La G@zette Nucléaire sur le Net!
G@zette N°266, novembre 2012

Le TOURNANT ENERGETIQUE: vous y croyez? La Gazette a de forts doutes!!

La confusion des rôles est-elle une exclusivité soviétique et japonaise? Réponse de Bure
Antoine Godinot (PhD of Geology) - 21 août 2012


     I) Question troublante: qui donc a choisi l'"expert" indépendant "du CLIS de Bure"? (entre  parenthèses: N° de pages correspondant aux archives de www.clis-bure.com)
     Le CLIS, "Comité Local d'Information et de Suivi" est un organisme prévu par le rapport déc. 1990 (p. 92) de Christian Bataille qui demande que sa composition soit déterminée par Loi et qu'il soit convoqué par le Préfet. L'année suivante, la "loi Bataille" écrit qu'il "est composé pour moitié au moins d'élus des collectivités territoriales consultées à l'occasion de l'enquête publique.", un représentant par organismes divers, "des représentants de l'État" dont le Préfet Président, on verra que l'Autorité de Sûreté y est toujours présente, de l'Agence du Nucléaire et "des personnels liés au site".
     Géophysicien retraité, Monsieur André Mourot est en 2002 membre du Bureau du CLIS au titre d'une association. Fin décembre, il présente une "Note" (1) basée uniquement sur trois éléments:
     a) des rapports historiques du Service géologique de l'État, le BRGM, sur le bon potentiel géothermique de la zone même de Bure (2);
     b) un forage récent, Lezéville 1989 (3), qui conforte ces rapports BRGM;
     c) un texte réglementaire RFS III.2.f émis le 01/06/1991 par la Direction de la Sûreté des Installation Nucléaires.
     Dans un premier temps, la "Note" de Mr Mourot (1) a été évacuée en 3 lignes dont deux pour le moins contestables par un rédacteur salarié du CLIS (archives / bureau / 28-janv.-2003, p.3; le secrétaire scientifique du CLIS est alors Jérôme Sterpenich):
     i) la première sur un ton comme anecdotique et blasé écrit qu'il "rappelle" l'existence de ressources géothermique alors que l'essence même de la  "Note" est de monter assez brillamment comment elles ont été cachées en toute connaissance de cause;
     ii) la deuxième dit qu'elle rappelle la RFS qui dit qu'il est interdit de stériliser des ressources "exceptionnelles", vrai, mais omet de dire qu'elle cite ensuite l'annexe 2 de cette RFS: "géothermie... les sites retenus ne devront pas présenter d'intérêt particulier de ce point de vue", et qu'elle applique cette simple mathématique : "LE SITE DE BURE SE TROUVE DANS UNE RÉGION OÙ IL NE DEVRAIT PAS ÊTRE." (seuls caractères en majuscules de la "Note").
     Jamais le CLIS de Bure ne mettra la "Note" Mourot 2002 sur son site internet, même lorsque 9 ans plus tard par deux fois, j'en ferai la remarque dans des lettres recommandées (avril et juin 2012). Jamais non plus on y verra tout simplement ces rapports phare BRGM qui concernent Bure au premier chef.
     Tout ce qui va découler directement de cette "Note" pendant une décennie (intervention de J.C. Baubron; interventions/rapport de l'expert privé du CLIS: Erdyn 2005, puis Drouot 2007 puis Drouot 2010), avec nombres d'affirmations erronées, sera retranscrit sur le site internet du CLIS mais la "Note" de la révélation en sera toujours bannie. C'est un peu comme les débats du retour à la normale après Tchernobyl en France alors qu'officiellement rien n'avait été anormal.
     Cependant une partie des membres du CLIS l'a lue et la population l'apprenait par voie de presse et conférences (Bure, Chaumont) et découvrait l'existence de ces rapports phares du service géologique de l'État. Le C.A. du CLIS a d'abord décidé à la suite du Bureau de janv. 2003 qu'on ne traiterait de ce sujet que au prochain Bureau, ce qui en clair signifiait à huit-clos. Ceci vaudra entre les deux Bureaux une Assemblée plénière (24 mars 2003) houleuse, plusieurs associations claquant la porte. Comme ce qui se dit en Bureau n'est pas retranscrit mais seulement très brièvement résumé par les bons soins d'un salarié du CLIS, on ne saura jamais vraiment ce qui s'y est dit: pour Mr. Ch. Fouillac (Bureau du 17/04/2003: 2 lignes). Par contre à la Plénière suivante, tout le monde a pu écouter J.C. Baubron sous le chapeau BRGM (p. 8) :"Enfin non seulement il faut de la température pour la géothermie, mais il faut aussi du débit...
     Les deux mesures de porosité qui ont été faites donnent environ 10% et 9% seulement, et le débit est de 0,30 m3/h, c’est-à-dire 300 litres grosso modo, c'est une baignoire."  Et plus loin (p. 9) "Je prends Bazincourt 1 ou Montplone... les débits dans les deux cas sont très faibles, c'est de l'ordre de 1 m3/h, ce qui est totalement inutilisable pour la géothermie.". Un intervenant (p. 15): "L'Andra... dans son référentiel géologique», je le cite "Les perméabilités dans la région sont fortes... et les débits peuvent atteindre 50 à 80 m3/h... quand on nous parle de 0,3 m3, soyons sérieux quand même.". Mr Baubron répond qu'il "n'a pas trouvé" dans les données des forages de recherche pétrolière "de débits de 50 m3, ce qui est déjà extrêmement faible" (p. 16) [cette Plénière est absolument surprenante où ce sont des auditeurs qui corrigent l'intervenant; J.C. Baubron qui a pratiquement toujours travaillé dans des zones volcaniques et sur les gaz ignore tout des rapports phare 1976-83 de son organisme sur la géothermie du bassin de Paris; il n'a pas perçu la différence entre les résultats bruts de tests de forages pétroliers de recherche et des estimations qu'on peut faire pour la géothermie à partir d'estimation de la perméabilité].
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     Par ailleurs en discutant du gradient pour la géothermie (p. 8):
     "Une donnée nouvelle, qui est excellente, même parfaite de ce point de vue-là, donne un gradient de température mesuré par l'Andra dans le forage HTM102 de 25,2°C à 612 m. La plupart des gradients de température au monde sont mesurés avec des profondeurs de l'ordre de 150 à 300 m et rarement à 612 m." peut-être vrai dans les régions volcaniques mais hélas pas dans le bassin parisien. Et logiquement avec de tels chiffres p. 10: "Cette zone est assez défavorable en l'état des connaissances, je le répète.". Une telle intervention est journée de deuil pour la réputation du Service Géologique de l'État (faute de volontaires, a-t-on "poussé" Mr. Baubron dans l'arène? le patron direct de Mr Fouillac et Baubron alors, est Yves Caristan, un CEA-militaire qui a fait 18 ans de Moruroa, à qui "par hasard" on a confié la Direction du BRGM en 1999 et qui ne la quittera, volontairement pour retourner au  bercail, après que Ph. Vesseron ait pris les rennes de la Présidence). Un membre du CLIS constate au bout d'un an (Plénière 15/01/04, p. 28): "la conclusion de tout ça c'est qu'on ne sait rien". Il est alors décidé au sein du CLIS de créer un groupe de travail pour faire un appel d'offre pour une étude chargée de déterminer les potentialités géothermiques de la région de Bure.
     Certains comme le Vice-Président d’alors du CLIS (Bureau, 11/02/2004, p. 4) : "M. Fernbach émet des réserves quant à l'efficacité d'une telle mission et ajoute qu'en cas de stockage, une étude d'impact devra être réalisée et devra prendre ces questions en considération.", autrement dit ça ne servira à rien vu qu'un scénario en temps voulu règlera ce type de questions. Le groupe est néanmoins constitué, et avec 5 personnes: Mr. J. Sterpenich salarié du CLIS, Mme Malfait-Benni, conseillère générale alors Vice-Présidente du CLIS, Mr. M. Chaugny, Autorité de Sûreté nucléaire, Mr. P. Wojcik, CFDT, et Mr. A. Mourot le géophysicien. Et le 25/02/04 ce groupe définit la mission (Bureau 5/04/04, p. 3):
     "définir le type d'exploitation envisageable dans la région de Bure (zone de transposition décrite par l'Andra), à partir des exemples d'exploitation existants en Europe, afin de déterminer les moyens à mettre en œuvre pour caractériser une ressource géothermique (située dans ou en-dessous du Trias) et le coût."
Cette mission est approuvée par le Bureau par 10 voix pour, une voix contre, une abstention et il est précisé: "M. le Préfet ajoute que cette étude est également destinée à l'information du Parlement, lorsqu'il aura à vérifier si l'Andra a bien répondu aux exigences de la règle fondamentale de sûreté" (Bureau 05/04/2004, p. 3). On sait ce qu'il en sera (4).
     Cela est discuté et annoncé à l'assemblée plénière CLIS du 11/05/2004 (p. 52-58) qui l'a accepté sans opposition et l'avis d'appel à la concurrence a été adressé début juin au Journal Officiel de l'Union Européenne et au Bulletin des Annonces des Marchés publics (Bureau 22/06/2004, p. 6). Pour la petite histoire, le BRGM et ANTEA (branche géotechnique séparée du BRGM en 1994) ont demandé un dossier qu'ils n'ont pas renvoyé (Bureau 19/07/04 p. 5). En fait personne n'a répondu à l'offre.
     Le résumé du Bureau du 20/09/04 écrit alors que la commission a fait "appel à candidatures auprès des organismes susceptibles de répondre à la demande du CLIS" et puis: "deux organismes contactés (ERDYN Consultants, France, et GEOWATT, Suisse) se sont déclarés intéressés par la mission." (Bureau 25/10/04, répété au Bureau 30/11/04 p. 6). Le coté associatif estime que c'est de fait à l'étranger qu'il faut aller pour avoir des experts indépendants (Bureau 20/09/04, p. 4). Finalement, il est annoncé que ces deux organismes et le cabinet R. Duplouy "ont déposé leur offre dans les délais." (Bureau CLIS 24/01/05). Mr Chaugny étant parti, l'ASN est présente au Bureau soit par Mr. O. Mesureur ou Mr. A. Thizon ou encore Mr. M. Babel, parfois deux d'entre eux (2 sur un total de 13 pour le Bureau du 24/01/05 seulement 18 jours avant le fameux choix).
     Le résumé du Bureau du 28/02/05 annonce que la commission d'appel s'est réunie le 11/02/05, a ouvert les plis et apparemment directement dans la réunion "s'est finalement prononcée pour l'offre d'ERDYN", celle Duplouy étant incomplète. Cependant, Mr Mourot "estimant qu'un délai était nécessaire avant de se prononcer" n'a pas participé au vote dit le résumé écrit par le salarié du CLIS. Les arguments donnés du choix sont,  écrit le salarié du CLIS: "la commission a estimé que les deux autres offres présentaient une qualité technique et des compétences équivalentes" Puis: "l'offre d'ERDYN, qui prévoit une collaboration étroite avec le CLIS et un coût moindre (38.000 €), contre 56.000 € TTC pour GEOWATT". "La commission a estimé", sans donc Mr Mourot qui a refusé de participer à ce "vote" précipité. Qui donc restait? 3 personnes? 4 personnes? qui incluait l'Autorité de Sûreté Nucléaire à coté du salarié du CLIS (P. Wojcik n'apparait pas dans les Bureaux qui encadrent cette "fameuse" réunion du 11 février donc il n'y était probablement pas, remplacé?).
p.7


     La société suisse Géowatt est un spécialiste pointu de la géothermie, du stockage de chaleur, de l'hydrogéologie, composée exclusivement de géologues et de géophysiciens. Géowatt AG de Zurich est à ce moment-là un partenaire de ENGINE avec le BRGM, CFG-Services (filiale géothermie du BRGM), les grands spécialistes allemands GFZ Potsdam, etc., c'est à dire l'élite des géothermiciens d'Europe. ENGINE, ENhanced Geothermal Innovative Network for Europe, est le projet européen de pointe sur la géothermie améliorée qui se déroulait sur ces années là appuyé par les gouvernements. Géowatt est donc au fait de tout ce qui se fait de mieux et de plus récent en géothermie, choix des sites, méthodes, précautions, du pourquoi du projet CLASTIQ du BRGM, des applications avancées de "géothermie du futur" que lancent les allemands, autrichiens, etc.
     Les 3 ou 4 personnes restantes de la commission lui ont préféré en une paire d'heure une "société de service en technologies, spécialiste de l'innovation industrielle", "multispécialiste", Erdyn, présidée alors par un X-Sup'Aero (P. Haouat), homme qui avait travaillé 10 ans dans la propulsion pour l'armement français, et qui avait racheté Erdyn à son créateur, L. Drouot. Sur son site Erdyn mentionne de nombreux clients comme "Les 3 Suisses", Acelor, Otis Ascinter, Cogema, etc., et son Président ne cache pas d’ailleurs que le maintien de bonnes relations avec ses clients est essentiel (chiffre d'affaires 2004: ~750.000 €). Il n'y a ni géologue ni géophysicien à Erdyn.
     Deux ans et demi après la "Note" Mourot (1) qui parle uniquement d'un règlement issu par la Direction de la Sûreté des Installation nucléaires et de grands rapports phares du Service Géologique d'État (2): intérêt notoire des grès du Trias inférieur pour la géothermie, particulièrement à Bure qui est en plein dans l'axe de la zone d'apport de ces grès, de forte porosité, et où la température est la plus élevée, confirmé par un forage pétrolier (3), on est dans la situation suivante:
     - on a d'un coté le BRGM, service géologique de l'Etat, qui démarre une nouvelle grande étude phare sur le potentiel géothermique des formations gréseuses profondes du bassin de Paris notamment, la première depuis celles de 1976-83: CLASTIQ (qui va donner 7 gros rapports techniques), partout... sauf... en Lorraine (Ph. Vesseron est alors le Président et Directeur du BRGM et le décret du 2004-991 du 20/09/2004 art. 15 venait de lui donner pouvoir direct de licenciement du personnel).
     - pendant que le CLIS de Bure, par le choix de quelques personnes (3?, 4? le salarié y compris) incluant l'Autorité de Sûreté Nucléaire, passe commande à une société "d'innovation industrielle" ne comportant pas de géologue pour "l'estimation du potentiel géothermique de la région de Bure" (i.e. dans cette Lorraine absente du projet CLASTIQ - pdf).
     Le rapport Erdyn comme les suivants sera rédigé par un centralien qui a un master en électronique, L. Drouot. Le CLIS de Bure vient d'être prévenu en recommandé (06/06/2012 avec justifications) qu'il a été induit grossièrement en erreur par le 3e rapport de Louis Drouot dont il a diffusé les conclusions à 168.000 exemplaires via sa lettre de juillet 2010.

     II) Tant que la loi qui impose Bure n'a pas été votée, l'ASN a "joué la montre", s'évertuant à trouver des arguments de la non nécessité d'un forage au Trias
     Ce que demande nombre de membres du CLIS (Michel Marie notamment) et du public, c'est qu'on fasse, et vite, un forage pour voir ce qu'il en est réellement de la géothermie sous Bure. La pression est forte. Michel Chaugny, Drire Champagne-Ardennes, Ingénieur des mines qui est dans l'organigramme de l'Autorité de Sûreté Nucléaire-2003, prend la parole en juriste (Bureau 17/04/2003 p. 3): "l'Autorité de sûreté nucléaire a demandé à l'Andra d'étudier cette question du risque d'intrusion accidentelle ou non (qui est déjà évoquée dans le dossier 2001 Argile, dans le cadre de sûreté à long terme)... la RFS III 2 f n'a pas de caractère réglementaire mais sert de cadre pour la sélection des sites et pour les recherches". Serré à l'occasion par A Mourot qui hormis le "exceptionnel" souligne l'annexe n° 2 §3.1.5 de la RFS qui spécifie qu'il ne doit pas y avoir de géothermie, selon les notes d'un salarié du CLIS, il a cette réponse (Bureau 23/12/2003): "ces deux formulations ne sont pas incompatibles, le corps du texte de la RFS définissant de manière générale le contexte du stockage, et les annexes précisant les cas spécifiques".
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    À partir de juin 2004, pour la Champagne-Ardenne, c'est Alain Tizon, Inspecteur de la sécurité nucléaire senior ou Olivier Mesureur ou encore Michel Babel qui aujourd'hui est responsable pour les "stress-test" de Nogent-sur-Seine et Chooz qui représentent l'ASN au CLIS de Bure. Comme on l'a vu au paragraphe précèdent, à cette époque, l'ASN est partie prenante d'une commission qui choisit «pour le compte du CLIS» un dit «expert» indépendant sur ce sujet de la géothermie.
     Jérôme Goellner, Directeur de la DRIRE Lorraine, ingénieur du corps des mines affirme à la Plénière du 26/05/2003 (p. 12): "il n'y a pas d'application de la RFS avec des critères précis, sur le sujet de la géothermie, qui conduirait à dire de manière automatique si le site est adapté ou ne l'est pas". La ligne d'avant: "L'Autorité de Sûreté nucléaire, lorsqu'elle a analysé le sujet à l'occasion de la création du laboratoire, en préfiguration de la possibilité d'application d'une telle RFS, avait considéré qu'il n'y avait effectivement pas de caractère exceptionnel quant aux ressources présentes sur le site". Et (p. 20): "la RFS répond au problème. Elle demande précisément que nous étudions des scénarios qui seraient par exemple des intrusions accidentelles dans le cadre d'une prospection géothermique dans 100 ans parce que nous avons oublié le stockage. Précisément, la RFS demande que le rapport qui sera remis par le gouvernement et qui sera proposé au Parlement en 2006 parle de cela". Pourtant, c'est lui qui comme Adjoint au Directeur de la Sûreté desDirection Générale de la Sûreté Nucléaire installations nucléaireet de la Radioprotection en 2000 avait été "voir" la centrale nucléaire du Blayais qui, suite à l'intrusion de 90.000 m3 d'eau de la Gironde, avait perdu deux systèmes de sauvegarde de base laissant pendant une dizaine d'heures la France sans plus aucun filet face à l'accident nucléaire majeur (avec les routes coupées, site inaccessible, électricité jouant au yoyo etc; cf. Gazette Nucléaire n°181/182, partie 1 et partie 2). Il avait bien dû admettre alors: "... on n'imaginait pas un tel scénario" (8).
     Cette bénédiction autorise le Directeur de l'Andra, François Jacq d'expliquer aux membres du CLIS dans la foulée (Plénière 26/05/03 p. 19): "Ce n'est pas à l'Andra d'aller caractériser les ressources géothermiques en France...(...) pour que la puissance publique pense que cela vaille la peine d'y investir de l'argent pour la caractériser parce qu'elle aurait justement un caractère exceptionnel, c'est à elle de le faire, ce n'est pas à l'Andra de décider ce genre de choses".
     Mr. J. Goellner de nouveau, qui intervient spontanément à la Plénière du 12/12/05 (p. 31-32): "Nous avons compris que dès lors qu’il y a de l’eau en profondeur, d’une manière ou d’une autre, il y a quelque chose qui est une ressource exploitable. Donc la question qui a été posée était quand même bien de savoir si dans tout ce secteur, il y a quelque chose qui présente un caractère exceptionnel en matière de géothermie. C’était bien la question posée. L'ANDRA a apporté une réponse, là une autre appréciation est donnée [il parle de Erdyn choisi par la fameuse commission], il y a des instances qui évaluent tout ceci, à elles aussi d’en juger. (...)  Il faudra... que la démonstration de sûreté prenne en compte l’existence possible d’un forage qui serait fait un jour par erreur et que l’évaluation de sûreté prenne en charge ce genre d’intrusions externes".
     Pas plus que l'Agence du nucléaire l'Autorité de Sûreté Nucléaire ne parle des rapports phares du BRGM 1976-83. Elle bagarre à l'identique pour argumenter le rejet des demandes qui fusent en permanence dans le CLIS de faire au moins un forage. Pendant cette période 2003-mi 2006 (de la "Note Mourot" jusqu'à la Loi), pour les Inspecteurs de l'ASN, cette "question" "juridique" sera résolue en temps voulu par un "scénario" dans l'ordinateur.
     Il y a quelques explications que l'on n’a pas pu trouver pas dans leurs interventions:
     a) pour les gens ordinaires, c'est quoi "exceptionnel"? scientifiquement, économiquement, environnementalement, maintenant, dans 100 ans, dans 500 ans, dans 1.000 ans?
     b) Pourquoi les "gendarmes" qu'ils sont, ne demandent-ils pas qu'on vérifie que ça ne l'est pas "exceptionnel"? puisque c'est le seul mot de ce texte RFS III.2.f  émis par la Direction de la Sûreté des Installations nucléaires qu'ils veulent bien voir.

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     Les rapports BRGM que, aujourd'hui tout le monde peut télécharger sur www.brgm.fr, ne montrent-ils pas que pour le Trias inférieur Bure est à l'endroit "optimal", le mot est celui de Maget et Rambaud 1979 (2)? La fig. 4 du rapport IRSN (5), figure qui vient du Ministère de l'Industrie-1978 ne met-elle pas Bure en "Zone à productivité forte"? La "zone de transposition" de Bure n'est-elle pas centrée juste au-dessus d'une série permienne gréso-argileuse tellement épaisse, -2600 m jusqu'à - 4200m/mer (6), comme essayait de les débusquer ailleurs le projet CLASTIQ (qui n'a pas trouvé d'équivalent aussi puissant)? Les Allemands n'étudient-ils pas la mise en exploitation géothermique ("moyenne température", température 90 à 150°C) de ce genre de séries gréso-argileuses très profondes et très salées à Groβ Schönebeck au nord de Berlin (grès permiens à -4.000 m, l'identique de Bure), à Horstberg au Nord de Hanovre (grès à -4.000 m), à Hanovre (grès à -3.700 m)?
     c) Comment fait-on à l'ASN/IRSN pour quantifier un "scénario" sans données? Comment définit-on des couches qu'on n’a pas besoin de connaître parce qu'elles ne sont pas "exceptionnelles"? Quelles relations hydrauliques et chimiques impose-t-on entre l'aquifère Dogger du dessus avec le plus grand aquifère lorrain "non exceptionnel" du Trias du dessous (via les failles, etc.)? Est-ce en rentrant des valeurs "raisonnables", imaginées et non exceptionnelles (évidemment) dans le logiciel dernier cri? car pas de forage pas de donnée (7) p. 37 : "...aquifère du Trias, aucune donnée n'est à ce jour disponible à l'échelle du secteur. L'IRSN regrette qu'aucun forage ANDRA n'ait atteint ces niveaux...".
     Les réponses des inspecteurs à "ce type de questions" sont l'identique de celle du "Ministère de l'Environnement" (dont le Grand Directeur était alors Ph. Vesseron) au Sénateur lorrain J.P. Masseret à la même époque (JO Sénat du 13/02/2003 - page 514): ".. des scénarios de type "intrusion humaine" couvrant des situations liées à ce type de questions."

     III) De toute façon, juste avant le vote des parlementaires, l'ASN "sait" qu'il y a peu d'eau dans le Trias et qu'on a un excès [veulent-ils dire "exceptionnel"?] chimique
     Avis de l'Autorité de Sûreté Nucléaire au Gouvernement, aux Parlementaires et à la République au nom desquels elle veille au contrôle, avant que ceux-ci n'adoptent la Loi qui va imposer Bure comme site, unique, et qui prévoit dans la foulée: "la demande de son autorisation [= passage industriel de l'évacuation géologique] prévue à l’article L. 542-10-1 du code de l’environnement puisse être instruite en 2015":
     "Le secteur étudié ne présente pas de ressource naturelle connue aujourd’hui (gazière, pétrolière, charbonnière, minérale) pouvant augmenter la probabilité d’interférences entre l’exploitation de ces ressources et un éventuel stockage. Il n’y existe pas non plus de potentiel géothermique exploitable pour des raisons de salinité excessive et de faible production d’eau des aquifères". (9) p. 6
     La prière incantatoire du gendarme pourra-t-elle modifier la nature du sous-sol? Car la loi, elle est belle et bien passée.
     Sont-ils sûr cette fois d'avoir bien "imaginé" tous les scénarios pour cette radioactivité qui va être 2.000 fois le cumul de tout ce qu'on a laissé à Moruroa/Fangataufa (10) à déposer à quelques décamètres du seul aquifère d'ultime recours des meusiens et haut-marnais (11)? C'est vrai que le Blayais n'a jamais été qu'un petit incident niveau 2...

Bibliographie

     (1) Mourot, A.  2002, "Lorraine-Champagne Ardennes - Bure et la Règle Fondamentale de Sûreté", polycopié 7p. et 7 cartes annexes, décembre. [présenté au CLIS de Bure, à la CNE qui, elle, a fait savoir publiquement qu'elle le transmettait à l'ASN]
     (2) Suite aux chocs pétroliers, l'Etat avait demandé au BRGM de faire l'inventaire des ressources géothermiques du pays, pour la Champagne-Ardennes et la Lorraine (Bure étant à cheval sur les deux) ces rapports phares sont :
      * Desplan, A. - Lejeune, J-M. - Maiaux, C.  1981a, "Les possibilités de réalisations géothermiques en Meuse : Inventaire", BRGM/SGN, Établissement public Régional de Lorraine - Comité géothermie, Rapport 81 SGN 408 LOR, 100p. [les cartes isothermes, isopaques, pression et salinités de ce rapport non numérisé sont reproduites dans Mourot 2002]
     * Desplan, A. - Lejeune, J-M. - Maiaux, C.  1981b, "Les possibilités de réalisations géothermiques en Meuse : Étude de la faisabilité du projet géothermique de Maizey", BRGM/SGN, Établissement public Régional de Lorraine - Comité géothermie, avec la collaboration de l'omnium d'Études techniques, Rapport 81 SGN 372 LOR, mai, 46p. et 3 annexes. [téléchargeable sur le site BRGM]
(suite)
suite:

     * Maget, P. - Rambaud, D.  1979, "Possibilités géothermiques de la région Champagne-Ardenne", BRGM, décembre, rapport 79 SGN 739 GTH/CHA, 37p, 36 cartes HT. [téléchargeable sur le site BRGM] Voir la carte 26 pour le "golfe" d'apport de ces grès qui passe pile par Bure; voir la carte "Synthèse Trias" S4 où l'on voit même le village de Bure en position optimale; et p. 34: "Le réservoir du Trias présente les caractéristiques les plus intéressantes au Sud de la région, autour d'un axe passant par Joinville/Bar-sur-Seine, les conditions optimales étant coté oriental" = le côté oriental c'est pile Bure; cela est dit aussi dans résumé du rapport.
     * Maget, P. - Rambaud, D.  1980, "Possibilités géothermiques de la région Champagne-Ardenne - II. Étude hydrogéologique des sites", BRGM, septembre, rapport 80 SGN 649 GTH/CHA, 54p. [téléchargeable sur le site BRGM]
(3) Coparex  1989, "Rapport final forage "Lezéville 1" (LZV1) - permis de Biencourt", septembre 1989 SC/NG/EG, 31p. et un log final dépliant du forage au 1/500. Ce rapport écrit (p. 14) : "Buntsandstein (1396 - 1447m) : - la partie supérieure (1396 - 1427m) présente une série de bancs gréseux, épais de 2 à 6m, séparés par des niveaux métriques d'argile et d'anhydrite. L'épaisseur brute cumulée des grès est de l'ordre de 25m, soit 80% du total. Il s'agit de grès moyens à grossiers, dans l'ensemble assez "propres", peu cimentés, manifestement poreux et perméables", les passages soulignés le sont dans le rapport de l'opérateur).
(4) Le rapport OPECST Bataille-Birraux (mars 2005) le dernier avant la loi qui impose Bure, a totalement censuré le sujet de la géothermie alors même qu'ils savent très bien ce qui se passe au CLIS (p. 85, 86 et 87) et qu'on y apprend que Mr Mourot a été reçu à l'Opecst (p. 57). On se rappelle que c'est le médiateur Ch. Bataille en accord avec l'Andra qui avait choisi ce site Meuse/Hte-Marne en 1993. Il était à cette époque membre du Conseil d'Administration de l'Andra, donc tenu de respecter la confidentialité de ce qui s'y délibère et il y est de nouveau au moment de ce rapport OPECST 03/2005 alors que Cl. Birraux lui, est dans celui de l'IRSN.
(5) IRSN (Gros, J.C)  2003, "État des connaissances sur la présence de ressources géothermiques dans le sous-sol du site de l'Est", IRSN/DPRE/SERGD 03-12 bis, mai, 27p. [peut être demandé au CLIS de Bure]
(6) ANDRA  2001, "Référentiel géologique du site Meuse/Haute-Marne", janvier, tome 2 "Les connaissances à l'échelle régionale"; voir la fig. 2.3-11 et le texte chapitre II "Géologie du substratum" p. 11-12. [peut être demandé au CLIS de Bure]
(7) IRSN  2005, "Avis de l'IRSN sur le dossier 2005 Argile", décembre, Rapport DSU n°106, 247p.
(8) Cité in "La lettre qui accuse", Christophe Labbé et Olivia Recasens, 14/01/2000, Le Point n°1426 [disponible en ligne]
(9) "Avis de l’Autorité de Sûreté Nucléaire sur les recherches relatives à la gestion des déchets de haute activité et à vie longue (HAVL) menées dans le cadre de la loi du 30 (5) décembre 1991, et liens avec le PNGDR-MV ", ASN, Paris le 02 février 2006, 10p.
(10) "Même avec une marge d'erreur d'un facteur dix, on constate que l'activité totale des radionucléides produits par les essais nucléaires souterrains est inférieure à celle des radio-éléments produits annuellement par une centrale nucléaire PWR de 900 MWe". in  Fondation Cousteau  1988, "Mission scientifique de la Calypso sur le site d'expérimentations nucléaires de Moruroa", Novembre, p. 48 [on le trouve sur internet]. Au lecteur de faire le calcul pour Bure sans oublier les réacteurs militaires et de recherche, ceux fermés, ceux en construction...
(11) L'aquifère Oxfordien est la couche qui repose directement sur la couche argileuse visée pour l'enfouissement des déchets nucléaires. Cet aquifère d'eau douce particulièrement pure (identique Evian moins la radioactivité résiduelle des tirs atomiques aériens) figure sur la liste des eaux souterraines dites "d'ultime recours" sous le numéro 206 pour la Lorraine (in Ministère de l'environnement/BRGM, convention n°07/93, 1994 "Ressources en eaux souterraines protégées dites «d'ultime recours»...", rapport R 38142; [téléchargeable sur le site BRGM]; voir le tableau 1). En cas de contamination de surface radioactive, chimique ou biologique, il faudrait se rabattre sur lui (d'ultime recours "parce que protégé de manière temporaire sinon définitive" par sa profondeur) puisque comme écrit la première page de ce rapport: "le caractère vital de l'eau potable, qui ne peut souffrir une défaillance excédant un laps de temps très réduit". Exploité à Lezéville à 7 km SSE de Bure, cantons où l'on manque régulièrement d'eau, cet aquifère a été trouvé très perméable avec des élargissements de type karstique à une profondeur de 380m à 9km WSW en plein aval hydraulique de Bure à cause de son drainage par la vallée de la Marne (forage EST321; transmissivité 3.10-3 m2/s).
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