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N°141/142 
DÉBAT NATIONAL ÉNERGIE & ENVIRONNEMENT
ANNEXES
ÉNERGIES RENOUVELABLES (dossier RESOSOL)

I. FAITS ET CHIFFRES



1) Présentation
     Les énergies renouvelables représentaient en 1990, 22% de la production nationale d'énergie primaire, celle-ci étant largement dominée par l'électricité nucléaire, comme l'illustre le tableau suivant.
Production primaire (milliers de tep) en 1990

Hydraulique                       12.950
Bois                                     7.611
Déchets industriels                   771
Déchets urbains                       715
Pompes à chaleur (EnR?!)       589
Géothermie                             155
Bio-gaz                                     74
Solaire thermique                       38
Résidus de récolte                      18
Éolienne                                       0,07
Solaire photovoltaïque                  0,03
Biocarburants                               0
TOTAL                               22.920
Source : Observatoire de l'Énergie. En 1990, les décisions relatives aux biocarburants n'étaient pas prises.

     Dans cette production, deux énergies dominent: l'hydraulique et le bois, comme l'illustre le tableau ci-dessus qui détaille la production d'énergies renouvelables en France.

L'énergie hydraulique
     On distingue la grande hydro-électricité pour laquelle on peut estimer que 90% des sites potentiels sont aujourd'hui équipés; la petite hydroélectricité (moins de MW), qui vise à utiliser la force motrice de l'eau des rivières pour la transformer en électricité dans des sites isolés notamment. La production annuelle en petite hydroélectricité atteint en France 4 TWh, soit l'économie de 1 million de tep, (1% de la production électrique française) réalisée à partir de 1.500 petites centrales (dont 200 appartiennent à EdF); enfin l'énergie des mers: utilisation des flux et reflux de la marée; l'usine marémotrice de la Rance (240 MW) reste un cas unique, en France et dans le monde.
     En matière d'environnement, dans le cas de la petite hydroélectricité, les problème concernent l'écologie de la rivière et la faune; enfin le classement de certaines rivières interdit leur usage énergétique. Les petites centrales hydrauliques ne génèrent par contre aucune pollution atmosphérique et présentent un risque nul.

Le bois énergie
     Le bois peut avoir diverses origines:
     - le bois de rebut constitué des palettes usagées, des emballages, et des broyats d'élagage des arbres d'ornement; on estime le gisement à 550.000 tonnes, soit 190.000 tep.
     - le gisement forestier constitue une ressource durable et fiable, dont le coût est un peu plus élevé que le bois de rebut. Les produits sont principalement des bûches, ou peuvent faire l'objet d'une transformation par broyage, en plaquettes forestières. Le gisement non exploité représente 2.500.000 tep.
     - les produits connexes de l'industrie du bois (scieries, papeteries). Les produits les plus courants sont les écorces et les sciures; outre leur valorisation interne, ils sont plus adaptés aux grandes chaufferies (plus de 700 kW). En outre, certains fabricants produisent localement des granulés à base de sciure. Le gisement non exploité représente 520.000 tonnes, soit 110.000 tep.

suite:
     - les nouvelles ressources: dans le cadre de la réforme de la Politique Agricole Commune, la mise en jachère d'une partie des terres ouvre la voie à des cultures non alimentaires, et notamment le bois énergie, sous forme de Taillis à Courte Rotation (TCR), qui font l'objet d'une récolte tous les 3 à 7 ans, ou de plantes herbacées (sorgho, miscanthus) à double fin (énergie et papier).
     La consommation énergétique du bois représente, pour 1992, de 7 à 9 millions de tep, dont environ 90% dans l'habitat individuel, 1% dans l'habitat collectif et le tertiaire, et 9% dans l'industrie (bois, papier). 300 chaufferies collectives fonctionnent en France, auxquelles il convient d'ajouter un millier de chaufferies dans les industries du bois. Pour les chaufferies collectives, les coûts d'investissement sont 2,5 à 3 fois plus élevés que pour une installation au fioul ou au gaz.
     La combustion du bois génère, comme celle des combustibles fossiles, des émissions polluantes. Cela dit, les techniques modernes ont permis de réduire de 80% les émissions de gaz à effet de serre et de particules. En outre, le bois n'émet pas de soufre (pluies acides). Enfin, le CO2 dégagé ne contribue pas à l'effet de serre: en effet, la combustion du bois se substitue à l'oxydation lente qui transforme en CO2 tout le bois mort abandonné en forêt. Dans le cycle naturel du carbone, l'utilisation énergétique valorise donc un processus inéluctable. Enfin, la combustion du bois ne génère pas de déchet. Les cendres peuvent être utilisées comme engrais agricole.

L'énergie éolienne
     Il existe deux catégories d'éoliennes: les aérogénérateurs domestiques (jusqu'à 25 kW) qui permettent la fourniture d'électricité dans des sites isolés, pour des besoins individuels (cas du département de l'Aude), ou de petits réseaux collectifs (cas de l'île de la Désirade en Guadeloupe), et les éoliennes de grande puissance, utilisées en autoconsommation ou raccordées au réseau électrique d'EDF, 6 grandes éoliennes fonctionnent en France : une de 300 kW à Dunkerque (Nord), et une de 200 et (depuis 1993) 4 de 500 kW à Port la Nouvelle (Aude).
     Le coût de production de l'électricité est de l'ordre de 50 ct/kWh, pour les grandes éoliennes raccordées au réseau, et devrait à 28 cts/kWh dans les prochaines années. Il s'agit cependant de kWh n'offrant pas de garantie de fourniture. L'énergie éolienne ne génère ni pollution atmosphérique, ni déchets. Son impact environnemental concerne l'emprise au sol, l'impact visuel, et le bruit provoqué par la rotation des pales.

L'énergie solaire photovoltaïque
     Deux technologies existent aujourd'hui: silicium cristallin et silicium amorphe. La principale utilisation concerne la fourniture d'électricité dans les sites isolés: électrification rurale et pompage de l'eau potable (50%), télécommunications et signalisations (40%), applications domestiques pour l'éclairage de petite puissance (10%). Le photovoltaïque intéresse également particulièrement les pays à habitat rural dispersé (marché mondial de 6 milliards de francs/an). A plus long terme, on peut imaginer l'utilisation du photovoltaïque dans des centrales solaires couplées au réseau. Aujourd'hui on estime que 5.000 familles, en métropole et dans les DOM TOM, sont équipées en cellules solaires.

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L'énergie solaire thermique
     Les applications sont: le chauffage (notamment Plancher Solaire Direct), la production d'eau chaude, les piscines. La principale est la production d'eau chaude sanitaire collective. L'architecture "bio climatique", permet en outre d'exploiter le plus complètement possible le potentiel solaire dans une habitation. Cette énergie a été mise en oeuvre dès 1973, en particulier dans les DOM. 500.000 m2 de capteurs ont été installés entre 1980 et 1990, et 15.250 m2 destinés aux chauffe-eau solaires ont été posés en 1993, essentiellement dans les DOM.

La géothermie
     On distingue les gisements géothermiques à haute température (plus de 150°C), à moyenne température (de 90 à 150°C),à basse température (de 30 à 90°C), à très basse température (moins de 30°C, exploité à l'aide de pompes à chaleur).
     Les gisements à haute et moyenne température permettent la production d'électricité, ceux à basse température permettent la production de chaleur, pour le chauffage collectif principalement. En France, il existe une seule opération à haute/moyenne température, à la Guadeloupe (5MW, depuis 1985). En métropole, 70 puits de production basse ou très basse température sont en place, dont 45 dans le Bassin Parisien, et 19 dans le Bassin Aquitain. Au total, le bilan de la géothermie, en 1992, est de 230.000 tep, dont chauffage: 218.000 tep (pompes à chaleur(*): 40.000 tep, pisciculture: 8.000 tep, chauffage collectif: 170.000 tep), et production d'électricité: 12.000 tep.
     La baisse du prix du pétrole à partir de 1986 a mis en difficulté financière la plupart des exploitations géothermiques, qui ont fait l'objet d'un plan de sauvetage de 1989, leur situation s'est aujourd'hui améliorée
(*) Dossier sur la cogénération inclu dans la seule version web!

Les biocarburants et biocombustibles
     Dans le cadre de la nouvelle Politique Agricole Commune, la CEE a décidé la mise en jachère de 15% des terres consacrées à certaines cultures, dès la campagne 1992/1993, ce qui représente 1,5 million d'hectares pour la France (une baisse de pourcentage a été décidée en 1994). La possibilité de pratiquer, sur ces terres, des cultures destinées à des usages non alimentaires a ouvert la voie à la production de biocarburants (destinés aux transports) et biocombustibles (destinés au secteur résidentiel et à l'industrie), à partir de céréales ou d'oléagineux.
     Il existe 2 filières:
     l'éthanol: utilisé comme bio-carburant, mélangé au super,
     et l'ester de colza: utilisé comme bio-carburant, mélangé au gazole ou comme biocombustible, mélangé au fioul domestique.
     L'éthanol est fabriqué dans des distilleries/sucreries à partir du blé ou de la betterave. Il peut être incorporé dans le super, soit directement, soit sous forme d'Ethyl Tertio Butyl Ether (ETBE), et augmente l'indice d'octane des carburants. L'incorporation d'éthanol directement, autorisée à 5%, pose des problèmes techniques, et suscite de nombreuses réticences de la part des constructeurs. L'incorporation d'ETBE dans le super sans plomb, autorisée à 15% ne pose pas de problèmes techniques, et s'effectue de manière banalisée. 350.000 hl ont été transformés en ETBE à Feyzin en 1993, pour produire 820.000 hl d'ETBE.

suite:
     L'ester méthylique de colza (EMC) est obtenu à partir d'huile de colza; il peut être incorporé dans le gazole, ou dans le fioul domestique ("biocombustible"). Concernant le gazole, en France, un arrêté, notifié à Bruxelles, autorise son incorporation à 5% dans le gazole de manière banalisée à partir du 31 mars 1994.
     De nombreux projets d'usines de transformation sont en cours de concrétisation pour les deux filières.
     Au niveau énergétique, la production de biocarburants nécessite des consommations d'énergie (culture, transformation), non négligeables par rapport à l'énergie qu'ils contiennent.
     Au niveau économique, les biocarburants et biocombustibles, bénéficient d'une exonération de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) qui favorise leur développement. Cette exonération est limitée, tant pour les esters que pour l'éthanol. On estime le manque à gagner fiscal pour l'État à 250 MF en 1994, et 500 MF en 1994.
     Au niveau environnemental, l'impact des biocarburants dépend des polluants considérés, et surtout doit être apprécié en prenant compte l'ensemble de la filière (culture, transformation, consommation).

2) L'impact économique des énergies renouvelables
     Les énergies renouvelables représentent aujourd'hui une économie de 15 à 20 milliards de Francs sur la facture énergétique de la France.
     Elles emploient entre 40.000 et 50.000 personnes (18.000 emplois dans l'hydroélectricité, 25.000 dans la filière bois-énergie).
     Le secteur industriel de fabrication d'équipements se composent principalement de PMI employant un millier de personnes.

3) Les énergies renouvelables et l'environnement
     A l'exception du bois et des biocarburants et biocombustibles, les énergies renouvelables n'entraînent pas d'émission polluante dans l'air. (Rappelons le CO2 émis par la combustion du bois ne contribue pas à l'effet de serre.) La pollution ainsi évitée est difficile à estimer car elle dépend du type de production remplacée par les énergies renouvelables. Les autres effets sur l'environnement concernent notamment l'écologie des sites (hydraulique), le bruit (éolien), l'emprise au sol et l'impact paysager (éolien, solaire).
     En outre les énergies renouvelables génèrent moins de besoin de transport d'énergie, réduisant ainsi les atteintes paysagères, environnementales et en terme de risque. Enfin, elles permettent d'épuiser moins vite les ressources naturelles existant en quantité limitée, s'inscrivant dans une perspective du développement durable.

4) Les perspectives de développement des énergies renouvelables
     Les énergies renouvelables pourraient, d'ici 2020, représenter 40% de la production d'énergie dans le monde, contre 20% aujourd'hui.
     En France, le potentiel de développement représente plusieurs millions de tep dans les 20 prochaines années, notamment dans le bois, la petite hydroélectricité, voire la géothermie, le solaire thermique.

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5) Comparaisons internationales
     La France est le premier producteur européen d'énergies renouvelables, grâce à l'hydroélectricité et au bois, masquant un développement plus faible dans les autres filières.
     Le contexte est en général plus favorable au développement des énergies renouvelables dans les pays voisins. La France connaît en effet une situation spécifique, caractérisée par des coûts de l'électricité faibles et des tarifs péréqués sur le territoire. Les tarifs d'achat de l'électricité, en France est un des moins chers d'Europe, ce qui ne facilite pas le développement des énergies renouvelables. Certains pays ont en outre mis en place des prix d'achat spécifiques pour les énergies renouvelables, afin de favoriser leur développement. 
     Le tableau ci-dessous résume la production d'énergies renouvelables en France et chez ses principaux partenaires (1991).
 
 
Solaire 
 
 

k Tep

Éolien

Product

k Tep

Hydraulique
 
 

k Tep

Biomasse
 
 

k Tep

Énergie

Géothermie

k Tep

Total
 
 

k Tep

FRANCE 14,8 0,1 4.940 9.151 169,1 14.275
ALLEMAGNE 9,4 18,5 1.472 5.007 6,9 6.515 
Royaume-Uni 5,2 0,9 394 624 0,6 1.024
ITALIE 7,6 0,3 3.362 2.850 2.049,7 8.539
BELGIQUE 0,9 0,7 20 415 1,3 438
DANEMARK 2,1 64,0 2 991 1,1 1.060
Pays-Bas 2,0 6,2 7 927 0 942
USA nd 75,0 23 500 75.000 6.000 109.500
Source AIE
suite:     Le tableau suivant compare les tarifs d'achats moyen du kWh éolien dans certains pays.
 
FRANCE
29 cts
ALLEMAGNE
55 cts
ROYAUME - UNI
1 F
ITALIE
60 cts
ESPAGNE
50 cts
     Le soutien public à la recherche et développement en matière d'énergies renouvelables est plus faible en France que chez ses partenaires, comme le montre le tableau ci-dessous.
Budget de R & D publique pour les énergies renouvelables en 1993 en millions de $ 
(en France, ADEME, CNRS, C.E.A., BRGM).
 
France
Allemagne
Japon
Royaume-Uni
États-Unis
8
113
188
23
226
p.17

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