LA CONSULTATION PUBLIQUE DE LA CUVE DE L'EPR F3, UNE GAGEURE
Le Club...
Par consultation publique de juillet 2017 (1), l'ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire) s'est adressée à tout citoyen voulant apporter un commentaire sur son projet d'avis relatif à la mise en service de la cuve de l'EPR de Flamanville. Il est surprenant que l'ASN dont le rôle premier est de formuler une décision technique sur la sûreté nucléaire s'en remette au citoyen lamda, à l'homme de la rue.
D'ailleurs, son président Pierre-Franck Chevet, n'a pas manqué de préciser dans une interview du magazine Sciences et Avenir (2) l'objectif visé par cette consultation publique ; « nous espérons des conseils techniques qui viendront compléter notre vision. ». Les observations et les remarques sur la politique énergétique « ne nous servent pas dans les décisions techniques.»
Une consultation publique pour quoi faire ?
Le premier avis que donne l'ASN dans son projet est que «L'anomalie de la composition en carbone du fond et du couvercle de la cuve du réacteur EPR de Flamanville n'est pas de nature à remettre en cause la mise en service de celle-ci ». Contester techniquement cet avis ne va pas de soi pour le citoyen lamda.
En effet, cet avis ne fait-il pas appel à des connaissances et des savoirs techniques et scientifiques pointus comme les documents de référence cités dans le projet d'avis ou bien ceux cités en référence sur la page internet de la consultation publique (1) ou celle de l'IRSN (3) ? Les dossiers mis à disposition du public sont souvent très techniques et difficiles à comprendre (quand bien même un effort de pédagogie a été exercé par l'ASN et l'IRSN). Ils sont examinés ou étayés par des études d'AREVA, dont l’objectivité ne peut pas être garantie. Surtout, après la mise en lumières des dossiers de falsifications des pièces de forges d'éléments de centrales nucléaires conçues à l'usine de Creusot Loire et les scandales d'Uramin (4).
La question du « pourquoi d'une consultation publique ?» mérite d'autant d’être posée que c'est une décision individuelle que doit prendre l'ASN. C'est à dire un acte administratif unilatéral qui renvoie à son autorité même et non celle d'une vox populi technici.
La demande est donc que pourra bien faire l'ASN des avis des citoyens, de l'homme de la rue, des militants anti ou pro nucléaires qui tous ne formuleront pour la plupart qu'un avis général, intuitif, de bon sens sans aucun doute, militant raisonné assurément, expert partiellement.
Si l'ASN consulte, c'est que la loi l'autorise à le faire et notamment le code de l'environnement. C'est en somme ce que répond naturellement son président Pierre Franck Chevet dans son interview de Sciences et Avenir. L'ASN est donc dans son rôle d'information du public et de transparence, surtout après 40 années de désinformation de dissimulations, voir de tromperies par l'industrie nucléaire française et internationale. Elle y a sans doute intérêt pour une décision aussi cruciale qui engage la vie de nos concitoyens et l'environnement du pays. C'est aussi une façon de se couvrir dans l'avenir, si jamais une fois mise en service la cuve venait à se rompre. L'ASN pourra se défendre d'avoir respecté la procédure mais aussi de dire que l'opinion n'avait pas plus formuler davantage de conseils techniques éclairés sur la question. Car d'un autre côté, les enjeux économiques et financiers de la filière nucléaire françaises font que la pression est considérable sur l'ASN et son président. Ces pressions sont bien réelles et sont une pratique constante des acteurs de la filière. Dans le champ de force dans lequel se trouve plonger l’ASN, il existe bien entre le pouvoir citoyen une asymétrie, une inégalité des pouvoirs d’influence, de menaces tant économiques et politiques qui s'exercent au profit de la filière nucléaire .
Aussi, l'ensemble des avis de nos concitoyens sur le projet de décision de l'ASN aurait pu avoir une valeur de référendum. Mais qui peut le croire quand le projet de décision renvoie à des éléments techniques ardus, où l'information reste soumise au secret industriel, où si peu de place est laissée à la contre expertise ? Ces éléments ont-ils fait l'objet d'un débat dans le pays pour être réduits à une réponse par oui ou par non ? Ont-ils été autant débattus qu'avaient pu l'être le projet de constitution européenne de 2005, au demeurant très technique lui aussi? Il y a bien eu une tentative de dialogue technique du côté des instances de représentation à l'initiative de l'ANCCLI qui a débuté dès décembre 2015 (5). Et c'était plutôt louable. Mais l’enjeu de ce dialogue a été placé plus dans l'accès à l’expertise par les acteurs de la société civile que sur le choix d'une alternative à la cuve défectueuse. Choix qui n'aurait pas manqué de questionner sur l'arrêt même du chantier et du projet EPR. Ainsi le dialogue a été très vite orienté sur la méthode de requalification de la cuve de l'EPR de Flamanville3 appelée pudiquement «démarche de justification ». Quant aux résultats finaux, le dossier de synthèse d’analyse d'AREVA des conséquences de l’anomalie du couvercle et du fond de la cuve du réacteur EPR furent remis sur table aux représentants des CLI (Commissions Locales d'Information) et des associations de la société civile une semaine avant la réunion plénière du 5 juillet 2017 ! (6) .
Enfin, débattre de la participation à la consultation publique, c'est placer l'ASN comme arbitre, et la considérer comme un acteur neutre dans la décision technique, dans ce dossier de l'EPR de Flamanville3. Mais l'est-elle vraiment ? Car il aura fallu presque 10 ans à l'ASN entre la découverte de suspicions d'anomalies sur la cuve et la formulation de cet avis 2017. Celui-là même aura fait suite à une procédure dérogatoire qui elle, n'a durée à peine deux ans. Que s'est-il donc passé pendant ces huit années avant que ne se mette en route cet échappatoire ? Là est bien la clé de cette affaire qui jette l'opprobre sur l'ASN. Et l'on ne peut que se renforcer dans son opinion quand on voit comment l'éponge est passée par le 1 premier ministre actuel dans l'affaire de soupçons de corruption d'acquisition et des falsifications industrielles qui touchent l'usine du Creusot Forge.
Enfin, le mouvement social antinucléaire n'y croit pas davantage à cette valeur référendaire de la consultation publique. Sans doute que l'histoire institutionnelle et politique de la filière nucléaire faite de lois dérogatoires ou d'exception, du fait accompli, de corruptions, d'achat des consciences de nos élus, de répressions sournoises ou brutales ne lui donne pas tort.
Participer ou ne pas participer à cette consultation plaçait le mouvement antinucléaire dans un piège. S’il participait massivement à cette consultation et non à la décision en soi, alors sa crainte était de voir son vote instrumentalisé par l’Etat français qui n'aurait pas manqué de s’enorgueillir du caractère démocratique de la procédure respectée, quand bien même la décision finale lui appartient en sus d'un lobby nucléaire bien introduit dans nos ministères. Participer, c'était aussi apporter de l'eau au moulin de l' « acceptabilité sociale » tant recherchée par les organismes d’État ASN, IRSN, EDF, AREVA, CEA etc.. qui fût une préoccupation de tous les instants depuis le début du nucléaire français. Si le mouvement anti nucléaire refusait la consultation, alors son attitude aurait été interprétée comme un consentement d’autant, qu'il est aujourd'hui très affaibli depuis que son réseau a été instrumentalisé en 2010 par le parti écologiste en vue des élections présidentielles de 2012 (7). Aujourd'hui divisé, il est en difficulté pour exprimer son refus massif dans la rue.
L'expertise citoyenne invoquée
Faire appel à l'opinion technique d'un public éclairé n'allait pas non plus de soi comme a tenté à le faire croire Pierre Franck Chevet dans cette consultation publique. En effet, il s'agissait d'émettre un avis sur un modèle de réacteur nucléaire de 3ème génération présenté de surcroît comme un prototype de plusieurs réacteurs futurs. Or selon la définition de l'OCDE, le prototype se définit comme « un modèle original qui possède toutes les qualités techniques et toutes les caractéristiques de fonctionnement d'un nouveau produit. (...) ». Et pour reprendre la définition complémentaire qu'en fournit Wikipédia (8),
« il s'agit aussi parfois d'un exemplaire incomplet (et non définitif) de ce que pourra être un produit ou un objet matériel final. Le prototype matérialise une étape d'évolution ... avant toute valorisation commerciale ».
Tant est si bien que l'EPR de Flamanville et sa cuve sont des prototypes (9). Et dans le cas particulier de la cuve de Flamanville3, on peut affirmer le caractère incomplet, définitif de la pièce. Incomplet parce que la seule chose dont on est assuré est que la cuve de l'EPR Flamanville3 n'est pas conforme aux exigences réglementaires et à la qualité industrielle attendue. Pouvoir porter un jugement et donner un avis sur un prototype (non conforme) et destiné à être le réacteur le plus puissant du monde requiert donc une science qui pour le cas de l'expertise citoyenne nécessite une information complète et transparente. Or, dans le cadre de la démarche probatoire appelée « démarche de justification » qui avait été présentée lors de la phase de dialogue technique initiée par l'ANCCLI, l'incomplétude et l'information imparfaite est demeurée une caractéristique notable.
Information imparfaite car les valeurs des essais, de conceptions ne nous ont été accessibles que partiellement et de voir le document de synthèse des résultats donnés par AREVA, caviardés (10).
Information incomplète car on sait bien que tous les événements accidentels, et incidents n'ont pas été pris en comptes par les essais numériques. Leurs complexités, leurs imprévisibilités ou même leur invraisemblance sont difficilement modélisables.
On sait bien que dans tout modèle, les hypothèses et les paramètres associés délimitent une certaine vision du monde et de sa réalité. La précision des estimations est dépendante de la qualité des données d'entrée et qu'il faut être prudent sur l'exploitation de résultats obtenus pour de très faibles niveaux de probabilités de défaillance. Et dans le cas d'espèce de la
survenue d'un accident majeur, la chaîne des causes, de l'ordre du chaos remet en cause les choix faits au niveau de ces
paramètres et de ces hypothèses . Quand bien même ces dernières soient conservatrices.
En conséquences, le caractère imparfait de l'information et incomplet de la méthode génère plus que des questionnements, c'est assurément beaucoup d'incertitude qu'il faut voir dans les résultats obtenus par AREVA. D'autant, que peu de place a été laissée à la contre expertise. De plus, la cuve étant par définition un prototype, elle se caractérise par son caractère unique qui est source d'incertitude additionnelle et pour laquelle il est extrêmement difficile de déterminer une population de référence. Ainsi, il y a d'abords eu la question de la représentativité des calottes sacrificielles des cuves anglaises et américaines qui ne présentaient pas de résultats robustes. L'ajout d'une troisième pièce a modifié significativement la température d'indexation.
Or ces résultats ont déterminé fortement les essais mécaniques. Le caractère similaire de la fabrication des calottes peut donc être largement remis en question.
Les essais réalisés à partir des calottes sacrificielles ont une valeur de résilience inférieure à la norme des 60 joules et même 56 joules pour la norme européenne. Le caractère fragile de l'acier demeure donc. Les taux de carbone observés dépassent les valeurs maximales autorisées par le code RCC-M. Ce qui signifie que l'on a dépassé les marges de sécurité de qualité de la composition chimique de l'acier pour les zones de ségrégation. Mais qu'en est-il de la composition chimique de l'acier pour les zones non ségréguées ?. On nous assure que la cuve serait exempt de défauts, mais dans certaines limites. Or les tests de qualités mécaniques de l'acier ont montré une baisse de sa ténacité. Mais là encore, le résultat de la démonstration reste fragile car il dépend bien sûr de la représentativité des calottes sacrificielles. De plus, la baisse de la ténacité resterait dans des limites acceptables au regard de la réduction des facteurs de marges constatés pour le cas du test de rupture brutale de la cuve.
Pourtant, là encore des doutes sérieux concernant ces facteurs de marges peuvent être parfaitement exprimés et étayés, surtout dans le cas d'un prototype.
La réduction des facteurs de marges, un exemple parmi d'autres
Dans l'évaluation du risque de rupture brutale réalisée pour le fond et le couvercle de cuve du réacteur EPR de Flamanville 3, AREVA a calculé une valeur seuil appelé facteur de marge. Sa valeur est le rapport de la ténacité observée des calottes «représentatives» rapportée à une valeur intégrant des contraintes sur une fissure, majorée d'un coefficient de sécurité. Un facteur de marge supérieur à 1 considère que le risque de rupture est exclu et la résistance mécanique des calottes est assurée.
Si AREVA et l'ASN constatent la réduction du facteur de marge par rapport une situation où les calottes seraient exemptes de ségrégation de carbone, ce résultat appelle toutefois plusieurs commentaires. D'abord, une reprise du calcul des facteurs de marges du risque de rupture brutal amène à des conclusions fort différentes (11). En effet, le résultat du facteur de marge varie en fonction d'un coefficient de sécurité. Celui-ci est classé selon la gravité de l'événement qui affecterait la marche du réacteur, c'est à dire une classe de probabilité de réalisation. Dans le cas d'une marche normale ou perturbé du réacteur, le coefficient de sécurité prend la valeur 2 alors que dans le cas d'un accident majeur où sa probabilité est considérée comme plus faible, il prend une valeur inférieure de 1,2. Ceci a pour conséquence de minorer la marge à conserver en cas d'accident majeur par rapport à une marche normale du réacteur. Ainsi quand AREVA mesure le facteur de marge de rupture avec le test de sensibilité de la taille au défaut de 20 mm -p.67 conf. (11)- en situation d'accident majeur (coefficient de sécurité=1,2), la valeur du facteur de marge s'élève à 1,52 pour le couvercle de cuve et 1,28 pour le fond de cuve. La marge étant supérieure à 1, elle est supposée conservée. Cependant, si on reprend le calcul avec un coefficient de sécurité d'une valeur de 2, alors les facteurs de marges obtenus pour le couvercle et le fond de cuve respectivement deviennent 0,91 et 0,77.
On obtient un résultat semblable en situations incidentelles pour le fond de cuve. Et dans le cas de la taille d'un défaut de 10 mm, le facteur de marge du fond de cuve est tout juste égal à 1. Un tel résultat aurait dû conduire à la conclusion de la mise au rebut des calottes pour plusieurs raisons.
Premièrement, les coefficients de sécurité sont bien des enjeux de sûreté. Il suffit de s'en référer à l'avis du groupe permanent d’experts pour les équipements sous pression nucléaires de juin 2015 concernant la quatrième visite décennale des réacteurs de 900 MW et de leur poursuite de fonctionnement à plus 20 ans (12). En effet, EDF aurait souhaité modifier la catégorie attribuée aux situations liées aux brèches primaires supérieures à 1 pouce qui sont aujourd’hui considérées comme relevant d'événements incidentelles. Cette modification aurait conduit selon les experts à appliquer des coefficients de sécurité inférieurs comme le note la recommandation numéro 5. EDF s'était donc heurté à l'expression d'un refus sur le déclassement d'un risque qui aurait conduit à l'application de coefficients de sécurité plus faibles.
Deuxièmement, suite au constat de non conformité de la cuve de l'EPR du fait de sa fabrication mal maîtrisée, toute nouvelle étude dans le but de valider la poursuite d'utilisation de la cuve aurait dû conduire à la majoration de coefficients de sécurité.
C'est la norme ou la procédure. C'est en quelque sorte la reprise de calcul des facteurs de marges présentée plus haut qu'il fallait faire. Cependant l'ASN et l'IRSN se sont réfugiées derrière l'arrêté de 1999 (13) fixant la valeur de ces coefficients en fonction de la catégorie des risques. Mais il faut remarquer que la loi a fixé à minima ces valeurs de coefficients de sécurité et donc, l'ASN, l''IRSN comme son groupe d'expert auraient dû s'aviser à les majorer pour la démarche dérogatoire d'AREVA, sachant que la résilience minimale n'était pas atteinte. Pourquoi ne l'ont-elle pas fait alors que son groupe d'expert a démontré en juin 2015 que c'était un enjeu sûreté ? Que l'arrêté n'ait pas prévu la cas dérogatoire est là aussi surprenant alors qu'il nous a été présenté par l'ASN que le traitement de situations particulières sur les matériaux existait dans les régimes antérieurs notamment voir l'arrêté du 26/02/1974 et le décret n° 99-1046. La seconde remarque porte sur l'arrêté lui-même dont la date de novembre 1999 nous renvoie bien loin en arrière. Depuis, il y a eu l'accident de Fukushima de mars 2011. L'ASN, l'aurait-elle oublié ?
Troisièmement, le calcul des facteurs de marge dans l'évaluation du risque de rupture brutale des calottes de la cuve de l'EPR revêt finalement un caractère probabiliste par le biais des catégories d'événements qui déterminent les valeurs des coefficients de sécurité. Or c'est peut être là, la chose la plus inquiétante où l'ASN n'est pas exempte de contradictions voir de duplicité. Il faut se rappeler qu'en octobre 2012, le commissaire européen à l'Energie, Gunther Oettinger avait épinglé l'ASN suite au stress tests sur les centrales européennes en lui enjoignant d'appliquer les recommandations de l'AIEA (Agence Internationale de l'Energie Atomique) de conduire à la fois une approche probabiliste et une approche déterministe (14). Paradoxalement, le cahier des charges des évaluation complémentaires de sûreté (ECS) de l'ASN ne dit pas les choses autrement. D'autant que les études probabilistes de sûreté sont calculées sur la base d'équipements conformes. Dans le cas de l'évaluation de rupture brutale de la cuve, l'approche déterministe impliquerait de choisir le coefficient de sécurité indépendamment de la probabilité de situations accidentelles ou normales et certainement obligerait à revoir la valeur maximale (au-delà de la valeur 2 actuellement en vigueur) défini par l'arrêté de 1999.
En définitive, le constat peut être amer car c'est bien la doctrine de sûreté de l'ASN que l'on voit régresser et un pari sur la défaillance de la cuve se mettre en place, pour employer un euphémisme. Mais sans doute devrait-on dénoncer autrement le fait qu'un crime atomique ou crime de masse est à venir? Enfin suivre une approche déterministe aurait eu le mérite, à partir de situations diverses de décrire les conséquences graves provenant du réacteur le plus puissant au monde.
L'étude des conséquences, le grand absent du dialogue technique de l'ANCCLI et de la consultation publique
Toute la partie du dialogue technique a été consacrée à la méthode de requalification de la cuve et à ses résultats. Si un scénario alternatif de remplacement des calottes a bien été présenté aux participants, il a constitué le temps d'un bref exposé et d'échanges de 1h30 au total. Face à la société civile représentée par les CLI, la démarche en a oublié d'évaluer les conséquences du risque d'une défaillance de la cuve de l'EPR de Flamanville 3. Cette attitude est pour le moins stupéfiante quand on sait que l'ASN planche sur des scénarios de gestions post accidentelles (15). Toutefois, le scénario des retombées radioactives d'un accident majeur de l'EPR de Flamanville a été entrepris à la demande de l'ONG Greenpeace en 2007 (16).
Les retombées radioactives se feraient ressentir jusqu’à plusieurs centaines de kilomètres de Flamanville, touchant Paris au bout de 12h, et dès le deuxième jour la Belgique, le Luxembourg, l’Allemagne, la Suisse, l’Italie, l’Autriche, l’Espagne.
L’ampleur de la catastrophe ne serait pas d’ordre local, ni même national, mais bien d’ordre européen. Des désordres politiques s'installeraient de facto dont l’État français a toujours soigneusement niés jusqu'ici. Des questions politiques comme la COP sur le climat s'en pose pourtant. Ainsi, la question de l'effondrement de l’État français incapable à protéger ses citoyens (17), de la perte de solidarité nationale envers les réfugiés des zones sinistrées devraient être mises sur table. La question de la performance économique, sociale et environnementale de la nation devient aussi une variable de taille des conséquences d'une catastrophe majeure. Doit-on rappeler que selon le programme du PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement), la santé et l'éducation expliquent pour les pays riches 85 % de la progression de l'IDH (Indicateur de Développement Humain) depuis un siècle et demi. Les données des Nations Unies révèlent notamment deux caractéristiques qui distinguent la France de ses voisins européens : l'IDH dépend davantage de l'éducation et de la santé que du revenu (18). Le coût d'un accident nucléaire majeur sur l'EPR de Flamanville dépasserait largement les estimations de l'étude de l'IRSN (19) qui avait estimé des pertes monétaires équivalentes à 20 % du PIB national alors que le dimensionnement de l'accident s'appuyait sur un scénario minimaliste. Les pertes en bien être sanitaire, d'éducation , de patrimoine de solidarité longuement acquis sont inestimables à l'heure actuelle comparée à une étude coûts/bénéfices de l'IRSN car ces secteurs sont constituants de la performance française sur le moyen et long terme.
Jean-Luc Fossard - Militant antinucléaire, altermondialiste
Adhérent du Collectif Stop EPR ni à Penly ni Ailleurs et du Collectif Anti Nucléaire Ouest
Membre suppléant à la CLI Paluel-Penly
Notes
(1) www.asn.fr/.../EPR-projet-d-avis-de-l-ASN-relatif-a-l-anomalie-de-la-composition-de-l-acier-du-fond-et-du-couvercle-de-la-cuve(2) www.sciencesetavenir.fr/.../epr-de-flamanville-a-quoi-va-servir-la-consultation-du-public_114387
(3) www.irsn.fr/.../19-Seminaire-reacteur-EPR-cuve-anomalie_2015-2016.aspx
(4) www.francetvinfo.fr/.../info-franceinfo-defauts-sur-la-cuve-de-lepr-de-flamanville-l-autorite-de-surete-nucleaire-avait-alerte-edf-des-2005-de-dysfonctionnements-chez-le-fabricant_2121929.html
(5) www.anccli.org/dialogue-technique-cuve-epr
(6) www.irsn.fr/.../20170628_Expertise-consequences-anomalie-fabrication-couvercle-et-fond-cuve-EPR.aspx
(7) Actes des "Rencontres pour un monde vivable dénucléarisé" 23-25 octobre 2015 Saintes
(8) fr.wikipedia.org/wiki/Prototype#cite_note-1
(9) www.lemonde.fr/.../nouveau-report-et-reevaluation-du-cout-pour-le-reacteur-epr-de-flamanville_4744155_3234.html
(10) Justification de la ténacité suffisante des calottes du fond et du couvercle de la cuve de l'EPR de Flamanville 3 AE - NOTE D'ETUDE OU DE SYNTHESE - N° 002-ARV-01-104-503
(11) Je reprends ici les données qui ont été utilisées au sein de groupe de travail du réseau Sortir Du Nucléaire et qui ont donné lieu à une astuce de calcul au vue de la non publication des données brutes des essais ou du caviardage du document d'AREVA
(12) GROUPE PERMANENT D’EXPERTS POUR LES EQUIPEMENTS SOUS PRESSION NUCLEAIRES Avis relatif aux orientations retenues par EDF pour la mise à jour des dossiers de référence réglementaires lors de la quatrième visite décennale des réacteurs du palier 900 MWe et pour la poursuite de fonctionnement jusqu’à VD4 + 20 ans - Réunion tenue à Montrouge le 10 juin 2015
(13) legifrance.gouv.fr ... LEGITEXT000021233786
(14) www.actu-environnement.com/.../audit-surete-communication-commission-europeene-16735.php4
(15) www.asn.fr/.../Gestion-post-accidentelle
(16) cdn.greenpeace.fr/.../EPR-le-reacteur-le-plus-dangereux-du-monde.pdf
(17) La condition nucléaire - Jean-Jacques Delfour ed; L'échapée 2014
(18) Le bel avenir de l’État providence - Eloi Laurent ed. LLL 2014
(19) http://www.irsn.fr/.../20140414_Estimation-couts-accidents-nucleaires-France-Methodologie-IRSN.aspx