Dans la Gazette n° 302, nous titrions SMR : Small Mythical Reactor ?
Vision prémonitoire du GSIEN ?
Le fragile projet de SMR français Nuward
« Sérieux revers pour le projet Nuward d’EDF », comme le titrait La Tribune dans un article du 1er juillet 2024 : « Le programme de mini centrale nucléaire mené par l’électricien historique peine à tenir une équation économique pertinente compte tenu des choix techniques réalisés. EDF indique avoir décidé de faire évoluer le design de son SMR tandis qu’une source interne évoque la possibilité de suspendre le programme pour en démarrer un autre.
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Cette évolution fait suite à « l’étude en détails de la maquette complète dans le cadre de la phase de basic design par les équipes d’ingénierie » et aux « échanges avec les acteurs du marché », explique l’électricien, qui entend « aller vers des technologies exclusivement éprouvées »
Des choix innovants qui se heurtent aux réalités industrielles
Pour Nuward, EDF a fait le choix de reprendre la technologie des réacteurs à eau pressurisée, actuellement en service dans l’Hexagone, tout en souhaitant se rapprocher du niveau de sûreté des réacteurs dits de 3ème génération (dont font partie les EPR), qui prennent en compte, dès leur conception, le risque de fusion du cœur. « Cela implique qu’on fasse des choix innovants qui se heurtent aux capacités de la filière industrielle », explique à La Tribune une source interne, selon laquelle des doutes sur la faisabilité du projet ont émergé il y a environ un an au sein des équipes techniques. Selon Les Echos, EDF a notamment buté sur la conception de générateurs de vapeur à plaques qui doivent permettre de miniaturiser les équipements.
Par ailleurs, « lorsque l’on fait la somme de tous les coûts d’ingénierie, de conception et d’exploitation, cela coûte très cher », poursuit cette même source. Des débats portés sur le choix des matériaux et des filières de fabrication auraient notamment conduit à la conclusion que le coût global du projet était trop éloigné des attentes des clients » [La Tribune, 1/07/24].
Les coûts de Nuward n’avaient pas été rendus publics lors du lancement en fanfare du projet. Certains ont dû se pencher sur le devis secret et constater qu’il ne serait pas possible de tenir une équation économique pertinente.
Le design du projet est donc à revoir comme l’explique la Société française d’énergie nucléaire : « Ce lundi 1er juillet, suite à des rumeurs de presse, EDF a confirmé que la gouvernance de Nuward a pris la décision de remettre à plat le design de son SMR, développé avec TechnicAtome, le CEA, Framatome et Naval Group. Une orientation prise à un moment crucial du développement du réacteur alors que celui-ci a atteint la phase de basic design (avant-projet détaillé) ».
Force est de constater que le projet initial reposait sur un socle fragile car désormais, il va « Reposer sur une base solide – L’une des demandes des potentiels clients, (...) est de se reposer exclusivement sur des briques technologiques éprouvées, afin de garantir la tenue des délais et des budgets.
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L’idée innovante d’une chaudière intégrée (regroupant cuve et générateurs de vapeur) est écartée pour revenir à un design plus classique et ainsi améliorer la faisabilité technique, diminuer les coûts et délais de construction » [SFEN, 2/07/24]. La conception du réacteur avec des générateurs de vapeur intégrés dans la cuve est abandonnée.
Nuward en était à la phase d’avant-projet détaillé. Avec la remise à plat du design, il va falloir repasser par une phase d’avant-projet sommaire afin d’intégrer les évolutions pour passer d’un réacteur entièrement intégré à un réacteur à boucles. Cela devrait retarder le calendrier de développement bien qu’EDF indique encore sur son site Internet que « La conception et le calendrier de développement de NUWARD™ vise la construction d’une centrale de référence en France à l’horizon de 2030 » [EDF], un calendrier déjà très ambitieux avant le chan-gement de design.