Contrairement à ce qu'affirme la propagande officielle, le développement de l'énergie nucléaire n'est pas la seule issue qui nous soit offerte. Il existe d'autres perspectives - les "énergies nouvelles", dont les deux principales à l'heure actuelle sont la géothermie et l'énergie solaire - qui pourraient assez rapidement devenir opérationnelles, pour peu qu'on leur en donne les moyens. Or ces moyens sont pour le moment dérisoires. Les crédits de recherche ont certes doublé en 1976 par rapport à 1975. Mais ils ne sont encore que de 222 millions, contre 5 milliards pour le CEA. Et, comme l'indique M. Chabbal, directeur du CNRS, c'est l'année 1977 qui sera décisive (document 5). C'est l'énergie solaire qui, grâce à sa plasticité d'utilisation, est la plus riche de promesses. Dans le domaine de la production de chaleur, elle est d'ores et déjà à la limite de la comp?titivit?: les chauffe-eau solaires sont déjà compétitifs, quant aux installations de chauffage des habitations, leur rentabilité dépend maintenant en grande partie de leur diffusion et de l'industrialisation de la production. L'énergie solaire peut également servir à la production d'électricité. Ici, on est encore loin de la compétitivité, mais les chercheurs sont optimistes, comme le montrent les conclusions du colloque sur l'électricité solaire, qui s'est tenu cette année à Toulouse (document 6). La Délégation aux Energies Nouvelles a publié, en mars 1976, une brochure dans laquelle elle expose ses objectifs (document 7). Or ces objectifs sont contradictoires avec la politique de la direction d'EDF, orientée vers le tout-électrique, tout-nucléaire. Aussi y a-t-il lieu de s'étonner quelque peu et de s'inquiéter en examinant la composition du Comité de l'énergie solaire (COMES) créé sous l'égide du Ministère de l'Industrie et de la Recherche pour assister M. Colli, Délégué aux énergies nouvelles, et qui aura par conséquent la haute main sur le développement de l'énergie solaire. Non seulement parce que, comme l'indiquait Dominique Vergu?se dans Le Monde du 3 décembre 1975: "Toutes les personnalités choisies sont déjà membres d'autres comités, ont leurs propres activités et ne consacreront à l'énergie solaire que quelques heures de temps en temps. Ce comité ressemble fort à un alibi que se donne le gouvernement pour assurer qu'il s'intéresse aux énergies nouvelles." Mais il y a plus grave: le COMES compte parmi ses membres trois représentants du CEA - MM. Schneider-Maunoury, Bailly du Bois et Bindel, et le directeur-adjoint des Etudes et Recherches d'EDF, M. Bienvenu. A cela s'ajoute le fait qu'EDF participe actuellement à deux projets expérimentaux: un projet de maisons solaires à Aramon et une centrale thermo-hélio-électrique de moyenne puissance (projet THEM)[1]. Est-ce le meilleur moyen d'assurer la promotion de l'énergie solaire que d'en confier la maîtrise à des représentants d'organismes connus pour leur hostilité à son développement. Et à qui fera-t-on croire que si EDF embrasse son rival, l'énergie solaire, ce n'est pas pour l'étouffer? 1. Avec au total 4,8 ingénieurs-an et 1 agent technique-an (N.D.L.R.) (suite)
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DOCUMENT N°5 1977, année de vérité Ce sera surtout le budget de l'année
prochaine qui sera révélateur des véritables intentions
du gouvernement français concernant le développement de l'énergie
solaire.
Extrait de l'article "1er Colloque mondial sur l'Electricité
Solaire"
(Air et Cosmos n°615 du 13 mars 1976, pp. 31-35) dans lequel Pierre Langereux rend compte du Colloque de Toulouse des 1-5 mars.
p.6
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(Extraits d'Enerpresse, n°1557, du 23 avril 1976
Source: Délégation aux Energies Nouvelles, avril 1976) 1. Dans le domaine des photopiles, l'effort de recherche est actuellement en grande partie centré sur les piles au silicium. D'ici à 1980, les industriels comptent réduire le coût des piles de 100 F à environ 25 F par Watt crête. Les systèmes "photovoltaïques" seront alors compétitifs avec les groupes électrogènes. A l'heure actuelle, il existe déjà un marché non négligeable qui va des micro-générateurs pour montres digitales (1 mW) aux pompes à eau (500 W) en passant par toute la gamme des systèmes de télécommunications pour lesquels les puissances se situent entre 10 et 500 Watts. A plus long terme, les fabricants ne veulent plus exclure qu'on puisse atteindre un prix-plancher d'environ 1 F par Watt. Ainsi s'ouvrirait la voie pour construire des centrales solaires photovoltaïques fournissant le kWh à un coût compétitif avec les centrales actuelles. Les chercheurs américains pensent atteindre cet oblectif entre 1983 et 1985, les responsables français se montraient plus prudents au Colloque de Toulouse. Les efforts de recherche engagés pour réduire le coût des photopiles au silicium suivent plusieurs voies en même temps. Il s'agit de simplifier la métallurgie actuelle du silicium de façon à réduire le prix de la matière première et de développer les procédés de préparation de lames minces de préférence par un procédé continu qui se prête à une production de masse. Sur ce dernier point, notamment le LEP en France a rapporté ses travaux qui, à l'heure actuelle, donnent des résultats encourageants. D'autres types de photopiles sont également pris en considération pour une production à grande échelle et notamment les piles en couches minces au sulfure de cadmium. On s'accorde aujourd'hui à penser que les problèmes de durée de vie observés dans le passé sur ces piles ont pu être surmontés. Les chercheurs américains sont d'ailleurs prêts à reconnaître qu'il s'agit là d'un résultat essentiel qu'on doit à l'effort des équipes du CNES et du CNRS ainsi qu'à la SAT qui travaillent sur ces problèmes depuis une dizaine d'années... 2. La Commission thermodynamique a constitué le deuxième grand volet du Colloque. M. Girardier, de la Sofretes, a présenté les travaux originaux de la France dans le domaine des pompes solaires dans la gamme comprise entre 1 et 150 kW. En haut de la gamme, les pompes fonctionnent à l'électricité produite par 2 turbines qu'alimente un réseau de collecteurs solaires plans. Ces systèmes sont d'une fiabilité exceptionnelle et connaissent un succès considérable en Afrique et en Amérique Latine pour le pompage de l'eau et l'électrification rurale dans des sites très isolés. En ce qui concerne les centrales solaires de 1 à 100 MW, d'importants travaux ont été lancés en France, et par la CEE, aux USA, au Japon et en URSS. D'une façon générale, il apparaît clairement que les efforts financiers sur ce procédé sont sensiblement les mêmes que ceux accordés aux photopiles dans presque tous les pays. Le système de conversion qui a été retenu par tous les protagonistes est la "centrale à touré. Une chaudière est montée au sommet d'une tour d'une centaine de mètres sur laquelle le rayonnement solaire est concentré au moyen d'un champ d'héliostats disposé essentiellement au Nord de la tour. Dans la chaudière, on compte produire de la vapeur à environ 540°C pouvant entraîner une turbine comme dans les centrales classiques. (suite)
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Le CNRS, en association avec EDF et divers industriels a engagé un vaste programme d'optimisation et de développement de centrales solaires, dont un prototype de 70 MW, qui devrait fonctionner d'ici à environ 5 ans[1]. Le Gouvernement français a annoncé à Toulouse qu'il vient de lancer un appel d'offres auprès de l'industrie pour une première centrale d'une puissance de l'ordre de 1 MW. Une première centrale de ce type pourrait fonctionner en France avant 1980. Au cours d'une table ronde improvisée, des spécialistes français et américains notamment, ont trouvé l'occasion de discuter plus en détail les problèmes qui se posent au niveau des divers éléments d'une centrale solaire. On y a constaté généralement un accord sur les points suivants: - la puissance maximale d'une centrale solaire thermodynamique ne pourra dépasser 100 MW; une telle centrale occupera une surface de 1 km2 environ, - les héliostats représentent le problème primordial sur lequel doit porter l'essentiel de l'effort de développement: en effet le coût des héliostats interviendra pour environ 80% du coût total des centrales. Les spécialistes pensent également que le coût du kWh solaire devrait assez rapidement devenir compétitif avec le coût du kWh "conventionnel".
1. Voir note de la Rédaction, ci-dessus. p.7
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en cours de restauration (photocopie dégradée)...
DOCUMENT N°7 Extrait de la brochure de la Délégation aux énergies
nouvelles de mars 76 concernant les objectifs que se fixe cet organisme
Compte tenu de la connaissance actuelle des
ressources nationales, du potentiel technique de l'industrie et du bilan
énergétique prévisionnel, un objectif a pu être
indiqué pour l'utilisation des énergies nouvelles en 1985.
Celles-ci représenteront alors de l'ordre de trois à cinq
millions de tonnes d'équivalent - pétrole, soit environ 4
à 6% des énergies employées aux usages résidentiels
et tertiaires (et 1 à 2% de la consommation énergétique
globale). Pour atteindre ces ordres de grandeur, des opérations
de démonstration se poursuivront activement pendant tout le
VIle et le VIIIe Plan.
(suite)
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En effet, alors que la géothermie atteint d'ores et déjà le stade industriel, les applications de l'énergie solaire en sont encore à leur phase de décollage, et demeureront encore pendant plusieurs années l'objet d'expérimentations. Dans ce domaine, des sauts technologiques peuvent intervenir et accélérer le développement, mais leur échéance est par nature imprévisible. Par ailleurs, le champ d'application potentiel de l'énergie solaire est vaste, puisqu'elle peut fournir, à diverses échelles, des températures variées ou même de l'électricité. Cela explique la difficulté d'une prévision précise. En ce qui concerne les capteurs-plans, en tout cas, le passage (proche) à la production de petite série va entraîner à court terme des économies d'échelle importantes et amorcer la création d'un marché. D'autres opérations de démonstrations, plus ponctuelles, sont envisagées dans ces applications particulières de l'énergie solaire que sont la fermentation méthanique et l'énergie éolienne. L'ensemble des énergies nouvelles ne connaîtra enfin son plein développement, à terme, que si les actions de recherche et de développement ont été menées durant de longues années avec détermination, persévérance et méthode. Dans ce domaine essentiel, l'objectif
est de mettre les capacités scientifique, technologique et industrielle
nationales en mesure de répondre, à l'échéance
de l'an 2000, à la nature et à la dimension des exigences
énergétiques nouvelles.
(Extrait de Science et technologie pour l'énergie, publié par l'O.C.D.E. Paris, 1975, p. 79) Production de matières organiques à partir de la photosynthèse
p.8
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