Le démantèlement sans fin...
des installations nucléaires :
EDITORIAL
DÉMENT TELLEMENT…
Et non, ce n’est pas une faute d’orthographe ou de typo…
Au moment où de nombreuses installations (tant pour la production d’énergie, que pour le cycle du combustible ou pour la recherche) construites au cours des dernières décennies sont arrivées ou vont arriver en fin de vie et devoir être démantelées dans les prochaines années, il est opportun de consacrer une Gazette Nucléaire et d’avoir un regard critique sur ce sujet. D’autant plus opportun que ces opérations de démantèlement vont aussi générer une grande quantité de déchets et que s’exprime actuellement de la part de certains responsables politiques une volonté de relance d’un nouveau programme nucléaire.
Dément tellement, par exemple :
- le coût de démantèlement du réacteur nucléaire français (filière eau lourde de 70 MWe) de Brennilis (Bretagne) qui va finalement flirter avec le milliard d’euros ; ou encore le coût des démantèlements du réacteur (REP de 305 MWe) de Chooz (Ardennes) pour 600 M€ ou de l’usine Georges BESSE 1 qui progressivement et surement de-vrait tangenter les 2 milliards.
- la quantité de déchets radioactifs à gérer estimée à 226 000 tonnes
(l’équivalent de la masse de 26 tours Eiffel !) pour le démantèlement de l’usine Georges BESSE 1.
- mais aussi le projet de Techno-centre en Alsace pour remettre dans le marché les métaux TFA issus des démantèlements en cours ou à venir, alors que des déchets provenant de zones contrôlées (îlots nucléaires) sont déjà recyclés, en toute discrétion.
Bref, pour plagier l’actuel Premier Ministre Michel Barnier, une formidable (au sens premier de l’adjectif) dette environnementale et financière pour les générations futures, encore plus gigantesque si la France poursuit sa fuite en avant dans une politique énergétique largement basée sur le nucléaire ?
Alors que l’État vient de lancer une consultation publique sur la future PPE (Programmation pluriannuelle de l’énergie), comme l’ont récemment écrit Michel Badré et Alain Grandjean dans une tribune du Monde publié le 06/11/2024, « le dossier de concertation sur la PPE semble comporter beaucoup de non-dits sur des points majeurs » : Prise en compte des hypothèses les plus optimistes envisageables en matière d’allongement de la durée de vie des réacteurs existants, de rythme de lancement de nouveaux réacteurs… ; coût non actualisé des éventuels futurs EPR2… Et d’ajouter : « D’autres investissements, chiffra-bles pour chacun en milliards d’euros, doivent être intégrés : le renouvel-lement des installations d’entrepo-sage centralisées des combustibles usés et de fabrication du combustible MOX, en fin de vie d’ici à 2040, l’extension des installations de stockage des déchets ultimes et la capacité de réenrichissement en France de l’uranium de retraitement, actuellement sous contrôle de la Russie ».
Enfin pour conclure cet édito : en l’absence d’information, comment ne pas s’inquiéter des difficultés qui semblent être rencontrées au cours des opérations de divergence de l’EPR FA3 de Flamanville. Mais aussi comment ne pas s’interroger sur la nomination de l’ancien responsable de l’ANDRA (en charge du dossier de demande d’autorisation de création de CIGEO) à la Présidence de la future ASNR qui aura à valider cette demande d’autorisation. Comment ne pas s’inquiéter enfin sur la consul-tation concernant la décision ASN relative aux Orientations de la phase générique du cinquième réexamen périodique des réacteurs de 900 MWe d'EDF (RP5-900) ouvrant la voie à une prolongation de leur exploitation au-delà de leur 50ème année de fonctionnement, consultation pour laquelle le GSIEN a déposé une contribution sur le site de l’ASN.
Marc DENIS – Président