La G@zette Nucléaire sur le Net! 
N°82/83
SUPERFUITIX
 

II. STOCKAGE DES DECHETS


INTRODUCTION

     Le deuxième sujet est bien sûr les stockages parce que cette année la prospection bat son plein. Nous avons retrouvé un texte qui fixe les règles pour le site «Manche». Souhaitons qu'un texte de ce type soit mis au point pour les labos profonds. L'Aube également doit bénéficier d'un texte du même type.
     Nous avons ajouté un texte pris dans le rapport du CEA de 1986. Ceci précise ce sur quoi travaille le CEA et donne du poids à nos demandes de mise au point d'un certain nombre de choses emballage, retour dans l'environnement des effluents.
     Il faut en plus tenir compte des problèmes sur les sites, le dernier en date sur le site Manche n'est pas triste. L'ANDRA a stocké des produits radioactifs sachant qu'à l'endroit oû elle le mettait, la dose à la limite du site dépasserait les normes. Même si les normes ne sont pas la panacée, les dépasser parce qu'on est à la limite d'une zone sans habitations est inadmissible.
     La commission s'est insurgée, évidemment. D'autant plus que ce dépassement a été constaté plus rapidement parce que des maires surveillent eux-mêmes leur environnement. L'ANDRA a seulement confirmé en plaidant le temporaire. Irrecevable, surtout si c'était la première fois, mais ce n'est pas le cas. Irrecevable parce qu'en plus d'une irradiation, il n'est pas impossible qu'il y ait aussi une contamination. Ce qui cette fois signifie des rejets, rejets qui ne sont pas permis.

A. REPONSES DE L'ANDRA
AUX QUESTIONS DE L'ASSOCIATION
DE BOURG-EN-BRESSE
(EXTRAITS SIGNIFICATIFS)

RETRAITEMENT

4) Nature des contrats de retraitement concernant le retour des déchets étrangers et spécialement avec le Japon
     Les contrats de retraitement passés par la COGEMA, avec le Japon ou tout autre pays, prévoient le retour vers le pays client, des déchets produits par les opérations de retraitement.
     Les matières fissiles seront dans tous les cas soumises aux garanties et contrôles internationaux usuels.
     Enfin il y a une commission, il y a des décrets mais l'ANDRA pollue toujours «avec innocence».
     Le rapport Goguel «Stockage des déchets radioactifs en formations géologiques - critères techniques de choix de site» est enfin disponible. N'hésitez pas à le réclamer au Ministère de l'Industrie rue de Grenelle. Nous en publierons de larges extraits dans la  Gazette N°86/87.

p.27b

6) La vitrification permet-elle d'économiser des déchets? Différence entre déchets produits au retraitement et volume du combustible irradié à stocker,  si non retraitement
     La vitrification diminue, d'un facteur 2,5 environ, le volume des déchets de très haute activité, par rapport au combustible usé non retraité. En contre-partie, des déchets dits «alpha» sont produits.
     Si les volumes sont du même ordre de grandeur dans les deux options, retraitement et non retraitement, il faut bien voir que le retraitement réduit fortement les quantités de produits radioactifs à vie longue qu'il faut stocker définitivement.


Fiche documentaire

Le problème thermique dans les stockages
de déchets nucléaires


1. ORIGINE DU DEGAGEMENT THERMIQUE
     Les combustibles nucléaires après leur sortie du réacteur, restent une source de dégagement thermique. Ce dégagement est la conséquence des réactions de désintégration des radioéléments: il décroît donc dans le temps conformément aux lois générales de décroissance radioactive. Néanmoins, il nécessite durant les trois premières années un stockage des combustibles en piscine afin d'assurer leur refroidissement.
     Après retraitement, la quasi-totalité des radioéléments responsables de ce dégagement se retrouve dans les déchets vitrifiés mais la décroissance est déjà telle qu'une simple ventilation suffît à les refroidir dans leur entreposage. La durée d'entreposage (de l'ordre de 30 ans) sera calculée de telle sorte que leur puissance thermique ait suffisamment décru pour atteindre un niveau compatible avec leur enfouissement définitif.
     A la date de leur enfouissement, les radioéléments responsables de ce dégagement thermique sont:
- strontium 90 (période 30 ans)
- césium 137 (période 28 ans)   Produits de fission (PF)
- américium241 (période 432 ans)   Actinides
     Ce sont les produits de fission qui ont un rôle prépondérant dans le dégagement thermique, ceci pendant environ 200 ans.

2. LES CONSEQUENCES THERMIQUES DU DEGAGEMENT DE CHALEUR
     Après l'enfouissement en profondeur, du fait que les roches sont des matériaux isolants, l'énergie dégagée se trouve confinée au voisinage des déchets durant une longue période (1.000 ans pour fixer les idées). On étudie donc les conséquences possibles de ce dégagement d'énergie sur:
     - la tenue des conteneurs,
     - la stabilité des galeries de stockage et les effets des contraintes mécaniques dans les roches entourant le stockage,
     - le transfert de cette énergie jusqu'à la surface du sol et l'environnement externe.

suite:
     Les résultats des études seront pris en compte - suivant les qualités des roches et du site retenu - dans la conception du stockage (par exemple durée de l'entreposage provisoire et répartition des déchets) pour que les effets restent toujours dans des valeurs acceptables, c'est-à-dire sans conséquence au point de vue de la sûreté à long terme avec de larges marges de sécurité.

a) Effets sur les conteneurs
     L'effet essentiel sur le plan de la sûreté du dégagement de chaleur est la possibilité de modifier les équilibres physico-chimiques des colis de déchets et de leur environnement. C'est cet effet qui conditionnera en fait les conditions précises de stockage. La température maximale acceptable à la périphérie des colis de déchets est de l'ordre de 120°C pour l'argile, le granite et les schistes et de 250°C pour le sel.

b) Effet sur la stabilité des galeries et les contraintes mécaniques dans les roches
     - La prévision du champ thermique est un problème des plus simples; un seul phénomène physique est en jeu la conduction; les calculs se réalisent sur ordinateur.
     - L'élévation de la température des parois des galeries pendant la phase d'exploitation sera faible par rapport à la température naturelle du massif (compte tenu du gradient géothermique naturel: environ 3°C par 100 mètres). De toute façon, la température de l'air sera imposée par le système de ventilation dont ce sera une des fonctions.
     - Le champ thermique induit dans le massif un champ de contraintes. On sait que les contraintes se propagent sur des distances plus grandes que le champ thermique surtout dans les massifs rigides (granite, schistes).
     Compte tenu de s profondeurs envisagées, ces contraintes thermiques additionnelles n'ont que peu de conséquences sur la stabilité des galeries.
     - Ces contraintes ont des effets contradictoires sur les roches entourant le stockage
· Dans le «noyau» chauffé, la dilatation refermera les fissures (roches dures  granite et schistes) isolant ainsi davantage sur le plan hydrogéologique, la zone des déchets de l'extérieur. Pour les roches sédimentaires (argile et sel) le chauffage accélère le fluage, dont la fermeture des cavités.
· Plus loin, des micro-fissurations peuvent se créer et entraîner une modification du régime d'écoulement local des eaux (roches dures).
     L'étude fine de ces effets et la comparaison des aspects favorables et défavorables est un des buts essentiels des travaux qui vont être conduits.

c) Effets en surface
     Le transfert de l'énergie stockée pendant les quelques premières centaines d'années dans le voisinage immédiat des déchets, jusqu'à la surface du sol, s'étalera sur des dizaines de milliers d'années.
     - Il faut savoir que la température du sol est fixée par les conditions climatiques locales* (échange thermique avec l'atmosphère et surtout échange radiatif avec l'espace); elle n'en sera donc pas affectée, seul le gradient géothermique profond sera légèrement modifié.

* En France, la valeur moyenne annuelle est de l'ordre de 12°C.

p.28

B. EXTRAITS DU RAPPORT ANNUEL
CEA (1986)

a) Extraits pages 39 et 40

Etudes technologiques liées à la gestiou des déchets radioactifs:
     La R et D, en matière de déchets radioactifs, a un double objectif:
     - soutenir les grands projets industriels: programmes d'EDF, du cycle du combustible, de stockage de l'ANDRA, et la gestion des déchets des centres d'études nucléaires tout en améliorant les techniques existantes.
     - acquérir les connaissances nécessaires à la démonstration de la sûreté à long terme.
     Le soutien à l'usine UP3 de La Hague bénéficie d'une priorité particulière et il faut retenir entre autres pour 1986:
     - la poursuite des essais, sur le prototype évolutif de vitrification (PEV), qui ont permis de vérifier à échelle 1, les équipements, les limites acceptables de la composition chimique des verres et les autres paramètres de fonctionnement.
     - la remise à Cogema, à l'intention de ses clients, d'un dossier donnant les caractéristiques des verres.
     - enfin la mise en exploitation du prototype à échelle 1 de l'installation de cimentation des coques et embouts.
     Les équipes du CEA continuent d'apporter leur aide à la société SGN et aux futurs exploitants britanniques de l'installation industrielle de vitrification, en cours de construction à l'usine de Sellafield.
     En ce qui concerne l'incinération des déchets à forte teneurs en émetteurs a, le prototype inactif d'une capacité de 5 kg/h, représentatif de l'incinérateur de Valduc a démarré à Marcoule, et les équipements du pilote actif Iris de l'incinérateur de l'usine Melox ont partiellement été réceptionnés. Par ailleurs, la récupération du plutonium par oxydo-réduction a été expérimentée sur un lot significatif de cendres.
     Quant à la gestion des déchets des centres d'études nucléaires, l'installation Prodiges, du prototype de destruction des solvants par digestion sulfurique, a démarré en actif à Fontenay-aux-Roses.
     Le soutien à la réalisation des stockages et à la démonstration de leur sûreté à long terme se traduit par la caractérisation des colis et des barrières ouvragées et la modélisation du comportement des radionucléides.
     Dans ce domaine, les faits les plus importants ont été les suivants:
     - caractérisation des déchets de faible et moyenne activité:
     Le BECC (Bureau d'Evaluation et de Contrôle des Confinements) a établi des procédures normalisées d'essais de caractérisation en vue de l'agrément des déchets destinés au stockage en surface. Par ailleurs, EDF lui a demandé son assistance technique pour l'ensemble des essais de caractérisation et l'a chargé d'établir l'inventaire chimique et radioactif de déchets de centrales.
     - comportement des déchets de très haute activité (verres):
     Les études ont porté notamment sur la lixiviation en situation de stockage en milieu granitique, tant en inactif, qu'en actif avec des verres contenant différents transuraniens, afin de définir le devenir spécifique de chaque actinide. Les données recueillies sur les mécanismes de lixiviation sont appliquées à la modélisation de la dissolution physique des verres.

suite:
     - barrières ouvragées des stockages profonds:
     Les études de comportement et de caractérisation des argiles ont conduit à choisir comme matériaux de remplissage des puits de stockage des déchets vitrifiés de très haute activité, une smectite tricalcique.

Barrières ouvragées des stockages profonds de déchets de très haute activité, vitrifiés
     Le CEA développe, à Fontenay-aux-Roses et à Saclay, des études sur les «barrières ouvragées», pour définir et qualifier les matériaux utilisés dans la réalisation des stockages de déchets nucléaires, afin de garantir le confinement des éléments radioactifs.
     Les matériaux ainsi examinés sont essentiellement constitués d'argiles ou de liants hydrauliques, tels que les ciments, auxquels sont ajoutés différents composants sable, graphite, sel, granite broyé... afin d'améliorer leurs performances.
     Ces études concernent plus particulièrement les propriétés:
     - hydrauliques: perméabilité, gonflement
     - physiques: porosité, teneur en eau, conductivité thermique;
     - rhéologiques et mécaniques: viscosité, retrait, résistance, fluage, pression de gonflement
     - chimiques: interaction eau-roche, évolution minéralogique à long terme, migrations ioniques et en particulier des radioéléments.
     Les moyens dont dispose le CEA sont ceux, classiques, de physico-chimie appliqués à la science des matériaux et de mécanique, complétés par des équipements spécifiques de mécanique des sols, d'étude de transfert d'ions et de microscopie électronique à haute résolution.


b) Extraits pages 42 et 43

Extraits du bulletin du CEA
ANDRA
Agence Nationale pour la Gestion
des Déchets Radioactifs

     Selon les termes de son arrêté de création, l'Agence a en charge:
     - la gestion des centres de stockage à long terme,
     - la conception, l'implantation et la réalisation des nouveaux centres de stockage et toutes les études nécessaires,
     - la promotion des spécifications de conditionnement et de stockage.

· Activité industrielle
     La gestion industrielle des déchets à vie courte et l'exploitation du Site de Stockage de la Manche sont les plus anciennes activités industrielles de l'Agence.
     Cette année, 29.500 mètres cubes de déchets radioactifs ont été livrés et 43.800 mètres cubes stockés, ce qui a permis une résorption notable des déchets en attente sur le centre. Au 1er janvier 1987, le volume total des déchets stockés sur le site atteignait 300.000 mètres cubes.

p.29

     Un effort important a été fait pour rationaliser la collecte, le tri et le traitement des déchets provenant des petits producteurs: secteur hospitalo-universitaire, laboratoires de recherches médicales et pharmaceutiques, industries. Deux plates-formes de regroupement ont été créées à Pierrelatte et Saclay et une action de sensibilisation des producteurs a été engagée dans le Sud de la France pour améliorer les conditions de gestion de ces déchets.

· Deuxième centre de stockage de surface
     Compte tenu de la saturation du Site de Stockage de la Manche vers 1990, le Gouvernement a, en 1984, autorisé le lancement d'une campagne de prospection pour sélectionner de nouveaux sites et, après un an d'exploration sur 30.000 hectares, l'ANDRA a proposé le site de Soulaines dans l'Aube.
     Sur la base des données recueillies, après d'importants travaux géologiques, hydrogéologiques et géotechniques, le groupe permanent d'experts placé auprès du Service Central de Sûreté des Installations Nucléaires a pris acte que le site proposé correspond bien aux critères de sûreté qu'implique l'édification d'un tel stockage. Les travaux de qualification alors entrepris ont permis à l'ANDRA de déposer auprès des Pouvoirs Publics, en juillet 1986, un dossier de demande de création d'une installation nucléaire de base et, dans le cadre de cette procédure, une enquête publique locale s'est déroulée du 29 septembre au 10 novembre 1986.
     Parallèlement, l'Agence a développé localement une action importante d'information avec réunions, expositions, diffusion de brochures, édition d'un journal trimestriel et visites d'installations nucléaires.
     Le deuxième centre de stockage est prévu pour stocker 1 million de mètres cubes de déchets à vie courte, sur trente ans; il devrait entrer en activité en 1991.

· Stockage en profondeur
     L'option technique retenue pour les déchets de très haute activité et les déchets contenant des émetteurs a à vie longue consiste à stocker en profondeur dans des structures géologiques stables et étanches.
     Un inventaire national des sites effectué avec le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) a permis d'identifier plusieurs zones, a priori (souligné par la Gazette) favorables, dans quatre milieux différents: argile, granite, schistes et sel.
     Afin de proposer aux Pouvoirs Publics un site pour la construction d'un laboratoire souterrain, destiné à qualifier les conditions dans lesquelles pourront être stockés les déchets à vie longue, il va être procédé à des reconnaissances par moyens géophysiques et forages sur 4 sites, un dans chaque milieu, dès l'aval des autorités gouvernementales.

· Activités internationales
     L'expérience acquise par l'ANDRA intéresse vivement les pays étrangers désirant mettre en place une organisation rigoureuse de la gestion industrielle des déchets radioactifs à vie courte. Plusieurs demandes d'assistance technique se sont concrétisées durant l'année et ont donné lieu à la signature de contrats avec l'Espagne et les Etats-Unis notamment.

suite:
c) Extraits pages 49 à 52

CYCLE DU COMBUSTIBLE ET TRANSPORT:

     Les analyses de sûreté les plus significatives dans ce domaine ont porté sur:
     - l'ensemble des évaluations pour autoriser le démarrage progressif des nouvelles usines de La Hague.
     - les conditions de fabrication, puis de traitement après irradiation du combustible mixte à UO2-PuO2,
     - le deuxième centre de stockage définitif de déchets en surface,
     - une réflexion approfondie sur les problèmes posés par les transports d'UF6, produits pour lequel le risque chimique n'était pas suffisamment pris en compte dans la réglementation.

· Gestion des déchets radioactifs
     Les principaux travaux réalisés et les résultats acquis au cours de cette année concernent la détermination «in situ» des caractéristiques des milieux géologiques susceptibles d'accueillir un stockage de déchets à vie longue.
     Les expériences se sont déroulées dans des forages ou des laboratoires souterrains d'Etudes Méthodologiques et Instrumentales (LEMI) aménagés dans des galeries du siège minier de Fanay-Augères dans le Limousin.
     C'est ainsi qu'une cavité de quelque 400 m3 a été creusée à partir d'une galerie existante en vue d'étudier les effets d'une élévation de température au sein d'une masse de granite.
     Afin de mieux connaître les phénomènes liés aux écoulements des eaux souterraines et à la dispersion des radionucléides dans les milieux fissurés, il a été procédé à une injection de traceurs, non radioactifs, dans un forage vertical de 50 m avec récupération de ces traceurs en galerie et dans des forages voisins.
     Par ailleurs, à Marcheprime en Gironde, une barrière artificielle enterrée a été installée pour étudier expérimentalement la modification des écoulements des nappes aquifères. Les résultats de cette étude pourront servir à améliorer encore le confinement des déchets à vie courte dans l'environnement proche d'un stockage en surface.

· Protection de l'homme et de l'environnement

ETUDES TECHNIQUES DE PROTECTION:

     En ce qui concerne la protection des travailleurs, un appareil de mesure de la concentration en énergie a potentielle des descendants à vie courte du radon, dénommé «Mimil», a été mis en place dans les mines d'uranium de Cogema et il est désormais opérationnel.

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     En robotique en milieu hostile, le programme Centaure se poursuit et un prototype, Centaure II, a été réalisé: radiocommandé à 500 m d'un bâtiment du centre de Saclay, il est entré dans le bâtiment, a monté un escalier et a pénétré puis fonctionné à l'intérieur d'une cellule blindée portes fermées. Par ailleurs, le premier système opérationnel de téléopération assistée par un ordinateur sur microprocesseur, TAO I, a été livré et son évaluation est en cours.

PROTECTION RADIOLOGIQUE ET ENVIRONNEMENT:

     Suite à l'accident de la centrale de Tchernobyl, de nombreux contrôles de produits agro-alimentaires ont été effectués sur le territoire français à la demande des autorités civiles, ainsi que des mesures radioactives liées à l'environnement (eau, sol) sur la côte orientale de la Corse, le bassin du Var et le bassin de la Moselle.
     Quant au programme Ressac portant sur la réhabilitation des sols suite à un accident et dont les objectifs ont été "confortés" (guillemets Gazette) par celui de Tchernobyl, les tout premiers résultats permettent, d'ores et déjà, de proposer des procédures d'intervention sur un site nucléaire en cas d'accident.

ETUDES BIOMECICALES ET SANITAIRES:

     Dans ce domaine, de nombreux thèmes ont été abordés cette année encore, et ont débouché sur des résultats significatifs. Les études les plus importantes ont porté sur:
     - les conséquences cliniques des irradiations neutroniques à haut débit de dose (2 et 6 grays), conséquences qui seront prises en compte pour les décisions thérapeutiques dans le cas d'un éventuel accident de criticité;
     - l'influence sur le foetus d'une irradiation g à faible débit de dose;

suite:
     - la mise en cause du caractère totalement aléatoire du risque de cancer radio-induit et de sa modélisation chez l'animal, révélée par l'analyse cytogénétique de cellules de tumeurs humaines;
     - le rôle de l'âge dans la toxicité des radioéléments.

BIOLOGIE MOLECULAIRE:

     Les travaux de génétique animale, menés dans le cadre de la convention passée entre l'INRA et le CEA et en collaboration avec l'Institut Pasteur, ont abouti au dépôt d'un brevet sur la détermination du sexe des embryons bovins de manière rapide, économique et fiable; ce résultat représente un progrès important, notamment dans son application éventuelle au marché de la production bovine.

· Déclassement des installations nucléaires
     Les opérations de démantèlement des réacteurs Triton et Néréide à Fontenay-aux-Roses et EL 3 (confinement du bloc pile) à Saclay ont pris fin. Par ailleurs, il a été décidé de confier à Technicatome la responsabilité des derniers travaux de démantèlement de l'installation Elan II B à La Hague, sous la maîtrise d'oeuvre de l'Unité Centrale de Déclassement des Installations Nucléaires.

· Sécurité des installations et des matières nucléaires
     Cette activité est exercée pour le compte du ministère chargé de l'Industrie. L'année 1986 a été marquée par la rénovation du système informatique servant à comptabiliser, au niveau national, les matières nucléaires et par la mise en chantier, par les transporteurs français, de plusieurs véhicules utilisant les techniques de protection renforcée et de suivi à distance, mises au point par l'IPSN.

p.31

Transports illégal de déchets radioactifs
Le centre nucléaire de Mol, en Belgique, est mis en accusation
 

BRUXELLES
de notre correspondant

     
     Mise sur pied d'un groupe de travail belgo-ouest-allemand, création d'une commission d'experts indépendants, proposition de constitution d'une commission d'enquête parlementaire au niveau européen, demande de la Commission de Bruxelles de pouvoir dépêcher sur place des experts: le scandale des déchets nucléaires - devenu une véritable affaire d'Etat en Allemagne fédérale - commence à créer de sérieux remous en Belgique. Avec, au centre du débat, une interrogation: que se passe-t-il réellement au centre nucléaire de Mol (CEN) situé en Campine, dans le nord-est de la Belgique, tout près des frontières néerlandaise et ouest-allemande?
     Plusieurs responsables du centre sont, en effet, impliqués dans ce que l'hebdomadaire Der Spiegel dénonce commme «le plus grand scandale de l'histoire de l'industrie ouest-allemande de l'atome».
     L'hebdomadaire belgo-francais le Vif-l'Express, dans son édition du vendredi 8 janvier, estime pour sa part qu': «il n'est pas impossible qu'un trafic similaire à celui qui s'est produit avec l'Allemagne fédérale se soit déroulé avec d'autres pays». Cet hebdomadaire avait aussi révélé, en avril 1987, que le centre de Mol aurait pu collaborer indirectement à la fabrication de la bombe atomique au Pakistan et en Libye. Il n'est pas exclu non plus qu'il se trouve au centre d'un trafic international de plutonium.
     Pour le moment, les regards se focalisent sur le trafic des déchets nucléaires. Tout commence le 21 octobre 1986 avec l'accident survenu à un camion de la firme allemande Transnuklear, qui transporte des déchets faiblement radioactifs de la centrale nucléaire de Krümmel, en RFA, vers le centre de Mol. Or il s'avère que les produits réellement convoyés ne correspondent pas à leur description sur les documents de bord du camion. Le scandale rebondit le 17 août 1987, lorsque la télévision ouest-allemande révèle que Transnuklear aurait versé pour prés de 20 millions de francs de pots-de-vin, notamment à certains responsables du centre de Mol. Le chef du département «déchets» du Centre, M. Van de Voorde, est licencié.
suite:
     Rapidement, on découvre que les déchets transportés en Belgique par Transnuklear ne répondent pas aux prescriptions officielles. En décembre, des fûts de déchets nucléaires belges, stockés illégalement, sont découverts en RFA. Il s'agit de 321 fûts contenant des traces, minimes, de plutonium. Il y aurait en fait 2.000 fûts  belges  en Allemagne fédérale, apprend-on par la suite. Le montant des pots-de-vin augmente aussi et on parle maintenant de 400 millions de francs belges (environ 60 millions de FF). Et le 6 janvier encore, 150 fûts de déchets allemands, faiblement radioactifs, étiquetés comme étant des déchets belges, sont découverts à Mol. (A Bruxelles, certains experts vont jusqu'à se demander si, en plus du trafic crapuleux révélé par le scandale de Transnuklear, il n'y aurait pas aussi la dissimulation d'accidents survenus à certaines centrales nucléaires, qui auraient eu tout intérêt à évacuer, sous une forme ou sous une autre, certains de leurs déchets.)

Vers l'éclatement du centre

     Le trafic, selon le Vif-l'Express, pourrait ne pas être limité à la Belgique et à l'Allemagne. Le 10 juillet 1987, un contrat avec Transnuklear avait été signé par les responsables de Mol pour l'évacuation de déchets provenant de la centrale nucléaire
de Caorso, en Italie.  «Les experts, écrit le Vif-l'Express, estiment que le marché présente des anomalies sur le plan financier.» Autre contrat signé par le centre de Mol: celui avec la centrale de Mühl, en Suisse. Quant à EDF, elle aurait aussi eu des contacts avec Transnuklear et Mol pour la prise en charge d'huiles de refroidissement utilisées dans des circuits secondaires de réacteurs; «Il semblerait, écrit le Vif-l’Express, que Transnuklear ait soumissionné à un prix très bas et ait emporté l'affaire. Les huiles devaient être acheminées à Mol, mais, après la révélation du scandale ouest-allemand, EDF a renoncé(1)
     Compte tenu de l'ampleur du scandale, le gouvernement belge, qui avait jusque-là été très discret, semble maintenant dans l'obligation d'intervenir et de tenter de remettre un tant soit peu d'ordre dans la gestion du centre de Mol. A terme, certains évoquent même la fermeture pure et simple du centre qui emploie mille deux cents personnes. Il est plus vraisemblable que l'on s'achemine vers un éclatement du centre: la partie non nucléaire de ses activités serait confiée à l'exécutif de la région flamande. Le traitement des déchets nucléaires, à l'origine du scandale, lui, serait mis sous la responsabilité d'un autre organisme, l'ONDRAF (Office national des déchets radioactifs et des matières fissiles). Seul donc, le département études resterait au CEN.

JOSÉ-ALAIN FRALON

Le Monde, Samedi 9 janvier 1988

p.32
(1) Interrogée sur cette affaire, EDF a précisé qu'il n'y avait pas, à sa connaissance, de contrat signé sur ce point, car EDF retraite elle-même ses huiles radioactives. Cela ne signifie pas, cependant, qu'une centrale française n'ait pas, de sa propre initiative et pour ses propres besoins, passé un tel contrat. Il est vrai, cependant, qu'EDF fait appel à Transnuklear pour le traitement de certains déchets solides.
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