mika Noro, présidente de l'association "Le pont pour Tchernobyl", qui a partagé son expérience: s’étant rendue au Bélarus en 1993 (pays le plus touché par les retombées radioactives de Tchernobyl), elle a éclairé avec lucidité et compétences les symptômes cliniques chez les enfants de Fukushima. Après la catastrophe de Fukushima, Our Planet-TV a lancé une enquête pour savoir si les retombées radioactives avaient eu des effets sur la santé de la population. Suite à cet appel, ils ont été amenés à étudier plus de 500 cas. Cette enquête met ainsi en évidence que la radioactivité, même à faible dose, a des effets réels sur la santé, ce qui était déjà connu par ailleurs avec la reconnaissance de l’augmentation du risque de cancer.
     Dans cette vidéo sous-titrée en français, on voit entre autres le Dr Masamichi Nishio, chef  du centre anti-cancéreux d’Hokkaïdo commenter le livre de Yablokov et Nesterenko et témoigner que la  CIPR (Commission  Internationale contre les rayonnements) a renoncé à étudier les effets des radiations internes car cela aurait gêné le développement de l’industrie nucléaire.
Source: http://fukushima.over-blog.fr/
Suivi Fukushima
Excès de leucémies autour des sites nucléaires français: de nouvelles données

     L’ACRO souhaite attirer l’attention du public sur une nouvelle étude qui met en évidence une augmentation significative du nombre de leucémies chez les enfants vivant dans un rayon de 5km autour des centrales nucléaires françaises. 
     L’étude vient d’être acceptée dans un journal scientifique avec comité de lecture:
http://onlinelibrary.wiley.com/
     La mission principale de l’Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’ouest (ACRO) est d’informer nos concitoyens sur les risques liés aux radiations ionisantes. 
     Elle le fait d’abord à partir des études qu’elle publie et des données produites par son laboratoire. Mais il est aussi de son devoir d’informer lorsque des études scientifiques, encore trop peu accessibles au grand public, paraissent et qu’elles apportent des éléments nouveaux sur les risques sanitaires suspectés en lien avec l’industrie nucléaire. 
     L’International Journal of Cancer, paru en ligne le 5 janvier 2012, présente une étude épidémiologique, réalisée par des chercheurs de l’Université Paris-Sud, de l’INSERM et de l’IRSN, sur le risque de leucémie de l’enfant près des centrales nucléaires françaises. Basée sur une enquête dite «GEOCAP», elle porte sur la période 2002 à 2007 et concerne les 19 sites de centrales nucléaires. 
     La principale information qui ressort de cette étude est que l’incidence de leucémies aiguës chez les enfants de moins de 15 ans vivant à proximité des centrales nucléaires, c’est-à-dire dans un rayon de 5 km, est pratiquement doublée (ratio de 1,9) et que cette sur-incidence de leucémies est statistiquement significative. 
     Il convient de souligner une avancée méthodologique - le géocodage - qui a permis d’établir la distance à l’installation avec une bien meilleure précision que dans les études précédentes. 
     Ces mêmes équipes de chercheurs, dans une étude antérieure portant sur la période de 1999 à 2001, avaient conclu à l’absence d’augmentation du risque de leucémies autour des sites nucléaires français. 
     En s’appuyant sur les doses (à la moelle osseuse) estimées par modélisation dues aux rejets radioactifs des centrales nucléaires dans l’atmosphère et leur répartition géographique (zonage établi par l’IRSN), les auteurs n’observent cependant pas d’association entre le niveau d’exposition aux radiations et le risque accru de leucémies. 

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     Le point de vue de l’ACRO 
     D’autres études épidémiologiques ont, dans le passé, suggéré l’hypothèse d’une relation causale entre des risques accrus de leucémies chez l’enfant et certains sites nucléaires en Angleterre (Sellafield, Aldermaston, Burgfield), en Ecosse (Dounreay), en Allemagne (Kruemmel) et en France (usine de retraitement de La Hague). 
     Dans ce contexte, l’ACRO considère que cette nouvelle étude qui vient de paraître constitue un nouveau signal sanitaire important et qu’il doit être pris en compte par les autorités. 
     Certes, nous ne cherchons pas à masquer l’existence d’autres études épidémiologiques qui ont conclu à l’absence de relation entre les risques de cancers et la proximité d’un site nucléaire. 
     Pour autant, les doutes que l’ACRO a pu exprimer dans le passé restent plus que jamais intacts et il nous semble important que des études soient poursuivies et ce, dans plusieurs directions:
     1- Tout d’abord, il est essentiel d’élargir le travail effectué ici à l’ensemble des installations nucléaires, au-delà des seuls réacteurs, en particulier à des sites de la chaîne du combustible dont les rejets dans l’environnement sont plus importants. Par ailleurs, il convient de prendre en compte toutes les voies d’atteinte du public et non les seuls rejets atmosphériques (dont les retombées sont plus faciles à cerner). 
     2- Bien des études en matière d’épidémiologie pêchent dans leurs objectifs par défaut de puissance statistique. Il est donc capital d’aller vers de grandes enquêtes d’envergure internationale, ce qui demande au préalable d’harmoniser les outils méthodologiques. L’ACRO rappelle que c’est cette démarche qui, avant 2005, a permis d’établir plus formellement la relation entre cancer du poumon et radon domestique. 
     3- D’autres études doivent permettre d’approfondir les connaissances concernant les effets biologiques des faibles doses. Si les données acquises à partir du suivi des survivants de Hiroshima-Nagasaki ont permis d’asseoir très largement le système actuel de radioprotection, il est insuffisant pour apprécier les effets des faibles doses. L’accroissement très important ces vingt dernières années des doses délivrées à des fins médicales doit être mieux exploré, notamment chez les enfants. 
     4- la recherche des facteurs étiologiques (causes possibles) doit être renforcée et, au-delà de l’enfant jeune, porter également sur les expositions lors de la grossesse. Une attention particulière doit aussi être apportée aux effets combinés de divers agents toxiques. L’apparition d’un cancer est le résultat d’un processus en plusieurs étapes et, si les radiations sont connues pour être des agents initiateurs (altération du génome), d’autres toxiques (notamment chimiques) sont connus pour être des agents promoteurs c’est-à-dire qu’ils potentialisent l’action des radiations. 
     En conclusion, l’ACRO rappelle que, depuis près d’un siècle, c’est l’évolution des connaissances scientifiques qui ont conduit à la réévaluation régulière et toujours à la hausse du risque induit par les radiations ionisantes. Depuis 1928, les recommandations concernant les limites d’exposition ont été réduites par un facteur 30. Cela se poursuit actuellement avec la réévaluation du risque lié au radon et du risque de cataracte radio-induite. Nous considérons qu’aujourd’hui, un nouvel abaissement généralisé des limites réglementaires, tant pour les travailleurs que pour le public, est à l’ordre du jour. 
Contact: 
ACRO -138 Rue de l’Eglise–14200 HEROUVILLE SAINT CLAIR 
Tél : 02 31 94 35 34 
Site Internet: www.acro.eu.org
Courriel: acro@acro.eu.org 

(La gazette des communes, 10 janvier 2012)
EDF suspend les travaux du centre du Bugey
après décision de justice

     Electricité de France (EDF) a décidé de suspendre les travaux de construction d'un site de stockage de déchets à Bugey (Ain) après une décision du tribunal administratif de Lyon d'annuler le permis de construire, a-t-on appris vendredi 6 janvier 2011 auprès du groupe. 
     «EDF a pris connaissance de la décision du tribunal administratif et suspend les travaux», a déclaré un porte-parole d'EDF. Le groupe construit une installation temporaire, appelée ICEDA (Installation de conditionnement et d'entreposage de déchets activés), sur le site du Bugey, qui doit permettre de conditionner et d'entreposer, à partir de fin 2013-début 2014 une partie des déchets issus des neuf réacteurs EDF (dont Bugey-1) en cours de déconstruction. 
     Travaux démarrés en 2010 - Le permis de construire de l'ICEDA, annulé par le tribunal administratif de Lyon, avait été accordé le 22 février 2010 par le préfet de l'Ain. Deux mois plus tard, le Premier ministre François Fillon avait signé le décret autorisant la création de cette installation, dont les travaux ont démarré à l'été 2010. 
     L'objectif d'EDF est d'y entreposer les déchets issus des neufs réacteurs français de première génération promis au démantèlement, soit le rédacteur n°1 de la centrale voisine du Bugey (Ain), ainsi que ceux de Brennilis (Bretagne), Saint-Laurent (Centre), Chinon (Centre), Chooz (Ardennes) et l'ex-Superphénix de Creys-Malville (Rhône-Alpes). 
     Plainte d'un horticulteur riverain - Le permis de construire a été attaqué par un horticulteur voisin de la centrale, qui utilise l'eau tiède pour tempérer ses serres, qui refuse de vivre à côté d'un site de déchets nucléaires. 
     Après une audience début décembre, le tribunal administratif de Lyon lui a donné raison en jugeant le permis de construire non conforme au plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Vulbens, qui interdit les occupations du sol «non liées» et «nécessaires» au fonctionnement de la centrale.

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Fuites de tritium à la centrale nucléaire de Civaux
Information ou désinformation?
Communiqué de Sortir du Nucléaire 86

     Le 18 janvier 2012, EDF annonçait une pollution au tritium de la nappe phréatique située sous la centrale nucléaire de Civaux. Et le service de communication d'EDF d'annoncer que «l'eau de cette nappe phréatique ne fait l'objet d'aucun usage direct, ni pour l'eau potable ni pour les besoins agricoles». Comme pour le nuage radioactif de Tchernobyl qui s'est arrêté à la frontière française, EDF tente de nous faire croire que l'eau polluée est piégée dans la nappe sous la Centrale. Dès le 19 janvier, EELV avait protesté vigoureusement en rappelant que les nappes phréatiques ne sont pas des lieux étanches et qu'elles participent à alimenter cours d'eau et autres nappes. Le rapport d'inspection de l'Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) vient de le rappeler en précisant que «le sens d'écoulement de la nappe d'eau souterraine concernée par la pollution est orienté vers la Vienne», rivière servant à l'alimentation en eau potable de la ville de Châtellerault.

     L'art de faire croire que l'eau polluée est potable
     Le 13 janvier 2012, un prélèvement réalisé dans la nappe phréatique a relevé «une concentration en tritium de 540 becquerel/litre (Bq/l)» alors qu'elle aurait dû être 8, soit 67,5 fois la normale. EDF se veut une fois de plus rassurante en indiquant que «cette concentration en tritium de 540 Bq/l représente l'équivalent de la radioactivité naturelle intégrée par une personne séjournant pendant un mois à 1.500 m d'altitude (Briançon) et est quinze fois inférieure au seuil de potabilité de l'eau fixé à 10000 Bq/l par l'Organisation mondiale de la santé (OMS)»! EDF oublie simplement d'indiquer que la valeur de référence des recommandations de l'Union européenne est fixée à 100 Bq/litre et que la valeur définie par l'OMS ne s'applique pas en France!

     Combien de gouttes dans une flaque?
     Dès le 3 janvier, un agent avait relevé un taux de radioactivité anormalement élevé au niveau de bassins de rétention des effluents radioactifs. Il est particulièrement inquiétant de constater qu'il a fallu quinze jours pour localiser la (ou les) fuites et que l'Agence Régionale de la Santé (ARS ancienne DDASS) n'avait même pas été prévenue, le 17 janvier, au moment de l'inspection de l'ASN. Que se serait-il passé si ces fuites s'étaient déroulées il y a seulement trois mois. Les débits de la Vienne et les niveaux des nappes phréatiques étaient à un niveau historiquement bas pour cette période? Une concentration de tritium plus élevée dans la nappe phréatique, une faible dilution dans la Vienne, ajouter à cela un exploitant qui met plus de quinzaine de jours à réagir, vous avez toute les chances d'obtenir un cocktail particulièrement efficace: contamination des milieux aquatiques, faune et flore, et absorption de tritium par les populations consommant l'eau de la Vienne. Le service de communication d'EDF a évoqué une fuite «au goutte à goutte» au niveau d'une vanne. Là encore, rien de grave, une seule goutte de solution de tritium utilisée parfois en laboratoire peu rendre impropre à la consommation 80 mètres cubes d'eau. Combien y avait-il de gouttes dans les flaques observées par l'ASN à proximité des réservoirs de rétention?

     La concentration des gouttes était entre 10 et 18 millions de Bq/l (source EDF)
     La CLI, un bassin de rétention de l'information?
     La Commission Locale d'Information de Civaux (CLI) «a été créée par arrêté préfectoral le 17 décembre 1981 dans l'objectif d'informer la population sur le fonctionnement de la centrale de Civaux et son impact sur l'environnement», du moins selon son site. Le président de la CLI n’a été informé des fuites de tritium que le 16 janvier – soit 3 jours après la Préfecture –, mais n'a pas diffusé immédiatement cette information et alerté les autres membres de cette Commission. Ces derniers n'ont appris l'existence de cette pollution que deux jours plus tard, c'est-à-dire en même temps que le public, à croire que la CLI est plus étanche qu'un bassin de rétention d'effluents radioactifs.

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     Des défaillances graves et un manque de formation du personnel.
     L'inspection de l'ASN a révélé que les réservoirs destinés à recevoir des effluents radioactifs présentaient de nombreux cloques, écaillages... permettant au tritium de traverser le béton. L'ASN a également constaté, aussi bien à l'extérieur qu'à l'intérieur des réservoirs, des colmatages de fortune avaient été réalisés à l'aide de «mastics ou de gels de silicone». L'état de ces réservoirs est inquiétant surtout dans l'une des centrales les plus récentes de l'hexagone.
     Ces événements se déroulent au moment où Jean-Paul Joly, le directeur de la centrale de Civaux, est jugé à Charleville-Mézières pour harcèlement envers 7 employés de la centrale nucléaire de Chooz (Ardennes). Il en était alors le directeur. Il est défendu par Jean-Pierre Mignard, également avocat d'EDF dans l'affaire de l'intrusion des militants de Greenpeace dans la centrale de Nogent-sur-Seine. Dans son réquisitoire, maître Mignard a qualifié Greenpeace d'organisation qui «cherche à faire peur à la population». Il est clair que ce n'est pas la ligne d'EDF qui se veut rassurante, surtout en cas de pollution environnementale. Pourtant EDF ne nous doit-elle pas plus que la lumière?
(Voir ci-après le dossier Civaux)

AVIS de la CLIGEET
10-02-2012
Demande de modification de décret EURODIF du 8 sep 1977
Réalisation des opérations «fin de vie de Georges Besse 1 (Eurodif)»
Maîtrise des impacts environnementaux

     I. Contexte et cadre réglementaire de la demande d’avis
     A. Objet de la demande d’avis
     La société EURODIF-Production, filiale d’AREVA, exploite depuis plus de 30 ans l’usine Georges BESSE d’enrichissement d’uranium par diffusion gazeuse. Cette usine est remplacée par l’usine Georges Besse II, qui fonctionne selon le principe d’enrichissement d’uranium par centrifugation. L’usine Georges Besse est donc destinée à être démantelée. 
     Des opérations de préparation à la mise à l’arrêt définitif vont être réalisées entre la fin de production et le démantèlement des installations. Il s’agit de l’opération Prisme (Projet de Rinçage Intensif Suivi d’une MisE à l’air). Ce projet pourrait démarrer en février 2013 et ce pour environ 3 ans. Ces opérations réalisées dans le cadre du décret de création, constituent cependant une modification notable et nécessitent une modification du présent décret d’autorisation de l’Installation Nucléaire de Base (INB) n°93, notamment une révision des autorisations de rejets. 
     Ces opérations entraînent l’instruction d’une demande d’autorisation auprès des ministres chargés de la sûreté nucléaire, au titre de l’article 31 du décret 2007-1557 du 2 novembre 2007. 
     La demande d’autorisation comprend les modifications suivantes:
     - opérations liées à la fin de vie de l’usine Georges Besse,amélioration de la maîtrise des impacts environnementaux, mutualisation des moyens sur la plate-forme AREVA du Tricastin,
     - modification du périmètre de l’Installation Nucléaire de Base (INB) n°93. 
     À noter que ces quatre points soumis à enquête publique sont indépendants les uns des autres et que seul le premier point (opérations liées à la fin de vie de l’usine Georges Besse) traite des étapes préalables au démantèlement de George Besse 1 dites projet «PRISME».
     À l’issue de cette modification du décret d’autorisation de création de l’INB n°93, EURODIF Production ne réaliserait plus d’opérations d’enrichissement et serait autorisé à réaliser les opérations listées ci-dessus. 
     Au titre des opérations liées à la fin de vie de l’usine Georges Besse, EURODIF Production serait principalement autorisé à macérer et mettre sous air les Usines de Diffusion Gazeuse, puis mettre en position de repli l’Annexe U et l’atelier de transfert échantillonnage DRP et enfin mettre sous surveillance les installations, dans l’attente de leur mise à l’arrêt définitif et leur démantèlement. Dans la même période, les zones périphériques aux usines de diffusion gazeuse seront dégagées en vue d’une utilisation ultérieure en phase de démantèlement.

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     Au titre de l’amélioration de la maîtrise des impacts environnementaux, EURODIF Production serait autorisé à réaliser les opérations de confinement hydraulique de la nappe alluviale et à rejeter une partie de ses eaux pluviales ainsi que les eaux traitées issues de la station d’épuration T600 dans le canal de Donzère Mondragon en lieu et place de la Gaffière et de la Mayre Girarde. 
     Au titre de la mutualisation des moyens sur la plate-forme AREVA du site du Tricastin, EURODIF Production serait autorisé à réaliser des activités de réception, d’expédition et de contrôle de conteneurs UF6 et serait chargé des opérations de collecte, de tri et conditionnement de déchets industriels banals pour le compte des autres exploitants du site du Tricastin (AREVA NC, COMURHEX, FBFC, SET et SOCATRI).
     Au titre de la modification du périmètre de l’INB 93, EURODIF Production serait autorisé à y inclure l’ICPE parc de stockage ClF3. 
     Pour l’ensemble de ces points, les caractéristiques des substances radioactives et chimiques mises en oeuvre dans l’installation sont inchangées.

     B. Cadre réglementaire et méthode de travail
     Cette demande de modifications est soumise à une enquête publique, ouverte par arrêté inter préfectoral en date du 18 novembre 2011. Cette enquête publique s’est déroulée du 19 décembre 2011 au 20 janvier 2012. Le Préfet de la Drôme a saisi par courrier, en date du 22 novembre 2011 reçu le 25 novembre 2011, M. Didier GUILLAUME en tant que Président de la CLIGEET et du Conseil général de la Drôme pour formuler un avis sur le projet «PRISME». À cette occasion, la préfecture a transmis l’ensemble du dossier sous forme d’un CD Rom aux services du Conseil général. Les Conseils généraux de l’Ardèche et du Vaucluse ont également été saisis par le préfet de la Drôme pour formuler un avis.
     Le décret n° 2007-1557 du 2 novembre 2007 relatif aux installations nucléaires de base et au contrôle en matière de sûreté nucléaire du transport de substances radioactives prévoit, en effet, que le Préfet consulte les Conseils généraux concernés et la commission locale d’information du site nucléaire en l’occurrence la CLIGEET. 
     Au cours de sa séance plénière en date du 9 décembre 2011, la CLIGEET a décidé de mettre en place un groupe de travail composé de membres de la CLIGEET volontaires. Ce groupe de travail a été chargé de préparer un avis avec le soutien technique de Mme Monique Sené du comité scientifique de l’Association Nationale des Comités et Commissions locales d’information (ANCCLI). Deux réunions de travail d’une demi-journée, chacune ont eu lieu les 13 et 26 janvier 2012. L’ensemble des membres du groupe de travail a reçu en amont de la première réunion le dossier d’enquête publique sous forme de CD Rom. La liste des personnes ayant participé à ce groupe de travail figure en annexe. 
     Conformément au règlement intérieur de la CLIGEET adopté le 10 juillet 2009, le bureau de la CLIGEET a approuvé la proposition d’avis préparée par le groupe de travail le 10 février 2012.

     II. remarques générales
     A. Conditions de consultation de la CLIGEET
     Le dossier soumis à enquête publique est très volumineux: plus de 3.300 pages, ce qui rend une étude approfondie des pièces du dossier dans un temps court  particulièrement difficile. De plus le dossier n’a été transmis que sous forme informatique ce qui peut rendre son étude moins facile que sous format papier.
     La CLIGEET regrette que la période des vacances de Noël ait été choisie pour le  déroulement de l’enquête publique. De plus, elle estime qu’une durée légale d’un mois pour cette enquête est insuffisante pour l’étude d’un dossier de cette taille. Elle estime également que des délais suffisants pour étudier les dossiers concernant les INB et soumis à enquête publique doivent être accordés aux CLI. Les CLI devraient ainsi pouvoir disposer de ces dossiers en même temps que l’Autorité environnementale.
     Cependant, la CLIGEET reconnaît le travail fait par l’exploitant pour rendre accessible ce dossier au cours de deux présentations faites en séances plénières de la CLIGEET des 8 juillet et 9 décembre 2011, présentations relativement succinctes, ainsi que lors de la première réunion du groupe de travail le 13 janvier 2012.

     B. Prise en compte des conclusions relatives aux évaluations complémentaires de sûreté (ECS)
     La CLIGEET note que le présent dossier soumis à enquête publique a été rédigé avant que l’ASN ne rende ses conclusions dans le cadre des ECS le 3 janvier 2012.
     Or, la CLIGEET note que, concernant le risque sismique, l’ASN a rendu les conclusions suivantes figurant page 271 de son rapport sur les ECS:
     «Pour l’usine Georges Besse I, à l’issue de l’instruction, l’ASN considère que la tenue des équipements au séisme des ateliers doit être assurée. Elle prescrira à l’exploitant de proposer des mesures compensatoires proportionnées au risque des opérations menant à l’arrêt de l’installation.
     Pour les risques spécifiques associés aux opérations de préparation de mise à l’arrêt de l’installation, puis aux phases de mise à l’arrêt définitif et de démantèlement, l’ASN prendra les prescriptions nécessaires à l’issue de l’instruction des demandes d’autorisation correspondantes.

suite:
     Pour Comurhex, à l’issue de l’instruction, l’ASN considère que la tenue des équipements au séisme, notamment l’atelier de fabrication du fluor et les risques spécifiques liés aux composés chlorés et fluorés constituent des points particuliers devant être pris en compte. Cette installation relève actuellement du régime des installations classées pour la protection de l’environnement.
     L’ASN proposera les prescriptions à l’Autorité compétente.
     Pour Socatri, à l’issue de l’instruction, l’ASN considère que la tenue des équipements au séisme, notamment le bâtiment URS constitue un point particulier devant être pris en compte. Elle formulera des demandes à ce sujet.
     D’une façon générale, sur l’ensemble du site du Tricastin, l’ASN considère que la tenue au séisme des locaux de gestion de crise constitue un point particulier devant être pris en compte. Elle prendra des prescriptions à ce sujet.»
    Et, concernant le risque inondation, l’ASN a rendu les conclusions suivantes figurant pages 293 et 299 de son rapport sur les ECS:
     «L’usine Georges Besse I
     Le plancher de l’INB est situé au niveau 49,50 m NGFO. Aucun équipement contenant des matières radioactives n’est implanté en dessous de la cote de 53,50 m NGFO. Seuls les conteneurs d’UF6 sont susceptibles d’être atteints par une inondation.»
     «Pour les installations du site du Tricastin, à l’issue de l’instruction, l’ASN considère que le risque spécifique d’inondation de l’entreposage des matières enrichies constitue un point particulier devant être pris en compte. Par ailleurs, elle considère que des actions complémentaires sont nécessaires pour que l’exploitant renforce les dispositions à prendre en cas d’inondation. Elle prendra des prescriptions à ce sujet.
     En particulier, l’ASN considère qu’AREVA devra lui fournir des compléments concernant l’évaluation des marges disponibles pour les séquences accidentelles d’inondation considérées en tenant compte de tous les aménagements réalisés sur le site susceptibles d’influer sur les hauteurs d’eau atteintes. Les différents exploitants nucléaires de la plate-forme devront également évaluer les marges disponibles pour les séquences accidentelles d’inondation considérées (rupture de barrages amont, effacement de la digue du canal de Donzère...) et proposer les éventuels renforcements en tenant compte de tous les aménagements réalisés sur le site susceptibles d’influer sur les hauteurs d’eau atteintes.»
     La CLIGEET souhaiterait connaître l’impact des prescriptions qui découleront de ce rapport sur les opérations liées à PRISME.

     III. AVIS de la CLIGEET
     La demande d’avis de la CLIGEET porte sur quatre modifications distinctes de l’INB Eurodif:
     1- opérations liées à la fin de vie de l’usine Georges Besse,
     2- amélioration de la maîtrise des impacts environnementaux,
     3- mutualisation des moyens sur la plate-forme AREVA du Tricastin,
     4- modification du périmètre de l’Installation Nucléaire de Base (INB) n°93. 
     Ces opérations sont indépendantes les unes des autres. La CLIGEET formule donc ses remarques et observations sur chacune des opérations soumises à enquête publique. 

     A. Opérations liées à la fin de vie de l’usine Georges Besse: projet PRISME
     1- Descriptif
     Selon le dossier présenté par Eurodif, les opérations liées à la fin de vie de l’usine Georges Besse sont constituées de:
     - la préparation à la mise à l’arrêt définitif,
     - le dégagement des zones périphériques aux usines de diffusion gazeuse.
     Ces opérations se dérouleront sur une période d’environ 3 ans et débuteront dès la fin de l’arrêt de production et d’extraction de l’UF6 des Usines de Diffusion Gazeuse (UDG) qui sera réalisé à la date du 31/12/2012.
     En préalable aux opérations de préparation à la mise à l’arrêt définitif, les opérations suivantes auront été réalisées:
     - arrêt de production et extraction de l’UF6 des UDG,
     - vidange des circuits de refroidissement (arrêt des tours aéro-réfrigérantes).
     Les opérations de préparation à la mise à l’arrêt définitif consistent en un rinçage intensif des équipements par le biais d’un procédé dit de macération avant de les mettre sous air. Elles sont désignées sous le terme PRISME: Projet de Rinçage Intensif Suivi d’une MisE à l’air d’Eurodif.
     Les opérations Prisme sont préalables à la phase de démantèlement.
     L’objectif est de récupérer les 320 tonnes d’uranium piégées dans les circuits procédés de l’installation qui représentent plusieurs centaines d’hectares et des dizaines de milliers de tonnes d’aciers. Après la phase de macération, il resterait encore environ 84 tonnes d’UF6. 

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     Cependant dans la fiche 014 de Réponse à l’Avis délibéré de l’Autorité ce Environnementale, il est indiqué:  «Les 84 tonnes d’uranium restant après macération, considérées lors de la rédaction du dossier établi sur le fondement de l’article 31 du décret n° 2007-1557 du 2 novembre 2007 relatif aux installations nucléaires de base et au contrôle, en matière de sûreté nucléaire, du transport de substances radioactives, ont été déterminées à partir de prélèvements réalisés en différents points d’équipements macérés: il s’agissait essentiellement de prélèvements de barrières de diffusion, de dépôts de corrosion et de poussières présents dans les équipements à l’issue de la macération » puis précisé : « La nouvelle fourchette de matière uranifère résiduelle à l’issue des macérations PRISME pourrait plutôt se situer entre 8 et 20 tonnes d’uranium.
     Cependant ces chiffres sont à prendre avec beaucoup de précaution du fait de la difficulté à extrapoler les premiers résultats d’analyses des prélèvements effectués sur un seul étage de diffusion à l’ensemble de la cascade de diffusion (1.400 étages de diffusion).» 
     Les opérations PRISME permettront donc de réduire la radioactivité et la toxicité chimique des matériaux qui seront issus du démantèlement afin de produire des déchets à très faible activité et de maîtriser les risques d’exposition chimiques et radiologiques des personnels dans la phase de démantèlement. 
     Les étapes suivantes seront ainsi réalisées:
     - Macération au ClF3  (trifluorure de Chlore): introduction d’un agent fluorant (ClF3) dans les groupes de la cascade de diffusion afin de faire réagir et d’extraire l’uranium présent et de le récupérer sous forme d’UF6. 
     - Mise sous Air des Usines de Diffusion Gazeuse (UDG): introduction d’air à humidité contrôlée dans les groupes macérés afin de d’hydrolyser les produits fluorés avec formation de fluorure d’hydrogène (HF) et de maîtriser les rejets (chlore, fluor principalement).  Cette opération nécessitera la construction d’un bâtiment, accueillant une installation de traitement des gaz provenant de l’hydrolyse du ClF3.
     * Ces 2 opérations visent à réduire autant que possible la quantité de matières nucléaires et chimiques résiduelle (UF6 sous diverses formes, déposé ou absorbé sur les parois et les barrières des différents éléments composant les groupes) pour la phase ultérieure du démantèlement
     - Mise en position de repli des installations de l’Annexe U et de l’atelier de transfert de DRP (Direction Ressource Programme): dès qu’elles ne seront plus nécessaires aux besoins des UDG et des opérations de préparation à la mise à l’arrêt définitif, les unités de l’annexe U et l’atelier de transfert seront progressivement arrêtés et vidangés de toute matière uranifère et chimique, puis mis en position de repli.
     - Surveillance des installations: la surveillance des installations ainsi nettoyées et vidangées de toute matière dangereuse sera mise en place au fur et à mesure du déroulement des opérations et sera assurée jusqu’au démarrage des opérations de démantèlement. Cette étape permet de s’assurer du maintien du bon état des installations.

     1- Observations et questions de la  CLIGEET
     La CLIGEET note que selon l’autorité environnementale, l’opération Prisme n’a «pas de précédents à cette échelle dans le monde». Des essais de macération et de mise sous air autorisés par l’ASN ont été réalisés par Eurodif afin de préparer PRISME. Cependant l’Ae note que «ces tests (portant désormais sur un groupe de diffuseurs à plus fort taux d’enrichissement) se poursuivent en 2011. L’extrapolation à l’ensemble de la cascade est un point sensible.». Le dossier d’impact ne rapporte pas sur les essais récents.
     La CLIGEET demande à être informée du résultat de ces essais par l’exploitant et l’ASN.

     Production et l’utilisation de ClF3 (trifluorure de chlore)
     Des questions se posent quant aux risques liés à la production et à l’utilisation de grandes quantités de ClF3. Jusqu’à présent l’usine Eurodif utilisait 5 à 6 tonnes par an de ClF3. Au cours des opérations Prisme cette quantité serait comprise entre 140 et 180 tonnes soit environ 50 à 60 tonnes par an (cf. fiche n°0014 du document Réponse à l’Avis délibéré de l’Autorité environnementale). Le ClF3 est un produit toxique, corrosif et comburant.
     C’est l’usine de Comurhex présente sur le site du Tricastin qui produit le ClF3 utilisé par Eurodif. Pour répondre aux besoins importants de ClF3 pendant les opérations PRISME, cette usine devra donc augmenter fortement sa production de 5 à 80 tonnes par an. Eurodif Production a indiqué dans la fiche 003 du document de Réponse à l’Avis délibéré de l’Autorité environnementale que «COMURHEX est une Installation Classée pour la Protection de l’Environnement soumise à Autorisation (ICPE A) du 23 juillet 2010. COMURHEX a présenté à la préfecture de la Drôme le 26 octobre 2010 les conséquences de la modification de cadence de production pour son atelier ClF3. Pour information, cette installation a une capacité nominale d’une centaine de tonnes par an et des campagnes de production de 70 à 80 tonnes par an ont déjà été réalisées dans les années 80. Cette modification de la cadence de production pour PRISME n’est pas une modification substantielle au sens du code de l’environnement: les autorisations de rejets n’ont d’ailleurs pas besoin d’être modifiées en conséquence».

suite:
     La CLIGEET estime:
     1- qu’il est nécessaire d’expliciter les mesures mises en place par AREVA avant de démarrer cette production accrue de ClF3 au sein de Comurhex en termes de risques pour les travailleurs et les riverains;
     2- qu’il faut également apporter des réponses à l’impact des transports nettement plus fréquents de ClF3 sous forme liquide entre COMURHEX et EURODIF;
     3- qu’il convient de préciser les dangers liés à l’utilisation de ClF3 liquide. En effet, il ne suffit pas d’affirmer «avoir bénéficié du retour d’expérience de l’usine militaire du Tricastin (fiche réponse n°012)» pour répondre aux légitimes inquiétudes des travailleurs et des riverains;
     4- qu’il convient de mieux expliciter les essais de macération «permettant d’optimiser l’efficacité de cette opération ainsi que de limiter les quantités de ClF3 utilisées», ainsi que ceux de mise sous air «qui ont permis d’identifier et de dimensionner les équipements destinés à traiter les effluents gazeux générés lors des opérations de mise sous air.» (fiche réponse n°012) 
     5- qu’il est nécessaire de préciser les risques liées au traitement des gaz issus de l’hydrolyse. En effet, l’injection de trifluorure de chlore (ClF3) pour nettoyer et décontaminer les diffuseurs puis l’action d’hydrolyse du ClF3, sont 2 opérations nécessitant la construction d’un nouveau bâtiment qui traitera les gaz issus de l’hydrolyse et qui doivent être décrites et suivies avec soin. Or l’étude d’impact n’est pas très précise sur ces opérations;
     6- concernant la production, la manutention et l’utilisation de ClF3, qu’il conviendrait qu’AREVA apporte des garanties en termes de formations, compétences, expérience, statut et protection des salariés;
     7- qu’il faut prendre en compte les risques d’explosion liés à la présence d’impuretés s’expliquant par la combinaison d’UF6, de ClF3 et de corps gras (pic à 8 µ). 

     L’augmentation des rejets de Socatri
     Un des effets de l’opération Prisme est d’augmenter les effluents liquides radioactifs et industriels de l’usine Georges Besse. Ces effluents seront traités par l’usine SOCATRI présente sur le  site  du Tricastin. SOCATRI a donc demandé à l’ASN la révision de son arrêté d’autorisation des rejets et des prélèvements d’eau (ARPE) pour obtenir un relèvement des limites autorisées de rejets pour le potassium, les chlorures et les fluorures. Il est indiqué page 7 de l’Avis délibéré de l’Autorité environnementale que «le volume des effluents générés par les opérations de macération et de mise sous air, puis transférés par EURODIF à SOCATRI  sera de 2.000 à 2.500 m3/an, avec notamment une teneur en chlore doublée, à comparer aux 400 m3/an environ en régime actuel».
     La demande de SOCATRI d’augmenter ses rejets et le projet Prisme sont donc liés. Cependant, la demande de SOCATRI n’est pas instruite dans le dossier soumis à enquête publique, mais fait partie de l’étude d’impact soumise à l’enquête publique. Elle fait l’objet d’une procédure conforme à l’article 26 du décret du 2 novembre 2007. Seule, une information du public sera faite par SOCATRI en mairie de Bollène sur une durée de 2 semaines. 
     Les opérations Prisme étant fortement liées à cette demande d’autorisation de rejets portée par SOCATRI, la CLIGEET se demande quelles seront les conséquences sur le  projet Prisme si SOCATRI n’obtient pas une nouvelle autorisation de rejets. Que deviendront alors les rejets générés par EURODIF dans la phase Prisme? La CLIGEET recommande que l’ASN analyse l’impact environnemental lié à l’augmentation des rejets de SOCATRI.
     La CLIGEET recommande qu’AREVA évalue les risques liés à l’augmentation des transports par camion des effluents entre Georges Besse et SOCATRI.
     La CLIGEET souhaite qu’une fois, les opérations PRISME terminées les valeurs de rejet de SOCATRI augmentées à l’occasion des opérations soient revues à la baisse.

     Mise sous air
     La CLIGEET s’interroge sur le maintien du confinement après les opérations PRISME notamment si l’efficacité de la mise sous air n’est pas totale.

     B. Amélioration de la maîtrise des impacts environnementaux
     1- Descriptif
     L’exploitant souhaite réaliser 3 opérations dans le cadre de l’amélioration de la maîtrise des impacts environnementaux:
     - le traitement des COHV (Composés Organo Halogénés-Volatils soit Trichloréthylène ou TCE / Perchloroéthylène ou PCE) marquant la nappe alluviale avec une limite de rejet pour les effluents gazeux générés par l’opération. En raison d’un marquage au TCE/ PCE de la nappe alluviale, EURODIF Production a lancé un plan d’actions visant à créer une barrière hydraulique de la nappe, permettant d’intercepter les écoulements impactés par des COHV avant qu’ils n’atteignent la Gaffière. L’eau pompée est traitée et les COHV extraits sont majoritairement piégés dans des filtres. Les effluents gazeux résiduels sont rejetés à l’atmosphère par le biais d’un nouvel exutoire tandis que l’eau assainie serait réinjectée dans la nappe;
     - l’orientation des eaux pluviales dans le canal Donzère-Mondragon, au lieu de la Gaffière;
     - l’orientation du rejet des eaux traitées de la station d'épuration «T600» vers le canal Donzère-Mondragon, au lieu de la Mayre Girarde.
     Ces opérations ne sont pas liées au projet Prisme traité précédemment.

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     2- Observations et questions de la  CLIGEET
     Le traitement des COHV implique une réinjection de l’eau assainie dans la nappe or cette opération n’est pas autorisée juridiquement. Un dossier spécifique a donc été déposé auprès du Préfet de la Drôme au titre de la loi sur l’eau pour solliciter l’autorisation de réinjecter dans la nappe souterraine les eaux qui y ont été prélevées et qui ont été épurées de TCE/PCE. 
     En l’état du dossier (fiche réponse n°027), il n’est pas démontré que le traitement proposé soit effectivement retenu puisque «une confrontation du modèle sera faite sur la base d’un pilote 60 m3/h pour lequel un dossier a été transmis à l’ASN au titre de l’article 26 du décret n°2007-1557 (...). Ce dernier permettra de visualiser sur le terrain les limites du confinement et de définir le nombre d’ouvrages complémentaires (pompage et/ou réintroduction en nappe) nécessaire.»
     La CLIGEET demande que:
     - la justification du choix du traitement retenu pour les COHV des eaux souterraines soit démontrée clairement, notamment en termes de gain environnemental;
     - soient précisés les effets d’une telle opération en termes de dépollution réelle des eaux, d’impacts sur la nappe et sur les terrains.
     - l’exploitant précise s’il s’appuie sur un retour d’expérience en matière de dépollution de nappe.
     La CLIGEET considère que l’orientation des eaux pluviales et des eaux traitées de la station d’épuration vers le canal Donzère Mondragon au lieu de la Gaffière (qui alimente la nappe) et de la Mayre Girarde  permet de limiter les conséquences pour les riverains.

     C. Mutualisation des moyens sur la plateforme AREVA du Tricastin
     Descriptif
     L’exploitant souhaite réaliser 2 opérations:
     - Mutualisation des activités de réception, d’expédition et de contrôle. À ce jour, EURODIF Production assure les opérations de réception, d’expédition et de contrôle des conteneurs d’UF6 dans le cadre de ses activités d’enrichissement. L’objet de cette modification a pour but d’autoriser EURODIF Production à réaliser ces opérations pour le compte des autres exploitants du groupe AREVA de la plate-forme du Tricastin.
     - Mutualisation des activités de tri et de conditionnement de déchets industriels Banals. L’objet de cette modification est d’obtenir l’autorisation de réaliser des prestations de tri et de conditionnement de déchets industriels banals pour le compte des autres exploitants du groupe AREVA de la plate-forme du Tricastin.

     Observation et question de la CLIGEET
     La CLIGEET n’émet pas d’observations particulières sur ces deux points. Cependant, la CLIGEET pensait que la mutualisation des activités de réception, d’expédition et de contrôle des conteneurs d’UF6, était déjà pratiquée. 

     D. Modification du périmètre de l’Installation Nucléaire de Base (INB) n°93
     1. Descriptif
     L’objet de la modification est de rattacher administrativement l’ICPE, parc de stockage ClF3 au périmètre de l’INB 93.
     2. Observations et questions de la CLIGEET
     La CLIGEET considère que cette modification permettra à l’ASN de contrôler ce parc de stockage et d’émettre toutes prescriptions nécessaires.

     CONCLUSION GENERALE:
     Une fois le projet PRISME démarré, la CLIGEET demande à avoir régulièrement des informations sur l’avancée des opérations notamment en termes d’impacts sur l’environnement et sur les salariés impliqués. 
     La CLIGEET rappelle qu’elle est très attachée à la sûreté et à la sécurité du site du TRICASTIN. Elle estime qu’un des éléments garantissant ce niveau de sûreté et de sécurité est une culture de la sûreté/sécurité partagée par l’ensemble des personnels (intérimaires, sous-traitants, agents) qui sera impliqués dans les opérations PRISME. Elle demande à AREVA de garantir cette culture de sûreté/sécurité.
     La CLIGEET recommande que les opérations PRISME soient réalisées par étape et que des évaluations soient faites avant le passage à l’étape suivante. Elle demande à être destinataire de ces évaluations étape après étape.
     Elle considère donc que la durée des 3 ans est donnée à titre indicatif et que la planification prévisionnelle peut être sensiblement modifiée.


Du césium dans la baie de Tokyo
 (ADIT)

     Selon une équipe de scientifiques du laboratoire d'analyse environnementale de l'université de Kinki (Région d'Osaka-Kyoto) menée par le professeur Yamasaki, la concentration de césium dans la baie de Tokyo a augmenté au cours des douze derniers mois. 
     Ce groupe de chercheurs a effectué des relevés du taux de radioactivité à quatre endroits différents du nord de la baie de Tokyo (voir figure ci-dessous, les points rouges indiquent les lieux des différents prélèvements).

suite:
     Ces mesures, effectuées de manière générale jusqu'à une profondeur de boue de 20 centimètres, ont révélé une concentration de césium radioactif plus importante que les niveaux relevés précédemment. Cette valeur est en partie attribuée par le professeur Yamasaki à l'accumulation d'excréments d'organismes ayant consommé des aliments contenant du césium.
     La méthodologie adoptée par les chercheurs a été d'échantillonner des tranches de mesures de 1 à 2 cm de la boue qui tapisse le fond de la baie. Selon ces mesures, la tranche concentrant la radioactivité la plus forte est comprise entre 12 à 14 cm de profondeur, avec 18.242 becquerel par mètre carré (soit un quart du maximum mesuré en France à la suite des retombées radioactives post-Tchernobyl). La présence de césium radioactif a été confirmée jusqu'à une profondeur de boue de 24 à 26 cm. 
     L'équipe de recherche a complété son étude par une comparaison avec les niveaux de radioactivité constatés au niveau du lac Biwa (proche de Kyoto, au sud-ouest du Japon) en suivant le même protocole expérimental. Cette dernière est 25 fois moins importante que celle relevée au niveau de la baie de Tokyo, qui dans l'absolu demeure cependant une faible valeur.
     Selon le professeur Yamasaki: «Le pic de concentration sera sûrement atteint dans un ou deux ans», il ajoute "néanmoins" que «Le fait que cette radioactivité soit profondément enfouie est une bonne chose pour les fonds marins».

Fukushima: nouvelles révélations accablantes contre TEPCO
Philippe Mesmer
Article paru dans Le Monde du 27.01.12

     L'avenir de la Compagnie d'électricité de Tokyo (Tepco) et du nucléaire japonais passe par la confiance retrouvée de l'opinion. L'entreprise propriétaire et opératrice de la centrale accidentée de Fukushima en a grandement besoin, notamment pour faire accepter les hausses de tarifs - 10% pour les particuliers et 17% pour les entreprises - qu'elle veut imposer, avec le redémarrage des réacteurs à l'arrêt.
     Les dernières révélations sur ses manquements, comme ceux des acteurs de la filière japonaise du nucléaire, ne vont pas y contribuer.
     Le 19 janvier, Tepco a admis le dysfonctionnement d'un système de transmission de données au gouvernement. En novembre 2010, quatre mois avant la catastrophe, l'entreprise devait relier à une alimentation de secours un appareil fournissant en temps réel des données sur la température des réacteurs et les niveaux de radiation autour des installations, à l'ERSS et à Speedi, deux systèmes d'informations faisant partie du réseau gouvernemental de prévention des catastrophes.
     Or, à l'époque, la connexion n'avait pas pu être établie, car le câble disponible était... trop court! D'après l'entreprise, la question a été évoquée avec l'organisation japonaise de sûreté nucléaire (JNES), organisme gouvernemental, mais aucune décision n'a été prise. Tepco a par ailleurs reconnu qu'avant la catastrophe, elle ne considérait pas le problème comme une urgence.

     Hostiles
     Informée du dysfonctionnement après l'accident, l'Agence de sûreté nucléaire et industrielle (NISA) n'a pas cru bon de le faire apparaître dans le rapport intérimaire de la commission d'enquête sur les causes de l'accident de la centrale, dévoilé en décembre.
     Autre problème impliquant la compagnie d'électricité, l'absence d'enregistrements des discussions de la cellule de crise mise en place par le gouvernement, Tepco et la NISA après l'accident. Le 24 janvier, le ministre de l'économie, du commerce et de l'industrie Yukio Edano a présenté ses excuses après avoir confirmé cette information.
     M. Edano, qui occupait en mars 2011 le poste de porte-parole du gouvernement, a jugé «regrettable» l'absence de ces enregistrements: «Compte tenu de l'impact de la catastrophe sur l'opinion et des attentes de la population, ils auraient dû être réalisés
     La responsabilité de ces enregistrements, obligatoires selon la loi, revenait à la NISA dont un représentant assurait le secrétariat de la cellule de crise. Ce dernier a affirmé qu'il était trop occupé pour s'en occuper. Et, d'après la NISA, l'absence de ces données n'est pas très grave, car les décisions prises ont ensuite été communiquées en conférence de presse.
     Ce point a fait réagir jusqu'au quotidien économique Nihon Keizai, pourtant traditionnel soutien de la filière nucléaire. «Ces révélations font craindre que le gouvernement n’ait délibérément évité de réaliser ces enregistrements, écrit-il dans un éditorial du 24 janvier, pour dissimuler à l'opinion certaines informations
     Et le quotidien de faire état de rumeurs selon lesquelles des argumentaires seraient rédigés pour s'assurer que les responsables impliqués donnent la même version des décisions prises par la cellule de crise. «Ces informations, ajoute-t-il, ont pour unique conséquence de saper les efforts réalisés pour restaurer la crédibilité des régulateurs et des opérateurs du nucléaire
     Retrouver la confiance des Japonais, aujourd'hui majoritairement hostiles au redémarrage des 51 réacteurs (sur 54) à l'arrêt, s'annonce donc difficile. D'autant que, d'après le quotidien Mainichi, le gouvernement a également dissimulé un rapport établissant que le Japon disposait de suffisamment de moyens de production d'électricité pour compenser l'arrêt de tous les réacteurs nucléaires et qu'il pourrait passer sans problème l'été, période de pic de consommation.
     Le gouvernement aurait agi ainsi pour alimenter la crainte d'une pénurie de courant et convaincre l'opinion d'accepter le redémarrage des réacteurs.

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