mars 2018 •

Cuve de l’EPR, les limites de l’avis ASN

Le gouvernement ne doit pas se défausser sur l’ASN pour accorder une dérogation à la cuve défectueuse de l’EPR car il est avéré que l’ASN n’a pas été capable d’empêcher Areva de construire la cuve dans l’usine du Creusot, alors même que l’on savait depuis le début que cette usine n’était pas du tout fiable.

Cette incapacité avérée de l’ASN, quelles qu’en soient les raisons, retire de fait tout crédit à l’avis qu’elle a fini par formuler et ne peut constituer le socle de la décision politique que le gouvernement sera amené à prendre sur cette question ultra-sensible de la sécurité de l’EPR.

Comme le montre le calendrier ci-dessous, l’ASN connaissait en effet les risques liés à la fabrication de la cuve au Creusot mais ne s’est pas donné les moyens d’un suivi drastique de cette fabrication.

2005 - ASN, EDF et Areva connaissaient les graves dysfonctionnements de l’usine du Creusot

-LACOSTE, Président de l’ASN à l’époque se dit «effondré » par ce qu’il a vu lors de sa visite au Creusot

-Après la rachat de l’usine par Areva, les choses n’ont guère changé et l’ASN ne s’est pas donné les moyens de s’assurer qu’Areva avait réglé les gros problèmes du Creusot.

-Or l’ASN aurait dû être particulièrement vigilante, car elle savait également qu’Areva n’avait eu aucun scrupule à travailler avec le Creusot, alors même qu’elle était au courant que le Creusot n’était pas capable de fabriquer des pièces fiables.

-Ce qui prouve que l’ASN savait qu’Areva elle-même n’était pas fiable.

-L’ASN a donc été particulièrement négligente en ne contrôlant pas vraiment le travail d’Areva qu’elle savait ne pas être fiable.

2006 - L’ASN va attendre 7 ans pour avoir des analyses des éléments de la cuve

-En 2006 l’ASN demande à Areva de lui confirmer que les éléments de la cuve sont conformes. Elle mais elle attendra 7 ans pour avoir des analyses de ces éléments !

2014 - L’ASN laisse installer une cuve non fiable

-Ce n’est que 9 mois après sa pose dans le bâtiment, qu’Areva et EDF annoncent que la cuve n’est pas conforme...

-Or tout le monde savait qu’une fois installée on ne pourrait pas la remplacer.

-L’ASN a laissé faire et a accepté de se retrouver devant un coupable « fait accompli ».

2017 - L’ASN formule des obligations qui ne garantissent rien en terme de sécurité

-L’ASN finit par accorder un feu vert à la validation de la cuve, mais les deux obligations dont est assorti ce feu vert, ne garantissent rien en terme de sécurité :

*Le fond de la cuve devra être contrôlé régulièrement :

-Ce contrôle est préconisé, non pas parce que c’est une disposition fiable en terme de sécurité mais parce que c’est la seule chose faisable techniquement

-Les contraintes techniques prennent le pas sur les exigences de sécurité publique

*Le couvercle de la cuve devra être changé dans 7 ans :

-Le délai de 7 ans est retenu, non pas parce qu’on a la garantie que le couvercle ne cédera pas dans les 7 ans à venir, mais parce qu’il faut 7 ans pour fabriquer un nouveau couvercle.

-Ici aussi, les contraintes techniques prennent le pas sur les exigences de sécurité publique.

De plus : Et pourtant la législation initiale interdit de manière absolue tout risque de rupture de la cuve. Le «risque zéro» doit être la règle impérative. Le contournement de cette règle n’est possible que depuis le 30 décembre 2015 grâce à un arrêté ministériel réalisé sur mesure pour permettre de valider la cuve défectueuse de l’EPR... Au plus haut niveau, les exigences de sécurité publique passent après les considérations économiques. Une situation «moralement» inacceptable.