septembre 2021 • Jean-Claude et Françoise

FOCUS sur les ENERGIES RENOUVELABLES

EDITORIAL

Nous voici de nouveau à un moment clé où se profile une relance d'un programme de production d'élec-tricité à partir de la fission de l'atome du type plan Mesmer des années 70. Notons que c'est à cette époque que fut créé le GSIEN qui s'interrogeait sur le bien-fondé de ce plan.

Bis repetita si l'on en croit la lettre de M. François Bayrou, haut-com-missaire au plan, expédiée au gouvernement et intitulée « OUVER-TURE - Électricité : le devoir de lucidité, en date du 23 mars 2021.

En voici un court extrait : « Le contexte est présent dans tous les esprits : la question du réchauf-fement climatique impose une politique de diminution des émissions de gaz à effet de serre, principaux responsables, disent les scientifiques, du bouleversement d’origine anthropique du climat ».

À embrasser un « contexte » où seule la conséquence médiatisée (climat) est prise en compte, aux dépends des événements et phénomènes qui induisent cette conséquence, il y a risque de contraindre la réflexion dans un cadre étriqué où les errements humains qui induisent cette conséquence seront très rapidement éludés.

Dans sa missive au gouvernement, M. Bayrou promeut la construction de pas moins de deux réacteurs par an pendant 20 ans... Sa note « comporte beaucoup de contre-vérités » selon l’analyse du Moniteur des artisans ; Bayrou serait-il « marabouté comme tous ses petits copains par une pensée industrielle à sens unique » ? comme le prétend Fabrice Nicolino dans Charlie Hebdo (articles pages 21 et 22). Nous vous en laissons juge et nous vous proposons en réponse au texte de François Bayrou celui de Françoise. Rappelons que notre amie Françoise, tout comme François Bayrou, est agrégée de lettres classiques. La lecture de la gazette en sera peut-être facilitée pour ce dernier. Merci à toi Françoise de glisser ici un peu de poésie dans cet enfer de substances.

« Le haut-commissaire au plan semble vouloir mettre son point d’honneur à respecter nos engagements à limiter les émissions de gaz à effet de serre, quel qu’en soit le prix, quel que soit le prix à payer, non pas par lui ou nous, ses

contemporains, mais par les générations futures. C’est cet unique engagement qui semble devoir décider non pas seulement de notre avenir énergétique, mais de l’avenir tout court, non de l’avenir de la France, mais de l’avenir de la planète.

La cause écologique de la limitation des émissions de gaz à effet de serre est le prétexte à un plaidoyer pour une certaine électricité décarbonée : c’est ainsi que François Bayrou nomme l’électricité nucléaire. Il discrédite les énergies solaire et éolienne en listant leurs inconvénients sans rien dire de la faillite de l’industrie nucléaire et des accidents de Tchernobyl et Fuku-shima, sans tirer d’enseignements de ces accidents. Comment peut-il déplorer que « le débat sur l’énergie tel qu’il se développe [soit] un lieu de non-dits ou d’a priori, jamais dévoilés, dont la persistance empêche la tenue d’une discussion publique, sincère et efficace » alors que c’est lui qui semble frappé d’amnésie ? Amnésie chez cet agrégé de lettres classiques qui a su à une époque que la démesure, l’hubris des Grecs, est une faute impardonnable. Quelle folie s’est emparée de lui pour qu’il ose appeler au lancement de deux nouveaux chantiers nucléaires tous les ans pendant 20 ans. C’est bien pire que livrer en pâture au Minotaure sept jeunes hommes et sept jeunes filles chaque année. Comment peut-il ainsi s’engager pour les générations futures quand il reconnaît dans le même rapport, au détour d’un paragraphe, que nous ne savons toujours pas gérer les déchets de l’industrie nucléaire : « La gestion sûre et durable des résidus à durée de vie très longue constitue une préoccupation légitime à laquelle il convient de répondre afin d’assurer le développement à l’avenir de cette filière décarbonée. » En revanche, à propos des solutions envisagées pour réduire la part du nucléaire, il écrit sans vergogne : « c’est une contrainte et un risque élevé de confier notre avenir électrique à des solutions encore jamais éprouvées à grande échelle » (page 9, 1er point).

Comment peut-il mettre en balance notre sentiment de liberté énergétique et la liberté pour les hommes de demain de vivre en terre non contaminée ? »

Face à cette triste perspective, nous avons souhaité produire un numéro focalisé sur les autres moyens de production d'électricité écrasés par l'industrie nucléaire depuis les années 70.

L'extension du sigle CEA (Com-missariat à l'Énergie Atomique devenu depuis peu Commissariat à l'Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives) ne peut à elle seule masquer les intentions de relancer une machine industrielle certes développée en France mais qui est vorace vis à vis des budgets nécessaires pour alimenter les investissements pour la relancer. 

Les agitations au niveau européen en matière de taxonomie visant à obtenir une garantie verte au nucléaire afin de sécuriser ces mises de fonds viennent conforter notre analyse ci-dessus.

Gageons que ce numéro fera réfléchir quant à l'ineptie que constituerait une relance du nucléaire sachant que pas plus les problèmes des déchets et rejets que ceux posés par les accidents ou encore la prolifération n'ont pu être "gérés" à défaut d’être résolus depuis plus de 50 ans qu'ils sont posés !

Jean-Claude et Françoise