La G@zette Nucléaire sur le Net! 
N°173/174
DOSSIER ÉNERGIE (suite)
     Comme prévu à l'assemblée du GSIEN la Gazette continue ses dossiers sur l'énergie. Nous venons de recevoir la revue Global Chance (Avril 99 - No 11 - Le nucléaire en débat, 41 rue Rouget de Lisle 92160 Suresnes)
     Ce dossier comporte un volet sur l'effet de serre, ainsi qu'un dossier sur la pile à combustible. C'est un dossier EDF, enfin un dossier un peu en dehors des idéaux EDF, vu sous l'angle un peu trop électricité mais faites-en bon usage.
     J'ai repris certaines portions du dossier sur les coûts de l'énergie. Ce dossier défend la position française du recours au nucléaire et présente une certaine politique alternative. Le problème est de vouloir tout faire car c'est impossible. Devant l'investissement nucléaire (unité le milliard), les autres voies n'ont aucune chance. Quant aux recommandations, la sixième annihile toutes les autres: donner l'ordre à EDF de commander un EPR et compenser le coût.
     En ce qui concerne le décorticage des coûts c'est raté comme d'habitude. L'exercice ne mème nulle part puisque la réalité des coûts n'est pas faite. Les points qui conditionnent une approche restent non connus: démantèlement, temps de vie, santé des travailleurs et des populations, stockage. Et comme en conclusion il est dit que le nucléaire est un atout majeur, on peut toujours l'écrire mais la réalité est moins belle.Le nucléaire restera un recours permettant la prolifération, l'emploi d'armes tels que les projectiles à l'uranium 238 (celui qu'on obtient comme résidu de l'enrichissement), projectiles perforants, lourds et pyrophores (s'enflammant).      Comme l'uranium est un métal lourd, s'il est pulvérisé lors de l'impact il empoisonne les soldats et les populations. Ce type d'armes a été employé en Irak et est sûrement dans tous les conflits. Bonne lecture et si cela vous inspire n'hésitez pas à nous écrire. Nous devons intervenir si nous voulons une autre politique. Ce leit-motiv ne change guère. J'ignore combien de temps il faudra mais il nous faut faire des progrès et vite sur le chemin d'une autre politique.

I- ÉNERGIE NUCLÉAIRE ET EFFET DE SERRE:
la peste ou le choléra
Maurice PASDELOUP (formateur au Centre d'initiation à l'Enseignement Supérieur (CIES) de Toulouse),
courrier à La Recherche 18/01/99
     Le sujet «nucléaire/effet de serre» est fortement d'actualité, et l'article d'Olivier Godard dans La Recherche de novembre 98 n'a pas manqué de susciter des réactions. Je vais donc y joindre la mienne, qui est aussi ma réaction aux réactions... On peut y voir une amorce du débat que tout le monde reconnaît comme scandaleusement absent en France mais qui est toujours éludé par ceux-là mêmes qui sont les mieux placés pour l'animer.

     On constate une fois de plus que ce n'est pas un scientifique, ni un ingénieur, qui a su faire le point d'une façon à la fois succincte, globale et pertinente sur cette problématique complexe. La dure expérience (et si souvent décevante dans son propre champ) de l'approche de l'économiste s'avère éclairante par rapport aux affirmations discordantes des experts plus (et sans doute trop...) directement concernés. C'est sans doute pour cela que les réactions d'Hervé Nifenecker (La Recherche, janvier 99) sont empreintes d'une assez mauvaise humeur.. .Certes, ce n'est pas seulement la France mais le monde entier qui est pris au piège de l'effet de serre, et plus généralement du cycle infernal né de l'utilisation effrénée et irresponsable des énergies primaires. Mais dans cette ténébreuse affaire planétaire, la France occupe bien une position particulière, et c'est de plus celle dont nous pouvons valablement débattre. Situation singulière en effet que d'en être arrivé à 80% d'électricité nucléaire (et d'en vouloir encore plus) alors que les autres pays de l'OCDE, qui ne sont pourtant pas en reste de modernité, plafonnent à moins de 20%. Et ceci au non de «l'indépendance énergétique»... C'est une très bizarre conception de l'indépendance qui nous impose d'être tributaires d'une seule source d'électricité produite, à partir d'une matière première quasi inexistante sur le territoire national et par une seule et unique technologie (celles des machines thermiques, la possibilité de transformation directe de l'énergie nucléaire en électricité étant absente, contrairement aux combustibles chimiques. C'est un argument scientifique fort que nous devrions utiliser plus souvent avec le nucléaire, pas de «piles à combustibles» dont le rendement [60 à 70%] est très supérieur aux machines thermiques). N'en déplaise à H. Nifenecker, c'est bien un lobby très puissant, un état dans l'État, qui est capable d'imposer une telle absurdité à tout un pays politiquement évolué.
    Ce constat n'oblige cependant pas à se ranger aveuglément aux côtés des «maniaques du sortir du nucléaire». Il faut reconnaître que l'arrogance de cette technocratie nucléaire, que Hervé Nifenecker veut bien déplorer, a généré un radicalisme symétrique qui «diabolise exagérément le nucléaire» (dixit Michel Rocard) et défend parfois des solutions inappropriées. Mais n'est-ce pas la conséquence du verrouillage maintenu depuis plus de 30 ans par cette caste de technocrates formatés à la pensée unique des plus grands corps de l'état et des plus «grandes écoles» à la française, qui a empêché que les arguments de l'un et l'autre bord s'astreignent à plus de réalisme?
   Il faut sortir du «tout nucléaire», sans aucun doute, mais ça ne veut pas dire qu'il faut exclure le nucléaire de manière dogmatique ou idéologique. Car il est probable qu'à tout prendre, le nucléaire n'est pas pire que le reste, dans la gabegie des énergies qui prédomine dans les pays dits développés. Il faut avant tout diversifier les technologiques de production d'électricité, forme d'énergie dont nous sommes devenus si dépendants, c'est la seule façon d'assurer sécurité et indépendance. Ramener la part du nucléaire de 80 à 30% comme c'est le cas en Allemagne, ne serait pas déchoir. Et on peut miser comme les Allemands sur la surcapacité actuelle du réseau pour ne pas remplacer les centrales à démanteler. Car c'est bien un programme démesuré de construction de centrales nucléaires qui s'est réalisé imperturbablement depuis son adoption précipitée dans la panique du gouvernement de 1974.

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     Aujourd'hui, la surproduction d'électricité nucléaire n'est absorbée que lors de quelques fortes pointes en hiver. Ceci au prix d'un matraquage publicitaire réitéré chaque année depuis 20 ans pour le chauffage électrique, le plus anti-thermodynamique qui soit, dont EDF s'obstine à faire une promotion éhontée. En substituant le chauffage au gaz au chauffage électrique par effet Joule (qui. devrait même être interdit dans le bâti neuf, comme au Danemark), on pourrait très vite arrêter un bon nombre de centrales.
     Mais il ne serait pas prudent de se priver complètement des possibilités et du savoir-faire du nucléaire. Bien sûr, le lobby nucléaire a toujours minimisé, pour ne pas dire dissimulé, les problèmes des stocks de matières nucléaires et des déchets. Pourtant, scientifiquement (mais non pas économiquement, ni socialement), c'est une affaire relativement simple: des combinaisons d'exponentielles et des connaissances courantes sur les matériaux sous rayonnements. Le hic vient du fait qu'ils s'accumulent et qu'il faudra les assumer pendant des siècles. Comme le remarque H. Nifenecker, l'instauration pour cela d'un état policier ne semble pas à craindre. Mais ce qu'il feint d'ignorer, comme tous les «nucléolâtres», c'est qu'il faut redouter le cas extrême opposé un épisode de «chienlit» politico-sociale généralisée où les structures de responsabilité s'effondreraient, ce qui n'est pas du tout à exclure sur de telles durées.
     Rien de comparable, cependant, dans le court terme, avec les inattendus de la dynamique complexe «non linéaire» de l'atmosphère couplée aux océans, et dont les premiers caprices suffiront à affoler peuples et gouvernants.. .Il est bien là le piège de l'effet de serre: faut-il accepter de n'avoir à choisir qu'entre la peste du nucléaire et le choléra du dérèglement climatique?
     Et pour nous enfermer dans ce dilemme, le lobby de l'électricité massivement centralisée et celui des combustibles fossiles s'y entendent à merveille, contrairement à ce que prétend R. Nifenecker. Il n'y a que quelques économistes indépendants pour mettre l'accent sur «l'efficacité énergétique» qui n'est bien sûr pas du tout recherchée par les industriels de l'énergie, quels qu'ils soient, et pour stigmatiser «l'économie de l'offre» massive et redondante qu'ils entretiennent pour susciter les utilisations les plus aberrantes. Car avant même de parler de «maîtrise de la demande» toujours un peu évocatrice de restrictions, c'est bien plutôt de la maîtrise de l'offre dont il faudrait d'abord s'occuper et qui permettrait de profiter très vite des «manques à gaspiller»...
     Pour ce faire, la politique à mener serait assez simple. Il faut d'un côté décentraliser la production d'électricité de manière à utiliser correctement les centrales thermiques (c'est-à-dire en mode «cogénération», ce qui double leur rendement), qu'elles soient «à flamme» ou nucléaires, ce qui veut dire ne pas accentuer le gigantisme comme le désire EDF avec ses prochaines tranches nucléaires à 1750 Mégawatts (pourquoi ne pas revenir au contraire à des puissances plus raisonnables en utilisant les réacteurs modèle porte-avions à propulsion nucléaire dont on n'a plus que faire, et qui peuvent alimenter une population de 12000 personnes ?.. ce serait une reconversion appropriée et des débouchés maintenus...). Le service public de l'électricité serait effectivement assuré par les collectivités locales ou régionales, qui en ont toujours réglementairement la responsabilité (comme pour l'eau), malgré la loi de 1946 créant le monopole d'EDF, dont il faudrait «désoviétiser» l'esprit et les structures dirigeantes. Et il faut d'un autre côté activement «collectiviser» les transports, puisque c'est la dérive individualiste et l'anarchie des transports routiers qui va maintenant le plus aggraver l'effet de serre (parmi bien d'autres de leur méfaits...) et mettre un minimum de rationalité dans l'urbanisation effrénée qui s'accentue un peu partout.
     Il y a donc des orientations, une politique, parfaitement réalistes et réalisables, qui peuvent être menées dès maintenant et qui auraient l'adhésion du public. Mais où sont-ils, que disent-ils, et que font-ils, les esprits libres et éclairés qui pourraient persuader les responsables politiques de s'y engager?
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II- NUCLÉAIRE ET EFFET DE SERRE:
l'argument de la dernière chance pour EDF.
(extrait de Lettre d'information "Sortir du nucléaire" No 5)
Christian David
     Malgré les budgets publicitaires colossaux d'EDF ou de FRAMATOME (le constructeur de centrales nucléaires), le mythe du nucléaire censé nous protéger contre l'effet de serre ne résiste pas plus à la réalité que ceux de l'énergie atomique rentable et sans danger.
     D'abord, une précision: sans effet de serre, la température moyenne (toutes saisons et tous lieux pris en compte) ne serait que de - 18oC!  Les rayons infrarouges (invisibles mais chauffants) venus du soleil, puis renvoyés par la surface terrestre, sont en partie piégés par l'atmosphère comme s'il y avait une serre. Certains gaz. comme le CO2 (gaz carbonique) le méthane, les oxydes d'azote, jouent ce rôle d'écran, et nous garantissent, aujourd'hui. une température moyenne de + 15oC.

Montée des mers
     Mais une hausse rapide (+0,5oC depuis 1900) a été enregistrée. Comparée aux réchauffements entre les glaciations produites depuis la préhistoire (+ 0,1oC par siècle au maximum). elle s'explique difficilement par un phénomène naturel. Ce réchauffement, probablement dû à nos émissions de CO2, est plus rapide près des pôles avec des fontes de banquises provoquant des accidents mortels.
     Les conséquences envisagées sont nombreuses:  + 2oC en moyenne d'ici 2100, montée des mers noyant des îles (ex  les Maldives) ou une partie du Bangladesh, extension des régions désertiques (ce fléau a plusieurs causes dont une est l'effet de serre), modification des climats, des écosystèmes, nouveaux flux migratoires,,, L'estimation de hausse moyenne de température est difficile car la complexité des phénomènes ne permet pas d'arriver à une bonne modélisation et donc, une prédiction fiable, de plus, le comportement des populations sera déterminant pour réduire les émissions polluantes.
     En France, parmi les activités humaines utilisant les combustibles fossiles rejetant le plus de CO2, signalons les transports 35%, l'industrie 24%, l'agriculture 2%, le chauffage des habitations et des bureaux 22,5% alors que la production d'électricité ne contribue "que" pour 16,5%.
     Certes, les centrales et le chauffage individuel au fioul, au charbon sont les plus gros producteurs de CO2, mais le lobby nucléaire nous devrait,,. au moins la lumière sur sa contribution...! 

suite:
Car il faut prendre en considération l'extraction et l'enrichissement du combustible nucléaire, la construction des centrales nucléaires, le transport du combustible ainsi que celui des déchets (plusieurs milliers de km par an). D'après une étude de «L'Ökonomie Institut» de Darmstadt (Allemagne) cela donne au minimum 28 g de CO2 émis par chaque kWh nucléaire. Multipliez par 376 TWh (= 376 mille milliards de Wh) d'électronucléaire produits par EDF en 1997, vous obtenez plus de 10 millions de Tonnes rejetées par EDF sur un total de 367 millions de Tonnes rejetées en 1990(3%, soit plus que l'agriculture). Les adeptes du lobby nucléaire ont du mal à se recycler en écologistes... quant à nous, citoyens, en économisant notre consommation d'électricité, nous évitons une partie des rejets de CO2.

Economies d'énergies et énergies renouvelables
     Quant aux énergies renouvelables (solaire, éolien ...), elles ne produisent pas ou peu de CO2. Certes, leur mise en oeuvre nécessite souvent des transports, mais plus courts, avec des matériaux plus légers que ceux d'une centrale atomique. Parmi ces énergies renouvelables, seule la filière bois pourrait poser le problème du rejet de CO2 par combustion. Mais, si on remplace l'arbre utilisé dans la chaudière par la plantation d'un nouveau, ce dernier va absorber du CO2 (pour fixer le carbone nécessaire à sa croissance). C'est pourquoi, dans une forêt en expansion (comme en France), la filière-bois absorbe, en fait, du CO2.
     En économisant l'énergie et en sortant du nucléaire, nous pouvons donc très bien lutter contre l'effet de serre. A condition d'ajouter aux énergies alternatives l'adoption de transports écologiques : vélo, trains,  en évitant surtout, les déplacements inutiles (pommes du Chili dans nos supermarchés...). Il faut au contraire, privilégier les circuits courts lors de nos achats, par exemple aux marchés auprès de producteurs, ou dans des commerces de proximité, coopératives...
     Ce sera, espérons-le, plus efficace que les sommets (Rio, Kyoto, Buenos-Aires) où se sont récemment créés des "permis de polluer" que les USA pourraient acheter au tiers-monde.
     Cet air devenu commercialisable, nous en avons par-dessus le marché!

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III- CHANGEMENTS CLIMATIQUES ET EFFET DE SERRE
27 novembre 1998
Définition et influence de l'homme
Compte-rendu disponible sur internet, voir en bas de page
Extrait de la présentation de MonsieurRAYNAUD
Directeur et chercheur du Laboratoire de Glaciologie à Grenoble,
ex-membre du GIEC

     La prise de conscience - d'abord scientifique - a vraiment émergé au début des années 80, aboutissant à la création du GIEC. Depuis cette époque, le GIEC, qui a publié plusieurs rapports d'évaluation représentant l'état de l'art en ce qui concerne les données scientifiques disponibles sur l'évolution du climat, a abouti à un consensus réunissant une très large partie de la communauté scientifique spécialisée dans le domaine.

     1) Les traces gazeuses à effet de serre ont augmenté de façon dramatique et exponentielle au cours des deux derniers siècles en raison des activités humaines. La révélation de l'influence de l'homme sur l'accentuation de l'effet de serre a réellement débuté à partir de 1958, lorsque l'on a commencé à mesurer en continu l'évolution de la teneur en CO2 de l'atmosphère. Les mesures ont démontré une croissance de 1 à 2 ppmv/an. La comparaison des courbes d'augmentation des teneurs en CO2 et des émissions dues à la consommation d'énergies fossiles indique l'étroit parallélisme entre les deux phénomènes, confortant leur lien de cause à effet. Ce lien est encore devenu plus évident lorsque l'analyse des bulles d'air emprisonnées dans la glace polaire a permis de montrer que le parallélisme en question recouvrait l'ensemble de la période industrielle (c'est à dire depuis la moitié du siècle dernier).
     L'enregistrement de la glace montre que durant l'époque pré-industrielle les teneurs en CO2 étaient relativement constantes autour de 280 ppmv, valeur à comparer avec la teneur actuelle qui est d'environ 360 ppmv. De telles tendances d'augmentation très importantes durant les deux derniers siècles ont été aussi mises en évidence pour le méthane et le N2O, deux autres importantes traces gazeuses. CO2, CH4 et N2O présentent des teneurs atmosphériques faibles par rapport à la vapeur d'eau (le premier responsable de l'effet de serre naturel de notre planète), mais leur augmentation anthropogénique peut entraîner un renforcement dramatique de ce fameux effet de serre.

     2) Effet climatique
     Au-delà de ce constat clair et marqué concernant la modification récente du contenu en gaz à effet de serre de l'atmosphère, la prédiction des conséquences climatiques est plus difficile en raison de la complexité des processus mis enjeu. La très grande majorité des modèles prédictifs de l'évolution du climat estiment entre 1,5 et 4,5oC l'augmentation attendue de la température pour un doublement du CO2 depuis le début de l'ère industrielle, ce qui pourrait conduire à une augmentation moyenne globale à la surface de la planète d'envirnn 2oC d'ici 2100. Les incertitudes majeures de la fourchette l,5-4,5oC pour un doublement du CO2 viennent de la difficulté à évaluer précisément les effet rétroactifs consécutifs à l'effet de serre additionnel résultant de l'augmentation anthropique (effet des nuages et de l'albédo de surface en particulier). Il convient, à ce stade, de rappeler que certains considèrent en opposition avec l'extrême majorité de la communauté scientifique que certains de ces effets rétroactifs pourraient atténuer largement, voire annuler, cette élévation de température. Est-ce qu'une augmentation de quelques degrés de la température globale de la planète est importantc? La paléoclimatologie nous permet de répondre sans ambiguïté par l'affirmative. En effet il a suffit que cette température augmcnte de 4 à 5oC entre il y a 20.000 et 10.000 ans pour faire basculer notre planète d'un univers glaciaire avec des conditions climatiques complètement différentes (niveau marin plus bas de 120m, énormes calottes de glace équivalentes à l'Antarctique actuel dans l'Hémisphère Nord,...) à la période interglaciaire plus climatiquement clémente que nous connaissons aujourd'hui. Dans le futur, l'effet de serre additionnel pourrait nous conduire à des conditions d'un «super-interglaciaire» jamais rencontrées au cours du dernier million d'années, avec une poursuite de l'élévation du niveau marin et de la température globale, cette fois-ci à l'échelle du siècle!
     L'étude du passé nous apprend aussi que les grandes variations du climat global au cours de ces derniers 400.000 ans ont été intimement accompagnées de variations du CO2 et du méthane (concentrations plus élevées durant les périodes chaudes et les plus basses au cours des maxima glaciaires), ces traces gazeuses ayant par exemple participé de façon importante, avec les changement d'insolation et de volume des glaces, aux 4 à 5oC caractéristiques des réchauffements glaciaire-interglaciaires. Il faut de plus observer qu'au cours des derniers 400.000 ans les teneurs de ces gaz n'ont jamais atteint, et de beaucoup, les teneurs observées aujourd'hui suite aux activités humaines. Enfin, l'étude du passé nous apprend que des changements drastiques de la circulation profonde de l'océan peuvent se produire en parallèle avec des variations brusques du climat à l'échelle de quelques dizaines d'années. Or des efforts récents de modélisation de réaction dc l'océan consécutif à une augmentation trop rapide de la température dans le futur conduisent à des conclusions semblables, le message étant que non seulement les niveaux d'effet de serre additionnel peuvent avoir des conséquences majeures, mais qu'il est désormais nécessaire aussi de considérer à quelle vitesse il augmente dans le futur. Si de telles prévisions se confirment, il apparaît urgent d'agir encore plus rapidement pour réduire le taux d'augmentation annuelle du CO2 et des autres traces à effet de serre que nous émettons dans l'atmosphère.

suite:
     3) En conclusion
     Le CO2 et d'autres traces gazeuses à effet de serre augmentent aujourd'hui de façon dramatique en raison des activités humaines. Les teneurs observées ont des niveaux inégaux au cours des derniers 400.000 ans. A la fois les modèles prédictifs du futur et les évidences du passé montrent qu'une augmentations des traces gazeuses à effet de serre doit le plus probablement conduire à un réchauffement global qui peut être des plus significatifs au cours du siècle à venir. Enfin il faut non seulement se préoccuper des niveaux de concentration que ces gaz pourraient atteindre mais de la vitesse à laquelle ces niveaux seront atteint.

Extrait de la présentation de Monsieur CIAIS (chercheur au CNRS, membre du GIEC)
     L'objet de l'intervention est de présenter le cycle de carbone et ses conséquences potentielles sur l'effet de serre. La question se pose en particulier des puits de CO2 qui peuvent éviter qu'en final un excédent de CO2 ne finisse par s'accumuler dans l'atmosphère, entraînant une accélération de l'effet de serre.

Cycle du carbone
     Si parmi les gaz à effet de serre le CH4 a un impact important, sa durée de vie moyenne relativement faible (de l'ordre de 8 ans) est moins problématique que celle du CO2 qui est pratiquement infinie.
     Le CO2 se répartit entre l'atmosphère, la biosphère (c'est à dire le stockage dans les végétaux par la photosynthèse ou les sols) et les océans (en particulier en profondeur). L'atmosphère joue un rôle de trait d'union entre la biosphère et l'océan.

La perturbation du cycle du carbone par l'Homme
     Avant le relargage de carbone fossile par l'Homme (il y a 200 ans) les échanges entre les différents compartiments (atmosphère, biosphère et océans) étaient constants. La combustion du carbone fossile rajoute actuellement 5 milliards de tonnes/an de carbone, ce qui peut apparaître encore très peu par rapport à la photosynthèt-se (50 milliards de tonnes). Avec la déforestation ce sont ainsi 7 milliards de tonnes de CO2 supplémentaires qui sont relâchés. Or les comptages ne permettent d'en dénombrer que la moitié en plus dans l'atmosphère. La question qui se pose alors est : quel est le puits de CO2?

Puits et source de CO2 sur les continents
     A l'heure actuelle on ne sait pas vraiment avec certitude quel est le réservoir manquant. L'hypothèse qui veut que la biosphère joue ce rôle serait plus temporaire qu'un piégeage profond dans les océans.
     De nombreuses incertitudes demeurent concernant:
     - la distribution régionale des sources et des puits.
     - la variabilité annuelle de ce bilan,
     - les processus,
     - les prédictions des conséquences potentielles.
     Concernant par exemple la distribution régionale des puits les modèles actuels aboutissent à des hypothèses contradictoires, localisant les puits de CO2 en Sibérie ou pour d'autres en Amérique du Nord.
     Si un consensus semble se dessiner sur l'existence d'un piégeage de CO2 dans la végétation de l'hémisphère nord, la zone demeure ainsi incertaine.
     Néanmoins le temps dc résidence (ou de piégeage) du CO2 dans les végétaux varie selon les écosystèmes:
     - 120 ans dans les marais,
     - 70 ans dans les forêts boréales,
     - 30 ans dans les forêts tropicales;
     Ce piégeage dans les végétaux, qui peut donc être un frein à l'augmentation des teneurs en CO2 dans l'atmosphère, pourrait n'être que transitoire. Dans tous les cas, le CO2 sera réémis à terme dans le cycle du carbone et donc dans l'atmosphère.

En terme de prédictions
     Il convient de bien réaliser le caractère très transitoire du stockage du carbone dans la végétation. Par ailleurs les terres susceptibles d'être utilisées pour stocker du carbone (reforestation) sont très faibles par rapport à l'ensemble des surfaces disponibles.
 
 
 
 

POUR PLUS DE RENSEIGNEMENTS
S'adresser à RHONALPENERGIE
10 rue des Archers 69002 Lyon - tél 04 70 37 29 14
re-mail : raee@imaginet.fr
sur internet
htpp://www.rhonalpenergie-environnement.asso.fr

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