L'approche de l'hiver nous a incités à centrer ce numéro de la Gazette Nucléaire sur les problèmes du chauffage. Le chauffage - qui représente le principal poste de la consommation française de combustible - est en effet depuis quelques années l'enjeu d'une offensive de grande envergure de la part de la direction d'EDF qui, dans le but de conquérir cet immense marché, pousse activement au remplacement des combustibles fossiles par l'électricité, utilisant ensuite le «besoin» de chauffage électrique créé par sa propre propagande pour justifier le développement de l'énergie nucléaire. Or l'utilisation de l'électricité (énergie noble) pour produire de la chaleur (énergie dégradée) est une absurdité énergétique: on considère en effet qu'appliquée aux usages nobles, l'électricité a une équivalence en Tonne Equivalent Pétrole de 1 TEP = 4.500 kWh. Appliquée à la production de chaleur, cette équivalence tombe à 1 TEP = 12.000 kWh. Absurdité énergétique qui se transforme tout aussitôt en absurdité économique: un tel gaspillage ne pourrait être «rentable» que si le développement de l'énergie nucléaire permet de réduire dans des proportions considérables le prix du kW. Il faut une forte dose d'optimisme pour y croire, quand les coûts de retraitement, entre autres, ne cessent d'augmenter et quand tout le monde sattend à un relèvement du prix du minerai. Et ici l'absurdité économique se transforme en danger social, car pour tenter malgré tout de rendre leur électricité compétitive, les responsables du programme nucléaire seront appelés à comprimer tous les postes compressibles - le premier réflexe étant de faire des économies sur la sécurité des installations. Mais la direction d'EDF ne se préoccupe guère de ce genre de problèmes et continue à pousser à la consommation, avec pour objectif d'étendre son empire, n'hésitant pas à se comporter dans les instances de l'appareil d'Etat comme un véritable lobby. Au point parfois de s'opposer à la politique officielle et de contrevenir aux décrets ministériels en matière d'«économies d'énergie», ainsi que le montrent les documents que nous publions ci-après. Le premier de ces documents est constitué des extraits d'une note datée du 27 janvier 1976 et produite dans le cadre d'un groupe de travail sur la pénétration de l'électricité, constitué à la demande du délégué général à l'énergie. On y verra comment, sous la pression des représentants d'EDF, l'Agence pour les économies d'énergie a finalement été obligée de faire des concessions et d'infléchir sa stratégie initiale. Le second document est le texte du décret du ministre de l'Industrie et de la Recherche en date du 6 décembre 1974, réglementant la publicité dans le domaine de l'énergie et interdisant notamment la publicité en faveur du chauffage électrique. Les responsables d'EDF ayant passé outre à cette interdiction, le secrétaire des Amis de la Terre s'est permis de le faire remarquer au ministre auteur du décret. On trouvera ici la réponse de ce dernier (document 3) qui, tout en s'efforçant de réduire l'affaire à un incident marginal, n'en reconnaît pas moins qu'EDF fait preuve d'un certain laisser-aller dans l'application des consignes ministérielles qui ne lui conviennent pas. En attendant, la Direction d'EDF poursuit tranquillement sur sa lancée le développement et non la stabilisation - du chauffage électrique intégré, comme le montre cette lettre du chef de centre de Besançon (document 4). Le centre de Besançon a mis en service 822 installations de chauffage électrique en 1975. Mais le nombre d'installations projetées et déjà décidées est de 1927, soit plus du double. Il ne fait pas de doute que les résultats de 1976 seront encore beaucoup plus brillants que ceux de 1975. (suite)
|
suite:
On notera au passage l'ironie involontaire du préambule: «Il nous a paru intéressant, au moment où les recherches en matière d'économies d'énergie sont au premier rang des préoccupations, de vous communiquer les résultats enregistrés en 1975 en ce qui concerne l'équipement chauffage des logements neufs...». DOCUMENT N°1 ou Quand l'EDF fonctionne comme groupe de pression (Extraits d'une note en date du 27 janvier 19 constitué à la demande du Délégué Général à l’énergie) NOTE 1. Un groupe de travail a été
constitué en octobre 1974 à la demande du Délégué
Général à l’énergie afin d'examiner les conditions
dans lesquelles devrait être organisée la pénétration
de l'électricité.
5. Bilans économiques
p.2
|
7. Le bilan en énergie En termes de consommation d'énergie, il est acquis que le chauffage électrique est plus dispendieux en énergie primaire que les autres modes de chauffage. Toutefois, en raison de la contribution du nucléaire à la production de l'électricité, il peut conduire, après réoptimisation du parc de centrales, à des économies en combustibles fossiles. Mais trois réserves importantes doivent être faites: - d'une part le développement du tout-électrique doit être étroitement coordonné avec celui du nucléaire et, dans l'état actuel des choses, tout développement anticipé du tout-électrique conduit pour plusieurs années encore à des dépenses supplémentaires de fuel. C'est ainsi que tout nouveau logement tout-électrique présentement engagé ne peut apporter de gains en énergie fossile avant 1984[1]... 8. Sur la base des considérations qui précèdent,
le groupe pénétration de l'électricité s'est
efforcé de dégager des recommandations:
1. Les rédacteurs de ce texte ignorent-ils que l'énergie nucléaire qui utilise l'uranium est aussi une énergie fossile, donc épuisable?! (N.D.L.R.). (suite)
|
suite:
DOCUMENT N°2 Le décret du 6 décembre 1976 Le ministre de l'industrie et de la recherche,
Arrête
Fait à Paris, le 6 décembre 1974.
Aux termes de ce décret, le Ministre de
l'industrie et de la Recherche intervient contre la publicité d'EDF:
voir page 4 la lettre du 30 décembre 1915.
Michel d'Ornano p.3
|
DOCUMENT N°3
(suite)
|
suite:
DOCUMENT N°4
p.4
|
Photocopie difficilement exploitable... DOCUMENT N°4 suite
(suite)
|
suite:
Photocopie quasiment inexploitable... DOCUMENT N°4 suite
Le "webmaistre" de la Gazette fait appel à tout lecteur en possession d'un N° plus lisible, MERCI! p.5
|