En 1962, le Commissariat
à l'Energie Atomique décida de construire EL4, un réacteur
prototype à uranium naturel-eau lourde-gaz sur le site de Brennilis
dans les Monts d'Arrée. EL4 a divergé le 23 décembre
1966. En 1973, la filière à eau légère sous
pression ayant été adoptée pour le programme électronucléaire
français, EL4 ne servit plus qu'à la production d'électricité
avec une puissance faible (70 Mégawatts).
On apprend maintenant que cette centrale a toujours été très polluante. D'après le chef du Service Central de Protection contre les Rayonnements Ionisants (SCPRI), le Prof. Pierre Pellerin, «elle rejetait beaucoup trop de gaz radioactifs par rapport à sa faible production. Cette centrale était carrément hors normes» (témoignage rapporté dans Libération le 11 août 1987). Il faut signaler que Monsieur Pellerin n'a pas l'habitude d'exagérer la pollution radioactive des centres nucléaires. Si l'on croit les propos recueillis par divers journalistes dans la région, il me semble que la population ait été prévenue de ces fuites radioactives. Brennilis a démarré avant que les diverses procédures d'autorisations liées aux installations nucléaires de base aient été mises en place. Il n'y avait donc aucune autorisation de rejets radioactifs qui imposait des limites. Le Prof. Pierre Pellerin ne semble pas avoir fait quelque tentative que ce soit pour normaliser une situation que maintenant il trouve anormale. EL4 a été définitivement arrêtée le 31 juillet 1985. En 1986, son périmètre a été officiellement modifié. Les Salaisons de l'Arrée se sont installées sur le terrain ainsi libéré dans le voisinage immédiat du réacteur. La référence à Brennilis améliorerait-elle l'image de marque de la charcuterie bretonne? Le déclassement (ou démantèlement) de EL4 est une première pour la France et cela pose quelques problèmes. 1. Aspects réglementaires du déclassement
des installations nucléaires de base
... «La réglementation nucléaire française est fondée sur le décret du 11 décembre 1963, modifié par le décret du 27 mars 1973; elle subordonne la création ou la transformation d'une installation nucléaire de base à une autorisation délivrée par un décret signé du Premier ministre. (suite)
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Cette autorisation n'est accordée qu'après une évaluation technique de la sûreté des dispositions prévues par l'exploitant, sur la base de l'examen d'un rapport de sûreté décrivant les travaux à effectuer et montrant que les précautions prévues seront suffisantes pour éviter de faire courir des risques notables au personnel ou à l'environnement.Le déclassement d'un réacteur change la nature des risques et la finalité de l'installation; administrativement, elle doit donner lieu à une nouvelle autorisation de création qui, obligatoirement, dans ce cas, doit être précédée d'une enquête publique locale. Jusqu'à présent, une telle procédure n'a pas été engagée. 2. Les travaux en cours à Brennilis concernent-ils
un déclassement ou simplement un arrêt définitif ?
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c) Le personnel gardé sur
place est important (environ 60% du personnel initial). Il est envisagé
pour ce personnel des travaux de surveillance, voire de sûreté
radiologique.
d) Certains incidents rapportés par le «Bulletin sur la Sûreté des Installations Nucléaires (SN)» du Ministère de l'Industrie, montre bien qu'il s'agit de travaux différents d'une simple mise à l'arrêt définitif. Il est rappelé que cette centrale est à l'arrêt définitif depuis le 31 juillet 1985. Le déchargement des éléments combustibles irradiés du réacteur se poursuit.Ces incidents ne semblent pas concerner un simple déchargement de combustible puisqu'il s'agit pour l'un deux du déplacement d'un élément de protection biologique. Ces incidents ont été suffisamment sérieux pour justifier un arrêt des travaux pendant un mois environ suite à une intervention du Service Central de Sûreté des Installations Nucléaires. 3. Les rejets de Tritium
dans l'environnement
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En ce qui concerne les rejets liquides dans la rivière Ellez, les Bulletins mensuels du SCPRI en 1986 et 1987 donnent les valeurs suivantes: novembre 1986: 460 Bq/l décembre 1986: 780 Bq/l février 1987: 810 Bq/l mars 1987: 820 Bq/l novembre 1987: 710 Bq/l En 1985 avant l'arrêt définitif de juillet 1985, les valeurs relevées dans les bulletins du SCPRI sont généralement inférieures à 15 Bq/l. Les autorisations de rejets liquides de Tritium pour les centrales de forte puissance imposent des concentrations maximales de 80 Bq/l. La centrale de Brennilis ayant été mise en place avant que soient établies les procédures d'autorisation, n'était soumise à aucune réglementation et ne relevait pas de ces procédures. L'activité anormalement élevée en Tritium qui a été mesurée représente-t-elle la concentration maximum en Tritium? Il n'est pas possible d'y répondre car une seule mesure (en début de mois) est rapportée pour chaque mois. Cette activité élevée n'est pas explicable par une simple opération du déchargement du combustible. Les opérations effectuées à Brennilis, tant par la nature des travaux effectués que par l'importance des rejets liquides, concernent un véritable déclassement dans sa phase initiale. La procédure administrative aurait dû imposer une demande de création d'une nouvelle installation nucléaire de base pour le site de Brennilis avec obligatoirement une enquête publique préalable. 4. Intervention des Associations Centre d'Information sur l'Energie et L'Environnement Rennes, le 29.6.88
à Mr le Préfet du Finistère, Commissaire de la République Monsieur le Préfet,
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Depuis l'accident nucléaire
de Tchernobyl, le CIELE a entrepris un suivi des mesures de radioactivité
effectuées en Bretagne par les services officiels ou les laboratoires
indépendants. A de nombreuses occasions, nous avons pu consulter,
à la Préfecture de Région, les tableaux mensuels de
mesures publiés par le SCPRI et apprécier la complète
collaboration du service de Protection Civile de la préfecture de
Rennes.
De ces mesures offiçielles effectuées sur 23 mois, nous avons extrait les résultats concernant la radioactivité en Tritium des eaux de surface et souterraines de la centrale de Brennilis (retenue et rivière Ellez>. Les principaux résultats concernant l'Ellez sont présentés sur les figures jointes. Il apparaît que sur 23 séries de mesures effectuées de mai 1986 à mars 1988 que: 1986-1987 Radioactivité de l'Ellez à BRENNILIS 1987-1988 - 13 montrent un taux de radioactivité
en Tritium très faible;
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Le démantèlement de la centrale nucléaire de Brennilis constitue une des premières opérations de ce type en France, comme vous, nous pensons que cette «première» doit se faire dans des conditions irréprochables et dans la transparence. Dans l'attente d'une réponse aussi complète que possible, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Préfet, l'assurance de notre haute considération. pour le C.I.E.L.E. D. BERNARD
membre du G.S.I.E.N. Groupe de Scientifiques pour l'Information sur l'Energie Nucléaire Pièces jointes:
Annexe à la lettre
La centrale électronucléaire
des Monts d'Arrée est une installation nucléaire de base
qui a fait l'objet d'une déclaration le 27 mai 1964 en application
des dispositions de l'artide 14 du décret n°63-1228 du 11 décembre
1963 relatif aux installations nucléaires (J.O. du 14.12.1963).
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