1. Rapport du groupe de travail sur les recherches
et développements en matière de gestion
des déchets radioactifs
Lors de la séance du 15
novembre 1984 du Conseil Supérieur de Sûreté Nucléaire
(où siège en tant que représentant associatif un membre
du GSIEN), le Professeur Castaing a présenté les conclusions
et principales recommandations du dernier rapport du groupe de travail
qu'il dirige.
Voici in extenso ces conclusions et principales recommandations. CHAPITRE III
Au terme de son examen, le groupe a pu identifier
un ensemble de questions pour lesquelles un effort tout particulier de
R&D lui paraît devoir être consenti. Rappelons tout d'abord
les deux grandes préoccupations qui ont guidé ses travaux:
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- que soient évaluées les incidences économiques de la stratégie complète du retraitement poussé sur le coût du retraitement, des entreposages et des stockages. - que la conception d'une éventuelle usine de taille industrielle succédant à TOR soit menée de façon à permettre les adjonctions ou aménagements nécessaires à la mise en oeuvre d'une telle option, compte tenu de l'intérêt tout particulier du retraitement poussé dans le cas de la filière NR. En ce qui concerne le stockage définitif des combustibles irradiés en l'état, le groupe recommande: - que des solutions techniques pour l'entreposage et l'évacuation définitive soient élaborées et qu'une évaluation économique détaillée soit entreprise. - que la France se dote d'une stratégie globale correspondant au non-retraitement, compte tenu des incertitudes sur les quantités futures de combustibles irradiés qui pourraient pour des raisons diverses ne pas être retraitées. En ce qui concerne le stockage définitif des déchets produits dans les diverses options, le groupe recommande: - qu'aussi bien dans le cadre du retraitement immédiat sans séparation des actinides mineurs que dans celui du non-retraitement, un gros effort soit consenti, dans la ligne des conclusions du paragr. 11.4, pour combler le retard pris en France dans le domaine géologique; le groupe reprend à cet égard toutes les recommandations contenues dans son précédent rapport. - qu 'en particulier l'effort de R&D sur la caractérisation en situation d'enfouissement géologique des verres ainsi que des combustibles irradiés d'une part, des déchets B de retraitement d'autre part, soit intensifié. - que si, comme il est très vraisemblable, à l'issue des étapes a, b, c (chap. II.4, paragr. 2) de sélection et de reconnaissance de sites par des sondages et de façon générale par des mesures effectuées depuis la surface, plusieurs sites apparaissent comme potentiellement favorables, un choix soit proposé aux autorités de sûreté, pour ce qui concerne la poursuite des opérations, entre les deux stratégies ci-avant évoquées à cet égard, à savoir: a) sélection d'un site initial, appuyée éventuellement sur des études complémentaires par sondages, pour l'installation d'un laboratoire souterrain unique où seraient poursuivies les mesures et opérations diverses visant à qualifier ce site pour un stockage définitif, b) poursuite des opérations de reconnaissance par des mesures effectuées par accès et galeries sur plusieurs sites appartenant si possible à des types de formations différents, la sélection d'un ou de plusieurs sites où seraient menées les étapes ultimes de qualification n'intervemant qu'au vu des résultats obtenus dans ces laboratoires souterrains, et que ce choix soit soumis pour avis au Conseil supérieur de la sûreté nucléaire. - que l'éventuelle prise en considération, en France, d'une formation saline pour l'enfouissement de déchets de type B ou C soit précédée d'une étude détaillée des conséquences d'une intrusion humaine dans un site de stockage dont la mémoire n'aurait pas été conservée. Quels que soient les avantages qui, pour un tel milieu de stockage, apparaissent résulter de l'absence d'eau en situation normale, il est nécessaire que les conséquences d'une telle intrusion humaine y soient jugées acceptables; en effet, la probabilité d'une telle intrusion, liée par exemple à l'extraction de sel ou à la réalisation de cavités de stockage de produits divers, ne nous paraît pas - du moins dans le cas de la France -, si elle est cumulée sur de très longues durées, pouvoir être tenue à priori pour négligeable. - que la recherche de sites d'enfouissement soit réalisée en priorité en vue des déchets B; une fois qu'un ou plusieurs sites favorables auront été complètement caractérisés du point de vue géologique, l'enfouissement ne pourra cependant intervenir que s'il a été démontré que les matrices et enrobages des déchets B à enfouir sont compatibles avec le milieu retenu. Dans le cas contraire, ces matrices et enrobages devront être rendus compatibles avec ce ou ces milieux. p.3
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- que pour les déchets
C la recherche de sites potentiellement favorables soit entreprise dès
maintenant, en vue de permettre l'étude et la qualification des
barrières ouvragées les plus appropriées aux roches
hôtes potentielles; cependant, du fait de leur émission thermique,
l'enfouissement des déchets C ne pourra intervenir avant une cinquantaine
d'années, laissant ainsi le temps soit d'atteindre une meilleure
connaissance des milieux, des barrières et donc de la sûrete,
soit de proposer des modes de gestion differents ne faisant pas appel à
l'enfouissement en profondeur.
- qu'un groupe de réflexion pluridisciplinaire, faisant intervenir notamment des géologues, des chimistes, des spécialistes de radioprotection, des hygiénistes, des sociologues, des spécialistes de la protection civile, de l'environnement, propose des critères de choix de sites de stockage profond et que les autorités de sûreté, prenant en compte ces critères, arrêtent une règle fondamentale de sûreté applicable à l'enfouissement en formation géologique. - qu'une commission consultative analogue au comité technique permanent des barrages par exemple, et constituée essentiellement de géologues, géotechniciens, mineurs et spécialistes de la sûreté, mais indépendants des opérateurs, soit appelée à donner un avis motivé sur les choix qui seront proposés aux pouvoirs publics à chaque étape du processus de décision, allant de la sélection des sites à la réalisation des stockages, par l'organisme responsable de la gestion des déchets, en l'occurrence le CEA. En tout état de cause, le groupe tient
à préciser que la large part qu'il a réservée
dans le présent rapport aux recherches concernant le stockage définitif
des déchets du type actuel ne doit pas faire oublier l'importance
qu'il attache à la recherche de procédés de retraitement
permettant de réduire de façon très significative
la radiotoxicité potentielle à long terme des stockages,
et par là même les incertitudes quant aux risques lointains.
Il rappelle que la majorité de ses membres considère le retraitement
poussé comme la solution intrinsèquement la plus satisfaisante
du problème de la fin du cycle électronucléaire.
Le Président du Groupe de Travail R. CASTAING Il est vrai que le rapport (et sa conclusion) énonce quelques vérités bien senties ainsi que des remarques de bon sens qui ne sont pas du tout dans la ligne que cherche à imposer le CEA. (suite)
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Citons: -- la décontamination la plus poussée possible en émetteurs alpha va s'avérer indispensable pour les combustibles mixtes {U/Pu) ; -- prévoir l'éventualité d'un entreposage et d'un stockage de combustibles en l'état sans retraitement. -- le choix du site pour le laboratoire souterrain devait être soumis pour avis au Conseil de Sûreté. -- les critères de choix de sites de stockage profond doivent être définis par un groupe de réflexion pluridisciplinaire et non uniquement par les technocrates de l'Industrie et ceux du CEA. -- une commission consultative de spécialistes indépendants des opérateurs (le CEA) devrait donner un avis sur les choix proposés aux pouvoirs publics par le CEA. Tout cela est iconoclaste et a provoqué la colère de nos têtes pensantes. «... Il faut que les responsabilités soient bien définies... Pas question d'être contrôlé par des rigolos qui n'appartiennent pas au clan. Tous les gens compétents en la matière sont déjà chez nous. Il existe déjà des groupes pluridisciplinaires comme les groupes permanents, la CIINB (Commission Interministérielle des Installations Nucléaires de Base), pourquoi en faire de nouveaux? Parler de non-retraitement, c'est décrédibiliser la technique française...», etc. Après un débat confus et une procédure de vote que n'aurait pas désavouée la IVe République, le Conseil a voté un avis qui a prouvé le bien-fondé de sa composition. «Le Conseil a estimé que les recommandations y figurant (dans le rapport) doivent être prises en compte...» et refuse la formulation: «Le Conseil a fait siennes l'ensemble des recommandations de ce rapport qui doivent être prises en compte». Ce qui, en termes clairs signifie, votre rapport vous pouvez en faire des confettis. C'est donc la mise à mort du groupe Castaing qui, comme nous vous l'avons déjà conté, fut constitué à un moment où la technocratie craignait une purge salutaire que le PS n'a pas osé faire à l'été 1981. Tous ceux qui. comme nous, espéraient que le travail de ce groupe aiderait à une gestion démocratique et scientifique des problèmes des déchets radioactifs, ont perdu. Nous avons toujours affirmé que le stockage des déchets ne pourrait se faire dans des conditions acceptables pour la population et les travailleurs que si on mettait en oeuvre les recommandations issues d'une analyse indépendante du lobby nucléaire (ce qui ne veut pas dire que pour faire cette analyse on ne doive pas entendre les membres du lobby et même tenir compte de certaines de leurs remarques). Encore une fois tous les pouvoirs vont être concentrés dans les mains d'un même groupe technocratique. Il faut donc une mobilisation sur les sites en cours de prospection pour obtenir de véritables engagements - des engagements écrits-. Sinon, on peut craindre le laxisme habituel dont le site de la Manche (La Hague) est un triste exemple. Où sont les études hydrogéologiques, qui les a contrôlées, les rapports et leur analyse ont-ils été communiqués au public, ou, au minimum, à la commission d'information de La Hague? Parmi les gens les plus compétents, tout le monde sait que le site du centre de de stockage de La Hague, aujourd'hui, n'aurait pas pu être qualifié. Sa seule vertu était d'être à côté d'une usine de retraitement que le CEA construisait en douce en faisant croire aux gens du pays qu'il s'agissait d'une usine de fabrication de matériel électrique (Cf. « Condamné à réussir»). Le problème des déchets radioactifs est un point crucial pour le cycle de l'énergie nucléaire. La façon dont il sera réglé est essentielle et servira d'exemple pour la gestion de tous les déchets de notre civilisation industrielle. Car si les déchets radioactifs, de par leur nature s'auto-détruisent dans le temps, il n'en est pas de même pour certains polluants chimiques d'une stabilité aussi remarquable que leur toxicité (souvenez-vous aux USA de Love Canal et de la dioxine, du mercure de Minamata...). L'industrie nucléaire est une industrie jeune; on pouvait penser que pour elle on construirait des structures nouvelles qui la mettraient à l'abri du laxisme et des errements historiques de l'industrie chimique. On pouvait aussi croire que l'expérience malheureuse des transferts de polluants dans l'environnement serait prise en compte. On pouvait enfin espérer que ces nouvelles structures serviraient d'exemple pour restaurer tout le vieil édifice industriel. Il n'en est rien. Le transfert se fait dans l'autre sens; on tente d'aligner les normes de l'industrie nucléaire sur le laisser-aller hérité d'un siècle de tâtonnements. rité d'un siècle de tâtonnements. p.4
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Dans la Gazette Nucléaire
n° 61 de juillet-août 1984, nous avions conté comment
le Ministre délégué à l'Energie de l'époque,
M. Auroux, avait honoré de sa présence la réunion
du Conseil Supérieur de Sûreté Nucléaire du
19 juin
1984. Dans un discours de juin 84, Auroux décrivant la nouvelle règle fondamentale de sûreté relative aux centres de stockage en surface, précise les critères d'acceptation des colis: «l'activité en éléments radioactifs émetteurs alpha d'un colis accueilli dans un centre de surface ne devra pas...» Dans la règle fondamentale de sûreté, nos technocrates ont écrit: «l'activité massique moyenne en émetteur alpha de chaque colis de déchets (en prenant toujours la valeur qui sera obtenue à l'issue de la phase de surveillance).. Donc pour les mêmes valeurs réglementaires, pour Auroux, c'est à la livraison du colis, pour le SCSIN c'est après 30 ans de décroissance. Cela permet d'en mettre un peu plus, en tenant compte de la décroissance. Mais pour des émetteurs de très longue période, c'est vraiment très peu. Bande de gagne-petit!!! A cette occasion il nous avait décrit les grandes phases de la mise en oeuvre des futurs sites de stockage de surface de déchets nucléaires (catégorie A: faible activité, contamination alpha inférieure à 0,01 curie par tonne) et du laboratoire souterrain destiné à tester les qualités du milieu pour le stockage des déchets des catégories B et C (moyenne et haute activité contaminés alpha). La suite fut le communiqué de presse du Secrétariat d 'fEtat à l'Energie du 21 septembre 1984 (voir encadré à droite) où nous apprenions, avec la joie que vous devinez les noms des trois départements choisis pour les sites de surface. A ce moment-là tout alla très vite. L'ANDRA, aidé par les préfets organisa des réunions avec les élus locaux, mit en place un permanent chargé de diffuser la bonne parole. Après ce blitz, les populations commencèrent à réagir et la guerre de tranchées s'installa dans nos campagnes. (suite)
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CHOIX DES CENTRES DE STOCKAGE DE DÉCHETS NUCLÉAIRES
p.5
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Pourtant. tout est évident,
hien connu. Comme dit l'ANDRA «nous avons quinze ans d'expérience
à La Hague». Alors, chers notables, quand vous visiterez ce
centre, posez quelques questions innocentes. Par exemple: comment se fait-il
que le stockage ait été si mal organisé par Infratome,
premier gestionnaire privé; qu'il a fallu tout reprendre (et ce
n'est pas fini). Au bout de combien de temps décidera-t-on qu 'il
faut tout reprendre sur votre site parce qu'on se sera rendu compte que
cela ne va pas ?
Et ce pauvre ruisseau St -Hélène qui sort de l'usine de retraitement au nord, s'il est contaminé en tritium, au point que c'est même indiqué dans les mesures du SCPRI. c'est à cause des fuites du centre de stockage. Si je ne m'abuse, il y a un tumulus qui s'est effondré il y a quelques mois. Mais tout celà, ce sont des médisances. Et puis, regardez les conditions de travail des gars* qui sont affectés à la presse compactant certains fûts métalliques, ce n'est pas très reluisant. Vous aurez peut être droit à une presse neuve, vous sur votre site. Ce qui nous laisse rêveur c'est de penser que lorsque le site sera plein dans 10 ou 20 ans, on continuera à payer des gens pour surveiller, faire des mesures de contamination de l'environnement, faire fonctionner les installations de reprise des drains et promis juré, lorsque cela finira, on cherchera la zone fuyarde pour intervenir - si c'est dans 200 ans, à la petite cuillère (!), et cela pendant environ trois siècles. Remarquez on pourrait aussi vous faire visiter la zone de stockage sur le site du Centre d'Etudes Nucléaires de Saclay où. il y a quelques années, on pouvait admirer des fûts de béton joyeusement fissurés, à moins que vous ne soyez admis à vous rendre auprès des silos en tranchées bétonnées de Cadarache et de Marcoule. Si vous êtes sages, vous pourrez même admirer les hangars de stockage des centres du CEA dépendant de la Direction des applications militaires de Valduc (Moloy en Côte d'Or) ou de Bruyères-le-Chatel (Essonnes)** Mais comment et sur quelles bases techniques furent choisies les régions prospectées? Techniquement. ce qui est recherché, ce sont les structures sous forme d'une couche de sable sur un dôme d'argile. Il paraît que c'est une structure très fréquente qui se trouve en de nombreuses régions de l'hexagone. Alors pourquoi trois régions et pourquoi celles là? On pouvait penser qu'on allait ratisser large, établir des dossiers techniques, socio-économiques et pondérer pour le choix. donc qu'il fallait plusieurs régions. Surtout qu'il a toujours été dit que l'ANDRA souhaitait un site au nord de la Loire, un autre au sud. Auroux qui avait un peu d'expérience du secteur énergie de l'Industrie, avait convoqué 17 préfets pour faire le point de la question avec eux. * Lors d'une visite, l'ancien directeur de l'ANDRA nous avait dit qu'il y avait rotation du personnel sur ce poste, pour répartir les doses d'irradiation. ** Voir pour plus de précision «Le Dossier Electronucléaire». Coll. Sciences, éd. du Seuil. (suite)
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Malvy, jeune débutant débarquant dans la galère, pris de court, a dû utiliser une des techniques de décision qui semble en usage à l'Industrie, lorsque le corps des Mines laisse la liberté de choix au Ministre, le jeu de fléchettes. La carte de France de l'almanach des PTT à deux mètres et hop, c'est décidé. En fait. en raison des restrictions budgétaires, il ne devait y avoir que deux fléchettes, car si je ne m'abuse, le département de l'Indre a bénéficié du piston de son député PS. Ne soyez pas jaloux, il y a quelques années, pour la centrale de Civaux les Poitevins eurent droit à l'entregent de Monory. Le coup d'envoi est donné: l'Indre, la Vienne et l'Aube sont les heureux préprospectés. On va faire un tour de département. L'INDRE
p.6
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Ce texte est en particulier paru dans La
Nouvelle République du Centre Ouest le 6-7 octobre 1984
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Je pense que des informations très sérieuses nous seront données avant que nous nous engagions». L'ANDRA a donc organisé des réunions à Neuvy-StSépulchre, Berthenoux et Lignac. Le résultat tient en un titre de la Nouvelle République: «Information sur les déchets radioactifs: une conclusion qui s'avère négative pour les responsables de l'ANDRA». Pourquoi ce relatif échec? Un commentaire nous met sur la voie: «On n'est pas capables de détruire nos ordures ménagères et il faudrait qu'on prenne en charge les déchets nucléaires». Voici crûment résumé par la Nouvelle République l'opinion des habitants de Belabre au moment même des réunions de l'ANDRA. Un détail a irrité également les populations, les réunions dans les communes étaient exclusivement réservées aux habitants de ladite commune, en contradiction avec les déclarations de consultation de toutes les communes concernées. La plupart des réponses de l'ANDRA ont d'ailleurs été confirmées le 16 octobre au Conseil Général par M. Laignel, son président. Par contre, il a affirmé: «Il n'y aura pas implantation si la commune concernée n'est pas d'accord». Rappelons que le 24 septembre, il avait déclaré: ï «se battre plutôt pour la réalisation du projet... parce qu'un tel centre aura des retombées financières énormes et tout à fait bénéfiques... ». Bon, sa position s'est quelque peu modifiée. Acceptons-en l'augure mais ne rêvons pas trop, bien que M. le préfet ait déclaré: ï «Vous savez, certaines communes ont rejeté les centrales nucléaires». A notre connaissanoe, à part Plogoff et le Pellerin les constructions se sont faites. Et même dans ce cas, si le site de Plogoff est vraiment abandonné, un autre site est recherché en Bretagne. Quant au site du Pellerin, il s'est déplacé jusqu'au Carnet sur l'estuaire de la Loire. A partir de ce moment les différentes communes entreprennent de se concerter et le premier vote négatif intervient le 17 octobre à Tranzault, épicentre du canton de Neuvy. «Vote contre toute implantation et toute enquête». Comme apparemment les événements ne se déroulent pas comme le voudrait l'ANDRA, c'est à cette date que les journalistes qui couvraient l'enquête pour les journaux locaux, semblent partir en vacances. Ils sont remplacés par d'éminents pigistes tel l'irremplaçable Le Prince Ringuet qui (il se répète) nous conte une fois de plus ses déboires radioactifs conjugaux. ï « Nous sommes tous radioactifs tout simplement parce qu'il y a du potassium dans votre corps, votre femme est radioactive, vous êtes radioactif. Et cela crépiterait dur si le soir dans votre lit, vous mettiez un compteur Geiger... ». Tel aussi que le Directeur de la Nouvelle République lui-même. Le collectif ne peut plus rien faire passer dans la presse. Et que croyez-vous qu'il advint. Quand on fait fi de la démocratie, on voit fleurir les comités de défense, naître les pétitions, apparaître les inscriptions vengeresses du type «Non aux poubelles nucléaires». Panique à bord! Mais les têtes-pensantes de l'ANDRA se sont alors directement souvenu de l'enquête comrnandée à la SOFRES en 1975 par le grand frère CEA sur le thème «Les Français et l'industrie nucléaire». p.7
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Les résultats de cette enquête avaient
été présentés lors d'un colloque sur les Implication
Psychosociologiques du développement de l'industrie nucléaire
(organisé par la Société Française de Radioprotection
et l'INSERN en janvier 1977). Nous vous offrons une fois de plus (voir
Gazette
20) en prime une citation de la dernière page des comptes rendus:
«Il faut que nous recherchions l'efficacité dans l'information du public au lieu de nous contenter d'une information éthérée parfaitement satisfaisante mais inintelligible ou inefficace. Au début de la dernière guerre, il y avait en France un ministre de l'Information qui s'appelait M. Giraudoux et en Allemagne un ministre de l'information qui s'appelait M. Goebbels. Sans aucun doute Jean Giraudoux était beaucoup plus intelligent, beaucoup plus subtil que M. Goebbels, et l'écouter était un délice, mais je crains que M. Giraudoux n'ait jamais fait changer d'opinion à une seule personne, alors que l'efficacité de M. Goebbels était redoutable» Professeur TUBIANA
Forte de ces enseignements, !'ANDRA a continué
les réunions en présence d'un psychologue. Espérons
qu'il ne suggèrera jamais de revenir aux méthodes du Dr Goebbels
tristement célèbre par ailleurs, contrairement à ce
que suggère la phrase plus que maladroite du Professeur Tubiana
lors des conclusions du colloque.
p. 532 (I977) Les conseils du psychologue ne semblent pas de toute façon avoir été très judicieux car les communiqués du genre «cette réunion est exclusivement réservée aux habitants de la commune de...» n'ont pas du tout amélioré le climat. Voici d'ailleurs un tract émanant d'un des comités de lutte:
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Retour de balancier, depuis le 2 novembre la
Nouvelle
République est un peu plus attentive au Comité de Défense.
p.8
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Dernière nouvelle: le 15 novembre, Madame
la Ministre Huguette Bourchardeau a reçu le collectif de Chateauroux.
Elle a répondu à différentes questions, dont principalement
:
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- Y aura-t-il une commission de contrôle locale? Le collectif a aussi demandé quel budget est consacré aux énergies nouvelles, quelle est la position vis-à-vis du retraitement? Huguette Bouchardeau a refusé de répondre. 1. qu'elle allait interpeller Malvy, Secrétaire d 'Etat à l'Energie et le Premier Ministre sur ce problème de choix des sites; 2. que les décrets de la loi de 83 sortiraient début 85 ; 3. que la procédure commission locale devait être mise en place; 4. que le Haut Comité à l'Environnement allait être saisi des problèmes relatifs au Centre de stockage des déchets. L'entretien a duré environ une heure, si ce n'est avec la Ministre, avec ses conseillers. Souhaitons que tout aille pour le mieux, mais l'affaire est à suivre: l'Indre aura-t-elle son débat, sa commission... Et pour vous rassurer, voici un échange probable du déroulement des enquêtes: Voici retranscrit sous forme d'un beau diagramme
l'échéancier de Auroux. Comme vous pouvez le constater, la
procédure d'enquête publique commence seulement après
le choix définitif des 2 sites.
p.9
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LA VIENNE
Centrale de Civaux. Voici l'une des premières prises de position:
Le processus d'information a suivi les mêmes
dédales que dans l'Indre, avec en plus pour certains, la crainte
de voir substituer aux réacteurs de Civaux. un site de stockage.
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En fait, l'information locale au niveau de la commune n'a pratiquement pas débuté. Le CEA dit se garder ce département en réserve. Une réserve de Poitevins, on aura tout vu. Sur la carte, voici en gros la zone qui sera protégée le secteur de Montmorillon. la Tramouille. Dans ce secteur il y a un camp militaire et une propriété de l'Académie des Sciences - On prend les paris? Pour tout arranger, le 4 octobre les habitants de Lathus ont appris l'octroi d'un permis exclusif de recherche d'uranium accordé à la Compagnie Total - compagnie minière - La conclusion du journaliste de la Nouvelle Republique est pleine d'humour : «Ainsi, par un curieux revers de la Nature, les terres considérées comme les plus pauvres pour l'agriculture. pourraient se revéler un jour les plus riches en minerais. Ce permis de recherches n'a évidemment rien à voir avec le projet de centre de stockage de déchets radioactifs bien qu'il se situe dans le même secteur géographique Mais on ne peut s'empêcher de faire le rapprochement et d'observer que si tous les projets devaient aboutir, il ne manquerait à la Vienne qu'une usine de retraitement pour concentrer toutes les étapes de la «fïlière nucléaire: mine d'uranium, centrale nucléaire, stockage de déchets». L'AUBE C'est dans l'Aube que les premières réunions d'information Préfet / ANDRA-élus eurent lieu. Ce département à la «joie» d'avoir ses réacteurs de Nogent. Alors, l'expérience aidant et sachant n'avoir rien à attendre d'une quelconqe concertation, il ne s'y passe rien de spécial - du moins à notre connaissance- et nous souhaitons pouvoir publier toute information que vous auriez. CONCLUSIONS En plus des départements choisis, il
y a, pour le moment, deux candidatures libres:
p.10
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Règle fondamentale de Sûreté
Extrait de l'article IV-2 ... «L'acceptation des colis correspondant à la tranche comprise entre 0.1 et 0,5 Ci alpha par tonne aura un caractère exceptionnel et devra faire l'objet d'un agrément spécifique de la part de l'exploitant au centre de stockage (voir commentaire en VI.2)» Extrait du commentaire VI-2 ... «Sans préjudice du résultat
de ces études (transfert à l'environnement des radioéléments),
la règle (lV-2) indique a priori les bornes de 0.01 Ci alpha par
tonne en moyenne pour le stockage et de 0,1 Ci alpha par tonne maximum
par colis en règle générale, tout en acceptant que
sur la base d'agrément au cas par cas puissent être acceptés
des déchets d'activité massique d'alpha supérieure
à cette valeur mais toujours inférieure à 0,5 Ci par
tonne».
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... «Aussi est-il apparu raisonnable
de limiter en règle générale à dix fois l'activité
moyenne la teneur limite par colis, soit 0,1 Ci alpha par tonne, en demandant,
pour préserver la validité des scénarios considérés,
que la constitution du stockage soit faite en répartissant les divers
déchets de façon à ce qu'il n'y ait pas de parties
significativement importantes du stockage qui soient susceptibles de dépasser
sensiblement la limite moyenne de 0,01 Ci alpha par tonne (IV-7-1) pour
les déchets solides»...
Ces extraits de la règle fondamentale sont significativement clairs. Certes, c'est mieux que pas de règle du tout, mais c'est un paravent commode où on tourne en rond dans les dérogations, et où avec plein d'adverbes prudents on peut faire, pas n'importe quoi, mais trop facilement des dépassements de concentration. Notre confiance déjà limitée dans les notes, l'est encore plus quand a priori le texte est dérogatoire. On a trop souvent l'habitude de ne se souvenir que de la dérogation et pas du reste. Si c'est une dérogation pour quelques cas particuliers, il convenait d'être nettement plus explicite sur lesdits cas. Laisser à l'exploitant le soin d'accorder l'agrément n'est pas du tout contraignant et en plus lui donne trop d'importance. La confusion des genres est toujours présente: les inspecteurs et les inspectés sont encore trop intriqués. La lecture de cette règle est d'ailleurs assez édifiante; sur 23 pages il y a 8 pages d'explications; ou bien ces explications sont indispensables et alors elles faisaient partie du texte, ou bien la règle est si obscure qu'il faut en plus l'expliquer. Comme il s'agit d'y justifier des dérogations, gageons que l'on oubliera les premières pages pour se souvenir des dernières. |