Et encore un problème pour le "fleuron" des réacteurs français, EDF se montre soudure d’oreille |
A Flamanville, des pièces stratégiques non conformes ont été planquées.
Il aura fallu pas moins de huit ans à EDF, de 2013 à 2021, pour s’apercevoir que l’une des pièces stratégiques de l’EPR de Flamanville n’était pas aux normes. Ce record fait d’autant plus désordre que la mise en service de ce réacteur accuse déjà onze années de retard et des surcoût ayant fait passer la facture de 3,5 à 19 milliards d’euros.
Cette fois, c’est le circuit primaire – celui qui évacue la chaleur produite par le réacteur- qui présente des signes de faiblesse. Ce gros tuyau doit être branché sur des circuits de secours pour injecter de l’eau froide en cas de surchauffe du cœur ou pour en retirer en cas de surpression. Problème, les soudures de raccordement de ces circuits ne sont pas d’équerre.
Extrême jonction
L’électricien avait décidé, en 2006, d’élargir significativement ces trous de jonction. Avant de s’apercevoir, en 2013, que les diamètres trop importants étaient interdits par des règles de sûreté visant à limiter le débit d’éventuelles fuites de liquide radioactif. Pour se sortir du pétrin, EDF a brandi un joker, décrétant que toutes ces tuyauteries se trouvaient en « exclusion de rupture ». En clair, il considérait l’éventualité d’une cassure comme quasi impossible, rendant sans objet les précautions liées à des fuites éventuelles. Restait juste un « léger » détail à régler : démontrer que la tuyauterie et ses soudures étaient réellement incassables...
Gendarmes discrets
En
2014, EDF informe incidemment de la situation l’Autorité de sûreté
nucléaire (ASN). Pas curieux pour deux sous, le gendarme de l’atome
classe le dossier. « Il y avait là un fil qu’on aurait pu
tirer », confesse au « Canard » Julien Collet, le
directeur de l’ASN. « Ce n’était pas notre priorité »,
ajoute-t-il, soulignant que ses troupes avaient d’autres chats à
fouetter avec ce réacteur truffé de malfaçons...
C’est
seulement en 2017 qu’une lettre est adressée à EDF, lui demandant
de vérifier si les soudures du réseau primaire étaient bien assez
solides. La réponse a fini par arriver, le 6 mars dernier. Dans un
courrier, EDF avouait que son histoire d’exclusion de rupture ne
tenait pas la route.
Ne reste plus qu’à tenter de réparer – délicatement – les pots cassés. Sans déclencher une trop violente réaction en chaîne financière, si possible...