I. Les recommandations internationales
et les situations accidentelles
- Accidents et états d'urgence
- Principes généraux de protection opérationnelle
contre les rayonnements
- Intervention dans les situations anormales
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Ces travailleurs devraient être des volontaires et il est souhaitable qu'une information sur les risques dus à des expositions qui dépassent les limites, soit donnée, dans le cadre de leur formation normale, à des groupes de travailleurs parmi lesquels on pourrait, dans un tel cas, trouver des volontaires. Article (192): Une fois l'événement initial maîtrisé, il restera le problème du travail de réparation. Celui-ci devra généralement être effectué en assurant le respect des limites recommandées par la Commission, mais, exceptionnellement, on peut rencontrer des cas dans lesquels l'application des limites impliquerait une dépense excessive, une durée excessive des opérations ou le recours à un nombre excessif de personnes. Il conviendrait alors d'examiner s'il ne serait pas juste d'autoriser une exposition exceptionnelle concertée pour un nombre limité de personnes qui effectueraient diverses opérations essentielles. Article (193): Il peut arriver que, par suite de situations anormales, certains travailleurs soient sérieusement irradiés ou contaminés. II. La législation française
et les «expositions exceptionnelles concertées». Décret
du 2 octobre 1986
p.12
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Nota: L'article 3 définit ainsi la catégorie
A: «travailleurs directement affectés aux travaux sous
rayonnements: personnes dont les conditions habituelles de travail sont
susceptibles d'entraîner le dépassement des trois dixièmes
des limites annuelles d'exposition fixées aux articles 6, 7 et 8
(5 rem).»
3) Avant une exposition exceptionnelle concertée, tout travailleur doit recevoir une information appropriée sur les risques et les précautions à prendre au cours de l'opération; pendant l'opération il doit disposer de moyens de dosimètre individuels adaptés aux conditions particulières de l'exposition. Article 12: Exposition d'urgence
Commentaires
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III. A qui s'applique le décret du 2 octobre 1986? Après avoir analysé certains aspects du décret du 2 octobre 1986, nous devons signaler un caractère assez curieux de ce décret. En effet, on trouve à l'article 1er cette déclaration. «...Toutefois le présent décret n'est pas applicable: Aux établissements où sont implantées une ou plusieurs installations nucléaires de base énumérées aux articles 2 et 17 du décret n°63-1228 du 11 décembre 1963, modifié par décret n°73-405 du 27 mars 1973.»... Le décret du 11 décembre 1963 énumère la totalité des installations nucléaires de base. Ainsi le récent décret sur la «protection des travailleurs contre les dangers des rayonnements ionisants» ne s'applique pas au personnel: - des réacteurs nucléaires - des accélérateurs de particules - des usines de préparation, de fabrication ou de transformation de substances radioactives, notamment aux usines de préparation des combustibles nucléaires de traitement des combustibles irradiés ou des déchets radioactifs - des installations de dépôt ou de stockage ou a l'utilisation des substances radioactives y compris les déchets - des installations destinées à l'irradiation - des installations nucléaires intéressant la défense nationale. L'article 1er exclut du domaine d'application les quelques installations productrices de rayonnement telles que les sources industrielles ou médicales. Le décret du 2 octobre 1986 est assez fidèle aux directives européennes mais il ne s'applique à personne, ce qui rend assez cocasse son dernier article qui nomme les ministres chargés de son application! Les signataires de ce chef d'œuvre de non sens sont Jacques Chirac, Philippe Seguin, François Guillaume et Michèle Barzach... La subtilité d'un décret s'appliquant à un ensemble vide nous avait, reconnaissons-le, complètement échappé (nous savons que nous ne sommes pas les seuls dans ce cas). Lors de notre intervention de Créteil, nous indiquions: «Si le Ministère des Affaire Sociales et de l'Emploi a effectué cette mise à jour le 2 octobre 1986 (par rapport aux Directives de la CEE), le Ministère de la Santé se refuse à le faire en ce qui concerne le public». En fait si le Ministère de la Santé réussissait le même exploit que celui des Affaires Sociales et de l'Emploi, ce serait le vide intégral en matière de radioprotection en France! Il demeure cependant une question: Qui a introduit cet article premier dans le décret du 2 octobre 1986, ridiculisant les participants aux négociations (syndicalistes, industriels, fonctionnaires) et les ministres qui ont finalement signé cette absurdité? La gestion de la crise de Tchernobyl par les autorités sanitaires a été assez lamentable, mais ces autorités semblent assez à l'aise en ce qui concerne les astuces juridiques... (voir encart colonne de gauche) p.13
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Qu'entend-on par normes
européennes?
Il y a d'abord les Directives du Conseil du 15 juillet 1980 et du 3 septembre 1984. Elles reprennent les conceptions de la Commission Internationale de Protection Radiologique (CIPR) de la publication 26 de 1977 et de ses publications spécialisées ultérieures. La Directive de 1980 concerne la «protection sanitaire de la population et des travailleurs contre les dangers résultant des rayonnements ionisants». Elle stipule que les Etats doivent faire le nécessaire pour se conformer à cette Directive avant le 3 juin 1984. En France le Professeur Pellerin, le Directeur du Service Central de Protection contre les Rayonnements ionisants a totalement bloqué la procédure en refusant toute modification des vieux décrets français de 1966 et 1967. Pour lui les concepts de la CIPR, pourtant très prudents et peu contraignants, sont une production d'intellectuels. En plus des concepts généraux de radioprotection, les Directives européennes de 1980 et 1984 définissent les limites annuelles d'incorporation (LAI). Cela signifie qu'elles donnent pour chaque élément radioactif la quantité maximum admissible (pour la population et pour les travailleurs) de cet élément que l'on peut inhaler ou ingérer. Lorsque la LAI a été atteinte, cela indique que la dose maximale admissible (5 rem pour les travailleurs, 0,5 rem pour le public) a été atteinte. Il est évident que ces LAI ne permettent pas de déterminer les limites admissibles de contamination des aliments. Pour y arriver il est nécessaire de définir un modèle humain de consommation. Signalons que les Directives européennes n'ont considéré qu'une seule LAI pour un homme standard. Certains pays (Angleterre et RFA en particulier) ont pris en compte des modèles plus contraignants en découpant la population en différentes classes d'âge. D'une façon générale, la LAI est prise environ 10 fois plus faible pour les enfants de moins de 1 an. Ceci revient à reconnaître que le facteur de risque n'est pas uniforme dans la population et dépend très fortement de l'âge. Ceci est une évidence pour la plupart des experts même parmi les officiels. Dès les premiers jours de Tchernobyl, la nécessité de normes directement utilisables s'est fait sentir et la Commission de la CEE publiait le 6 mai 1986 une recommandation. Elle définissait des tolérances maximum de contamination (il était sous-entendu qu'il s'agissait de l'Iode 131):
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Plus tard la composante majeure devenait le Césium et la Commission de la CEE publiait le 30 mai 1986 un nouveau règlement fixant la contamination maximale des aliments. La radioactivité maximale cumulée de Césium 134 et 137 ne doit pas dépasser: - 370 becquerels par kilogramme pour le lait relevant des positions 04.01 et 04.02 du tarif douanier commun ainsi que pour les denrées alimentaires destinées à l'alimentation particulière des nourrissons pendant les quatre à six premiers mois de leur vie, répondant à elles seules aux besoins nutritionnels de cette catégorie de personnes et conditionnées au détail en emballages clairement identifiés et étiquetés en tant que «préparations pour nourrissons» - 600 becquerels par kilogramme pour tous les autres produits concernés. Ce règlement devait expirer le 30 septembre 1986 pour laisser la place à des normes communautaires définitives. La France, ou plus exactement Monsieur Pellerin qui n'a jamais rendu compte de son activité, a toujours refusé d'appliquer ces normes. Les aliments contaminés au-delà des limites ont été laissés en vente. Des aliments étrangers (de Turquie en particulier) invendables dans le monde entier ont été acceptés sur le marché français bien que contaminés à des niveaux plusieurs fois supérieurs aux limites européennes. Le professeur Pellerin a bloqué pendant plusieurs mois les négociations européennes afin de fixer les limites le plus haut possible. Il est clair pour lui que des accidents pourraient se produire en France. Avec des normes fondées sur des critères strictement sanitaires, ce qu'a fait la Commission de la CEE, l'agriculture française avait de fortes chances de disparaître complètement. Récemment une commission d'experts européens a préparé un texte pour les gouvernements de la Communauté. Les discussions se sont déroulées à huis clos. Les média n'ont d'ailleurs posé aucune question à ce sujet. Impossible de savoir ce qui va en résulter mais il semble évident que les normes qui vont être proposées comme obligatoires aux Etats européens (si elles sont obligatoires les Etats n'auront plus à tenir compte de leur opinion publique) vont être particulièrement élevées. Le représentant du Ministère de la Santé français a fondé ses propositions uniquement sur des considérations économiques indépendamment de considérations sanitaires. Nous estimons qu'il est inadmissible qu'une seule personne intervienne sur les problèmes de santé en matière de nucléaire. C'est pourquoi nous avons demandé la démission de Monsieur Pellerin, estimant qu'il ne remplit pas son rôle. Il nous semble indispensable que ce soit un ensemble de médecins qui étudient ces problèmes. p.14
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(Le Monde 22 mai 1987)
La Commission européennes aura mal géré, de bout en bout, l'affaire de Tchernobyl. Après la catastrophe à la centrale nucléaire soviétique, les responsables communautaires avaient proposé, dans l'affolement général, des normes très sévères fixant le niveau de radioactivité des produits alimentaires autorisés à être commercialisés. Sous l'impulsion de l'Italie et surtout de l'Allemagne fédérale, les Douze les avaient acceptées contre l'avis de la France et de la Grande-Bretagne. (suite)
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Le calme revenu, Paris et Londres ont relancé le débat afin que les doses admissibles correspondent mieux aux recommandations des scientifiques. Ne voulant ni gêner les autorités ouest-allemandes ni se déjuger, Bruxelles a multiplié les expertises pour justifier sa position de départ. Finalement, la Commission a dû se rendre à l'évidence: les conclusions des scientifiques lui donnaient tort. Aussi a-t-elle décidé, mercredi 20 mai, de proposer au conseil des ministres de la CEE ces nouvelles normes correspondant, pour les individus, à des doses d'exposition sensiblement plus élevées que celles qu'elle avait retenues en mai de l'année dernière. Les ministres européens pourraient se prononcer sur ce sujet au mieux le 22 juin. Comble de l'ironie, la réunion eut lieu le 30 avril à Luxembourg, alors même que l'on célébrait le premier anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl. Mais cette consultation très large de responsables de la CEE, de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et de scientifiques étrangers permit de corriger un peu le tir. Certains soulignèrent alors avec raison que les chiffres retenus par les scientifiques du comité d'Euratom étaient des valeurs extrêmes, correspondant à la dose que recevrait un individu qui ne consommerait, pendant un an, qu'un produit alimentaire unique: par exemple du lait à 20.000 becquerels par kilogramme. Un tel raisonnement manque de réalisme d'autant qu'un Grec ne s'alimente pas de la même façon qu'un Néerlandais ou qu'un Espagnol. C'est pourquoi les experts du comité d'Euratom ont accepté l'idée, en avril de cette année, de baisser leurs chiffres en les divisant pratiquement par cinq pour le césium et les émetteurs a. " Mesure très saine", commentent certains spécialistes, qui estiment qu'avec ces nouvelles valeurs on sera désormais sûr, en cas d'accident nucléaire, qu'un individu recevra moins des 0,5 rem préconisés par la CIPR, quelle que soit son alimentation. Commentaire
p.15
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