Comme l'écrit Le Monde du 14 avril, «le gouvernement a autorisé l'EDF à passer commande dès 1976 du surgénérateur Superphénix point de départ d'une deuxième géneration de centrales nucléaires permettant de pallier l'insuffisance d'uranium dans le monde et de mettre à profit l'avance technologique acquise en ce domaine par la France» On trouvera ci-dessous quelques documents relatifs à l'opportunité d'une telle décision. EN ANGLETERRE Sir Brian FLOWERS, président
de la «Royal Commission on environmental pollution» de Londres,
a envoyé le 14 novembre l975 au Premier Ministre du Royaume Uni
un texte relatif aux surgénérateurs et dans lequel on lit:
difficulté de nature fondamentale... A l'heure qu'il est, le surgénérateur
soulève des difficultés de nature fondamentale. Il y a les
dangers associés à la gestion de déchets à
haute activité, il y a des problèmes non résolus sur
la stabilité du réacteur lui-même (qui sur beaucoup
de points importants est qualitativement différente de la stabilité
des réacteurs à neutrons thermiques). Il y a les dangers
associés à la nécessité de traiter de grandes
quantités de plutonium et la possibilité de sabotages et
de vols, en particulier pendant les transports. Ces problèmes ont
une importance mondiale, mais nous sommes persuadés que le Royaume-Uni
peut apporter une importante contribution à leur solution. Des efforts
supplémentaires de recherche et de développement sont nécessaires:
il est possible que la construction d'un prototype de taille commerciale
aide à acquérir cette expérience.
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Surveiller minutieusement Il doit comporter sur place les installations nécessaires à la fabrication et au retraitement de son combustible afin d'éliminer les risques dûs au plutonium. Il doit être muni de tous les moyens de protection possibles, aussi bien sous forme de dispositifs physiques que d'une force armée de sécurité. Le système doit être conçu de telle sorte qu’il soit possible de mesurer et de surveiller minutieusement les flux de plutonium. Les coûts supplémentaires inhérents à de telles conditions sont le prix inévitable d'un programme sûr et responsable, afin d'évaluer les dangers des surgénérateurs commerciaux. Energies alternatives... Nous craignons toutefois qu'un investissement
massif d'argent et d'effort technologique dans un surgénérateur
prototype de grande taille fasse apparaître comme inévitable
le choix final d'un programme de surgénérateurs. Nous craignons
qu'une telle entreprise hasardeuse puisse éloigner pays de
la recherche de sources alternatives d’énergie à long terme
dont les dangers écologiques pourraient être bien moins élevés
que ceux d'un programme de surgénérateurs - et de la mise
en oeuvre d'une vigoureuse politique d'économie d'énergie.
Certaines des projections officielles des besoins à long teçrme
en énergie que nous avons vues sont si élevées que,
même s'il était possible de construire les surgénérateurs
au rythme requis, il est douteux que les quantités d'uranium nécessaires
soient disponibles. Le développement des énergies alternatives
et les économies d'énergie seraient alors inévitables...
Ceci incite à poser les questions suivantes: - Situé à 22 km de Bourgoin, à 38 km de Chambéry et à 44 km de Lyon, le surgénérateur prototype de taille commerciale «Superphénix» est-il éloigné de toute agglomération? - Est-il prévu qu'il comporte sur son site même toutes les installations nécessaires au retraitement et à la fabrication de son combustible? - Les sommes engagées dans Superphénix ne le sont-elles pas au dépens des recherches de sources alternatives d'énergie? DOMINIQUE VERGUESE
Le Monde- 7 avril 1976 p.2
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DOMINIQUE VERGUESE
LeMonde – 7 avril 1976 |
IL N'EST PAS DERAISONNABLE DE PENSER QU'UN GRAVE ACCIDENT SURVENANT A SUPERPHENIX POURRAIT TUER PLUS D'UN MILLION DE PERSONNES. Extrait d'un article de J-P. PHARABOD dans
Sciences et Vie n°703 avril 1976 p. l01
Pour ceux qui douteraient de la compétence
de l'auteur de ces lignes nous indiquerons que JY.PHARABOD a travaillé
pendant sept ans et demi au CEA et à EDF. Il a participé
aux essais des réacteurs Chinon 1 et Saint Laurent 1 et à
de nombreuses études de contrôle et de sûreté.
Il a démissionné d'EDF en 1970 et est actuellement ingénieur
au Laboratoire de Physique Nucléaire des Hautes Energies à
l'Ecole Polytechnique. |
EN FRANCE: En mars dernier, le groupement des scientifiques pour l'information nucléaire a publié le texte suivant: Il y a un peu plus d'un an était lancé
l'appel dit «des 400», signé depuis par plus de 4.000
scientifiques, et qui appelait la population à «refuser
l'installation des centrales nucléaires, tant qu'elle n'aura pas
une claire conscience des risques et des conséquences».
Un certain nombre de scientifiques, appartenant à l'université
d'Orsay, au Collège de France, à l'Ecole Polytechnique, à
l'INSERM et aux Universités parisiennes et de province ont depuis
constitué le Groupement de Scientifiques pour l’nformation sur
l'Energie Nucléaire (GSIEN).
Ces scientifiques représentent un éventail d'opinions assez
large, ce qui est une des garanties de leur objectivité. Certains
sont fondamentalement hostiles, pour des raisons soit techniques, soit
sociologiques, à l'utilisation de l'énergie de fission,
d’autres considèrent que l'utilisation de l'atome n'est pas en soi
plus nuisible que celle des combustibles fossiles; d'autres enfin nont
pas encore fixé leur opinion. Mais tous considèrent que la
solution à long ou moyen terme des problèmes énergétiques
repose sur les énergies nouvelles (solaire en particulier), et sur
la fin de la croissance inconsidérée de la consommation d'énergie.
Ils sont également unanimes pour dire que le programme électronucléaire
actuel engage la France (et par voie de conséquence les pays voisins)
dans la technologie la plus dangereuse qui soit.
tout nucléaire, tout plutonium... La première peut être résumée de la façon suivante: avec les surgénérateurs, on va passer du «tout électrique, tout nucléaire» au «tout nucléaire, tout plutonium». Cette filière repose en effet sur la production et l'utilisation massive du plutonium 239, matériau «fissile», à partir de l'uranium 238, matériau «fertile». Or le plutonium est dans doute le corps le plus dangereux que l'on connaisse: |
D'une part sa toxicité radioactive est telle que s'il est inhalé en aérosol, il entraîne un cancer mortel du poumon à partir d'une dose estimée entre un microgramme et un milligramme. La dispersion accidentelle de plutonium soit lors du transport ou du retraitement, soit lors d'avaries de centrales, aurait donc des conséquences redoutables. - D'autre part, il suffit de 5,6 kilogrammes de plutonium pour faire une bombe atomique. Avec un «parc» de surgénérateurs tel que nous le promettent les technocrates d'EDF, des dizaines de tonnes de plutonium circuleront en France chaque année. Il faudra une petite armée (sera-t-elle sûre?) pour se protéger contre les vols éventuels. La deuxième raison est que, à la différence des centrales nucléaires «conventionnelles», et à l'inverse de tout ce qui a été déclaré par la propagande officielle, les surgénérateurs peuvent, par accident, faire explosion à la façon d'une bombe atomique. En effet, ils peuvent être le siège d'une réaction en chaîne dite «surcritique prompte en neutrons rapides» particularité que seule la bombe atomique possède également. Excursions nucléaires... La variété d'explosion atomique
dont un surgénérateur peut être le siège porte
le nom rassurant d'«excursion nucléaire».
Plusieurs excursions nucléaires successives peuvent se produire.
Le problème est de savoir si ces explosions pourront être
contenues par les enceintes prévues autour du réacteur. Les
experts ont donc cherché à évaluer la puissance de
ces explosions.
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En effet Superphénix comportera environ 35 tonnes de combustible nucléaire, dont 5 tonnes de plutonium, et les expériences d'excursion nucléaires n'ont jamais concerné que quelques kilogrammes de matière fissile. Si l'on se rappelle les difficultés du calcul de l'explosion d'une structure beaucoup plus simple, celle de la bombe atomique, et le nombre d'expériences qui ont été nécessaires pour la mettre au point, on ne peut qu'être très sceptique quant aux résultats des calculs relatifs aux excursions nucléaires. Il est clair qu'étant donné l'extraordinaire toxicité radioactive des aérosols de plutonium, l'expulsion même partielle des 5 tonnes de plutonium de Superphénix dispersés ou volatilisés par l'excursion nucléaire constituerait une catastrophe sans précédent. déformation brutale du coeur... Sur les sept surgénérateurs
producteurs d'électricité qui ont déjà fonctionné,
trois (EBR 1, Enrico Fermi, BN 350) ont eu de graves accidents, proportion
jamais vue dans aucune autre filière. Les documents officiels
français indiquent que la valeur numérique de la probabilité
d'excursion nucléaire n'a pas été calculée.
De nombreuses causes peuvent être à l'origine d'excursions
nucléaires. On envisage par exemple une déformation brutale
du coeur par propagation rapide d'une rupture d'assemblage, déformation
qui entraverait la circulation du sodium réfrigérant et empêcherait
les barres de contrôle de fonctionner. On peut craindre également
la formation d'une masse surcritique locale à la suite d'une fusion
partielle, ce qui provoquerait une compaction du reste du coeur et une
excursion nucléaire d'ensemble. On peut envisager enfin des pannes
simultanées d'organes essentiels, l'éjection de barres de
contrôle, des fautes au déchargement un sabotage.
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Il ne saurait exploser En France, des dirigeants incompétents et des technocrates audacieux ont décidé de sauter allégrement de 250 (Phénix) à 1.200 Mégawatts électriques (Superphénix), et d'implanter entre Lyon, Grenoble et Genève le premier surgénérateur géant. Ces responsables formulent des assertions n'ayant aucun rapport avec la réalité, telles que: «on notera tout d'abord qu'il est physiquement impossible à un réacteur nucléaire d'exploser comme une bombe atomique» (rapport d'Ornano, novembre 1974), ou «un réacteur nucléaire n'a, en effet rien à voir avec une bombe atomique. Il ne saurait exploser» (l'Energie Nucléaire, Délégation générale à l'information, avril 1975). Ils glissent dans leurs publicités des phrases mensongères: «La centrale atomique utilise un çombustible impropre à une fission explosive» (publicité EDF. Paris-Match, juin 1975).Tout cela est contredit par ces phrases en style télégraphique, qui concernent les surgénérateurs: «Potentiel accidentel d 'excursion nucléaire prompte critique sous l'effet de compaction, libérant de l'énergie mécanique sous forme explosive» (Commissariat à l'Energie Atomique, Bulletin d'Informations Scientifiques et Techniques, n°208, novembre 1975, page 33) et: «Potentiel d'explosions dues à interactions violentes Na - UO2 fondu. Processus peut se coupler avec explosion nucléaire» (idem, page 34).on leur a menti Les populations de la région Lyon - Grenoble - Genève ont-elles été consultées quant à l'implantation de Superphénix à Malville? Ont-elles été simplement informées des problèmes posés par la sécurité de ce réacteur? La réponse est malheureusement négative: elles n'ont pas été consultées, elles n'ont pas été informées et en plus on leur a menti. p.4
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REPONSE HYPOTHETIQUE DU SYTEME NUCLEAIRE «SOUS-OPTIMAL» S’IL POUVAIT CONTINUER A SE DEVELOPPER A SON RYTHME PROPRE. Graphique tiré du «Rapport Poincaré» (disponible aux Amis de la Terre). La courbe 1 traduit les prévisions
du rapport dOrnano, Localisation des centrales nucléaires, tableau
1, p. 9 la contribution du nucléaire est représentée
par la courbe 2 en pointillés.
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