La G@zette Nucléaire sur le Net! 
N°59/60
DE LA SURETE ET AUTRES FABLES
 

Marcoule et son avenir



INTRODUCTION

     · Devant l'escamotage du débat énergétique par les Pouvoirs Publics, à l'époque des gouvernements de droite, mais également en fin 1981 pour la consultation du Parlement.
     · Devant la montée de groupes de pression matraquant l'opinion publique locale et se livrant au chantage à l'emploi - réacteurs à neutrons rapides ou chômage pour Marcoule, les adhérents du syndicat CFDT, organisation majoritaire ont décidé, le 30 Avril 1983, en Assemblée Générale réunie à Goudargues dans le Gard, de faire connaître leur point de vue:
     - sur la politique énergétique française,
     - sur la place du parc électronucléaire,
     - sur l'opportunité de la filière R.N.R.,
     - sur les problèmes posés par le retraitement des combustibles irradiés qu'ils connaissent très bien pour les assumer chaque jour,
     - et enfin sur la situation du site de Marcoule dans ce contexte pour déboucher sur des propositions concrètes et réalistes.
     Pour la CFDT, il faut le dire tout net: la situation de Marcoule est préoccupante et son avenir serait compromis si l'on ne tenait pas compte des observations de ses adhérents.
     D'où cette plaquette.
     Ce faisant, le syndicat CFDT de Marcoule a bien conscience de ne pas choisir la voie royale de la facilité et du slogan simplificateur et gonflant.
     Au contraire, il choisit délibérément la voie étroite et difficile:
     - de la vérité qui souvent dérange.
     - de la rigueur indispensable dans le contexte de crise.
     - de la solidarité en rejetant toute attitude corporatiste dans l'approche d'un problème qui concerne tout le pays.
     Cette contribution s'ajoutera donc à celles déjà nombreuses publiées par le Syndicat National de l'Energie Atomique CFDT et à celles de la Confédération que le syndicat de Marcoule assume totalement.

I. LA POLITIQUE DE L'ENERGIE

     Depuis toujours, la possession et la maîtrise de l'énergie ont préoccupé les hommes, puis lorsqu'ils ont été organisés, leurs gouvernements.
     En 1974, le Gouvernement Messmer, s'appuyant sur la crise pétrolière provoquée par les firmes multinationales, lance un programme nucléaire extrêmement ambitieux. Après la politique du «tout pétrole» s'amorce ainsi la politique du «tout électrique, tout nucléaire».
     Dès cette époque, sans condamner le recours à l'utilisation de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques, la CFDT se déclare opposée à ce programme gouvernemental.
     Le déroulement des événements donnera raison à la CFDT, au fil des années.

1. Les prévisions de consommation énergétique
1.1. - CONSOMMATION TOTALE D'ENERGIE
a) Historique
     Depuis 1970, les prévisions officielles de consommation d'énergie en France, ont été entachées d'erreurs et surestimées, ce qui conduisaient les prévisionnistes à les réviser à la baisse, ainsi que le montre le tableau ci-dessous:

Date des prévisions
 
Prévisions pour 1985
1970
 
300 Mtep
1973
 
284 Mtep
1974
 
240 Mtep
1975
 
232 Mtep
1978
hypothèse haute (HH)
230 Mtep
1978
hypothèse basse (HB)
215 Mtep
1980
 
219 Mtep
1981
 
 197 Mtep
Actuellement
 
192,2 Mtep

     En réalité, la consommation totale d'énergie a été de:

1979
193,5 Mtep
1980
191,7 Mtep
1981
188 Mtep
1982
185 Mtep
Mtep: millions de tonnes équivalent-pétrole.

b) Position: de la CFDT
     Dès 1975, à l'occasion des travaux du 7ème plan, la CFDT écrivait qu'«il était illusoire et dangereux» de prévoir le doublement de la consommation totale d'énergie en 15 ans et celle d'électricité en 10 ans.
     La CFDT proposait comme objectif, 220 Mtep à l'horizon 1990, chiffre qui apparaît aujourd'hui tout à fait raisonnable étant donnée la consommation effective d'énergie.
     Bien sûr, les hypothèses de croissances étaient plus fortes, mais les prévisionnistes officiels restaient avant tout des producteurs d'énergie qui gonflaient les chiffres pour justifier des investissements exagérés au détriment d'autres secteurs de l'activité nationale, aujourd'hui exsangues.

1.2. CONSOMMATION D'ELECTRICITE
a) Prévisions successives
     Comme pour la consommation totale d'énergie, les prévisions de consommation d'électricité ont été surestimées:

Date des prévisions
 
Prévisions
1974
EDF
580 TWh pour 1990 et
1.000 TWh pour 2000
1980
Giscard / Barre
450 TWh pour 1990 et
688 TWh pour 2000
1981
Rapport Hugon (HH)
416 TWh pour 1990
1981
Rapport Hugon (HB)
363 TWh pour 1990
Avant 1980
EDF
350 TWh pour 1985
Actuellement
EDF
315 TWh pour 1985
En réalité, la consommation d'électricité a été de:
1981     258 TWh
1982     295 TWh
Térawatt heure: milliard de kilowattheure
suite:
b) Prévisions de la CFDT
     En 1980, la CFDT chiffrait à 350 TWh la consommation d’électricité à l'horizon 1990.

1.3. RECAPITULATION: AJUSTAGE DES PREVISIONS
     Pour la préparation du 9ème plan, le groupe des rapporteurs a présenté les résultats d'un travail de réévaluation des prévisions publié dans le rapport Hugon pour l'année 1990. Il s'agit d'un simple ajustement, mais l'ajustage précis ne devrait pas aboutir à des chiffres très différents.

Ces prévisions ajustées par les raporteurs du 9ème Plan sont données dans le tableau ci-dessous:

 
Pour 1985
Pour 1990
Consommation totale en Mtep
192,2
201 - 216,5
Electricité en TWh
295
345 - 367
Charbon en Mtep
25,1
27,4 - 31,2
Hydrocarbures en Mtep
(pétrole/gaz)
107,3
93,2 - 100, 4

     Nous constatons que le chiffre de 220 Mtep avancé par la CFDT pour la consommation totale d'énergie en 1990 est très proche des prévisions officielles réajustées et que le chiffre de 350 TWh pour la consommation d'électricité est parfaitement encadré par la fourchette du tableau ci-dessus.
     Encore une fois les chiffres officiels ont été gonflés et la réalité confirme le sérieux des prévisions de la CFDT.
     Rappelons enfin que les prévisions ajustées correspondent à une hypothèse de croissance économique de 2,2% jusqu'en 1990 et de 4,6% de 1990 à 2000 ce qui est loin de la croissance zéro.

2. La couverture des besoins énergétiques.
     Pour couvrir les besoins énergétiques du pays, en ayant comme objectif une indépendance maximale à l'égard de l'étranger, le gouvernement dispose de l'arsenal suivant:
     - l'hydraulique
     - le charbon
     - les hydrocarbures: pétrole-gaz
     - le nucléaire
     - les énergies dites «nouvelles»
     - les économies d'énergies.
     Après la phase du «tout pétrole», les gouvernements français se sont lancés dans le «tout nucléaire» tout aussi dangereux aux yeux de la CFDT.

2.1. L'HYDRAULIQUE
     On ne constate aucune évolution de 1970 à 1980. C'est la stabilité à 14 Mtep ainsi que dans les prévisions.

2.2. LE CHARBON
     C'est la régression car la consommation de charbon passerait de 31.5 Mtep en l98l à 25,1 Mtep en 1985.
     Cette diminution provient de la baisse de la consommation de charbon pour la production d'électricité par E.D.F. (15,5 Mtep en 1981 et 7,6 Mtep prévus pour 1985) provoquée par la surcapacité de l'équipement électronucléaire.
     La dégringolade de l'exploitation du charbon français qui comptait 234.000 mineurs en 1959 et 61.500 en 1980 se poursuivra si l'on n'y porte pas remède car à un niveau de production aussi bas, les gisements ne seraient plus exploitables et leur déficit serait intolérable pour la collectivité.
     Le charbon, richesse nationale incontestable, après avoir été victime du «tout pétrole» serait définitivement abattu par le «tout nucléaire».

2.3.- LES HYDROCARBURES (pétrole-gaz)
     La consommation a baissé progressivement de 1970 à 1974, a peu évolué jusqu'en 1980, pour réamorcer une baisse en 1981 et 1982. Elle est passée de 132 Mtep en 1973 (117 pétrole + 15 gaz) à 115,4 Mtep en 1981 (90,7 pétrole + 24,7 gaz).
     Le gouvernement Barre en 1980 prévoyait 68 Mtep de pétrole et 42 Mtep de gaz pour 1990. Les prévisions actuelles (107 Mtep pour 1985, 100 Mtep en 1990), confirment la baisse des hydrocarbures dans le bilan énergétique. La surcapacité de raffinage, le maintien des contrats de gaz avec l'étranger (Algérie, URSS) vont poser de sérieux problèmes d'emploi dans le secteur pétrolier.

2.4. L'ELECTRONUCLEAIRE.
2.4.1. Le marché de l'uranium
     · Il est actuellement très détendu, en raison de la diminution des programmes nucléaires dans le monde. Le prix de l'uranium, contrairement à d'autres matières énergétiques n'a cessé de diminuer depuis quelques années, mettant en grave difficulté financière certains pays producteurs comme le Niger.
     · Les réserves mondiales sont importantes et dépendant du coût d'extraction que l'on accepte de payer. Le prix de vente par contre dépend du rapport existant entre l'offre et la demande.
     · Ainsi la faible demande actuelle entraîne un relâchement de l'effort de prospection qui risque d'être préjudiciable pour les décennies à venir.
     · Une augmentation des coûts s'ensuivra, mais qui ne sera que conjoncturelle et ne remettra pas encore l'importance, ni la nécessité des programmes nucléaires.

2.4.2. Fin 1982, le parc électronucléaire français présentait le panorama ci-dessous:
En service:
- nucléaire ancien, 8 tranches soit: 2.335 MWe
- R.N.R. Phénix, 1 tranche soit: 233 MWe
- P.W.R., 21 tranches soit: 19.060 MWe
- Total: 21.628 MWe
En cours de démarrage:
- P.W.R. 900, 4 tranches  soit 3.600 MWe
Démarrages prévus avant 1985:
- P.W.R. 900, 6 tranches soit 5.400 MWe
- P.W.R. 1.300, 5 tranches soit 6.500 MWe
Démarrages prévus avant 1990:
- P.W.R. 900, 3 tranches soit 2.700 MWe
- P.W.R. 1.300, 13 tranches soit 16.900 MWe
- R.N.R. SP.X.l, 1tranche soit 1.200 MWe
Le total s'élèvera à 57.928 MWe en 1990. Cependant, la capacité disponible, tenant compte des arrêts et retards éventuels de démarrage, sera de 56.000 MWe selon EDF.
R.N.R.: réacteur à neutrons rapides
P.W.R.: réacteur à eau pressurisée

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2.4.3. Facteur de charge et puissance disponible du porc électronucléaire
     Pour avoir une rentabilité optimale, il faut que les centrales nucléaires fonctionnent 6.000 à 6.200 heures par an, soit un facteur de charge de 70% environ.
     Dans ces conditions, le parc électronucléaire de 56.000 MWe (EDF) est capable, à lui seul de fournir la totalité de l'électricité dont la France aura besoin en 1990 soit 350 TWh.
     Cette situation extrême est impossible car il est nécessaire de suivre les variations de puissance à l'aide de centrales au fuel ou au charbon et de toute façon, il faut également utiliser les 70 TWh fournis par l'hydraulique.
     Il est admis que la part du nucléaire, compte-tenu de la souplesse demandée au réseau, ne peut dépasser 70% de la puissance totale. Sur la base des 350 TWh prévus en 1990, le nucléaire ne pourra produire plus de 245 TWh, c'est-à-dire qu'il fonctionnera avec un facteur de charge de 50% environ, donc inférieur au seuil de rentabilité optimal.

2.4.4. Conséquences
     Les conséquences de l'existence de ce parc électronucléaire français trop important sont graves et conduisent à une situation de crise. Les principales sont:

a) Sous-utilisation du parc de P.W.R.
     Les 56.000 MWe du parc électronucléaire produisant 245 TWh en 1990 signifient des centrales à un facteur de charge de 50% environ et 4.400 heures de fonctionnement par an au lieu de 6.000-6.200 optimum d'où un gâchis économique considérable.

b) Non-recours au charbon
     Compte-tenu des 70 TWh fournis par l'hydraulique, il ne reste plus qu'environ 20 TWe produits à partir du charbon soit le tiers de 1981. C'est bien la poursuite de la dégringolade de 1985 à 1990.

c)  Pas d'utilité des RNR
     Le parc des PWR est déjà excédentaire, aussi le développement des RNR n'a pas de justification énergétique avant une ou deux décennies et risque d'être périmé au-delà.

d) Peu de développement des énergies dites «nouvelles»
     En particulier des énergies renouvelables telles que le solaire.

e) Peu d'incitation aux économies d'énergies
    Lorsque E.D.F. devra vendre son électricité surabondante.

f) Quant à la vente d'électricité aux pays étrangers
     Cela n'a rien d'évident car il est difficile d'imaginer un Etat ou un gouvernement voisin qui se livrerait pieds et poings liés à la France dans un domaine aussi vital que son alimentation en électricité: aucun chiffre ne peut être avancé par E.D.F. et les contrats ne pourraient être qu'à court terme pour combler un trou passager.

2.4.5. Une situation de crise
     L'industrie nucléaire française, à cause de la surcapacité manifeste du programme, se dirige vers une situation de crise:
     - Peu ou pas de nouvelles commandes immédiates
     L'industrie électronucléaire (programme appliqué de 1974 à 1981) devait, dans l'esprit des promoteurs se partager assez rapidement entre le marché intérieur et l'exportation. Il n'en a rien été, le marché à l'exportation ne s'est pas développé, malgré les cocoricos de Chirac qui voulait vendre des centrales à l'Iran.
     Cette industrie est équipée pour fournir 6 P.W.R. par an et dans l'esprit des prévisionnistes, des 6 unités du départ prévues pour la France, on devait passer à 4 pour la France et 2 pour l'exporta-tion, puis 2 pour. la France et 4 pour l'exportation par exemple.
     - Là aussi, il y a eu erreur dans les prévisions
     Le renouvellement éventuel des réacteurs étant prévu après 20 ans de fonctionnement, la surcapacité de l'industrie nucléaire risque donc d'être durable.
     Le marché extérieur est peu important et s'y disputent de nombreuses sociétés étrangères.

suite:
     La récession économique explique en partie le phénomène par la stagnation de la demande d'électricité. Mais ceci n'explique pas tout et notamment pourquoi la part du nucléaire n'augmente pas dans tous les pays sauf en France. En effet, de nombreux pays ont jugé que le «pari nucléaire» ne valait pas la peine d'être tenté à si grande échelle et que le charbon était préférable pour la production d'électricité.

     - Potentiel de construction des P.W.R. trop élevé.
     Avec une industrie capable de construire 6 P.W.R. par an, il est tout à fait évident que celle-ci se dirige vers une crise très grave sur le plan économique, mais également sur le plan social par ses conséquences sur les travailleurs. Le 27 juillet 1983, le gouvernement a décidé la construction de 2 PWR en 1983-1984, 1 réacteur, peut-être 2 en 1985. Il est clair que des problèmes d'emploi vont se poser et qu'il faut prévoir dès maintenant la reconversion d'une partie de cette industrie.

     - Peu de commandes étrangères.
     L'ensemble de la stratégie a été basée sur des centrales de forte puissance, difficilement vendable à de nombreux petits pays. Il est à craindre que ne s'ouvre un marché de centrales types 300 MWe où la France soit absente.

2.5. PROPOSITIONS DE LA CFDT
     La CFDT avait fait des propositions raisonnables et que personne n'a suivi. Pour 1990 on les trouve dans le tableau comparatif ci-dessous publié en 1980 (en TWh).

 
Barre
(1980)
Rapport Hugon
(1981)
CFDT
(1980)
Hydraulique
64
65
65
80
Charbon
30
20
30
90
Nucléaire
330
270
298
140
Fuel lourd et divers
26
7
23
40
Total
450
362
416
350

     Dans cette optique CFDT, on aurait construit environ 2 centrales par an ce qui aurait permis à l'industrie électronucléaire de fonctionner harmonieusement pour arriver au remplacement des centrales en fin de vie, une part significative étant laissée au charbon national pour éviter l'effondrement de l'industrie charbonnière: production mais aussi port charbonniers, transports, etc.
     Au point où nous en sommes, il ne reste plus qu'à reconvertir une partie de l'industrie électronucléaire qui a encore plusieurs années de travail du fait des commandes engagées. Il faut employer ces années à la préparer pour d'autres productions car en dehors de la partie proprement nucléaire, elle concerne le génie civil, l'électromécanique, l'électronique, l'informatique, la métallurgie, etc. Il est donc possible de lui trouver du travail à l'exportation vers les pays de dimensions moyennes en voie de développement.
     Exemples:
     - centrales hydrauliques.
     - centrales thermiques, surtout à charbon mais aussi à fuel ou au gaz
     - utilisation rationnelle de l'énergie
     - énergies nouvelles et renouvelables.
     En France, l'industrie électronucléaire pourrait contribuer au développement des réseaux de chaleur de l'appareillage liés à l'utilisation rationnelle de l'énergie, etc.
     Plutôt que de dépenser 10 à 15 milliards par an pour construire des centrales nucléaires inutiles, ne vaudrait-il pas mieux aider l'industrie à se restructurer et à se moderniser pour prendre une part du marché mondial dans ces secteurs où l'industrie française a une certaine avance?

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II. LES REACTEURS A NEUTRONS RAPIDES
(R.N.R.)

1. Caractéristiques de cette filière
1.1. L'ARGUMENTATION OFFICIELLE
     Ces caractéristiques sont d'ordre énergétique et politique et ont été très largement diffusées par le Commissariat à l'Energie Atomique (C.E.A.), mais toujours de façon qualitative et incomplète. Ce sont:

a) Augmentation très importante de nos réserves d'uranium par transmutation de l'uranium 238 très abondant en plutonium 239 utilisable. Multiplication par 50 à 70 de nos réserves faisant de la France un pays aussi riche que l'Arabie Saoudite!

b) Amélioration de le sûreté de la production nucléaire d'énergie et diminution du taux d'irradiation globale des travailleurs, basée sur les résultats d'exploitation très encourageants du réacteur PHENIX de Marcoule et sur la faible quantité d'uranium à extraire des mines.

c) Francisation de notre production d'énergie électrique aussi bien du point de vue de la technologie (Les R.N.R. sont spécifiquement français) que sur notre approvisionnement en uranium. (valorisation de l'U238).

d) Possibilité d'utiliser les R.N.R. en incinérateur de plutonium et autres éléments radioactifs à vie longue.

1.2. LES ANALYSES DE LA C.F.D.T.
     Les principaux arguments officiels pêchent par deux grands défauts: d'une part, ils ne chiffrent pas quantitativement de façon valable les avantages de la filière R.N.R., d'autre part, ils omettent un certain nombre d'éléments dont l'importance est capitale.
     Aussi, tout en acceptant l'argumentaire précédent, il est fondamental d'en préciser la portée et les limites.

a) Oui les R.N.R. permettent d'économiser de l'uranium naturel. Mais le facteur de 50 à 70 de multiplication de nos réserves ne sera pas atteint avant plusieurs siècles, voire un millénaire et au prix d'une industrie très complexe, très coûteuse et nécessitant la manipulation de masses énormes de plutonium se chiffrant en dizaines de milliers de tonnes.
En effet:
* Des études plus précises ont montré que le gain en U naturel d'un parc de R.N.R. se développant au rythme de disponibilité du plutonium ne permettrait pas d'espérer une économie bien supérieure à 25 à 30% sur une échelle de 80 ans, en extrapolant notre consommation actuelle. (voir tableau 1 annexe).
* Des études faites par le C.E.A. ont même montré que l'introduction temporaire de R.N.R. à faible gain de régénération (cas des réacteurs Superphénix en projet) était plutôt néfaste sur le bilan d'uranium. Il vaut mieux de ce point de vue, récupérer aujourd'hui le maximum de plutonium produit par les réacteurs PWR pendant que l'uranium est abondant plutôt que de le briller dans des RNR à mauvais gain de régénération.
* Enfin, les masses de plutonium à manipuler seront forcément très importantes puisque l'énergie que l'on compte retirer de l'U238 très abondant passe obligatoirement par sa conversion en une masse équivalente de plutonium.

b) Oui, le taux d'irradiation du personnel exploitant la Centrale Phénix est plus faible que celui des travailleurs de l'E.D.F. exploitant les Centrales PWR.
     Mais, dans la filière RNR, ce n'est pas au niveau du réacteur que se concentrent les problèmes d'irradiation, c'est au niveau du cycle du combustible, externe au réacteur.
En effet:
* La fabrication du combustible à base de plutonium nécessite des installations en chaînes blindées, engendrant des déchets technologiques contaminés en plutonium et entraînant des interventions irradiantes et contaminantes pour les travailleurs.
* Le retraitement des combustibles des RNR est caractérisé par des contraintes spécifiques importantes qui sont:
- la nécessité de retraiter rapidement les combustibles irradiés pour diminuer le temps d'immobilisation du plutonium hors réacteur.
- la radioactivité très importante des combustibles à retraiter due au taux élevé d'irradiation en réacteur et au faible refroidissement.
- les masses de plutonium à manipuler très importantes: environ 5 fois plus que dans le cycle des réacteurs PWR, à puissance électrique fournie équivalente, ce qui entraîne la construction d'une usine de retraitement pour 4 RNR au lieu d'une usine type UP 3 La Hague pour 20-25 réacteurs PWR (à chaînes de traitement du plutonium identiques).
     Cette masse de plutonium en circulation engendre des pertes en matière fissile pratiquement proportionnelle (de 1 à 1,5% de pertes de Pu dans les déchets), d'où un cycle plus polluant pour les RNR que pour les PWR.
- par ailleurs, la mise en service des RNR nécessitant la récupération massive du plutonium des réacteurs PWR (environ 10 à 11 tonnes pour 1 RNR et son cycle) fait du retraitement des combustibles PWR une opération obligatoire. Or, il n'est pas évident à l'heure actuelle que cette opération soit justifiée du point de vue sûreté du stockage des déchets.

suite:
 La voie du non-retraitement commence à être prise très au sérieux dans de nombreux pays qui la considèrent comme beaucoup plus simple, donc beaucoup moins coûteuse, moins irradiante et moins polluante, car:
non génératrice de déchets technologiques dont certains contaminés par des émetteurs aà longue durée de vie (actuellement une tonne de combustible PWR retraitée à La Hague génère 21 mètres cubes de déchets à UP 2. Pour UP 3 la quantité espérée est plus faible).
confinement peut-être plus sûr à long terme des émetteurs a tels que le plutonium, le neptunium et l'américium dans la matrice d'UO2 du combustible irradié en PWR qui est vraisemblablement très peu soluble, en tout cas moins que les verress en sites géologiques profonds.
moins proliférante car le plutonium n'étant pas extrait des barreaux de combustibles, il n'est pas utilisable directement pour confectionner des engins nucléaires à des fins militaires.
     C'est en s'appuyant sur certains de ces arguments, par exemple, que la Suède vient de retirer des combustibles qui devaient être retraités à La Hague, pour les stocker dans leur intégralité en site géologique sur son propre territoire. De même l'Allemagne de l'Ouest commence à s'inquiéter très sérieusement du devenir de ses déchets de retraitement qui lui sont retournés par la Cogéma de l'Usine de La Hague.
- En ce qui concerne l'irradiation collective des travailleurs due à l'extraction de l'uranium, le gain de dose due aux RNR sera du même ordre de grandeur que celui de l'économie d'U naturel à savoir de 25 à 30% pour les 80 ans à venir. Cette diminution relativement faible sera à comparer à l'augmentation des doses due à la fin du cycle des RNR: fabrication et retraitement des combustibles irradiés contenant de fortes proportions de plutonium et de produit de fission.

c) Oui, la filière RNR est de conception et de réalisation essentiellement française, contrairement à la filière PWR.
     Mais est-ce une raison suffisante pour l'accepter à n'importe quel prix et dans n'importe quelles conditions?
     Il est bon de se rappeler l'affaire «Concorde» qui, pour 14 appareils vendus en tout et pour tout, coûta 40 milliards de francs actuels aux contribuables français et britanniques.
     Du point de vue économique, deux points importants sont à considérer: d'une part le coût de cette filière (indépendamment de son utilité), d'autre part, son financement:
c.1) Coût de la filière RNR:
     Il peut se décomposer schématiquement en quatre postes importants:
1. Le prix du réacteur proprement dit:
     actuellement 2,2 fois plus élevé que celui d'un PWR de même puissance (Superphénix 1: 1.300 MWe).
     Ce prix pourrait être ramené à un facteur compris entre 1,6 et 1,8 pour une série de 4 à 8 réacteurs commandés simultanément mais en tout état de cause il reste nettement plus élevé que celui des PWR pour des raisons technologiques. (Présence de deux circuits de sodium, etc.).
2. Le prix des installations de fabrication et de retraitement du combustible:
     Chaînes blindées de fabrication des combustibles, usines de retraitement de plus faible capacité.
     Le coût de ces installations et de leurs annexes sur un site comme celui de Saint-Etienne des Sorts correspond à un montant à peu près équivalent au coût des réacteurs proprement dit:  les 80 milliards lourds de ce projet se décomposent très grossièrement en 46 milliards pour les 4 réacteurs SPX et 34 milliards pour les usines FOR (fabrication du combustible) PURR (retraitement) et les piscines de stockage.
3. Le prix du plutonium nécessaire à la fabrication des deux premiers coeurs (les coeurs suivants étant reconstitués à partir du plutonium recyclé sur le site).
     Le coût de ce plutonium des 2 premiers coeurs dépend essentiellement de la stratégie adoptée en matière de retraitement des combustibles de la filière PWR:
Stratégie du C.E.A.:
     Le retraitement des combustibles PWR est un mal nécessaire, son coût doit donc être intégralement imputé aux KWh issus des PWR. Le plutonium devient alors un sous-produit à prix nul ou très réduit (60F le gramme en 1990 et 100F le gramme en 2000).
Stratégie «américaine»:
     Le stockage des combustibles sans retraitement est considéré comme moins hasardeux qu'après retraitement. Le retraitement devient alors une nécessité liée au développement de la filière RNR et son coût doit donc être imputé au plutonium extrait. A 10.000 francs par Kg d'uranium de coût de retraitement (prix réaliste pour UP 3) le gramme de Pu revient environ 1.100 francs soit un coût de l'ordre de 12 milliards de francs pour les 11 tonnes des deux premiers coeurs cités plus haut et nécessaires pour le démarrage d'un RNR. Ce coût est par conséquent équivalent à celui de la construction du réacteur et double l'investissement initial.
4. Le coût de fonctionnement des réacteurs et des usines de fabrication et de retraitement des combustibles. Ce poste n'est pas très important vis à vis des autres et comparable entre les deux filières PWR et RNR.

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     La valeur de l'uranium résiduel retiré des combustibles PWR étant quasiment nulle, le seul gain à attendre de la filière RNR par rapport à la filière PWR concerne le prix de l'uranium naturel et des unités de travail de séparation isotopique qui sont économisées, mais le coût de ce poste ne représente pas plus de 10 à 15% du prix du KWh PWR et il intervient très peu dans la balance.
c.2) Financement de la filière UNR:
     Comme il vient d'être vu, une des caractéristiques principales de la filière RNR est qu'elle mobilise des masses considérables de capitaux pour des frais de fonctionnement relativement faibles. On retrouve cette tendance dans la filière PWR à un moindre degré. Cette mobilisation de capitaux est d'autant plus pénalisante qu'elle doit intervenir longtemps avant la mise en service des réacteurs (environ 10 ans). Lorsque l'on sait que l'endettement d'E.D.F. fin 1982 avoisinait les 150 milliards de francs pour environ 8 milliards de déficit annuel et que les emprunts de l'organisme public sont principalement effectués en dollars, on mesure combien serait dangereux vis à vis de l'indépendance de la France et de son équilibre budgétaire, le lancement d'un programme RNR d'envergure (80 milliards pour le projet «modeste» de Saint-Etienne des Sorts).
     En conclusion de ce chapitre économique, il convient de retenir que:
• le coût de la filière RNR est très élevé en investissements: de 4 à 6 fois le coût de la filière PWR selon les hypothèses de base.
• la nécessité du recours massif aux capitaux américains pour financer cette filière rend dérisoire l'argument: filière RNR = filière française.
• le coût du KWh ainsi produit, à prix du plutonium nul est du même ordre de grandeur que celui du charbon (environ 33 centimes le KWh)
• Si la stratégie du retraitement obligatoire ne s'avérait pas la bonne, le coût supplémentaire dû à l'extraction du plutonium multiplierait le prix du KWh par un facteur voisin de 2, plaçant la barre très au-dessus du KWh pétrole. (Voir tableau 2 en annexe).

d) Quant au dernier point de notre argumentaire officiel initial concernant la possibilité d'utiliser les RNR en incinérateurs de plutonium et d'éléments radioactifs à vie longue, il convient de faire les remarques suivantes:
• les PWR permettent tout aussi bien d'assurer cette fonction, parfois même avec un meilleur rendement.
• l'objet même de la filière RNR n'est pas de faire disparaître le plutonium, mais au contraire de le produire à partir de notre uranium 238 pour valoriser notre richesse nationale en uranium naturel.

1.3. LES ASPECTS MILITAIRES
     La filière RNR est la seule capable actuellement de fournir du plutonium de haute qualité isotopique. (Pu à plus de 95% d'isotope 239 dans les couvertures radiales) en quantité suffisante pour alimenter le développement de notre force nucléaire tactique.
     Après l'arrêt des réacteurs G 1, puis G 2 et prochainement G 3 de Marcoule, et avant que ne soit mis au point le procédé d'enrichissement isotopique du plutonium par laser, le développement de la force de frappe française sera totalement dépendant du bon fonctionnement des réacteurs Phénix, puis Superphénix et des usines retraitant leurs combustibles: l'atelier SAP-TOR pour le retraitement de Phénix, l'installation ISAI pour le démantèlement des combustibles Superphénix, l'usine UP 1 puis MAR 600 en projet pour le retraitement de ce combustible.
     Cette caractéristique importante des RNR est certainement à l'heure actuelle l'un des seuls avantages qui soit indéniable, bien que rarement, pour ne pas dire jamais avancé dans les débats sur cette filière.
     Il faut noter cependant que le prélèvement à usage militaire du plutonium généré dans les couvertures radiales, porte un coup fatal au taux de régénération, à l'origine déjà faible de cette filière, et rend encore une fois plus douteux le développement de celle-ci à des fins civiles. (cf. le numéro d'avril 1982 de la revue «Energie» d'équipement  national  et  d'informations économiques).

2. Les R.N.R. dans le contexte énergétique global
2.1. - LES RESERVES EN URANIUM NATUREL
     Leur importance est sans cesse remise en cause pour plusieurs raisons. Elles sont traditionnellement sous-estimée pour des raisons militaires (l'uranium est un matériau stratégique) et pour des raisons économiques (maintenir une pénurie apparente pour sauver les cours) et leur inventaire exhaustif est difficile à faire.
     Le volume de ces réserves dépend aussi des coûts de production que l'on accepte de payer: 5 millions de tonnes à 130 dollars le Kg d'U - 14 millions de tonnes à 560 dollars le kg d'U selon l'O.C.D.E. en 1978.
     Enfin, l'inventaire de ce minerai est loin d'être terminé: en témoigne la découverte du gisement de Roxby officialisé en 1982 en Australie qui à lui seul représente 1,2 millions de tonnes soit 30 ans de consommation mondiale en 1982, ainsi que la prise en compte de l'uranium contenu dans les phosphates (4,2 millions de tonnes au Maroc) ou mieux encore dans l'eau de mer (4,5 milliards de tonnes environ) que les Japonais se proposent d'extraire à raison de 2.800 tonnes an en l'an 2000, à l'aide de barges amarrées dans de forts courants marins.

suite:
     En ce qui concerne les réserves auxquelles la France a accès - métropole et participations étrangères - elles permettent de couvrir nos besoins jusqu'en 2050 environ sur la base du parc de PWR installé en 1990 (53,6 MWe – 5.360 tonnes/an, facteur de charge 50%) ceci sans préjuger:
• de nouvelles découvertes en métropole et à l'étranger.
• de l'uranium extractible des phosphates importés comme engrais (600 tonnes/an équivalent à 2 Superphénix de 1.450 MWe)
• de l'amélioration du fonctionnement des PWR.
• de l'amélioration de l'enrichissement par procédé laser.
• de la découverte et la mise au point d'autres filières (RNR à U enrichi, réacteurs à spaliation, fusion, etc.)

2.2. LA CONSOMMATION EN URANIUM NATUREL
     Contrairement aux réserves d'uranium, elle a été très fortement surestimée à partir d'une croissance exagérée de notre demande énergétique, essentiellement pour justifier notre parc PWR et sa nécessaire relève par les RNR.

Prévisions des besoins cumulés en U naturel en tonnes dans le monde
pour 2000
pour 2030
Avril 1975 André Giraud
4 à 6 millions
24 à 42 millions
Début 1982 O.C.D.E
1,1 million
6 millions

     La tendance actuelle est franchement à la baisse aussi bien au niveau national que mondial (moindre consommation énergétique due aux économies d'énergies et à la baisse de la croissance, coupes sombres dans les parcs électronucléaires de nombreux pays...) et ne laisse pas prévoir de violent changement de cap dans les décennies à venir. Si bien qu'il n'est pas raisonnable de parler de rareté de l'uranium avant le milieu du siècle prochain.

2.3. L'UTILISATION DU PLUTONIUM ISSU DES USINES DE RETRAITEMENT EN FONCTIONNEMENT (UPI1Marcoule- UP2 La Hague) OU EN CONSTRUCTION (UP3 La Hague)
     Le plutonium issu de ces usines trouve son débouché naturel pour la fabrication des deux premiers coeurs du RNR Superphénix de Creys-Malville qui doit diverger en fin de l984.
     Dans les années à venir, s'il fonctionne correctement, ce réacteur consommera moins de 2 tonnes de plutonium par an. L'excédent de Pu issu des usines UP1, UP2 puis UP3 pourra alors être «brûlé» de trois façons différentes
a. Dans d'autres RNR refroidis au sodium, du type Superphénix, constituant la suite de cette filière.
     Cette solution est très coûteuse et ne s'impose pas à l'heure actuelle au vu du bilan énergétique prévisible (1er chapitre).
b. Dans les réacteurs à neutron rapides refroidis à l'eau sous pression, dits sous-modérés (RSM). Ces réacteurs, actuellement étudiés par le C.E.A. seront probablement moins coûteux que les RNR au sodium, mais ils cumulent les inconvénients des PWR (circuits d'eau à pression élevée) et des RNR au sodium (assemblages hexagonaux, immobilisation de 13 tonnes par Pu par coeur). Ils peuvent être surgénérateurs au prix d'un faible rendement énergétique.
c. Dans des réacteurs PWR classiques, en remplaçant l'uranium enrichi par du plutonium. Cette solution ne nécessite pas d'études très importantes, et moyennant un surcoût de fabrication d'éléments combustibles au plutonium, elle présente l'avantage de «brûler» le Pu avec un rendement énergétique élevé.
     Elle n'est pas surgénératrice, mais au contraire constitue un incinérateur à plutonium.

2.4. LES AMELIORATIONS CONCERNANT LES REACTEURS NUCLEAIRES
     La filière PWR ayant imposé son quasi monopole de la production d'électricité d'origine nucléaire, de nombreuses recherches sont effectuées pour diminuer la consommation en uranium de ces réacteurs. Parmi les innovations devant déboucher prochainement, retenons:
• la mise en service des assemblages AFA (usine Y de Pierrelatte) démontables et permettant une meilleure combustion de l'uranium
• la mise au point des assemblages à variation de spectre (RVS) permettant une économie de l'ordre de 20 à 25% d'uranium naturel. (accord Westinghouse-Mitsubishi, études Framatome).
• l'augmentation du taux de combustion des combustibles
• l'utilisation possible de réacteurs au sodium à l'uranium très enrichi (11%) permettant des économies de plusieurs centaines de sans nécessité de retraitement.

2.5. L'ENRICHISSEMENT DE L'URANIUM PAR LE PROCEDE LASER
• Technique très prometteuse mais très proliférante, qui verra probablement le jour à la fin du siècle. Elle possède 3 avantages importants:
• faible consommation énergétique par rapport à l'enrichissement par diffusion gazeuse.
• faible coût des U.T.S. (unités de travail de séparation isotopique) permettant d'abaisser la teneur du rejet à des valeurs de l'ordre de 0,08 à 0,05% et d'effectuer une réduction de 20 à 25% des consommations d'uranium naturel par rapport à un taux de rejet de 0,20 à 0,25% en diffusion gazeuse.

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• possibilité de reprise des importants stocks d'uranium appauvri des usines à diffusion gazeuse pour en abaisser la teneur de 0,20 à 0,05%, permettant de remettre sur le marché des quantités considérables d'uranium enrichi, constituant ainsi un véritable stock stratégique disponible sur place.

2.6.  LES RNR DANS LE PARC ELECTRONUCLEAIRE FRANCAIS
     Comme cela a été vu précédemment, le parc PWR étant excédentaire à l'échelle d'une dizaine d'années, sinon plus, toute introduction actuelle de RNR n'apparaît pas souhaitable. Elle coûterait beaucoup trop cher dans une période de crise où la pénurie n'est pas celle de l'uranium, mais des capitaux disponibles. La politique charbonnière française, déjà bien chancelante, recevrait un coup fatal dont elle ne se remettrait jamais.

3. Conclusions et propositions de la CFDT
3.1. - LE DEVELOPPEMENT DE LA FILIERE RNR NE REPRESENTE PAS D'INTERET:
a) Ni à court terme, en raison:
* du parc déjà excédentaire de réacteurs PWR
* du faible coût de l'uranium
* de notre capacité excédentaire d'enrichissement (Eurodif tourne au tiers de sa capacité)
* du coût trop élevé de cette filière et des difficultés de son financement
* des contraintes imposées par le retraitement obligatoire et immédiat des combustibles PWR
* des difficultés d'autres secteurs énergétiques tels que le charbon.

b) Ni à moyen terme, en raison:
* du faible impact à moyen terme de cette filière sur notre demande en Uranium naturel
* de l'effort financier et technologique énorme qu'elle demande et qui se ferait au détriment d'autres recherches ou développements énergétiques.
* de notre isolement croissant au niveau mondial, sur cette voie.
* de l'impossibilité d'exporter cette filière en raison de son caractère proliférant et du cycle complet qu'elle nécessite.

c) Ni à long terme, en raison:
* des masses extraordinairement importantes de plutonium qu'il faudrait manipuler, aux risques liés à cette manipulation et aux déchets qu'elle engendrerait.
* du caractère désuet que risquera de présenter cette filière d'ici quelques décennies.

3.2. IL FAUT ORIENTER NOTRE EFFORT DE RECHERCHE DANS 4 DIRECTIONS
a) Amélioration de notre disponibilité en uranium naturel
* par le maintien et le renforcement de la prospection en France et à l'étranger.
* par la mise en oeuvre de la récupération de l'uranium dans les phosphates que nous importons.
* par la recherche de méthodes d'extraction de l'uranium de l'eau de mer.

suite:
b) Amélioration du rondement de l'enrichissement
* par l'abaissement si besoin est, du taux de rejet au niveau de l'enrichissement par diffusion gazeuse, EURODIF ne fonctionnant qu'au tiers de sa capacité.
* par la mise au point du procédé d'enrichissement par laser qui permettra de mieux rentabiliser nos réserves naturelles et d'utiliser les masses importantes d'U appauvri comme réserve stratégique.

c) Améliorotion de fonctionnement des réacteurs PWR et du stockage en piscine des combustibles irradiés, avec comme objectifs principaux:
* l'abaissement des doses intégrées par les travailleurs des Centra les nucléaires (amélioration des matériaux de gainage, détection des ruptures de gaines, contrôle et élimination des boues, etc.)
* l'augmentation de la fiabilité et de la sûreté des réacteurs (étude de tenue des matériaux à la fatigue, aux chocs thermiques, amélioration de la robinetterie, études des vibrations, des écoulements hydrauliques et du comportement des structures, amélioration des chaines de contrôle et régulation. etc.)
* l'augmentation des capacités de stockage des piscines; compactage des assemblages, démantèlement et consolidation des éléments combustibles, stockages parasismiques, etc.

d) Amélioration du rendement et étude de nouvelles filières de réacteurs
* pour les PWR: mise en oeuvre des assemblages à variation de spectre et augmentation du taux de combustion des combustibles.
* études d'autres filières:
     - Celles des réacteurs au sodium à uranium très enrichi qui permettront de valoriser notre avance technologique dans ce domaine et d'économiser d'importantes quantités d'uranium naturel sans avoir recours au cycle du plutonium.
     - Celles des réacteurs PWR permettant de consommer efficacement le plutonium issu des usines de retraitement actuelles.

3.3. NE PLUS CONSIDERER LE RETRAITEMENT COMME UN MAL NECESSAIRE
     - Mais mettre tout en oeuvre pour essayer de se passer de cette opération coûteuse, délicate, voire dangereuse, et génératrice de volumes importants de déchets technologiques et qui ne procure pas pour autant de solution à long terme pour les déchets radioactifs.
     - Etudier au plus tôt la solution du non-retraitement, les principaux axes de recherches et développement pouvant être:
* étude d'un conteneur de stockage en site géologique profond.
* étude de la physicochimie des dissolutions de l'UO2 et des autres composants des barreaux irradiés en site géologique (conditions réductrices. faible lixiviation).
* étude de sites géologiques potentiellement utilisables: caractérisation, recherches sur le terrain.
* mise en oeuvre d'un laboratoire souterrain permettant d'étudier en vraie grandeur les conditions locales de dissolution des combustibles irradiés, le devenir des produits de dissolution, le comportement thermique des roches, etc.

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III. LE RETRAITEMENT DES COMBUSTIBLES IRRADIES

1. Pourquoi le retraitement
1.1.- DU POINT DE VUE CIVIL
     - Le retraitement a «officiellement» un double but:
     * d'une part, récupérer du plutonium en grande quantité pour alimenter la filière RNR
     * d'autre part, améliorer le conditionnement des déchets issus des centrales nucléaires.
     - Mais les incertitudes liées à ces deux objectifs, empêchent souvent de clarifier le débat:
     * lorsque l'on parle des RNR, il est souvent avancé que cette filière est concurrentielle économiquement, car le plutonium est un sous-produit du conditionnement des déchets et qu'à ce titre il est obtenu à prix très réduit.
     * lorsque l'on parle de la possibilité de ne pas retraiter les combustibles pour des raisons de coût ou de complexité des opérations, on en avance alors la nécessité au titre de la filière RNR
     - Pour la CFDT, il n 'est pas question de laisser tramer de telles ambiguïtés et d'entretenir une telle confusion: la filière RNR, comme nous l'avons démontré, n 'étant pas une filière d'avenir et se situant par ailleurs totalement en aval du retraitement des combustibles, elle ne doit en aucun cas influencer les décisions concernant cette opération. La seule question à laquelle il convient de répondre est alors la suivante:
     Le retraitement permet-il, oui ou non, d'améliorer le conditionnement des combustibles irradiés à moyen et long terme. Si oui, sous quelles conditions et à quel prix?
     Il est bien évident que la CFDT ne peut pas répondre à ces questions qui dépassent ses compétences.
     Par contre, nous considérons qu'elles sont du cadre de compétence du groupe CEA et qu'à ce titre il doit mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour y répondre et proposer des solutions.
     Il serait entre autre urgent que le groupe CEA sorte de l'impasse dans laquelle il a enfermé le. retraitement, en le considérant ainsi qu'il l'a toujours fait, comme une opération urgente et inéluctable alors qu'il existe d'autres voies qui n'ont pratiquement pas encore été étudiées comme le retraitement différé après amélioration du procédé, ou de stockage en l'état des combustibles irradiés, qui peuvent procurer un meilleur conditionnement des déchets, et peut-être même coûter beaucoup moins cher.

1.2. DU POINT DE VUE MILITAIRE (*)
     Le retraitement est une opération OBLIGATOIRE pour des questions de miniaturisation des charges nucléaires, le plutonium remplace aujourd'hui l'uranium enrichi. Aussi les militaires ont ils besoin sans cesse de s'approvisionner en plutonium pour renouveler leurs charges (amélioration de la qualité isotopique) ou augmenter le nombre de celles-ci.
     La haute teneur en isotope Pu 239 et les quantités exigées par les militaires, impliquent comme nous l'avons vu précédement la chaîne d'opérations suivante:

REACTEURS PWR Þ RETRAITEMENT COMBUSTIBLES PWR Þ REACTEURS A NEUTRONS RAPIDES Þ RETRAITEMENT COMBUSTIBLE RNR Þ BOMBES NUCLEAIRES

     Avec la mise au point future de l'enrichissement par laser, cette chaîne sera simplifiée:

REACTEURS PWR Þ RETRAITEMENT COMBUSTIBLES PWR Þ ENRICHISSEMENT LASER Þ BOMBES NUCLEAIRES

     Dans chacun des cas le retraitement des combustibles issus des réacteurs nucléaires s'avère un maillon nécessaire au développement d'une force de frappe nucléaire, avec toutefois des besoins en quantité beaucoup plus faible dans le deuxième scénario.
     La CFDT ayant toujours refusé l'arme atomique, il va de soi qu'en aucun cas elle ne peut souscrire à ne faire du retraitement des combustibles irradiés qu'une opération justifiée par le seul besoin militaire.
     Après avoir posé les bases nécessaires à la poursuite du débat, nous allons passer en revue l'état actuel des usines de retraitement en France avec une étude plus approfondie de la situation à Marcoule.

2. Activités des usines de retraitement

     L'usine UP1 de Marcoule a démarré en 1958 sur des objectifs uniquement militaires et retraitait les réacteurs G1 puis G2 et G3. L'usine UP2 de La Hague retraitait pendant ce temps les combustibles issus des Centrales UNGG de l'EDF, appelées «nucléaire ancien» dans le parc électronucléaire.
     Progressivement, avec la mise en service de l'atelier HAO à La Hague, cette usine a été reconvertie pour le retraitement du parc de PWR qui démarrait depuis 1974, et l'usine de Marcoule a été affectée au retraitement des UNGG en parallèle avec ses activités militaires. Il faut noter que le «nucléaire ancien» d'UNGG sera pratiquement arrêté dans les années 1990, ce qui limite l'horizon de UP1 qui par ailleurs après plus de 30 années de fonctionnement sera dans un état de vétusté qui la rendra inutilisable dans des conditions de sûreté correctes.
     L'atelier pilote du S.A.P. (service des ateliers pilotes) de Marcoule retraite également le coeur de Phénix et les couvertures sont traitées à UP1. Par la suite, le coeur de Superphénix devrait être retraité à TOR-Marcoule, les couvertures dans un atelier à construire, après démantèlement à ISAI en cours de construction à Marcoule.


* Voir dossier "Armement"
suite:
     On voit donc bien le partage des taches se dessiner entre les sites de La Hague (retraitement des PWR) et de Marcoule (queue du nucléaire ancien, usage militaire, Phénix et Superphénix).
Ces activités ne vont pas sans problèmes et constituent le talon d'Achille de la stratégie française. C'est ainsi, qu'à la suite du débat parlementaire d'octobre 1981, le ministre de l'industrie a constitué, auprès, du Conseil Supérieur de la Sûreté Nucléaire, une Commission scientifique chargée d'analyser les problèmes posés par la gestion des combustibles irradiés et des déchets radioactifs. Cette Commission, appelée Commission Castaing du nom de son Président, membre de l'Académie des Sciences, comprenait douze membres, dont le Haut-Commissaire du C.E.A. M. Jean Teillac. Une lettre de mission datée du 11 décembre 1981 précisait que son rôle consistait à examiner les projets des extensions de l'usine de La Hague UP2/800 et UP 3 A et à faire «toute propositions pour permettre à la France de maintenir les compétences technologiques nécessaires pour assurer dans les meilleures conditions la gestion des combustibles irradiés».
     La Commission Castaing n'avait donc pas à se prononcer sur le bien-fondé des constructions entreprises à La Hague, ni sur le choix de la stratégie PWR - RNR.
     La CFDT a pour sa part, regretté que la conception des nouvelles usines ait été définitivement arrêtée et les travaux entrepris sans attendre le rapport de la Commission.

3. Quelques conclusions de la Commission CASTAING *

     Le rapport de la Commission met en évidence que des améliorations certaines ont été apportées aux techniques utilisées dans les usines actuelles et note que les conditions de travail se sont améliorées depuis 1980 â l'usine de La Hague. La Commission précise «Ces améliorations devront faire l'objet d'une vigilance constante, d'autant qu'un certain nombre de situations difficiles subsistent encore. Les seules modifications techniques ne suffisent pas. Il importe d'instaurer un autre type de relations humaines..., une plus grande écoute et un meilleur dialogue s'imposent.
     Les personnes qui assument les risques doivent être associées aux mesures concernant la réduction de ces risques
     Bien que la Commission soit muette sur Marcoule, la CFDT voit dans ces quelques lignes une reconnaissance implicite de son action menée sur les deux sites pour analyser avec les travailleurs les problèmes posés dans les usines et proposer des solutions.
     La Commission pose cependant de nombreuses interrogations sur la possibilité d'assurer, dans les usines actuelles, une protection suffisante du personnel et de l'environnement, ainsi que sur la gestion à long terme des déchets provenant du retraitement.
     En outre, elle confirme que l'entreposage en piscine des combustibles irradiés pendant plusieurs années, ne pose pas de problème notable, mais qu'il permettrait au contraire d'améliorer sensiblement les techniques de retraitement.
     Une meilleure séparation des produits de fission et des transuraniens, la mise en oeuvre de procédés nouveaux de compactage des déchets technologiques permettraient une gestion plus sûre des déchets radioactifs du retraitement.
     Enfin, la Commission Castaing affirme très clairement que le retraitement doit être sérieusement mis en balance avec des méthodes de stockage direct des combustibles irradiés et demande à ce que des études très approfondies soient entreprises:
     - sur un retraitement plus poussé comportant notamment une meilleure séparation des différents produits (émetteurs a à vie longue)
     - sur les procédés de stockage des combustibles irradiés et des déchets radioactifs. Ce stockage doit être réversible pour permettre la reprise des combustibles ou des déchets en vue de leur retraitement ou de leur stockage définitif.
     Ces études devront permettre le choix, après 1990, entre le retraitement, le stockage des combustibles irradiés ou une solution mixte faisant appel aux deux procédés de gestion.
     Ce choix est d'ailleurs également lié, on l'a vu précédemment aux besoins en plutonium militaire ou civil et à l'avenir ou non de la filière RNR.
     - le droit d'intervention des C.H.S.C.T (Comités d'Hygiène, de Sécurité et d'Amélioration des Conditions de Travail) pour arrêter une installation dangereuse.
     - le renforcement des Services de Radioprotection et l'établissement d'une législation garantissant leur indépendance ainsi que celle des organismes de sûreté (IPSN, SCSIN, SCPRL...).
     - l'obligation de saisir le Comité d'entreprise de tout nouveau projet et la possibilité matérielle pour celui-ci (heures de délégation) d'intervenir sur les choix techniques.
     - l'accès aux dossiers de sûreté des usines.
     La CFDT continue d'exiger:
     - que toute l'information soit donnée sur les coûts attachés à la gestion des combustibles irradiés
     - que les contrats de retraitement étrangers soient renégociés et transformés en contrats de stockage à moyen terme.
     - que le gouvernement s'engage à faire poursuivre les études sur toutes les techniques de gestions des combustibles irradiés.
     - que la définition et le suivi du programme de gestion des déchets soient confiés à une structure pluridisciplinaire indépendante, autonome par rapport aux opérateurs industriels.
     - que la Commission Castaing poursuive ses travaux, notamment pour examiner la situation de l'usine de Marcoule et indique les technologies ou installations qui n'offrent pas toutes les garanties requises et pour lesquelles de nouvelles études doivent être entreprises.


* Voir Gazette N°61

p.8

IV. MARCOULE DANS LE CONTEXTE GENERAL

1. LES ACTIVITES DU SITE DE MARCOULE
     Il existe deux Etablissements distincts sur le site de Marcoule: le Centre d'Etudes Nucléaires du C.E.A. de la Vallée du Rhône et l'Etablissement de Marcoule de la Cogéma.
     En mars 1983, le premier employait 1.002 travailleurs, le second 2.250 (son effectif autorisé est de 2.345) ce qui porte l'effectif global relevant du Groupe C.E.A. à environ 3.350 salariés.
     A cet effectif, il faut rajouter un certain nombre d'entreprises sous-traitantes qui opèrent en permanence sur le site et qui porte le nombre total à plus de 4.000 travailleurs.

1.1. LE CENTRE D'ETUDES NUCLEAIRES DE LA VALLEE DU RHONE DU CEA (CEN-VALHRO)
     Ce centre regroupe essentiellement:
     - le réacteur Phénix
     - le Service des ateliers pilotes (SAP), qui s'écarte de plus en plus de la notion de pilote pour devenir un atelier de production en ce qui concerne:
     - le retraitement du coeur de Phénix
     - bientôt avec TOR le retraitement à petite échelle du coeur de Superphénix.
     - le Service des Déchets de haute activité qui poursuit les travaux sur la vitrification des déchets liquides radioactifs (SDRA)
     - le Service des protoypes industriels (SP1) qui met au point en milieu inactif, les principaux appareils d'UP3, future usine de La Hague
     - le Service d'industrialisation des procédés, chargé de contrôler et valoriser les travaux du CEA en matière de retraitement
     - les Installations de surveillance des assemblages irradiés, en construction, pour Superphénix (ISAI).
     Toutes ces unités dépendent de l'IRDI (Institut de Recherche technologique et de développement industriel).
     Sont également implantés sur le site:
     - un service de l'Office des Rayonnements ionisant (ORIS) qui met au point, réalise et commercialise des applications médicales des radioéléments (pour plus de détails se reporter à l'annexe 10).
     - quelques unités de plus faible importance qui dépendent de l'Institut de Protection et de Sureté Nucléaire (IPSN):
     * Unité centrale de déclassement des installations nucléaires.
     * Service d'évaluation de la sûreté des laboratoires et usines
     * l'assistance en protection et sûreté nucléaire.
     Enfin, une direction avec son support logistique. Le tout, totalisant environ 1.000 travailleurs.

1.2. L'ETABLISSEMENT COGEMA DE MARCOULE
     Comme il a été indiqué dans les chapitres précédents, cet établissement est chargé d'alimenter la force de frappe française en plutonium et de retraiter les combustibles irradiés du «nucléaire ancien» de l'E.D.F. c'est à dire les réacteurs UNGG dans l'usine UP1 en activité depuis 1958.
     Il dispose donc:
     - d'un atelier de dégainage qui sépare mécaniquement les barreaux de combustible des gaines avec ses piscines de stockage.
     - d'une usine de retraitement équipée d'une métallurgie du plutonium à usage militaire et d'une unité de conversion en oxyde à usage civil.
     - d'un atelier de vitrification des effluents liquides de haute activité (AVM).
     Autour de ces unités de production gravite un ensemble d'autres ateliers indispensables qui fournissent des prestations aussi bien à la COGEMA qu'au CEN-VALRHO:
     - la station de traitement des effluents
     - l'atelier de décontamination
     - l'atelier de compactage des déchets solides
     - les laboratoires d'analyses
     - le service de protection contre les radiations (SPR)
     - le service chargé de la sécurité (FLS)
     - les services d'intendance et de direction
     et d'autres encore, non moins importants puisqu'ils regroupent à eux seuls 900 travailleurs, assurant l'entretien, la construction de nouvelles unités, etc.
     N'oublions pas enfin les réacteurs à usage militaire que sont G3 et Célestins toujours en fonctionnement.
     On constate qu'autour de l'usine de retraitement proprement dite qui fonctionne avec un effectif voisin de 150 personnes 24 heures sur 24, gravite tout un ensemble d'unités qui portent l'effectif global à 2.245 et montrent à l'évidence la complexité des opérations.

suite:
2. LA SITUATION ACTUELLE DE MARCOULE
2.1. LE RETRAITEMENT DES U.N.G.G. (réacteurs à uranium naturel E.D.F. au graphite et refroidis au gaz carbonique)
     On a vu précédemment que UP1, usine de Marcoule avait pris le relais de l'usine UP2 de La Hague pour le retraitement de ces combustibles. Les problèmes liés aux taux de combustion des combustibles d'EDF qu'avait connus La Hague sont alors apparus à Marcoule et ont affecté l'ensemble de la chaîne:
     • le dégainage
     a connu des difficultés croissantes au fil des années et des incidents multiples, mécaniques ou physiques tels que des incendies de barreaux ou explosion, avec contamination des locaux, parfois des travailleurs, accompagnés d'irradiation.
     Le dernier en date survenu le 22 mars 1983 a consisté en un incendie des déchets de gaines de magnésium contaminés, suivi d'une violente explosion mettant prématurément fin au fonctionnement de cette installation avant que ne soit prête celle qui devait prendre le relais: MAR 400.
     Le déficit du tonnage retraité (245 tonnes prévues pour 1983) sera selon les affirmations de la Direction du Centre au minimum de 100 à 120 tonnes si le démarrage de l'atelier MAR 400 se passe bien.
     • l'usine UP1
     fonctionnait dans des conditions acceptables pour le retraitement militaire à faible taux de combustion des réacteurs G1 - G2 et G3. Depuis le démarrage du retraitement des EDF, l'usine a connu également de gros problèmes d'irradiation compliquant énormément l'entretien des installations.
     Par ailleurs, cette usine a démarré en 1958 et certaines parties essentielles à son fonctionnement, et irremplaçables n'ont jamais connu le moindre contrôle depuis cette date. Il n'est pas évident qu'UP1 permette de terminer le retraitement du nucléaire ancien jusqu'en 1990-1995 ce qui lui ferait une durée de vie de 37 ans. Des études ont montré que personne n'était prêt à prendre le risque de lui faire retraiter Superphénix, dans quelques années, bien qu'actuellemnt elle retraite les couvertures de Phénix dans de très mauvaises conditions.
     • la station de retraitement des effluents
     depuis le retraitement des EDF cette station a été rapidement saturée et engorgée de boues radioactives que la chaîne d'enrobage dans le bitume n'arrivait plus à traiter du fait là aussi de l'augmentation du taux de combustion et par là même du volume des boues radioactives dans les effluents.
     Cette station fonctionne actuellement dans de très mauvaises conditions et comme elle et indispensable aussi bien pour les activités du CEN/VALRHO que pour celles de la Cogéma, il est urgent d'en construire une autre, mais encore faut-il qu'un investissement aussi important soit justifié par un avenir du centre plus lointain que 1995.
     Pour l'heure une nouvelle chaine d'enrobage des boues va être construite en urgence car sans cela, ce serait l'asphyxie du site de Marcoule.
     • l'atelier de vitrification
     depuis sa mise en service cet atelier n'a pas posé de problèmes majeurs. Sa capacité nominale de vitrification étant supérieure aux besoins de l'usine UP1, le temps alloué aux opérations d'entretien est suffisant pour assurer une marche satisfaisante des installations. Notons cependant l'accumulation croissante des déchets technologiques et le délicat problème du pont roulant qui n'a pas été étudié aux normes nucléaires et qui donne des signes de fatigue et devra être démantelé.
     • les autres unités
     elles ont suivi l'évolution générale du site dans le sens où leurs activités sont étroitement dépendantes telles que l'atelier de décontamination qui a eu affaire à des radioactivités croissantes ou l'atelier de compactage des déchets solides inadaptés aux déchets a.
     On a par ailleurs assisté depuis 1958, à une aggravation de l'accumulation des déchets radioactifs de toute nature sur le site de Marcoule, conséquence du retraitement des combustibles irradiés de l'E.D.F.:
     - gaines des barreaux de combustible accumulées depuis l'origine
     - agrandissement des silos de fûts de boues bitumées.
     - déchets technologiques augmentés par la mise en service de l'atelier de vitrification des produits de fission.
     - produits de fission liquides, puis vitrifiés et stockés dans des puits.
     - solvants et huiles contaminés.
     - réacteur G2 arrêté, en attente de démantèlement.
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     - atelier 100, ancienne fin de chaîne Pu de UP1 arrêtée depuis de nombreuses années et contenant des quantités de plutonium non négligeables, auxquelles sont venus s'ajouter des appareillages démantelés de la fin de Pu actuelle, contaminés en plutonium panneaux de boîtes à gants, boîtes à gants, cuves, appareils divers, etc.
     - de nombreux fûts de déchets riches en plutonium et théoriquement incinérables et qui attendent que cette opération soit effectuée stockés ici ou là à l'intérieur de UP1.
     - cendres riches en plutonium provenant de l'incinération des déchets en attente de dissolution et de recyclage (opération peu évidente).
     - d'autres déchets émanant des laboratoires.
     - du béton contaminé par des fuites d'installations.
     - etc.

2.2.  LE RETRAITEMENT DES COMBUSTIBLES PHENIX AU SAP
     • la chaîne actuelle (TOP) qui doit s'arrêter fin juillet 1983 n'a jamais fonctionné dans des conditions correctes. Elle a connu notamment lors de la mise en actif d'un nouvel atelier d'extraction du plutonium (3ème cycle Pu en cellule 65) une des plus dures interventions humaines depuis la création de Marcoule: il a fallu couper une colonne pulsée en milieu fortement contaminée en Pu! La CFDT était pourtant intervenue pour différer le démarrage de cette installation, les essais inactifs ayant été écourtés pour des raisons de production. Depuis cette cellule n'a jamais fonctionné correctement, entraînant pour les intervenants des irradiations et contaminations importantes.
     L'atelier de traitement mécanique de cette même installation a connu d'énormes problèmes dus à la vétusté des installations, comme la panne d'une grue, fortement contaminée qui bloqua la chaîne pendant deux mois.
     • La nouvelle chaîne TOR (Traitement des Oxydes Rapides) dont le démarrage est prévu en 1985 est en cours de montage. On peut déjà être soucieux étant donnée la conception de l'atelier TOR 3 - premier cycle d'extraction - dont la complexité et le manque de place rendront les interventions très difficiles, voire impossibles, même avant la mise en actif. Quant à l'atelier de traitement mécanique TOR 1, il semble déjà poser des problèmes, et une mise en actif avant la fin des essais préliminaires est à craindre si le démarrage doit être réalisé avant janvier 1985.
     - La mise en service de cette nouvelle chaîne risque donc d'être problématique et entrainera à coup sur des nuisances importantes pour les travailleurs qui seront chargés de l'exploiter. Il est par ailleurs à déplorer que ceux-ci n'ait pratiquement pas été consultés, lors de la conception et que c'est eux qui en feront les frais.
     Face à cette situation la CFDT dénonce les objectifs mercantiles (rapporter le maximum d'argent à la Division) et publicitaire (montrer que l'on sait retraiter les combustibles de la filière rapide) que le CEA assigne à un service d'ateliers pilotes dont la fonction principale devrait être de faire de la recherche et développement en retraitant des combustibles à cadence réduite.

3. Bilan - Propositions de la CFDT
3.1. BILAN
     On l'a vu, hormis le réacteur Phénix, toute l'activité de Marcoule dépend de l'existence d'une station de traitement des affluents liquides.
     Cette station est actuellement à bout de souffle et provoque déjà des arrêts des installations de production que ce soit Cogéma ou CEA.
     Le dégainage ancien des UNGG a terminé son existence par une explosion de gaînes de magnésium accumulées dans un transporteur vibrant laissé à l'abandon de septembre 1982 à mars 1983. Une commission d'enquête a été demandée par la CFDT. Il doit être relayé par un nouveau dégainage appelé MAR 400 qui ne pourra retraiter Bugey que si un nouvel atelier est mis en place en tête de UP 1 accompagné d'une nouvelle station de traitement des effluents.
     En mai 1983, le retraitement des UNGG-EDF est totalement arrêté sur Marcoule.
     L'usine UP 1 mise en service en 1958 est à la merci d'une défaillance grave qui mettrait fin brutalement au retraitement des combustibles des réacteurs UNGG de l'EDF, et entraînerait la paralysie d'une grande partie des autres installations qui lui servent de support. Actuellement, Marcoule poursuit donc ses activités sur le fil du rasoir, faute d'avoir engagé à temps les investissements nécessaires.
     Le service des ateliers pilote (SAP-CEA) dont dépend également l'emploi d'un nombre important de travailleurs, va cesser ses activités mi 83 pour les reprendre à la mise en service des nouvelles installations TOR en 1985. En attendant va se poser un problème de reclassement temporaire du personnel chargé de l'exploitation. En ce qui concerne le plus long terme deux projets sont actuellement dans les cartons. Il s'agit:
     - de MAR 600, unité COGEMA destinée à retraiter les combustibles de 3 réacteurs à neutrons rapides type Superphénix.
     - d'ATALANTE, unité CEA de recherche et développement sur la chimie du retraitement, destinée à prendre la relève des installations du CEA/DGR de Fontenay-aux-Roses (région parisienne) devenues vétustes et trop proches d'agglomérations urbaines.

suite:
     Les deux installations dont la mise en service n'est pas prévue avant 1992, dépendent en fait de la politique en matière de retraitement et de filière RNR que la France mettra en oeuvre. Elles seront très liées à la façon dont seront prises en compte les conclusions de la Commission Castaing (sous la responsabilité du Conseil Supérieur de la Sûreté Nucléaire) et nous avons vu, qu'en la matière, la sagesse n'était pas à la précipitation.
     En ce qui concerne MAR 600, il risque de se poser rapidement le dilemme suivant: doit-on lancer la réalisation au plus vite de cette installation pour sauvegarder l'emploi sur Marcoule à tout prix, ou doit-on attendre que les procédés de retraitements actuels, mal adaptés à un stockage à long terme des déchets (nécessité de dépaver les émetteurs alpha, présentant en plus de grandes quantités dans les combustibles de la filière RNR) soit améliorés et mis au point industriellement?

3.2. LES PROPOSITIONS DE LA CFDT
     La CFDT et les travailleurs de Marcoule se trouvent confrontés à un problème extrêmement complexe, que certains simplifient exagérément:
     - Terminer les programmes de retraitement à court et moyen terme, puis assurer l'avenir du site qui non seulement contribue à maintenir des emplois dans le Gard-Rhôdanien, mais aussi en génère par la sous-traitance et les retombées économiques des salaires versées.
     - Ne pas tomber dans le travers simplificateur et corporatiste en entretenant de faux espoirs tels que la construction de 4 réacteurs à neutrons rapides, sans prendre la précaution élémentaire de les inscrire dans un développement énergétique national cohérent, assurant les besoins du pays et prenant en compte toutes les sources d'énergie, en particulier le charbon national qui on l'a vu précédemment serait irrémédiablement condamné.
     La CFDT, bien que majoritaire avec presque 40% des voix des travailleurs de Marcoule du CEA et de la COGEMA, alors que 6 organisations syndicales sont présentes, est seule sur ce qu'elle considère être le terrain de la vérité, de la rigueur et de la solidarité:
     - Véritésur les difficultés réelles du retraitement des combustibles irradiés.
     - Rigueur sur la manière d'aborder les problèmes que posent à la fois la crise internationale, le bilan énergétique national, le bien fondé de la stratégie du CEA, ceux du retraitement dont la faisabilité industrielle n'est pas démontrée, les déchets nucléaires.
     - Solidaritéentre les travailleurs des différentes productions d'énergies françaises qui se concurrencent actuellement: citons le charbon contre le nucléaire avec leur cortège de problèmes d'emplois. Depuis plusieurs années, le Syndicat de Marcoule alerte les Directions et les autorités sur la situation précaire du site. Etant conscient de la faiblesse de ses moyens d'investigation, il demande également depuis plusieurs années qu'une Commission d'experts vienne enquêter pour faire le bilan et l'état des lieux de Marcoule de manière à dégager, par le débat avec les travailleurs et leurs syndicats, des propositions crédibles pour l'avenir. Cette initiative de la CFDT n'a pas eu actuellement, la réponse positive que le syndicat espérait.
     Avec l'arrivée de la gauche au pouvoir, et les remarquables travaux de la Commission Castaing, le syndicat CFDT a, par l'intermédiaire de son Syndicat National de l'Energie Atomique (le SNPEA/CFDT) et de la Confédération, réitéré sa demande de Commission «type Castaing» au Président du Conseil Supérieur de la Sûreté Nucléaire: l'avenir dira s'il a été entendu.
     De son côté, la Direction Générale de la Cogéma, sans doute très préoccupée de l'avenir du retraitement de PWR à La Hague qui nécessite des investissements énormes et qui lui pose des problèmes financiers, fait la sourde oreille en ce qui concerne Marcoule et refuse le contact direct avec la CFDT pour noyer et tronquer le débat.
     Devant cette situation, le syndicat CFDT, pense que les propositions de la Commission Castaing doivent être appliquées sans attendre sur Marcoule et complétées par des mesures prenant en compte les caractéristiques techniques et historiques propre à ce site:
     - Réexaminer la notion de secret défense avec les restrictions au libre accès à l'information qu'elle entraîne, afin que des données aussi importantes que les taux de perte en plutonium dans les déchets ou les rapports de sûreté des installations soient accessibles à toute organisation qui en fait la demande. Il serait de même possible de déclasser certaines installations (traitements des déchets par exemple...) qui n'ont rien de «confidentiel militaire» afin de faciliter le débat.
     - Mettre en oeuvre une opération ménage du site: c'est à dire après enquête exhaustive de tous les déchets accumulés depuis l'origine de Marcoule, rechercher et mettre en oeuvre les traitemens nécessaires à un bon conditionnement de ces déchets qui soit définitif ou bien temporaire avec reprise possible si aucune solution technique actuelle ne convient à long terme. Cette opération peut nécessiter des moyens technologiques importants, ainsi que des effectifs. Il peut être nécessaire de construire de nouvelles unités de traitement des déchets.

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     - Assurer la fin du retraitement des UNGG: il peut être nécessaire d'arrêter l'usine UP 1 soit pour faire «le ménage» (une salle est condamnée depuis plusieurs années pour contamination importante), soit pour rajeunir ou construire de nouveaux ateliers afin d'éviter un arrêt définitif du type «22 mars 83 au dégainage».
     - Assurer le traitement des effluents liquides: la station actuelle et constamment saturée et n'atteindra pas les années 90-95. Envisager, dans le même esprit que précédemment une opération «ménage» des déchets accumulés et surtout hâter la mise en chantier d'une nouvelle station. Parallèlement, envisager et réaliser tout ce qu'il est possible d'être fait pour recycler les effluents liquides dans les usines (UP1 ou le SAP) ou dans les laboratoires.
     - Au dégainage, après les conclusions de l'enquête en cours demandées par la CFDT, tout mettre en oeuvre pour que celui-ci soit un secours du nouveau MAR 400 qui n'a pas fait ses preuves.
     - Amélioration du procédé actuel: bien que des études soient menées dans d'autres centres, en particulier Fontenay-aux-Roses, certains travaux complémentaires peuvent être menés à Marcoule par la section Génie Chimique des Services de Production, les Bureaux d'Etude et les services CEA-SA P et SPI qui sont concernés.
     - Marcoule peut également apporter sa contribution à la caractérisation des déchets contaminés en émetteurs apour l'expérience acquise aux ateliers de la fin Plutonium de UP 1 et du SAP.
     - Etude du compactage des déchets: Marcoule pourrait mettre en oeuvre un pilote qui pourrait étudier l'absorption par l'usine elle-même de ses propres déchets immédiatement conditionnés sans transport et manipulations dangereuses pour les travailleurs et l'environnement. Cette installation pourrait être appliquée industriellement à l'usine UP3 de La Hague.
     - Vitrification des produits de fission: améliorer la tenue à la lixiviation des verres actuels et se pencher sérieusement sur le devenir à long terme des transuraniens contenus dans les terres en cours de fabrication.
     - Conditionnement des coques et embouts, des boues de coprécipitation: accélérer les études d'industrialisation des procédés devant remplacer le bétonnage et le bitumage actuels (fusion en auto-creuset, céramisation... pour que ceux-ci soit adaptés dans les usines futures (UP 3, MAR 600).
     - Exploitation de l'usine: mettre en oeuvre rapidement un fichier des incidents, exploitable aussi bien par les unités COGEMA (Usine UP2, Service Maitre d'Ouvrage de UP 3...) que par les unités CEA, afin que toute l'expérience d'exploitation puisse être mise à profit.
     - Développer la robotique en milieu nucléaire par la création de hall d'essai du matériel télédémontable.
     - Activités non liées au retraitement des combustibles:
     Elles sont actuellement marginales de part les effectifs qu'elles mobilisent, mais pourraient se développer de façon plus importante, afin de diversifier las activités du site et le rendra moins fragile vis à vis de la conjoncture. En effet, les potentialités existent et les moyens à mettre en oeuvre ne sont pas très importants (moins d'investissements lourds que dans le retraitement). Les principales unités concernées sont:
     - L'ORIS, dont le développement du L.A.P.A.M. (Laboratoire des produits pour analyse médicale) devrait entraîner:
     * un renforcement du secteur radio-immunologique
     * de nouvelles activités mettant en oeuvre d'autres techniques non radioactives pour l'analyse médicale in vitro.
     * la conception et la fabrication d'appareillage automatique utilisant des produits bio-médicaux.
     L'avenir de ce service bien que prometteur au niveau de l'embauche parce que les besoins sociaux le justifient, risque de réserver quelques soucis au personnel, car considérée comme «rentable» cette activité se marginalise de plus en plus à l'intérieur du C.E.A.
     - ERIES, groupe d'intérêt économique entre le CEA et la société ROBATEL-SLPI, sera probablement transformée en filiale du CEA avec capitaux CEA, SGN, EPICEA, etc. Cette société a toujours fonctionné avec de petits moyens, essentiellement fournis par le Groupe de Génie Chimique (GGC) du SAP-CEA.
suite:
     Son domaine d'activité couvre:
     - l'extraction liquide-liquide et solide-liquide
     - la filtration
     - le cracking
     - la distillation
     Ses applications ont trouvé des débouchés dans:
     - la dépollution; déphénolage, récupération d'acides, etc.
     - l'industrie chimique: carbo et pétro-chimie, pharmacie industrielle, métaux précieux, hydrométallurgie du Cu, Ni, Cr, Uranium, etc.
     - l'industrie agroalimentaire: extraction et purification d'huiles, de protéines, décolorants, etc.
     - valorisation de la biomasse.
     Il est évident qu'un tel spectre d'activités pourrait déboucher sur des travaux importants. Mais pour cela il faudrait, en plus des moyens économiques nécessaires, une volonté politique de diversification et d'ouverture sur l'extérieur, une souplesse d'adaptation et d'organisation auxquelles le CEA et la COGEMA de Marcoule sont peu habitués. Des projets qui doivent être encouragés sont cependant à l'étude dans ce sens:
     - le traitement des nodules marins
     - la mise en chantier d'une plate-forme agroalimentaire.

Conclusion: les propositions de la CFDT sans être exhaustives ont le mérite d'exister; encore faudrait-il qu'elles soient discutées, ce qui n'a jamais été sérieusement le cas. Certains travaux coûteront cher, demanderont du temps; raison de plus pour entreprendre dès maintenant les réalisations dont l'urgence est évidente.
     Après un quart de siècle d'activités essentiellement tournées vers les besoins militaires de la force de frappe, le site de Marcoule peut envisager un nouvel avenir.
     Cet avenir, d'ici l'an 2000, passe par le retraitement, la caractérisation et le conditionnement des déchets nucléaires, l'extension des activités à caractère non nucléaire, la contribution du site au développement régional.

CONCLUSION

    Depuis plus de 10 ans le Syndicat National de l'Energie Atomique C.F.D.T., la Confédération, à travers des publications (tel que le «Dossier Electronucléaire en France») des films, des conférences, tentent de placer le débat publiquement.
     Le Syndicat de Marcoule, peu sensibilisé dans les années 73-74 a pris conscience de la gravité de la situation avec l'arrivée des combustibles E.D.F. sur le site, puis avec de plus en plus de force au fil des années et des incidents au point que la situation sur le site, son état et son avenir ont constitué l'essentiel des débats de son Assemblée Générale du 30 avril 1983.
     C'est à la suite de cette Assemblée, réunissant une journée entière les adhérents de la CFDT de Marcoule que la décision d'informer plus, l'ensemble des travailleurs, a été prise.
     En effet, les adhérents de la CFDT, qu'ils soient décontamineurs ou opérateurs, au dégainage ou à l'usine de retraitement, qu'ils soient techniciens ou ingénieurs, qu'ils soient chimistes ou mécaniciens, qu'ils soient exploitants ou entreteneurs, partagent la même opinion:
     - la situation de Marcoule est précaire, il faut qu'elle soit mise en lumière, il faut faire l'état des lieux, il faut en discuter, il faut le faire savoir et le sortir du cercle restreint des initiés.
     Toute solution passe par là.
     Cette brochure n'est donc pas sortie du cerveau de quelques militants mais représente bien la contribution du syndicat de Marcoule au débat sur les problèmes énergétiques et nucléaires dont dépend l'avenir du site.
     Le syndicat CFDT, bien que majoritaire, n'entend pas adopter un comportement de groupe de pression pour imposer un type de solution à force de matraquage et de slogans, il entend apporter sa contribution au débat et sensibiliser les travailleurs et les autorités sur les problèmes que pose le site de Marcoule et qu'il faudra bien résoudre si, comme la CFDT, on veut assurer son avenir.
     Dans le cas contraire, en refusant ce débat, on prendrait des responsabilités historiques pouvant aller à l'encontre des intérêts du pays et des générations à venir.

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