1. Situation du problème
L'exploitation minière donne naissance à deux types de résidus. Le premier dénommé «stériles» est constitué des roches trop pauvres pour être exploitées mais qui ont du être déplacées pour donner accès au minerai ce type de résidus ne pose pas de problèmes. Le second type est constitué de roche finement broyée ayant été soumise à l'action de divers réactifs chimiques. Seul l'uranium est extrait les autres éléments et en particulier le radium restent dans les résidus. Les résidus sont mis en tas à proximité des usines de concentration ou transportés vers des sites proches appropriés. Une usine étant commune à plusieurs sites d'extraction, les résidus ne sont donc pas nécessairement stockés sur leur site d'extraction. Il peut même s'agir dans certains cas de résidus de traitement de minerais importés, comme ce fut le cas pour l'usine du Bouchet (Essonne). Les résidus, qui se présentent initialement sous forme d'une boue à l'issue des opérations de séparation, sont sédimentés dans des bassins barrés si nécessaire par des digues. Les bassins sont remplis progressivement pendant la durée d'exploitation des sites. En France, l'activité minière a fortement décru pour des raisons économiques ces dernieres années, des minerais beaucoup plus riches étant disponibles à l'étranger. Les sites miniers sont donc en voie de fermeture et de réaménagement. 1.1. Les nuisances des résidus
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1.2. Les aménagements possibles Le traitement généralisé de ces déchets pour en extraire toutes les vies longues (Ra et Th) serait une solution extrême mais d'une faisabilité non démontrée et d'un coût sans doute démesuré vis à vis de la réduction de la nuisance réelle. Le rejet à la mer présente des avantages objectifs (la concentration de ces éléments déjà présents naturellement dans la mer ne changerait pas) mais elle est impraticable, l'opinion publique et les accords internationaux n'acceptant pas cette hypothèse. Compte tenu du volume des résidus, la solution actuellement retenue est le stockage en place dans les anciennes mines à ciel ouvert, avec mise en place de couvertures plus ou moins élaborées et de servitudes d'utilisation du sol et du sous-sol. 2. L'action de l'IPSN
2.1 Les recherches sur la compréhension des mécanismes
2.1.1 Le radon
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Ce sont ces descendants qui sont responsables par inhalation
de l'essentiel de la dose, car ils restent dans les bronches et les poumons
assez longtemps pour y déposer leur énergie de désintégration.
La migration du radon jusqù'à l'homme se décompose en plusieurs phases. Tout d'abord, la décroissance du radium en radon au sein de la roche éjecte le radon par effet de recul. Une partie de ces atomes éjectés n'ont pas une énergie suffisante pour sortie des grains de roche incluant le radium initial ou auront au contraire assez d'énergie pour pénétrer dans un grain voisin où ils seront emprisonnés. Compte tenu de la décroissance rapide du radon, cela signifie que seule une petite partie du radon formé sera libérée (une thèse est en cours au SERGD sur ce sujet). Le radon libéré doit encore atteindre la surface du sol. Il ne peut le faire que transporté en solution (à condition que le trajet de l'eau soit d'une grande rapidité, ce qui n'est que rarement le cas), ou en empruntant les porosités non saturées en eau de la roche. Plus ce trajet est long, plus le radon a des chances de disparaître avant d'atteindre la surface. L'état de saturation des porosités et la facilité des migrations de gaz qui en résulte est donc un paramètre clé. Des études sont en cours pour modéliser ces phénomènes d'infiltration. S'agissant de matériaux de très faibles granulométrie, les effets de capillarité doivent être pris en compte. C'est grâce à cette capillarité que les résidus peuvent garder une certaine humidité même s'ils sont très au dessus du niveau des nappes. C'est en l'occurrence un élément favorable à une réduction des émanations. La connaissance de la répartition des phases liquides et gazeuses permet ensuite de calculer la vitesse de migration du radon. Les modèles nécessaires sont maintenant opérationnels: leur validation sera la prochaine étape. Elle pourra se faire à partir d'essais sur maquettes et échantillons et aussi par des expériences in-situ (mesure simultanée des flux de radon en surface et de l'état hydrique du sol). La dernière étape est le trajet du radon dans l'atmosphère. La concentration du radon en atmosphère libre est assez faible, à l'exception de situations météorologiques particulières (atmosphère très stable et sans vent) survenant sur des résidus riches et non recouverts. Il est évidemment nécessaire de pouvoir estimer cet effet, ne serait-ce que pour optimiser les moyens de protection. De plus, l'estimation de l'impact ajouté par un site demande que l'on puisse distinguer le radon émis par le site du radon ambiant (les sites miniers sont forcément dans des zones où les niveaux naturels sont plus élevés que la moyenne), ce qui peut être fait à partir de la mesure des facteurs d'équilibre entre le radon et ses descendants à vie courte. 2.1.2 Les effets chimiques
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Ces éléments sont plutôt rassurants, mais les grands tas de résidus étant soumis à des conditions chimiques particulières, il convient de vérifier que cela ne peut pas se traduire, à un moment ou un autre de leur évolution ultérieure, par une solubilité accrue du radium et des toxiques chimiques. L'intérêt d'une étude chimique ne se limite pas aux seuls problèmes de lixiviation immédiate: il est important aussi de déterminer dans quelles conditions peuvent se produire des précipitations de phases minérales nouvelles. Une agglomération des grains par ce type de phénomène serait doublement bénéfique: en réduisant la libération du radon et en transformant le résidu en un matériau moins attractif que du sable pour des amateurs de matériaux bon marché (cela s'est déjà produit dans les pays de l'est). 2.1.3 Les collaborations internationales
2.2 Les recherches sur la méthodologie de l'évaluation
d'impact
p.28
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L'étude de l'impact à
court terme des résidus miniers ne pose pas de gros problèmes
(voir expertise ci-après en 2.3). Pour le moyen et le long terme,
on ne peut pas échapper à la nécessité de bâtir
tout un ensemble de scénarios et à les épurer de leurs
incompatibilités. Par exemple, on ne peut pas faire l'hypothèse
qu'une eau sera bue si sa composition chimique la rend impropre à
la consommation, de même, il n'est pas sérieux d'imaginer
que l'on fera un forage en haut d'une colline plutôt que de pomper
dans une nappe alluviale... Lorsque des scénarios cohérents
sont bâtis, il reste à calculer leurs conséquences
de façon réaliste et enfin à juger de leurs vraisemblances
(quantifier une probabilité est plus difficile).
Procéder de cette façon est indispensable pour prendre des décisions de protection «optimisées». Deux situations à conséquences similaires, mais dont l'une ne pourrait airiver qu'au terme d'une suite d'événements peu probables, ne sont pas équivalentes. Un excès de protection contre des situations rares peut conduire à des effets pervers (en plus du gaspillage de ressources qui pourraient être utilisées ailleurs). Il ne s'agit pas que d'un cas d'école. Si par exemple on envisageait de retraiter tous les résidus pour en extraire radium et thorium, cela réduirait un risque mais en créerait d'autres: les nuisances de l'usine de traitement, l'irradiation des ouvriers, l'isolement de radium sous une forme concentrée et bien plus dangereuse que sa forme diluée dans les déchets... La réflexion sur tous ces sujets est loin d'être mure, aussi bien en France qu'au niveau international (l'AIEA se cherche une doctrine). Quelques allusions controversées se trouvent dans les textes de la CIPR. Cependant quelques pays se sont engagés dans la voie du réalisme et de l'estimation du risque. Il est clair que la réflexion doit se poursuivre encore. Quelle que soit la façon de voir ces problèmes généraux, les outils techniques nécessaires restent similaires. Il faut recenser des scénarios, compléter les connaissances sur les phénomènes cruciaux dans ces scénarios et enfin bâtir des outils d'évaluation globale des impacts. L'aspect global est évidemment fondamental. Un exemple typique est celui de l'évolution des écosystèmes agricoles. Les diverses interactions entre les compartiments de l'environnement (eau, sol, plantes, animaux, humains) peuvent être modélisés en rassemblant les connaissances de radioécologie, radiobiologie et en les combinant à la description des pratiques agricoles et des modes de vie (type d'alimentation, degré d'autarcie...). Ce genre d'approche est désormais classique et s'applique dans de nombreux autres domaines (impact de rejets, contamination par accident). Ces travaux d'intégration sont en cours et font l'objet d'intercomparaisons entre les équipes de différents pays (dans le cadre de l'exercice BIOMOVS en particulier). 2.3 Les enseignements de l'étranger
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Malgré cet exemple extrême, il semble que la tendance dominante soit de se diriger vers le réalisme et vers l'acceptation de risques réduits pourvu qu'ils soient ALARA. 2.4 Les premières expertises
p.29
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Depuis 1976,
il existe, en France, un
groupement de scientifiques indépendantsqui
diffuse de l'information sur les nombreuses questions que soulèvent
le développement de l'industrie nucléaire en France. Lors
de l'accident nucléaire de Tchernobyl, ce groupe a été
abondamment sollicité par la presse et le public pour répondre
aux carences des services officiels.
Les compétences pluridisciplinaires du Groupe de Scientifiques pour l'Information sur l'Énergie Nucléaire ont été largement reconnues puisque plusieurs de ses membres ont participé à des expertises de projets nucléaires... à l'étranger. En réclamant l'accès à la documentation, la pluralité des analyses, afin d'obliger les services officiels à fournir une inforrnation sincère, le GSIEN a témoigné qu'une large fraction de la communauté scientifique française souhaitait des structures d'évaluation indépendantes d'un des plus importants programmes nucléaires au monde. La catastrophe de Tchernobyl a largement montré qu'en France, l'information sur le nucléaire est biaisée: on ne peut être en même temps promoteur et garant de la sûreté, on ne peut confier aux mêmes services la sûreté des systèmes et les conséquences de l'échec de ces mêmes systèmes. Rappelons que c'est l'absence totale de débat démocratique sur l'énergie nucléaire qui est à l'origine du GSIEN et la motivation de son activité, compte tenu de la démission du pouvoir politique vis-à-vis des nucléocrates du CEA, de l'EdF et de l'indifférence absolue de ceux-ci vis-à-vis de l'opinion publique et même de la législation. |
Le GSIEN, c'est plus de 120 dossiers scientifiques
publiés dans la revue «La Gazette Nucléaire»,
c'est la publication de plusieurs livre et de nombreuses interventions
devant des organismes officiels ou pour le public, c'est aussi la réponse
à de nombreuses demandes (scolaires, journalistes, associations...)
Ce groupe indépendant, à but non-lucratif, ne fonctionne que par la volonté de ses membres et avec les financements de leurs cotisations. A l'heure (*) où les importantes avaries du réacteur surgénérateur Superphénix soulèvent des inquiétudes et son redémarrage sans cesse repris les confirme, il est important qu'un groupe tel que le GSIEN puisse continuer à bien fonctionner. Cela dépend largement de votre soutien. Pour soutenir notre action, vous pouvez:
p.30
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Depuis fort longtemps le lobby
militaro-industriel ne s'était pas senti aussi attaqué qu'actuellement
suite à l'annonce faite par le Président Chirac, de la reprise
des tirs nucléaires. Il se sent tellement contesté dans ce
qu'il considérait être son sanctuaire de légitimité
qu'il utilise toute une panoplie d'arguments ayant une apparence scientifique
et technique.
Ce qui est prodigieux c'est le contraste entre les hérauts de la presse qui reprennent ces argumentaires sans aucun esprit critique et le pékin moyen qui s'en tient à son gros bon sens et qui désapprouve cette initiative même pas douteuse, franchement stupide. Lors de la décision de moratoire sur les essais nucléaires décidé par le président Mitterand en 1992, un des porte-parole traditionnels du lobby avait eut le culot (courage ???) de transcrire un argumentaire inqualifiable contrairement à certains pays du tiers monde qui vaudraient faire des tirs pour développer une bombe «sale», nous voulions améliorer la propreté de nos bombes, améliorer le rapport qualité-prix. La bombe française aurait fourni le «kilomort» au coût le plus bas. Cette fois devant la chute libre de l'acceptation publique de la décision, il ne suffit plus de faire donner les seconds couteaux traditionnels de la presse. On voit monter aux créneaux les grands chefs de la Direction des Applications Militaires du CEA, et pour bien montrer qu'eux ils sont des scientifiques compétents, ils arrivent à nous torcher des formulations d'une nébuleuse clarté: «Cela suppose de faire appel à des concepts robustes, qui présentent des marges suffisantes à l'égard des différents effets de seuil intervenant dans le fonctionnement de la charge nucléaire pour les rendre peu sensibles à des variations limitées des paramètres de réalisation» (J. Bouchard - Libération - jeudi 3 août 95). Ce même Directeur explique dans La Recherche (n° 281, nov. 95) «Il ne s'agit pas d'essais sur le vieillissement des armes proprement dites, mais sur les concepts qui permettent d'analyser le vieillissement». A quand des analyses sur l'effet de la maladie de Parkinson sur un chef d'Etat qui n'arriverait plus à appuyer sur le bouton? Les arguments techniques ne résistent pas à une analyse logique simple. - Il faudrait tester le modèle de bombe actuellement déployé dans notre «force de frappe». De deux choses l'une: ou ce modèle d'arme a été testé depuis plusieurs années, bien avant d'en lancer la construction en série, et un tir supplémentaire ne nous apprendra rien de plus, ou nos spécialistes ne sont pas certains de son bon fonctionnement et ils ont équipé notre parapluie nucléaire avec quelque chose que l'on pourrait remplacer par des bombes factices. Dans ce cas cela relève de l'escroquerie en matière de deniers publics et de la haute trahison en matière de sécurité nationale. (suite)
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- Deuxième argument, ce seraient des tirs dits «de sécurité», destinés à vérifier si les dispositifs destinés à empêcher n'importe quel fou galonné à déclencher le feu nucléaire sans l'accord du Président, sont toujours opérationnels malgré le vieillissement. Donc il s'agit de voir si les vetos marchent bien, donc que la bombe n'explose pas si tous les cadenas n'ont pas été enlevés. Ce genre de test peut très bien être effectué sur une bombe d'où on a ôté la charge nucléaire (puisqu'il s'agit d'un essai de non-explosion), et cela relève tout à fait des installations Armée/DAM de Moronvilliers. A quoi cela servirait-il d'affiner par des mesures sur tir réel les paramètres de calcul utilisés dans les simulations si ce n'était pas destiné à servir à développer de nouveau engins? Les anciennes valeurs étaient bien suffisantes, puisque, si je ne m'abuse, on sait faire avec ces paramètres des charges capables d'exploser. La notion de recherche avec pour finalité unique le «savoir» en matière d'armement me ferait sourire si ce n'était pas une gigantesque hypocrisie. Essayez d'imaginer l'esprit de recherche fondamentale, la volonté de repousser les limites de la connaissance quand des «scientifiques» (!!??) «améliorent» des mines anti personnelles dont la France est un des plus gros exportateurs mondiaux. Ne croyez vous pas que nos hommes politiques sont en train de céder à la pression des militaires qui souhaitent disposer d'une arme de faible puissance, arme du champ de bataille qu'ils pourraient utiliser à leur volonté dans un conflit local? On peut lire des raisonnements extrêmement surprenants quant à la justification des tirs en Polynésie. Le dernier en date consiste à expliquer qu'on pourrait très bien faire ces tirs quelque part dans l'hexagone, dans la Corrèze par exemple, en raison de leur totale innocuité, à un détail près. Il y a quand même un léger (???) ébranlement à la surface du sol au moment de l'explosion et cela risquerait d'endommager le parc des églises romanes qui constitue une part importante de notre patrimoine. On peut quand même se poser une question intéressante: pourquoi la Polynésie? Nous avons d'autress possessions encore plus éloignées, encore moins peuplées: les îles Kerguelen, les îles saint Paul et Amterdam. On peut supposer que les personnels civils et militaires qui vont préparer et assister aux tirs préfèrent l'accueil des vahinés à celui des manchots empereurs Il faudrait que nos technocrates de la mort, les nécrocrates, cessent de parler de Science quand il s'agit d'améliorer l'efficacité de leurs engins, car, à quoi sert tout le savoir, toute la recherche qu'ils appliquent à leur tache. Cela ne sert, comme amélioration, qu'à faire passer le rendement d'une bombe de 100.000 à 150.000 morts (en vocabulaire de nécrocrate le kilomort par kilotonne pour combien de Mégafrancs). Quel immense progrès obtenu sous le nom de «Science», quelle perversion de ce qui aurait dû servir à améliorer la condition humaine... Raymond SENÉ
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