«Comme
convenu voici les réponses aux questions que vous nous avez envoyées.
Nous sommes désolés mais nous n'avons pas pu traiter certaines
d'entre elles car elles ne relèvent pas de nos compétences
ministérielles. Sachez que nous en sommes vraiment désolés.
En tout cas le ministre
était vraiment ravi de pouvoir réaliser cette interview car
l'Ukraine est un pays qui revêt une importance stratégique
pour la France et les enfants de Tchernobyl est une cause qui lui
tient personnellement à cœur.
Bien à vous,
Aurore Longuet
Service de presse
d'Hervé Novelli»
MEYER: «Lundi 17 septembre 2007,
accompagné des représentants de BOUYGUES et de VINCI qui
forment le consortium NOVARKA, vainqueur de l'appel d'offres lancé
par la BERD pour la construction de la nouvelle enceinte de confinement
du réacteur n°4 de la centrale de TCHERNOBYL, vous vous êtes
rendu sur le site du réacteur sinistré puis vous avez assisté
à la signature du contrat.
Que signifie la signature de ce contrat pour
le gouvernement français?»
NOVELLI: «Je suis très heureux
de la signature de ce contrat. En effet, la construction du sarcophage
met fin à une page tragique de l'histoire de l'Ukraine et de la
communauté internationale. Il faudra à l'avenir être
extrêmement strict sur le respect des règles de sûreté,
essentiel pour permettre de créer un climat de confiance dans le
nucléaire, source d'énergie essentielle pour répondre
aux défis énergétiques et environnementaux de demain.
J'ai d'ailleurs tenu à me rendre sur le site du réacteur
accidenté pour adresser un message de solidarité à
tous ceux que la tragédie a touchés et endeuillés».
MEYER: «Cette signature intervient
après quinze ans de tergiversations ukrainiennes, d'appels d'offre
sans cesse modifiés voire annulés et de rivalités
industrielles internationales. L'instabilité politique en Ukraine
depuis son indépendance, la corruption rampante et endémique
dans tous les secteurs d'activité de cette ancienne République
de l'Union Soviétique ne font-ils pas craindre au gouvernement de
la France que ce projet ne puisse pas être mené à terme?»
NOVELLI: «La
réponse n'est pas de notre compétence ministérielle»
MEYER: «Le montant du contrat s'élève
à 432 millions €. Le financement est assuré par un fonds,
le «Chernobyl Shelter Fund» (CSF) constitué en
novembre 1997 à l'initiative du G7, abondé de dons internationaux
(dont 26,3% de la Commission européenne et 5,77% de la France) et
administré par la Banque Européenne pour la Reconstruction
et le Développement (BERD). Considérant la nature exceptionnelle
du projet, les nombreux problèmes techniques et de faisabilité
qu'il reste à résoudre et la durée prévue des
travaux (53 mois d'octobre 2007 à 2012), un dépassement du
coût semble possible. Dans un tel cas, quelle serait la charge financière
supplémentaire pour la France?»
NOVELLI: «Le fonds CSF a reçu
735 M€, dont 308 M€ ont déjà été
déboursés pour la préparation du projet. La France
a contribué à hauteur de 41,7 M€. A titre de comparaison,
la Communauté européenne a donné 204,8 M€, le
Royaume-Uni 47,6 M€, le Japon 42,8 M€ et les Etats-Unis 138,8
M€. La lettre de commande mentionne Novarka comme adjudicataire de
l'appel d'offre de la BERD pour un montant de 312,5 M€ (l'offre initiale)
et une part révisable et actualisable de 139,6 MUSD (en raison du
retard du projet et du renchérissement du coût des matières
premières). La BERD estime que 490 M€ sont nécessaires.
A ce jour, seuls 430 M€ sont cependant disponibles. Une nouvelle reconstitution
du fonds CSF sera donc nécessaire à partir de 2009. Cette
reconstitution nécessitera la participation de l'ensemble des pays
du G7 et de l'UE, conformément au Mémorandum d'Entente signé
avec l'Ukraine en 1995, en fonction des capacités contributives
de chacun.
Dans ce cadre, il
pourrait être envisageable de réfléchir en termes de
contribution par zones géographiques, l'effort, déjà
important, consenti par l'UE et ses Etats membres devant être entendu
comme un tout. Il est également nécessaire que la Russie
et l'Ukraine contribuent de manière significative à cette
reconstitution»
MEYER: «Depuis une dizaine d'années,
le Parquet Général d'Ukraine ne cesse de traiter des dossiers
relatifs à des trafics volumineux de métaux fortement irradiés
sortis illégalement de la zone d'exclusion autour de la centrale
de TCHERNOBYL. En 2003, la «direction» de la centrale nucléaire
a été accusée par la Justice ukrainienne d'avoir vendu
illégalement 315 tonnes de tubes métalliques en cuivre, nickel
et fer. Le Parlement européen vient d'intervenir récemment
à ce propos. Depuis la signature de ce contrat, l'image de notre
pays est associée dans l'opinion publique internationale au démantèlement
de la centrale de Tchernobyl. Le gouvernement français envisage-t-il
des mesures pour contrer ces vols et trafics de déchets radioactifs?»
NOVELLI: «La
réponse n'est pas de notre compétence ministérielle»
MEYER: «Selon une étude publiée
le 17 septembre dernier, réalisée par «The Blacksmith
Institute», un organisme américain spécialisé
sur la question environnementale, la région de Tchernobyl figure
toujours en tête du classement des endroits les plus pollués
de la planète. Au delà de ce contrat obtenu par 2 sociétés
françaises, le gouvernement français dont l'environnement
semble être l'une des priorités actuelles projette-t-il de
participer à la gestion des conséquences environnementales
de cette catastrophe qui se poursuit aujourd'hui?»
NOVELLI: «La
réponse n'est pas de notre compétence ministérielle» |
MEYER: «A l'invitation des autorités,
je me suis rendu sur le site de Tchernobyl. Saisissant spectacle que ce
cadavre de métal et de béton, balafré d'échafaudages
et de contrepoids chargés de maintenir le vieux sarcophage. A plus
d'une centaine de mètres de la centrale blessée, notre compteur
Geiger affichait plus de 300 microroentgen par heure (mR/h) alors que la
valeur moyenne de la radiation naturelle dans notre pays oscille entre
10 et 20 mR/h. Nous avons croisé dans cette atmosphère radioactive
des ouvriers, des techniciens, des hommes en uniforme, des femmes élégantes
mais personne ne portait d'équipement de protection. Les sociétés
BOUYGUES et VINCI affirment que tout le personnel travaillant dans la zone
de montage sera équipé de tenues adaptées et de dosimètres
qui feront l'objet chaque jour d'un traitement spécifique réalisé
sur le site. Ces employés des sociétés françaises
bénéficieront-ils sur place des contrôles, du suivi
et des prestations des organismes de contrôle français, en
particulier de l'IRSN?»
NOVELLI: «La
réponse n'est pas de notre compétence ministérielle.
Il faut se diriger vers le consortium Novarka»
MEYER: «21 ans après l'explosion
du réacteur de Tchernobyl, des millions de personnes consomment
encore aujourd'hui en Ukraine (mais aussi au Bélarus et en Russie)
des produits contaminés, en particulier par le césium 137.
Notre association humanitaire, en collaboration avec l'Académie
des Sciences d'Ukraine, a démontré la contamination encore
actuelle et parfois importante de l'organisme des enfants qui vivent jusqu'à
200 km de Tchernobyl. Le projet prévoit l'intervention de 900 ouvriers
ukrainiens encadrés par un personnel d'encadrement français
composé de 60 expatriés.
Les ingénieurs
et techniciens français vont-ils consommer eux aussi des produits
locaux radioactifs ou bien seront-ils alimentés en nourriture saine
importée, éventuellement de France?
Si de la nourriture
saine est acheminée, les centaines d'Ukrainiens qui travailleront
sur le chantier auront-ils droit eux aussi à cette nourriture?»
NOVELLI: «La
réponse n'est pas de notre compétence ministérielle.
Il faut se diriger vers le consortium Novarka»
MEYER: «Lors de votre récent
séjour ukrainien, vous avez pu visiter le Centre Médical
français de Kiev. Mme Marie-Laurence Simonet, sa fondatrice, vient
d'exprimer son inquiétude quant à la progression depuis quelques
années du nombre de cas de leucémie chez les enfants qui
vivent sur les territoires contaminés par les retombées radioactives
de Tchernobyl. Pour notre part, fort de notre présence constante
depuis une quinzaine d'années auprès des populations de ces
régions, nous pouvons témoigner de la situation sanitaire
dégradée de ces personnes.
Le gouvernement de la
France envisage-t-il d'apporter un soutien sanitaire aux populations qui
continuent de vivre en Ukraine, au Bélarus et en Russie sur des
sols notablement contaminés par la radioactivité de Tchernobyl?»
NOVELLI: «La
réponse n'est pas de notre compétence ministérielle»
MEYER: «Les 15 et 16 novembre 2005,
le Président de la République d'Ukraine a effectué
une visite de travail en France. Lors de sa réception par le Président
Jacques Chirac, ont été abordés le renforcement des
relations bilatérales, notamment économiques et l'approfondissement
du partenariat privilégié UE/Ukraine. Quelques jours auparavant
à Kiev, les deux ministres des Affaires Etrangères ont signé
la Feuille de Route. Deux ans après cette signature, quelles sont
les réalisations effectives?»
NOVELLI: «La "feuille de route" a largement
contribué à relancer la dynamique des relations bilatérales
entre la France et l'Ukraine. Cette feuille de route contient outre des
volets politique, justice, sécurité et culture, un large
volet économique qui fixait des objectifs dans les secteurs de l'énergie,
des transports et des infrastructures. Elle visait également le
suivi de mémorandums signés entre les entreprises françaises
(AREVA, GdF, Air France, Bouygues, 3M, EADS, Sagem, CMA-CGM, Arcelor, Saint
Gobain) et les Ministères ukrainiens. Aujourd'hui, l'essentiel
des objectifs de la feuille de route a été réalisé.
Encouragés
par le bilan positif de la mise en œuvre de la "feuille de route" de 2005,
une deuxième "feuille de route" franco-ukrainienne, pour la période
2008-2009, pourrait être signée, par les Ministres des Affaires
étrangères ukrainien et français, après la
formation d'un nouveau gouvernement.»
MEYER: «A l'occasion d'une rencontre
avec la presse le 12 septembre 2007, M. Jean-Paul VEZIANT, Ambassadeur
de France en Ukraine, a évoqué les nouvelles orientations
de la France en politique étrangère. Le 17 septembre, à
l'issue de la cérémonie de signature du contrat, vous vous
êtes entretenu avec M. Viktor Iouchtchenko, Président de l'Ukraine
au nom du gouvernement français. Quel est l'état actuel de
nos relations politiques bilatérales avec l'Ukraine et quelles sont
les perspectives d'avenir?»
NOVELLI: «Nos relations sont excellentes,
comme l'atteste le rythme de ces visites.
Dans les domaines
qui sont les miens, nos relations sont également bonnes même
s'il existe des marges de progression. En 2006, les échanges commerciaux
avec l'Ukraine ont progressé de 33% et ont dépassé
pour la première fois le milliard €. L'excédent commercial
de la France est passé à 463 M€ en 2006 (contre 347
M€ en 2005), atteignant ainsi un niveau record. La France est aussi
un investisseur de premier plan en Ukraine dans les domaines bancaire,
agroalimentaire et de la grande distribution.
Avec un montant d'exportations
proche de 800 M€ en 2006, la France se place au 8ème rang des
fournisseurs de l'Ukraine. J'ai à l'occasion de mon déplacement
pu témoigner au Président ukrainien la détermination
du gouvernement français à soutenir les efforts de nos entreprises
sur ce marché en plein essor. Après le succès de la
première "feuille de route" signée entre les deux pays en
2005, je souhaite que cet accord soit rapidement renouvelé et contribue
à accélérer le rythme de ce rapprochement.» |