Chine - SMR en construction :
ACP 100 - Centrale de Linglong 1 (Hainan Changjiang SMR)
En développement depuis 2010, l'ACP 100 est un réacteur intégré de démonstration de 385 MWth pour 100 MWe net (rendement 26%) développé par la Chine. Il « est basé sur la technologie REP existante et adapte des systèmes de sécurité passive pour faire face aux conséquences des accidents ; en cas de transitoires et d'accidents de dimensionnement hypothétiques, la convection naturelle refroidit le réacteur. La conception intégrée du système de refroidissement du réacteur de l'ACP 100 permet d'installer les principaux composants du circuit primaire à l'intérieur de la cuve sous pression du réacteur ». La cuve intègrera « quatre pompes primaires » et « seize générateurs de vapeur ». Le cœur sera chargé de combustible UO2 standard enrichi à moins de 5%. La réactivité sera contrôlée à l’aide de grappes de contrôle et de bore soluble dans l’eau primaire [AIEA, 2022].
L’ACP 100 est en construction sur le site nucléaire de Changjiang qui accueille déjà deux tranches REP de 600 MWe en exploitation et deux tranches REP de 1000 MWe en construction.
Tableau de bord ACP 100
NEA/OECD, 2024
Planning
Dans son édition 2014 sur les SMR, l’AIEA fait le point : « La China National Nuclear Corporation (CNNC) développe actuellement la conception du réacteur ACP 100 et soumettra son rapport préliminaire d'analyse de sûreté à la National Nuclear Safety Administration (NNSA) en 2014, en vue d'une construction en 2016 » [AIEA, 2014].
L’ambitieux planning de réalisation du projet présenté par CNNC auprès de l’AIEA en 2015 prévoyait le début des opérations pour fin-2021/début-2022 [nucleus.iaea.org]. En réalité, c’est la construction de l'ACP 100 qui débutera en 2021 (juillet).
Dans les éditions suivantes sur les SMR (2016, 2018 et 2020), l’AIEA ne se hasardera pas à un quelconque pronostic sur une date de démarrage de l’ACP 100. Toutefois dans le rapport 2022, l'exploitation commerciale est annoncée pour « 2026 » [AIEA, 2022].
Coûts
Un article publié sur le site du Multidisciplinary Digital Publishing Institute en donne une estimation, au conditionnel, réalisée avant le démarrage du chantier : « Une étude de faisabilité montre que le réacteur ACP 100 pourrait coûter environ 5000 $/kW ».
En octobre 2013, l’Institute for energy research évalue la construction du réacteur Linglong 1 à « 5 milliards de yuans (700 millions de dollars) » soit 7000 $/kWe [IER, 12/10/23].
Densité surfacique de puissance
L’AIEA indique une emprise au sol de « 200 000 m2 » pour l’ACP 100 [AIEA, 2022].
Une présentation de la China national nuclear corporation (CNNC) indique une « emprise au sol de de 300 m par 300 m » soit 90 000 m2 (9 ha) [CNNC, 2019]. Une rapide vérification sur Google Earth permet de valider cette superficie du chantier de construction de Linglong 1 (100 MWe). La densité surfacique de puissance sera par conséquent de 900 m2/kWe soit six fois plus élevée que celle d’un réacteur du Tricastin.
Mensurations
Les images diffusées par CNNC montrent des images du chantier avec, en sous-titre : « compact size » (Cf. photo ci-après), « taille compacte » selon la propagande chinoise. Compte-tenu de sa petite puissance, le réacteur intégré HTR 100 est classé parmi les small réacteurs, mais qu’en est-il de la dimension du bâtiment réacteur qui l’abrite ? Compact or large size ?
Les rares renseignements glanés deci delà révèlent un imposant bâtiment réacteur constitué d’une enceinte interne en acier et d’une enceinte externe en béton. Regardons plus en détails l’évolution de la construction. Selon Wolrd nuclear news, « l'épaisseur totale du radier en béton est supérieure à 7,5 mètre » [WNN, 9/03/23].
Le chantier de Linglong 1
CNNC, 26/10/2023, capture écran 2’40’’
Introduction de la cuve intégrée (Ø 3,35 m)
Sur ce radier, une enceinte métallique de confinement a été construite : « Le fond de l'enceinte de confinement, qui soutient la coque en acier de l'enceinte, a été assemblé sur place à partir de 50 plaques d'acier préfabriquées. Le composant assemblé a été mis en place à l'aide d'une grue sur le radier de fondation en béton de la centrale le 24 octobre 2021. La partie inférieure de l'enceinte de confinement - d'une hauteur de 15 mètres et d'un poids d'environ 450 tonnes - a été mise en place sur le fond de la cuve le 26 février 2022, avec 46 jours d'avance sur le calendrier. Le cylindre supérieur de l'enceinte de confinement - d'une hauteur d'environ 15 mètres et d'un poids d'environ 720 tonnes - a ensuite été mis en place le 6 juillet de l'année dernière » [WNN, 9/11/23].
Un couvercle en acier aux dimensions et à la masse inconnues est venu recouvrir cette coque métallique début novembre 2023. Préparé en amont à être bétonné, son dôme d’une masse de « 550 tonnes » a été positionné début février 2024 [CNNC, 7/02/24].
Aucun élément factuel ne permet de connaître les dimensions des installations. Néanmoins, une photo du chantier de construction, avec notamment l’introduction de la cuve (hauteur 10 m et diamètre de 3,35 m) dans le bâtiment réacteur, interpellent sur le diamètre de l’ouvrage en cours de réalisation (Cf. photo ci-dessus).
Avec Google Earth nous avons pu estimer le diamètre du bâtiment réacteur à une trentaine de mètres :
Vue satellite de la centrale nucléaire de Linglong 1 (ACP 100) en construction
Alors, SMR ou LMR (Large modular reactor) ?
Sûreté
Du point de vue de la sûreté de son réacteur, CNNC n’y va pas avec le dos de la cuillère en matière de propagande. Extrait de la présentation de l’ACP 100 auprès de l’AIEA : “Large LOCAs (loss-of-coolant accidents) are physically impossible”. Traduit en français: « un APRP-GB (Accident de perte de réfrigérant primaire – Grosse brèche) est physiquement impossible » [nucleus.iaea, 2016]. Voilà qui devrait faire sourire Raymond...
Schéma
de principe du modèle original ACP100
Wang
Hongliang, 2022
A noter une innovation avec le système de refroidissement passif par convection naturelle de l’enceinte de confinement (coque métallique). Le bâtiment réacteur en béton entoure la coque métallique où est logée la cuve sur le modèle des poupées gigognes. L’espace laissé entre la paroi interne du bâtiment réacteur et la paroi externe de la coque métallique permet la circulation naturelle de l’air. Une bouche d’évacuation de l’air chaud est présente en partie haute du bâtiment réacteur. Un article (en chinois) de Nuclear power engineering de 2022 permet de visualiser la conception du refroidissement passif de l’ACP 100 (Cf. encadré ci-dessus) sensé refroidir la coque métallique « dans des conditions d'accident grave » sur le réacteur [Wang Hongliang, 2022].