Interview - Benjamin Carreras :
Combiner extrapolation empirique et modélisation
IRSN, 2012
Quel est le plus grand défi technique lié au plasma ?
L'un des soucis majeurs concerne ce que l'on appelle les disruptions, c'est-à-dire l'apparition brutale d'instabilités du plasma. Dans les tests initiaux, avant la mise en œuvre d'éléments radioactifs, ITER va devoir acquérir une expérience sur la probabilité de ces disruptions et la manière d'en gérer les conséquences.
Comment prédire ces instabilités ?
Il existe des aspects du plasma à étudier sur ITER, dont nous n'avons pas encore une connaissance totale. Nos connaissances reposent sur des machines plus petites qui ne peuvent pas atteindre les températures auxquelles ITER va travailler. Nous ne disposons pas de bases théoriques suffisantes permettant de prédire ou de calculer les différents aspects de la disruption. Pour en évaluer les conséquences, il existe deux moyens : extrapoler à partir des données empiriques des tokamaks actuels ou modéliser le processus, aussi précisément que possible. Mais les deux approches ont des limites.
Pouvez-vous donner un exemple ?
Un problème important consiste à déterminer le temps le plus court mis par le courant pour s'effondrer durant une perturbation. Plus ce délai sera court, plus les conséquences de la disruption seront importantes. Il est donc primordial d'accroître l’analyse des données existantes et le niveau de modélisation de ces événements, en parvenant à des modèles tridimensionnels par exemple, et en même temps de rassembler autant d'informations que possible durant la première phase d'expérimentation pour tester les extrapolations empiriques déjà réalisées.
Benjamin Carreras est un physicien nucléaire américain, spécialiste de la physique du plasma. Il a travaillé dans le laboratoire de recherche pluridisciplinaire Oak Ridge National Laboratory, dépendant du ministère américain de l'Energie.
Actuellement [en 2012] chercheur au sein de deux institutions espagnoles et professeur de physique à l'Université de Fairbanks (Alaska, Etats-Unis), il est aussi consultant pour l'IRSN sur le projet ITER.