L'élaboration du Livre
Blanc de la Défense et celle de la nouvelle loi de Programmation
Militaire interviennent à un moment charnière de l'histoire
du monde.
Quatre ans après la chute du mur de Berlin, deux ans après la Guerre du Golfe, en pleine guerre en ex-Yougoslavie, la «nouvelle sécurité commune» est en train de naître dans les douleurs de l'enfantement. L'ONU se voit confier des missions de plus en plus nombreuses. Les armées nationales et les blocs militaires, modelés par la Guerre Froide, s'interrogent sur leur existence et réfléchissent à des missions nouvelles. Le Libre Blanc de la Défense devrait, à notre sens, développer sa réflexion selon quatre axes principaux: la bombe atomique, les structures et les moyens d'une sécurité commune, les nouvelles missions de l'armée et la reconversion des activités et productions militaires. 1. L'arme atomique
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Les atteintes à l'environnement sont par ailleurs bien connues pour l'ancienne URSS: Tchéliabinsk, Nouvelle Zemble et Mer Blanche, Semipalatinsk et tant d'autres sites. Les Britanniques, en ce qui les concerne, viennent d'accorder en juin 1993 des réparations substantielles à l'Australie pour les essais effectués dans les années 50 et 60 dans le désert de Maralinga. Des centaines de kilomètres carrés de désert, contaminés par du plutonium et autres isotopes à longue durée de vie, doivent être enclos définitivement. La France quant à elle, doit enfin publier les données, collectées par l'armée et le CEA au Sahara et en Polynésie, sur l'état de santé des populations et des personnels civils et militaires (militaires de carrière et appelés, scientifiques et techniciens), engagés dans les essais nucléaires, ainsi que sur l'état de l'environnement. Des études pluridisciplinaires indépendantes doivent évaluer la situation actuelle dans le Sahara, où du Césium 137 a été retrouvé dans des plants: y a-t-il des zones contaminées, de quelle superficie, des puits et pâturages à interdire, des populations (sédentaires et nomades) dont la santé est atteinte ou menacée et quelles sont les mesures à prendre: isolement temporaire ou définitif, décontamination, réparations, etc. Il serait en effet très surprenant que la situation au Sahara soit très différente de celle qui existe à Maralinga (approximativement même époque pour les essais et donc technologie apparentée, même nombre d'essais, même milieu). Des études et réparations similaires sont réclamées depuis des décennies par les autorités, les Eglises et les populations polynésiennes. ï Abandon de l'arme atomique En mai 1993, l'Assemblée Mondiale de la Santé a sollicité, par 73 voix contre 40, avec 10 abstentions, un avis de la Cour Internationale de Justice de La Haye, sur la légalité de l'utilisation de l'arme atomique. Le délai de consultation fixé par la Cour, avant de déposer son jugement, s'achève le 24 juin 1994. Cet automne, l'Assemblée Générale des Nations-Unies est saisie d'une résolution visant à solliciter l'avis de la Cour Internationale sur l'utilisation et la menace d'utilisation (autrement dit sur la dissuasion). Un rapport très documenté, élaboré par des juristes internationaux, établit en effet que l'arme atomique, instrument d'extermination de masse, viole une vingtaine de Traités et Conventions Internationales (pratiquement tout le corps international du «Droit de la Guerre»), signés par les puissances nucléaires, y compris la France. Les plus importants sont les Conventions de Genève sur la protection des populations civiles (blessés, vieillards, enfants), l'infliction de souffrances inutiles et à long terme, la protection des milieux aquatiques, de l'air, des sols, la condamnation du génocide, l'infliction de dommages à des pays neutres, et autres. L'opinion française et internationale estime, de plus en plus majoritairement, qu'asseoir sa défense sur des moyens d'extermination de masse est indigne de nations «civilisées». De même que c'est l'argument légal, invoqué par les abolitionnistes, qui a eu raison, au siècle dernier, de l'esclavage, il est probable que c'est la loi internationale qui va, dans un proche avenir, conduire à l'abolition des armes atomiques. La France, pays des Droits de l'Homme, ne peut être indifférente à ce combat. Que feront les militaires? En effet, le code Messmer, établi suite aux tortures en Algérie, et à l'insurrection des généraux, leur interdit d'obéir à des ordres illégaux. p.30
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Le Livre Blanc de la Défense
français doit sans attendre, prendre en compte les arguments légaux
présentés et anticiper sur une condarnnation très
probable, par la Cour Internationale, de l'armement atomique, ces moyens
d'extermination de masse étant, par ailleurs, totalement incompatible,
selon nous, avec l'«honneur militaire».
2. La Sécurité Commune
3. Armée ou institution civile d'intérêt
public?
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Il est par ailleurs apparu clairement que l'interposition et la médiation, le désarmement des milices et des franc-tireurs, exigeaient une formation très spécialisée et originale. Des séminaires se tiennent actuellement dans beaucoup de pays et aux Nations-Unies sur ce thème tout à fait inédit. La formation à la défense civile non-violente, réclamée depuis de nombreuses années par les mouvements non-violents et les objecteurs, serait une contribution très utile à cette formation de type nouveau. Le Livre Blanc de la Défense ne peut faire l'économie de cette problématique. ï Vers un service civil national et international: Pourquoi le rétablissement de l'ordre en cas de troubles internationaux d'origine sociales, ethniques, économiques, de guerre civile, ne pourrait-il être confié à une police internationale, formée à l'interposition, la médiation et la non-violence, avec mise à disposition de contingents non militaires, fournis par les pays membres de l'ONU ou de la CSCE, sans passer parl'armée? Le rétablissement de l'ordre passe par ailleurs par des missions strictement civiles: services de santé, services sociaux, observateurs des élections, rétablissement des transmissions, des ponts et routes par le génie civil, enseignement, pompiers et aide en cas de catastrophes naturelles ou industrielles. Ces missions pourraient être effectuées par des professionnels, non militaires, engagés dans un service international d'utilité publique. Médecins du Monde, Médecins sans Frontières ainsi que les missions de coopération ont déjà une expérience très précieuse dans ce domaine. Un tel service serait ouvert à parité aux femmes et jeunes filles, comme le sont déjà les missions du CICR (Comité International de la Croix Rouge) et du HCR (Haut Commissariat aux Réfugiés). Cette formation serait par ailleurs très utile en cas de problèmes intérieurs: inondations, tremblements de terre, réhabilitation de banlieues et autres missions d'utilité publique. Au lieu de prévoir 103 milliards pour son budget militaire en 1994, la France pourrait allouer une grande partie de cette somme à la mise sur pieds de ce service civil d'intérêt public. 4. La reconversion des activités militaires
et de l'industrie d'armement
p.31
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Le Libre Blanc de la Défense
doit, à notre sens, faire une place correspondante à l'importance
économique qu'il revet, au problème de la reconversion de
l'industrie d'armement de notre pays.
Le domaine des énergies renouvelables offre des perspectives pratiquement illimitées pour cette reconversion. Il s'agit d'un secteur moderne, de technologies de pointe, d'un savoir faire disponible dans les industries de l'armement (alliages, informatique, aérodynamique, etc.). La source d'énergie, le soleil est disponible, quant à lui, de manière pratiquement illimitée. L'Etat devra par ailleurs participer au décollage de cette reconversion par le lancement de contrats publics d'équipement solaire (capteurs ou panneaux photovoltaïques couplés au réseau), ou éolien des bâtiments, terrains et installations publiques (administrations, gares, hangars, hôpitaux, écoles, etc.). En conclusion, à situation nouvelle, il faut répondre par des solutions nouvelles. Pour cela, sortir des ornières, ôter ses oeillères, penser globalement et à long terme. Les quelques propositions exposées ici au nom des Verts dans le cadre de la réflexion sur le Livre Blanc de la Défense, souhaitent s'inscrire dans la perspective d'une sécurité commune, respectant et préservant la Vie, la nôtre et celle des générations futures, toute VIE. Le 13 septembre 1993, Conférence de l'IRIS au Sénat,
Paris
Solange FERNEX
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L'Association pour le Contrôle de la
Radioactivité dans l'Ouest existe depuis bientôt 8 ans. Issue
de l'après-Tchernobyl, L'A.C.R.O. a été créée
par des particuliers, c'est un des deux laboratoires indépendant
français de recherche et de contre-expertises.
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