VII / Les avantages économiques du nucléaire
    De nombreux scientifiques ont contesté la validité des chiffres officiels déterminant les statistiques de production et/ou de consommation d’énergie, aboutissant à survaloriser le rôle de l’électricité et à gonfler le rendement de la filière nucléaire. La plus récente démonstration française connue datant de 1984[29], je voudrais signaler que la Communauté européenne (DG XII) avait plus récemment financé (1988) une étude menée au Fraunhofer Institut für Systemtechnik und innovationsforschung de Karlsruhe sur les ‘’coûts cachés de l’énergie’’. Si, plus particulièrement, on intégrait les coûts externes de l’électricité (voir tableau ci-dessous), il s’avérerait que l’énergie éolienne serait compétitive dès 1986 (ce qui s’est révélé exact...). Quant au photovoltaïque il le deviendrait en 2010! [30]:

Coûts extérieurs (DM / kWh) de l’électricité d’origine:
Coûts extérieurs de l'électricité selon les sources d'énergie

    Comment également minimiser à ce point le coût de démantèlement des centrales nucléaires? Pour ne pas rester dans le seul cercle franco-français, j’évoquerai la Suisse qui, étant sans doute le pays qui emploie l’énergie hydraulique de la manière la plus intensive, se heurte également à ce problème: «Rien que la mise hors service et la démolition (des centrales atomiques) nécessiteront plus de 16 milliards de CHF. Or, seuls 500 millions sont prévus actuellement à cet effet dans un fonds indépendant. A cela, s’ajoutent 6 milliards sous forme de réserves auprès des diverses sociétés concernées dont certaines vont toutefois passer sous contrôle étranger»[31]
    En ce qui concerne la France, je vous soumets les chiffres "officiels" d’EDF pour 1993:
Coût du kilowattheure = 25 centimes dont Exploitation : 22 %, Combustible : 21 %, Stockage des déchets nucléaires : 1 %, Recherche : 2 %, Investissement : 54 % (dont démantèlement) et coût de démantèlement : 0,9 centimes = 3,6 %[32] (!?). Un peu plus loin, on peut lire: «A ce jour, dans le monde. aucun réacteur de grande puissance n'a encore été totalement démantelé» et surtout « Le chantier du démantèlement présente toutefois une particularité: le volume exceptionnel de matériaux à traiter (de l'acier, du béton, des tuyauteries, du calorifuge, des câbles électriques, etc.) et la grande quantité de déchets d'un niveau d'activité très faible. Dans la centrale à l'arrêt, les substances radioactives sont identifiées, classées et répertoriées. En effet, tous les déchets n'ont pas la même radioactivité, ni la même durée de vie. Pour chaque catégorie, EDF utilise des modes de traitement adaptés». Y a-t-il un commentaire dans l’assistance?...
    Je précise qu’actuellement, chiffre également diffusé par EDF sur le Web, le provisionnement est de 37 milliards sur 100 milliards... estimés. De plus, il est probable que le coût actualisé du démantèlement soit encore plus... sous-estimé que ce que l’on croit, à cause de l’utilisation du taux d’actualisation au lieu du taux d’intérêt porté sur les sommes mises en réserve, ce qui laisse bien confirmer que bien des estimations ne sont en fait que des objectifs, "dérapage" remarqué par plusieurs auteurs[33]. Enfin, comment ne pas se rappeler l’échec de l’essai de privatisation du système électrique britannique?
    La conclusion principale est que toute négligence ou attentisme concernant la non intégration de tous ces coûts continuera à causer une insupportable distorsion de la concurrence en faveur des énergies conventionnelles.

Annotations:
[29] Yves Lenoir, in la Gazette nucléaire No 135/136 p. 5
[30] Social costs of energy consomption, Olaf Hohmeyer (Springer-Verlag), 125 pages, 17 figures, 24 tableaux. Document EUR 11519 (CEE)
[31] Bernhard Stricker, in magazine Sonnen energie No 1/98, p. 6
[32] http://www.edf.fr/html/fr/edf/env/niv3/demant.htm
[33] IPSEP*, in abrégé de l’étude « Le coût de l’énergie nucléaire en Europe occidentale », 1994, tome 2 partie 3E de «Les politiques énergétiques et l’effet de serre», p. 17 et Franco Romerio, CUEPE, in "Les risques des politiques électronucléaires", p. 2