La G@zette Nucléaire sur le Net! 
G@zette N°223/224

DÉBAT PUBLIC
I- DOSSIER DÉCHETS

INTRODUCTION AU DÉBAT


     Le dossier déchet comporte une contribution gouvernementale qui souhaite répondre à:
     - D'où viennent les déchets? De quels dangers sont-ils porteurs? Comment sont-ils gérés aujourd'hui en France et dans d'autres pays?
     - Avec la loi de 1991, la France s'est donnée 15 ans de recherches selon 3 axes: quels résultats, quels avantages et inconvénients, quelles perspectives d'application pour chaque axe?
     - A l'issue de ces 15 ans, le temps des choix est venu: quelles sont les positions des experts scientifiques? Quel sera le processus de décision?
     Ils ont de plus proposé quelques thèmes de discussion (Voir plus loin la contribution GSIEN).
     Maintenant prenons le texte officiel.
     Affirmer "les organismes de recherches, en particulier le CEA ont encore intensifié leurs travaux sur le nucléaire" est “amusant". En effet, seul le CEA a travaillé dans ce domaine jusque dans les années 1995. A ce moment là des physiciens du CNRS sont effectivement entrés dans une collaboration sur la transmutation.
     Quant à la naissance de firmes de tout premier ordre parlons-en AREVA regroupe effectivement tous les talents: mines, combustibles, fabrication, retraitement et entreposage mais a perdu la maîtrise de la métallurgie, n'a quasiment plus de contrats de retraitement (hors ceux EDF). Bien sûr, compte tenu de sa corbeille de mariage étatique, tout va bien en apparence. En 1977 COGEMA avait hérité de la Hague et des mines, puis en 2002 la naissance d'AREVA a regroupé tous les axes du nucléaire hors la production et la distribution d'électricité.
     Quant au développement d'organismes "de contrôle indépendants" il a fallu attendre les années 90 soit plus de 20 ans pour avoir une direction de la Sûreté et on attend encore qu'ils ne soient pas soumis à des arbitrages  qui leur lient les mains. 
     Comme c'est principalement les transports qui polluent , on est de fait passé du "tout pétrole" au "tout pétrole ET tout nucléaire" ce qui ne diminue guère nos émissions de CO2 et nous rend esclave d'une seule source d'énergie car dépendre à 80% du nucléaire pour notre électricité est une aberration. Comme il est signalé "Si on arrêtait le nucléaire, l'indépendance énergétique de la France serait de 7% contre 23 en 1973": on ne peut pas dire qu'on a bien travaillé. On est pieds et poings liés à l'électricité d'origine nucléaire. On aurait dû développer le recours aux énergies alternatives et surtout aux économies. Il n'est jamais trop tard pour changer de cap mais ça finit par être de plus en plus difficile surtout en se lançant dans l'EPR et la fusion. Évidemment au niveau de la présentation d'un programme diversifié nous sommes très fort, malheureusement dans les faits c'est vraiment moins bon. La part du renouvelable doit plafonner dans les 2 à 3% (cela double ce qui se faisait l'année 1973) mais vraiment ce n'est pas une réussite.
     L'accompagnement dans notre démence par la Finlande, la Chine et l'Inde est tout relatif; la Finlande se paiera un EPR et des contrats avec la France quand il est arrêté pour changement de combustible (ou alors elle en achètera 2?) Quant à la Chine elle s'oriente vers des unités de moindre puissance (600 voire 300 MWé), l'Inde elle, n'a que des petites unités.
     Quant aux autres pays on verra, pour le moment les politiques en causent parfois mais les financiers ne sont pas prêts à payer.
     La comparaison des risques et avantages des diverses sources d'énergie est peu crédible. En particulier pour le nucléaire, on oublie l'impact sur l'écosystème et ses besoins en eau. Quant au solaire photovoltaïque on parle de ses coûts élevés mais comme il n'est pas développé, c'est normal. Si on veut faire de telles comparaisons il faut partout ajouter le prix des recherches et de la mise au point industrielle. L'éolien est bien sûr intermittent et a un impact sur les paysages. Facile, mais outre que les lignes à Haute Tension ne sont pas plus harmonieuses, ce qualificatif s'applique à peu près à toutes les énergies: charbon, gaz, nucléaire et hydraulique.
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     Pour aider à la compréhension, il y a donc les CLI. Elles sont bien courtisées ces structures qui, d'une part ne sont pas actives partout et d'autre part, n'ont pas toujours une composition donnant sa place aux citoyens.
     Quant à l'ANDRA dont on salue l'existence affirmée par la loi de 1991, elle a en charge uniquement le site de l'Aube et le laboratoire. L'ANDRA a aussi en charge l'inventaire des déchets mais il faut l'associer à un plan permettant de se rendre compte s'il existe ou non une solution pour que les déchets recensés soient sous une forme qui protégera les humains et leur environnement.
     De plus cet inventaire est incomplet car il existe des sites pollués non encore identifiés et de toute façon, la loi de 1991 ne  prend pas en charge de telles pollutions. L'apurement de cet ensemble de déchets est un impératif incontournable.
     Les valeurs données dans le dossier ne se réfèrent qu'aux seuls réacteurs (58) et en plus s'arrêtent en 2020.
     D'une part les options gouvernementales semblent privilégier un fonctionnement sur plus longtemps (30 voire 50 ans) et d'autre part nous le répétons les déchets de haute activité ne sont  pas les seuls à présenter des dangers.
     Que les procédés se soient améliorés, que EDF utilise des nouveaux combustibles qui séjournent plus longtemps dans les réacteurs n'empêchent pas les déchets d'exister. Leur volume diminue mais pas leur dangerosité : une fission donne toujours 2 produits de fission et il faut toujours autant de fission pour arriver à 900, 1.300, 1.400 et 1.600 MWé (soit 2.700, 3.900, 4.200, 4.800 MWth puisque la température de la source froide est toujours autour de 270°C et celle de la source chaude autour de 350 d'où un rendement de Carnot entre 33 à 35%)
     S'ensuit une présentation de la loi de 1991 dite "loi Bataille". S'il est vrai que le Parlement pourrait utilement intervenir pour poser des gardes fous et se faire expliciter les enjeux qui devraient guider pour la nouvelle loi de 2006, ce n'est pas vraiment ce qui se passe. Je n'en veux pour exemple que la présentation des quantités annuelles de déchets. Il n'est pas sérieux de présenter les hautement actifs sous la forme d'un cube de 5m de côté, les moyennement actifs 8,5 m et pour finir les faiblement actifs 30m. Bien sûr, on peut ajouter que les ordures ménagères sont plus encombrantes mais je me répète pourquoi chercher un site profond et s'ennuyer à creuser pour de si petits volumes.
     Par ailleurs, le CLIS a des difficultés à se faire entendre. Le rapport qu'il avait commandité à L'IEER a été très mal reçu par l'ANDRA en particulier et tous les tenants du programme en particulier. Et pourtant, il est très bien ce rapport: il pose des questions... mais c'est vrai que cela ne se fait pas.
     L'affirmation selon laquelle les filières industrielles sont "d'ores et déjà en place" est vraiment optimiste. Il existe 2 sites pour les Moyennement et faiblement actifs non contaminés par les émetteurs à vie longue (site Aube) et un pour les Très Faiblement Actifs juste à côté (Morvilliers). Bien sûr on entrepose à la Hague, à Marcoule, à Valduc, à Cadarache, à Saclay et autres sites comme ceux des réacteurs. Évidemment EDF (principe pollueur-payeur) fait payer à chaque français son kWh plus cher (nous sommes tous pollueur-payeur : c'est un peu facile puisqu'on ne nous écoute pas). Mais tout ceci ne donne pas "des filières industrielles".
     Il y a encore du boulot avant de parvenir à une gestion fiable des déchets. Pour le moment: stopper le retraitement, réfléchir et ne pas se bloquer sur le stockage géologique serait une meilleure façon d'aborder le problème.
     En ce qui concerne l'international aucun pays n'a réellement de solutions. la Finlande “a retenu la voie du stockage en couches géologiques profondes” mais retenu ne signifie pas que c'est réalisé.
     Quant à l'Allemagne, elle revoit sa copie avec les populations concernées; la Suisse fait de même et la Belgique aussi.
suite:
     Parlons maintenant des avancées de la loi de 1991:
     - La transmutation: Ce procédé dévoreur de crédits et avide de matières grises ne servira jamais à rien. De plus, il ne concerne qu'une part infime des déchets, les hautement actifs et entraîne la génération de déchets B en volume  important.
     - Le stockage en couches géologiques: le labo n'a rien livré comme résultats probants, juste des pistes puisque les puits ne sont pas foncés et que les expérimentations sont en devenir. Il est aisé de déclarer qu'il n'y a pas de défauts rédhibitoires; d'une part cette affirmation  n'est valable que juste sur l'emplacement du labo et d'autre part cela qualifie peut-être l'argile mais sûrement pas un site de stockage. Or le choix semble déjà fait : du labo on jumpe déjà au stockage.
     Il reste aussi la "réversibilité". Sur ce point il y a aussi mal donne: la réversibilité proposée est pendant le temps de vie du stockage, pas du tout sur le long terme. Et ce n'est pas en accord avec les demandes des citoyens. Il est urgent de mieux écouter les demandes.
     Par ailleurs il y a une autre réversibilité: si ce site s'avère mauvais, retournera-t-on en arrière? Ne va-t-on pas tout colmater au béton? Il n'y a pas en l'état d'autre alternative: argile à Bure et rien d'autre.
     - L'entreposage, quant à lui est qualifié de "technique industrielle éprouvée". Et ce, en citant les sites de Cadarache, la Hague et Marcoule. Il est vrai qu'à Cadarache, CEDRA et son entreposage sont prévus pour 50 ans mais qui peut affirmer que cela marchera.
     Le peu d'expérience que l'on a, sont les entreposages de la Hague qui, pour partie doivent subir un nouveau conditionnement qui est loin d'être réalisé. Bien sûr de superbes conteneurs existent mais leur tenue dans le temps n'a rien d'une certitude.
     Les choix en 2006:
     Si le choix est fait de continuer le labo pour qualifier le site de Bure cela veut dire que le problème ne sera pas correctement étudié. 
     De toute façon, il faut d'abord répondre à propos du programme énergétique de la France. En effet, ce programme conditionne étroitement les sites à prévoir et les moyens de gérer non seulement les combustibles usés retraités ou non mais aussi les déchets du cycle et l'ensemble du démantèlement des diverses installations dont celle de l'enrichissement, du retraitement et de l'entreposage.
     En conséquence le débat quel qu'il soit (Parlementaire ou citoyen) doit d'abord se positionner sur le programme énergétique français pour les déchets à venir. Et le débat devra aussi se positionner sur les déchets existants: Tous les déchets et pas seulement ceux de haute activité.
     Les avis pour le choix 
     La CNE: a écrit que il fallait continuer les études sur la transmutation qui ne verrait le jour que vers 2040. C'est encore optimiste et surtout quel intérêt?
     Elle a aussi noté qu'il n'y a pas d'obstacle à la mise en oeuvre d'une solution de stockage en couches géologiques profondes mais à part le fait que les travaux sont trop peu avancés pour rendre une telle assertion, l'autre point est qu'il n'y a que BURE donc quel autre choix?
     En ce qui concerne les entreposages il est osé d'écrire que "l'entreposage est une réalité industrielle maîtrisée". C'est sûrement une réalité mais maîtrisée c'est une autre paire de manches.
     Pour entreposer on entrepose mais la reprise des différents tas de l'histoire a encore de beaux jours devant elle. La CNE ajoute que les entreposages ne dureront pas 150 ans: alors comment tiendront des stockages qui utilisent les mêmes conteneurs et les mêmes bétons?
     La  DGSNR quant à elle a été chargée de mettre en place un plan national de gestion des déchets radioactifs et matières valorisables (PNGDR-MV)
     A vrai dire ce fut d'abord un PNGDR, puis est arrivée cette notion "Matières Valorisables" Voici page suivante le point de vue des associatifs sur ce glissement:
p.5

POINT DE VUE DES ASSOCIATIFS
ACRO- GSIEN-ROBIN des BOIS
     Les associations (ACRO, GSIEN, Robin des Bois) ont participé à l'élaboration du PNGDR (pdf).
     Il leur apparaît clairement que, malgré l'objectif "disposer d'un cadre global permettant de gérer de façon cohérente l'ensemble des déchets radioactifs quelque soit leur producteur", la loi du 30 décembre 1991 pèse lourdement sur la politique des déchets.
     Cette loi dont le mérite a été d'obliger à prendre en charge les déchets se limite malheureusement aux seuls déchets qui sont bien connus parce que issus des réacteurs.
     Elle se décline selon 3 axes (séparation-transmutation, stockage réversible en formations géologiques profondes, conditionnement et entreposage de longue durée). Ces 3 axes ne s'appliquent pas à tous les déchets sauf le dernier. En effet le conditionnement des déchets est incontournable à leur gestion. Par contre le premier axe fait croire à la possibilité de diminuer la radiotoxicité or on ne transmutera jamais les résidus de mines, les produits de démantèlement ni les aciers contaminés, etc. Quant au deuxième axe, s'appuyant sur les travaux encore à venir d'un seul laboratoire, il n'offre aucun choix de site hormis celui de Bure (Meuse-Haute-Marne).
     La loi de 1991 doit impérativement être complétée en 2006 par une approche beaucoup plus globale. Cette nouvelle loi devra traiter la question des déchets dans sa globalité, ce qui implique aussi les déchets de faible et moyenne activité à vie longue ou non et tous les territoires potentiellement concernés.
     Le PNGDR-MV tente de recentrer le débat futur sur l'ensemble des déchets, ceux à venir  comme ceux du passé et va donc dans le bon sens .
     Mais, le plan prenait en considération tous les déchets éventuels sans les qualifier de façon particulière. Le fait d'avoir ajouté dans le titre "Matières Valorisables" n'est pas une simple question de formulation. Il s'agit pour nos associations d'une question essentielle. Si elles admettent qu'il faut assumer l'existence des déchets radioactifs existants et à venir de la filière nucléaire actuelle, elles considèrent que la présentation sous l'appellation trompeuse de "matières valorisables" biaise le débat à venir et remet en cause la prise en charge de l'ensemble des déchets du cycle de la mine au démantèlement et du nucléaire diffus.
     En effet, cette présentation est de nature à forcer les choix futurs de politique énergétique vers la filière nucléaire en ne prenant pas la pleine mesure de la problématique déchets. Elle remet en cause le principe défendu par nos associations selon lequel la meilleure politique de gestion des déchets repose sur la limitation de production à la source.
     Nous souhaitons que la consultation de ce plan soit très large. Il ne faudrait pas d'ailleurs se limiter à une consultation, il faut aussi accepter de modifier selon les attentes de tous les citoyens et pas seulement selon celles des producteurs de déchets ou de ceux qui les conditionnent.

La position de l'OPECST
     Les 2 députés Bataille et Birraux préconisent:
     - pour les déchets de haute activité, le stockage réversible en couches géologiques profondes.
     - pour les déchets de moyenne activité: il reste le choix entre l'entreposage et le stockage réversible.
     - pour les déchets du futur: ils proposent la séparation poussée - transmutation "comme objectif ultime de recherche".
     Ils proposent de surcroît:
     "Le Parlement pourrait fixer comme objectifs à l'action des pouvoirs publics, les dates de 2016 pour la mise en service d'un entreposage de longue durée et l'autorisation de construction d'un stockage réversible en formation géologique, 2020-2025 pour la mise en service d'un réacteur démonstrateur de transmutation et la mise en service du stockage géologique, et 2040 pour la transmutation industrielle". 
     Et pour finir, le processus à venir:
     4 thèmes sont donc soumis au débat: 
     - 1 Quelles solutions de gestion retenir pour les déchets existants et à venir?
     Que faire des déchets radioactifs actuels aujourd'hui entreposés à Marcoule et à la Hague?
     Que doit-on entendre par réversibilité du stockage?
     Quel avenir pour les recherches sur la transmutation poussée - séparation?
     - 2 Quelles étapes après 2006?
     - 3 Quelle information sur le sujet?
     - 4 Quel accompagnement économique pour les territoires concernés?
     Questions auxquelles nous répondons (en partie et en 2 pages!) dans le dossier qui suit mais qui ne suffisent pas à ouvrir correctement le débat public.
     Et voilà bonne lecture du dossier qui se trouve, sur le site CNDP.
p.6

Les déchets ne seront-ils pas toujours orphelins?
Monique et Raymond Sené
extrait de CONTRÔLE n°165

     Que signifie "déchets orphelins"? 
     Ce sont des déchets "oubliés":
     - Parce que l'entreprise, l'exploitant ou le propriétaire ignorait qu'il manipulait des produits radioactifs.
     - Parce que l'entreprise, l'exploitant ou le propriétaire a fermé les portes sans assainir son site.

     Ils posent problème:
     - Parce qu'au moment  de la fermeture de l'usine, il n'y avait aucune réglementation pour ces produits.
     - Parce que les normes ont changé entre la création du site et son délaissement.
     - Parce que les emballages n'étaient pas appropriés.

     Probablement toutes les situations ont existé, existent, et existeront. 
     Inéluctablement, au fil des années, les emballages vont se détériorer et laisser échapper leur contenu. En conséquence si la mémoire du site est insuffisante, des problèmes apparaîtront un jour ou l'autre. Il est donc inévitable de devoir s'intéresser à ces fameux "déchets orphelins" et de se poser la question : comment transmettre leur souvenir.
     Actuellement cette notion "déchets orphelins" s'applique aux débuts de l'ère atomique et couvre une centaine d'années avec des origines variées : mines d'uranium, horlogerie, faïencerie, fonderie...
     Ces déchets ne comportent pas de radioéléments artificiels lorsqu'ils ont été délaissés avant 1950. Ensuite tout est possible.
     Après sa découverte (1896), la prise de conscience des problèmes liés à la radioactivité a été très rapide: 
     1896 : Premières brûlures.
     1902 : La première norme de tolérance est proposée. 
     1925 : Cri d'alarme lancé à l'académie de médecine par D'Arsonval, Béclère, Broca et Marie Curie.
     1931 : Premier code de protection.
     1936: Inauguration d'un monument à Hambourg avec 110 noms de pionniers utilisateurs des rayons X. 
     1955 : Après les radiologues, les techniciens, les chirurgiens et les médecins voici les dentistes,
     1958 : Pour finir, les vétérinaires.
     1966 : Démarrage de l'usine de la Hague.
     1974 : Démarrage du programme des 58 réacteurs en fonctionnement en 2005.
     Depuis se sont succédé des recommandations internationales (CIPR, AIEA), puis des directives européennes pour réglementer et protéger les humains, les animaux et leur environnement.
     Dans un premier temps, les quantités utilisées restaient faibles, les déchets ne semblaient pas impossibles à gérer. Comme il n'existait pas de véritables solutions, les fermetures de sites ne prévoyaient pas de décontamination donc aucune remise en état correcte. Ce fut la procédure suivie généralement entre les années 1965 et 1980.
     C'est ce qui explique la litanie des sites contaminés par du radium : rue Cuvier, locaux du Collège de France à Nogent et à Meudon, locaux d'Arcueil, Chemin du radium à Gif sur Yvette, école de Nogent, les 180 sites de mines,... ou ceux qui sont contaminés par de l'uranium : décharge de Solérieux, le Bouchet, Miramas et, bien évidemment, les sites des mines d'uranium...
     Ces sites sont connus maintenant, mais probablement d'autres existent qu'il faudra prendre en charge quand ils seront découverts.
     Le premier rapport public sur les déchets date de 1984 (2 eme rapport Castaing). Puis, en 1990 le CSSIN se saisit du sujet et ce fut le rapport Desgraupes. Il est dommage que les recommandations des rapporteurs n'aient pas été suivies complètement. En effet, la loi de 1991, au demeurant fort importante, ne se rapporte malheureusement pas à ce type de déchets. C'est pourquoi pour son réexamen en 2006 par les parlementaires, il serait judicieux de traiter TOUS les types de déchets radioactifs.
     La particularité du site dit "orphelin" est qu'il est en général sans propriétaire ou exploitant encore identifiable. Il se trouve très souvent dans une zone qui s'est urbanisée au fil des ans. Comme il est devenu une friche, on essaie de le récupérer pour un lotissement, pour une école, pour un centre aéré...
     La logique industrielle ne comportait pas la remise en état ou la préservation de l'environnement lors de l'arrêt d'une activité. Une tradition ancestrale, motivée à l'époque par l'absence de moyens de transport, aujourd'hui par l'économie, consiste à raser une vieille installation et à construire au-dessus.

suite:
     Dans la première moitié du XXe siècle, si un vague soupçon de contamination (quelle qu'elle soit) existait, on reconstruisait sur le site après un vague nettoyage ou bien on l'abandonnait à son sort sans scrupule. Depuis peu, les autorités ont pris conscience des dangers et exigent un minimum des exploitants. Cependant il y a encore des efforts à faire pour la remise en état, même lors d'arrêts récents. Pour les sites anciens, il va falloir d'une part trouver les bonnes méthodes d'assainissement et d'autre part le financement. 
     Il faut être conscient que la reprise des sites "orphelins" est un enjeu de taille. Leur émergence est à l'origine de la défiance des populations et de leurs interrogations à propos des déchets. Il faut reconnaître que les citoyens ont vraiment de bonnes raisons de continuer à exiger des réponses à leurs questions et de réclamer des processus décisionnels transparents.
     Le décor planté, la logique "sites orphelins" admise, que faire ?
     Tout d'abord il est indispensable d'essayer de répertorier les sites pollués. Pour cela il faut consulter les archives (si elles existent ecore) pour recenser les diverses activités qui ont pu utiliser des produits radioactifs et/ou chimiques. 
     Il sera alors possible de dresser un aperçu de l'ampleur des déchets. Inutile de croire (comme déjà mentionné) que la loi de 1991 couvre ce type de problème: elle ne traite que l'aspect déchets hautement et moyennement actifs provenant du retraitement des combustibles irradiés. 
     Comme pour l'ensemble des déchets, il est nécessaire de passer à un inventaire précis des superficies et des quantités de polluants. Il faut aussi essayer de connaître les types de polluants, leur forme physico-chimique, leur composition. Avec ce repérage, un inventaire exhaustif des sites pourra être dressé, donnant explicitement le contenu radioactif et chimique. Comme une liste ne suffit pas, il faut aussi chercher les solutions pour dépolluer, fixer des échéances et, ce qui devrait être évident, les faire respecter. 
     Une fois les sites connus, il convient de se demander quoi faire.
     Force est de constater qu'il reste encore beaucoup d'inconnues pour pouvoir se lancer dans la récupération des déchets radioactifs, leur entreposage et/ou stockage. La France ne dispose que de deux sites de stockage : les faiblement et moyennement actifs à vie courte (déchets "A") et les très faiblement actifs à vie courte (TFA).
     C'est un peu court pour stocker des résidus contaminés au radium. Les divers produits utilisés en recherche, dans l'industrie, dans le domaine médical ou tout autre usage imprévu et imprévisible posent également pour leur élimination des problèmes actuellement non totalement résolus. Quant aux entreposages, il en existe de fait sur les sites de réacteurs, les sites CEA, les sites militaires, mais ils ne sont pas conçus pour récupérer ce qui vient des sites "orphelins". Quand bien même le seraient-ils, le conditionnement indispensable des déchets aura un coût. Qui pourra l'assumer : les communes, les particuliers, les industriels? Et qui devra de toute façon le prendre à sa charge : l'État évidemment.
     La remise en état de tous les sites contaminés est un enjeu pour l'industrie nucléaire. Elle doit être une réussite. Il n'y a pas d'autre possibilité. Il faudra donc créer un fond ou renforcer ce qui existe pour pouvoir aider les particuliers et les communes à les reprendre. Comme l'État, in fine, sera en charge des sites "orphelins, c'est à lui que reviendra la charge d'organiser la collecte de fonds et leur gestion.

     COMMENTAIRE:
     Pour illustrer la problématique site orphelin, voici ci-dessous la redécouverte du site de la rue Cuvier.
     Les riverains se sont inquiétés d'apprendre que, sur ce site, était envisagé la construction d'un nouvel institut.
     Or ils avaient connaissance de problèmes, héritage du passé. En effet, du radium avait été manipulé au début du 20e siècle et apparemment les décontaminations avaient un peu... foiré. Du moins la lecture du compte-rendu du contrôle qui suit l'explicite assez clairement. Et, de plus il y a bien eu un contrôle et des recommandations mais qui a fait le travail de décontamination?
     Aux dernières nouvelles la pavillon serait conservé mais comment : en le fermant et en interdisant l'accès?
     Comme son architecture n'a rien d'exceptionnel, il y a fort à parier que, dans quelques années un bout de terrain en plein coeur de Paris va susciter des convoitises. Se souviendra-t-on des réserves? Sûrement pas si on en juge par l'histoire des autres sites.
     Bonne lecture

p.7

Compte-rendu d'intervention (décembre 2004)
CONTRÔLE RADIOLOGIQUE AVANT RESTRUCTURATION DE
L'ÎLOT CUVIER (75)
Service d'Intervention et d'Assistance en Radioprotection
IRSN
Voir aussi ipgp.fr
     
     1. CONTEXTE DE L'INTERVENTION 
     L'IRSN est intervenu le 28/09/2004 à la demande de l'établissement public du campus de Jussieu pour réaliser un contrôle radiologique dans le pavillon Curie situé dans l'ensemble architectural du 12 rue Cuvier Paris 5e. 
     Lors de précédentes investigations datant des années 1981 et 1992, une contamination en radium 226 avait été mise en évidence dans des conduites d'évacuation des eaux usées et les conduits de cheminée. 
     La présente intervention basée sur des mesures radiologiques directes in situ a pour objet d'évaluer l'étendue des contaminations radioactives en radium 226 et d'estimer le risque potentiel d'exposition aux rayonnements ionisants. L'objectif final est d'orienter, si nécessaire, les aménagements intérieurs prévus dans le cadre du projet de restructuration de l'îlot Cuvier étant entendu que le bâtiment ne doit subir que des réaménagements internes. 

      2. RAYONNEMENT PROSPECTÉ
      Au regard des radionucléides (radium 226 et ses descendants) mis en évidence lors des précédentes investigations, la prospection a été menée sur le rayonnement gamma. 
     Les émissions alpha et bêta, sans conséquences pour l'exposition externe, n'ont pas été prises en compte ici. Elles seront à considérer dans la mesure où des travaux risquant une remise en suspension de poussières, seront entrepris dans les locaux,

     3. MATÉRIELS UTILISÉS 
     - Radiamètres de prospection DG5 n°01/05/551 et 02/08/607, vérifiés le 20/07/2004 et 22/0412004, 
     - Radiamètres pour mesure du débit d'équivalent de dose FH40 GL10 n°12907 équipé d'une sonde FHZ 612E n°212 et vérifié le 03/11/2003 

     4. DÉROULEMENT DE L'INTERVENTION 
     Une prospection de surface du niveau de rayonnement gamma a été réalisée systématiquement dans chaque pièce. Les mesures ont été relevées à 50cm du sol et au contact dès lors qu'elles étaient supérieures à deux fois le bruit de fond local relevé préalablement à l'extérieur du bâtiment. 
     Sur les zones identifiées durant la prospection, les débits d'équivalent de dose ont été relevés afin d'apprécier le risque d'exposition externe. 

     5. RÉSULTATS ET INTERPRÉTATIONS 
     Le bruit de fond local mesuré in situ est compris entre 100 et 140 nanoSv/h. On considérera donc les relevés de mesure comme étant significatifs dès lors que les valeurs dépasseront 200 nanoSv/h. L'ensemble des relevés de mesure réalisés est présenté en annexe.
     Sous-sol
     - Pièce F: seule une conduite d'évacuation des eaux usées située en hauteur, reliée à l'évier de 1a hotte du rez-de-chaussée, a été identifiée comme présentant une radioactivité émergente significative.
     Rez-de-chaussée : 
     - Pièce A: Le niveau de rayonnement gamma ambiant mesuré dans la pièce est d'environ 0,4 microSv/h, soit 3 à 4 fois le bruit de fond extérieur. Cette augmentation s'explique par la présence de zones marquées, retrouvées, pour l'essentiel au niveau du sol. 
     - Pièce B: Le niveau de rayonnement gamma ambiant mesuré atteint ponctuellement plus de 30 fois le bruit de fond, Cette anomalie radiologique est, là encore, imputable à la présence de zones marquées.

suite:
     - Pièce C: Mis à part un point singulier identifié le long d'une plinthe sous un évier, aucune zone présentant une radioactivité émergente n'a été relevée. 
     - Pièce D: On note la présence d'éviers constitués de matériaux contenant des éléments radioactifs naturels qui ne sont pas à considérer comme une contamination due aux activités passées. 
     - Pièce E: Trois zones ont été identifiées qui conduisent à une augmentation significative du niveau de rayonnement gamma ambiant dans la pièce. 
     - Pièce G: on mesure une ambiance radiologique notable, supérieure à 10 fois le bruit de fond et imputable à la présence de taches de contamination situées au sol, sous le linoléum. 
     - Extérieur: Quelques points singuliers ont été mis en évidence dans la zone 32 (cf. annexe 1) contribuant ainsi à une augmentation significative du niveau de rayonnement gamma (supérieur à 2 fois le bruit de fond). On notera également deux points émergents sur les bordures de deux fenêtres. 
     La localisation des zones à radioactivité ajoutée est caractéristique puisqu'on les retrouve dans les endroits sujets à accumulation tels que les plinthes. Le linoléum actuellement en place permet d'assurer la non dispersion de ces contaminations surfaciques ce qui limite par la même occasion tout risque potentiel d'exposition interne. 
     Il convient de préciser que les zones identifiées peuvent ne pas être exhaustives, notamment dans les pièces A, B et C. car le niveau radiologique ambiant relevé peut masquer un certain nombre d'autres zones à radioactivité ajoutée moindre. 
     Toit
     Une réfection de l'isolation du toit a été réalisée dans les années 1990. Les quatre conduits de cheminées identifiés ont tous été obstrués. Les niveaux radiologiques relevés permettent de conclure en la présence de contaminations radioactives résiduelles des conduits mais inaccessibles en l'état. 

     6. ÉTUDE DE RISQUES
     Afin de répondre à la question du risque potentiel d'exposition externe aux rayonnements ionisants au regard des mesures réalisées, une étude très simplifiée permet d'apprécier le niveau de risque sur la base d'un scénario d'exposition volontairement majorant. On considère, bien entendu que le bâtiment reste en l'état pour cette évaluation. 
     Le présent scénario est basé sur un temps d'exposition de 2.000h par an habituellement pris comme référence, soit 8 heures sur 250 jours.
     Actuellement une personne est affectée dans la pièce B et une autre dans la pièce E. 
     Le débit d'équivalent de dose retenu dans la pièce B pour effectuer l'estimation est la valeur d'ambiance la plus pénalisante, à savoir 1,3 microSv/h, bruit de fond compris.
     Le débit d'équivalent de dose retenu dans la pièce E est de 0.5 microSv/h, bruit de fond compris. 
     Compte tenu de ces hypothèses, l'équivalent de dose estimé pour les deux individus est respectivement de 2.400 microSv/an (Bruit de fond déduit) et de 800 microSv/an (Bruit de fond déduit). Pour le scénario, on se réfère, bien qu'il s'agisse d'un scénario "travailleur", à la limite réglementaire pour le public de 1mSv/an, en considérant que le personnel affecté aux locaux n'a pas vocation à être professionnellement exposé aux rayonnements ionisants.
     Seule la valeur estimée pour l'individu travaillant dans la pièce B est supérieure à cette limite. Il conviendrait donc, soit de limiter l'usage de cette pièce au minimum et, en tout cas de ne pas dépasser un temps de séjour d'environ 830 h/an soit 3h20 par jour, soit de prévoir un assainissement de la pièce afin que le niveau de rayonnement ambiant redescende à un niveau compatible avec une fréquentation plus importante.

p.8

     7. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS 
     L'ensemble des mesures réalisées permet de confirmer la présence de contaminations résiduelles significatives dans le pavillon Curie. Dans la configuration actuelle, ces constats n'induisent pas une exposition radiologique majeure. Ces anomalies radiologiques doivent néanmoins être prises en compte dans l'optique d'un réaménagement du bâtiment 
     Concernant le sous-sol, aucune restriction d'usage ni d'aménagement n'est à mettre en place. Il conviendra cependant, soit de déposer la canalisation des eaux usées qui n'est plus utilisée aujourd'hui et de traiter son élimination via les filières adéquates, soit de la laisser en l'état, d'en interdire tout aménagement et d'en obstruer les extrémités. 
     Au niveau du toit, si aucun aménagement n'est prévu, compte tenu de sa fréquentation nulle (sauf en cas de réfection) et des niveaux radiologiques relevés, il n'y a pas nécessité d'engager d'assainissement sur les conduits d'autant qu'ils sont obstrués et ne sont donc plus utilisés. 
     Pour le rez-de-chaussée, seule la pièce C peut être aménagée sans restriction. Pour les autres pièces dans lesquelles il est prévu des aménagements, un assainissement des zones présentant une radioactivité ajoutée sera nécessaire. Cet assainissement consistera en la dépose par une société spécialisée des morceaux de parquet et revêtements contaminés. Les pièces A, B et G quant à elles, ne devraient pas subir d'aménagements particuliers puisqu'aucune occupation permanente n'y est prévue.
Cependant, dans un objectif de limitation de l'exposition externe des personnes qui pourraient être amenées à séjourner partiellement dans ces locaux, il serait souhaitable d'engager un assainissement de sorte que le niveau de rayonnement gamma ambiant descende en dessous du seuil de 0.2 microSv/h habituellement considéré dans les objectifs d'assainissement. 
     On notera que les contrôles réalisés se sont déroulés dans une configuration des locaux qui ne permet pas de conclure à l'absence de points émergents au plan radiologique dans les parties inaccessibles. Des contrôles complémentaires devront être réalisés dans ces parties au moment des travaux d'assainissement.
     Le présent contrôle a également mis en évidence, à l'extérieur du bâtiment, des zones singulières présentant une radioactivité ajoutée. Même si celles-ci ne représentent pas de risque en termes d'exposition aux rayonnements ionisants, l'enlèvement de quelques pavés et morceaux de béton devrait permettre de supprimer ces anomalies radiologiques. 
     Dans la mesure où le bâtiment sera potentiellement ouvert au public, nous préconisons une fois les assainissements et aménagements réalisés, d'effectuer un contrôle final complété par une mesure de l'activité du radon et de ses descendants. 
     Il convient également d'envisager l'opportunité d'instaurer des servitudes sur le pavillon Curie, celles-ci permettraient de pérenniser l'information sur l'historique du site et de prévoir des précautions particulières pour la réalisation d'aménagements ultérieurs éventuels. 
p.9a

EXTRAITS du LIVRE BLANC de l'ANCLI
sur la gouvernance locale des activités nucléaires
ANCLI - 30 mai 2005
     
     4- CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS
     4.1 Statut et Rôle des CLI au niveau local
     4.1.1 La mission des CLI
     La loi sur la transparence et la sécurité en matière nucléaire doit affirmer clairement la mission d'information, de suivi et d'expertise des Commissions Locales. 
     Par ailleurs, l'ANCLI souhaite qu'une CLI soit mise en place sur tous les sites nucléaires ou sites liés à des projets d'activité nucléaires ou à des activités passées.  En particulier, les fonctions de Commissions d'Information (CI) auprès d'INBS situés à proximité d'une INB doivent être assurées par la CLI existante auprès de la dite INB sous réserve du respect des conditions de confidentialité relatives aux CI. De la même manière la future loi sur les déchets radioactifs doit renvoyer à la loi sur la transparence pour l'organisation des Commissions Locales d'Information autour des laboratoires souterrains, et de site ou projet de site de gestion des déchets.
     En conséquence l'ANCLI recommande la formulation suivante dans la loi sur la transparence: 
     "La Commission Locale d'Information a une mission générale d'information, de suivi et d'expertise concernant le fonctionnement d'une installation nucléaire de base, d'une installation nucléaire de base secrète, d'un laboratoire de recherche concernant la gestion des déchets radioactifs, d'un centre d'entreposage ou de stockage des déchets radioactifs, et concernant son impact sanitaire, environnemental et économique, durant la vie de l'installation et au-delà."
     Cette disposition implique abrogation de l'article 14 de la loi n°91-1381 du 30 décembre 1991 relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs, qui crée des Commissions au statut spécifique pour les laboratoires de recherche souterrains.
      Concernant la procédure d'enquête publique, les Commissions souhaitent être informées de l'ouverture des enquêtes publiques menées sur le territoire concerné par l'installation. Au dossier d'enquête publique elles demandent que soit annexée une délibération de la CLI concernant les débats qu'elle organise, le cas échéant. Une délibération du Conseil d'Administration de la CLI rendant compte des débats qu'elle a organisés et des conclusions qu'elle en a tirées serait annexée à l'avis du Commissaire Enquêteur, en conclusion de l'enquête.
     L'ANCLI souhaite que la loi sur la transparence comprenne également les dispositions suivantes:
     "La CLI est saisie pour avis par le Conseil Départemental d'Hygiène pour les questions touchant à ses compétences. 
     L'exploitant et les services de contrôle de l'État lui communiquent tous documents et informations nécessaires à l'accomplissement de ses missions.
     Les CLI sont associées aux exercices de crise locaux et nationaux. En situation  accidentelle, la CLI est informée du déclenchement du PPI et est invitée à titre d'observateur dans les structures de coordination de la gestion de crise.
     Lorsqu'elle le juge nécessaire la CLI saisit l'Autorité de Sûreté sur toute question relative aux activités nucléaires pour le territoire du ou des Département(s) concerné(s). L'Autorité de Sûreté est tenue de lui adresser une réponse motivée."
     Le paragraphe suivant est ajouté à l'article 6 du projet de loi 2002 (ou article 5 du projet de loi 2003): "Les CLI sont informées des visites de contrôle, et ont la possibilité de missionner un de leurs membres comme observateur pour accompagner les inspecteurs sur le site de l'installation. La participation aux visites a pour objectif une meilleure information et compréhension du fonctionnement de l'installation pour les membres de la CLI."
p.9b

     Les CLI définissent dans leurs statuts ou règlement intérieur les éléments suivants:
     - territoire géographique où s'exercent leurs compétences;  
     - champ de compétences;
     - conditions de désignation du Président et des organes internes de la Commission (conseil d'administration, bureau, comité scientifique, sous-commissions ) et durée des mandats;
     - modalités de désignation des représentants des Chambres consulaires, des associations, des organisations syndicales, du CHSCT, personnalités qualifiées et autres participants au titre de la société civile;
     - modalités d'équilibre dans la représentation des différents types de participants;
     - modalités de participation des experts, des exploitants et de l'administration;
     - conditions d'accès du public et des médias aux travaux de la Commission;
     - modalités de leur participation et intervention aux réunions;
     - modalités de fonctionnement de la Commission (périodicité des réunions, organisation en commission plénière et le cas échéant en sous-commissions...);
     - modalités de remboursement des frais des membres bénévoles;
     Au titre de leur mission d'information du public, à l'instar des SPPPI, les CLI peuvent organiser des sessions d'information, notamment auprès des établissements scolaires et des média, afin de renforcer la sensibilité et la maîtrise des questions de sûreté et de radioprotection.
     4.1.2 Les Commissions Locales: une compétence territoriale
     L'article 7 du projet de loi de 2003 indique qu'une CLI "peut être créée pour plusieurs sites nucléaires proches." L'ANCLI est opposée à cette rédaction. Elle affirme la nécessité d'élargir les compétences de la CLI à l'environnement large de l'INB au niveau de l'intercommunalité et du Département, mais de maintenir une Commission spécifique auprès de chaque site, sauf en cas de proximité immédiate de plusieurs sites.
     Le texte de loi doit reconnaître de manière pleine et entière la compétence territoriale des Commissions Locales d'Information, sa capacité à se saisir de nouvelles questions, et à conduire des débats au niveau local de manière autonome. La CLI est en effet compétente pour considérer toute question de nature à mieux assurer le suivi de l'installation nucléaire, notamment dans ses interactions avec les autres activités économiques et sociales du territoire, et peut se saisir des problèmes liés à des activités nucléaires concernant son territoire.  L'ANCLI souhaite que la loi prévoie les dispositions suivantes:
     "La Commission est habilitée à traiter tout sujet touchant aux activités nucléaires de quelque nature, ayant potentiellement un impact sur le territoire."
     "Le territoire sur lequel la CLI exerce sa mission est constitué du Département où se situe l'installation pour laquelle la CLI est créée, ainsi éventuellement que des Départements limitrophes."
     Comme indiqué plus haut (Cf. IV.1.1) dans la définition de leurs missions, les Commissions Locales d'Information doivent progressivement fonctionner sur un même modèle sur tous les sites nucléaires, ou sites liés à des projets d'activités (par exemple laboratoire souterrain), ou des activités passées (par exemple, déconstruction, ou surveillance de stockage). Il est également important qu'une continuité soit assurée sur les sites présents sur le territoire, et que la même commission suive les projets, la phase de fonctionnement de l'installation, la gestion des déchets radioactifs, puis la préparation et la phase opérationnelle de déconstruction.
     La CLI doit être ouverte aux acteurs et instances compétentes sur les activités pouvant avoir un impact sur les installations nucléaires, ou pouvant être concernées par ces installations. Dans cette perspective le règlement intérieur des CLI doit mentionner que les membres des CLIC et SPPPI riverains assistent avec voix consultative. De la même manière, les Commissions doivent pouvoir inviter de manière permanente les représentants des autorités locales, de l'administration, et de la société civile de la région frontalière  (Espagne, Grande-Bretagne, Belgique, Luxembourg, Allemagne, Suisse, Italie).
suite:
     Enfin, les CLI peuvent, selon la particularité des contextes locaux, mettre en commun des moyens d'information, de mesure et de suivi, et de secrétariat technique avec des CLIC, des SPPPI, des unités du réseau de surveillance de la qualité de l'air et de l'eau, et toute autre organisme habilité à intervenir à titre réglementaire en matière de concertation et de suivi de l'environnement au niveau local.
     4.1.3  Statut des CLI et Modalités de financement
     Le projet de loi 2003 indique que la CLI  "peut être constituée sous forme d'une association". L'ANCLI approuve cette rédaction. Elle souhaite que soit clairement indiqué que la Commission dispose d'un statut juridique, quel qu'il soit, et d'une autonomie financière. La loi sur la transparence et la sécurité en matière nucléaire doit fixer un statut type pour toutes les CLI qui seront créées à partir de la date de publication de la loi. Les CLI existantes auront toute latitude pour fonctionner avec les structures qu'elles ont mises en place antérieurement à la loi, ou pour adopter le nouveau statut qu'établira la loi. 
      Il importe de réaffirmer la responsabilité et le rôle d'initiative du Conseil Général dans l'organisation du statut et des moyens de la CLI. L'intervention de la Préfecture par défaut doit être écartée de sorte à préserver et renforcer la responsabilité des Conseils Généraux dans le domaine.
     La formulation suivante est recommandée: "A compter de la date de publication de la présente loi, la CLI dispose d'un statut juridique et d'une autonomie financière. Elle peut être constituée sous forme d'une association. Le Président d'une collectivité locale du territoire concerné peut la présider."
     Les deux projets de loi prévoient que les ressources de la CLI proviennent notamment:
     1° Dans les conditions fixées par la loi de finances, d'une fraction du produit de la taxe instituée par l'article 43 III de la loi de finances pour 2000 (n°99-1172 du 30 décembre 1999)
     2° De subventions de l'État et des collectivités territoriales et de leurs groupements
     L'ANCLI est favorable à ce mode de financement ou toute autre financement sur la base d'une taxe parafiscale ou d'une redevance (affectant toutes les installations nucléaires: INB, INBS...) sous la réserve que les dotations soient affectées et gérées directement par les CLI dont le nouveau statut prévoira l'autonomie financière.  Les CLI auprès d'INBS et d'INB qui ne versent pas de taxe professionnelle doivent recevoir une contribution de l'État. L'ANCLI souhaite qu'il soit possible aux CLI de recevoir des moyens financiers complémentaires émanant d'organismes publics ou privés, sous réserve qu'ils ne contraignent pas l'autonomie et l'indépendance de son fonctionnement. 
     La Loi doit permettre aux CLI d'être administrées et financées par les collectivités territoriales sans contrainte abusive de gestion. 
     4.1.4 Composition et Présidence des Commissions Locales
     Présidence de la Commission
     L'organisation de la CLI est de la compétence du Conseil Général. L'ANCLI approuve la version 2003 du projet de loi qui spécifie que "la CLI est créée à l'initiative du président du Conseil Général du département d'implantation, ou lorsque l'installation est située sur le territoire de plusieurs départements, à l'initiative conjointe des présidents de Conseils Généraux des départements d'implantation."
     L'ANCLI propose de reformuler et compléter comme suit: "La CLI est créée à l'initiative du Conseil Général du département d'implantation, ou lorsque l'installation est située sur le territoire de plusieurs départements, à l'initiative conjointe des Conseils Généraux des départements d'implantation, le cas échéant. 
     Le Président de la CLI est élu par les membres de la CLI sur proposition du collège des élus. Le Président d'une Collectivité territoriale peut en être président.
     Dans les trois premiers mois suivant la création de l'association, le Président de la CLI propose au Conseil d'Administration un règlement intérieur."
p.10

     La raison d'être et le mandat des Commissions sont de même nature pour toutes les installations associées à des activités nucléaires ou des projets d'activité nucléaire. La présidence des Commissions existantes auprès des INB, INBS ou laboratoire de recherche souterrain doit être assurée par un élu ou une personnalité proposée par les élus. 
     Participation des associations, syndicats et Chambres consulaires
     Les modalités de désignation des associations et des syndicats sont de la responsabilité des CLI. La loi ne doit pas fixer de contraintes à la participation de ces membres. En particulier elle ne doit pas fixer de condition d'agrément aux associations, et doit laisser latitude aux CLI de définir leur propre mode de désignation. En revanche, la loi doit exiger des CLI de définir une procédure de désignation explicite et transparente, et ce afin de renforcer la crédibilité des Commissions.
     Le règlement intérieur ou les statuts de la CLI doivent indiquer que les participants bénévoles peuvent obtenir remboursements de leurs frais de déplacements par la CLI pour leur participation aux réunions et activités prévues dans le cadre de la Commission Locale. 
     Outre la participation des organisations syndicales, la CLI comprend des représentants du CHSCT de l'installation, à l'instar des Commissions Locales d'Informations et de Concertation sur les risques industriels. 
     Les Chambres consulaires, les acteurs économiques (industrie, services, agriculture, tourisme...) et les acteurs de l'aménagement du territoire  doivent également être représentés à la CLI. 
     L'ANCLI recommande l'introduction de l'alinéa suivant dans la loi sur la transparence: "Le Conseil Général élit les membres des collectivités locales appelés à siéger dans la CLI. Ces représentants forment le collège des élus territoriaux. Lors de la première réunion de ce collège sont déterminées les modalités de désignation des autres collèges comprenant notamment les associations, les syndicats et représentants du CHSCT."
     Participation des experts
     Les experts interviennent en tant que personnalités qualifiées auprès de la CLI. A la différence des élus et des membres de la société civile, ils ne représentent pas le territoire, et sont souvent extérieurs à la région. De ce point de vue il n'est pas nécessaire qu'ils constituent un collège particulier. Il est cependant recommandé que les personnalités qualifiées forment un conseil auprès de la CLI, de la même manière que l'ANCLI dispose d'un conseil scientifique. 
     L'ANCLI recommande l'introduction de l'alinéa suivant dans la loi sur la transparence: "Lors de la première réunion du collège des élus sont déterminées les modalités de désignation des personnes qualifiées ou experts."
     L'ANCLI souhaite renforcer son Comité Scientifique en lui donnant vocation à intervenir auprès des CLI, comme il a pu le faire à Saint-Laurent des Eaux. Elle encourage les CLI à faire bénéficier les autres CLI des compétences et de l'expérience de leurs experts.
     Participation de l'exploitant et de l'administration
     Chaque Commission devra avoir latitude de formaliser ou non la participation de l'exploitant et de l'administration par un statut de membre invité ou à part entière. En tout état de cause, si la Commission se dote d'un bureau, ni l'exploitant ni l'administration ne pourront en faire partie.
     L'ANCLI recommande l'introduction de l'alinéa suivant dans la loi sur la transparence: "Le cas échéant, les représentants des administrations de l'État et de l'exploitant assistent avec voix consultative aux séances de la commission locale d'information."
     Autres recommandations
     Les réunions des CLI sont publiques. Le public et les média assistent à la totalité des débats. Le règlement intérieur de la CLI établit les modalités de leur intervention. 

     4.2 RÔLE DES CLI ET DE L'ANCLI AUX NIVEAUX NATIONAL ET INTERNATIONAL
     Les actions des CLI et de l'ANCLI sont complémentaires. La CLI a un rôle au niveau local. L'ANCLI a un rôle de représentation, de visibilité et de fédération au niveau national et international. Les CLI attendent de l'Association Nationale qu'elle défende leurs positions auprès des instances nationales et internationales.

suite:
     4.2.1 Le rôle des CLI et l'ANCLI au niveau national
     La loi doit mentionner explicitement l'ANCLI, définir sa mission et son statut.
     "Il est créé une Association Nationale des CLI (ANCLI).
     L'ANCLI a pour mission de représenter les CLI auprès des instances nationales et internationales, notamment auprès de la Commission Européenne, du Parlement Européen et du Comité des Régions, et de porter à leur connaissance les informations qu'elle reçoit des instances nationales et internationales."
     L'ANCLI doit être représentative de la pluralité de composition des CLI:
     "Les CLI élisent les membres de l'ANCLI à proportion de quatre membres par CLI. Ces membres élus forment l'assemblée générale de l'association nationale ainsi créée, qui élit par collège les membres du conseil d'administration.
     Le Président est élu parmi les candidats présentés par le collège des élus."
     L'ANCLI définit dans ses statuts des modalités de composition qui permettent de refléter cette pluralité. Elle définit la durée des mandats, et encadre leur renouvellement. 
     La loi doit donner des garanties pour que l'Association soit partie prenante des procédures d'information et de participation au niveau national et international.
     La loi sur la transparence précise: "L'ANCLI peut se saisir de toutes questions qu'elle juge pertinentes dans le cadre de sa mission. Elle peut conduire des expertises, émettre des avis et saisir l'Autorité de Sûreté, la Commission Nationale du Débat Public, l'Office Parlementaire d'Évaluation des Choix Scientifiques et Techniques ou toute autre administration compétente sur les questions soulevées. 
     L'ANCLI peut émettre un avis sur les rapports de l'OPECST concernant les activités nucléaires. Cet avis est annexé aux conclusions du rapport de l'OPECST.
     L'ANCLI est informée des débats publics organisés par la Commission Nationale du Débat Public qui touchent aux activités nucléaires. La délibération du Conseil d'Administration de l'ANCLI rendant compte de son évaluation du débat public et de ses conclusions est annexée au rapport de la CNDP."
     La loi précise les moyens mis à disposition par l'État pour son fonctionnement: "Les crédits nationaux nécessaires à l'accomplissement des missions de l'ANCLI sont inscrits au budget de l'État."
     Enfin la loi institue un Conseil Scientifique au sein de l'ANCLI: "L'ANCLI constitue un Conseil Scientifique".
     Ce conseil aura compétence pour réaliser des expertises, des contre-expertises, et pour obtenir des informations (étude de danger, étude d'impact,...) directement des administrations, autorités de contrôle, experts publics et industriels. Les statuts de l'ANCLI précisent les compétences respectives de son bureau et de son conseil scientifique en matière de convention avec les experts publics et les industriels, d'appels d'offre, etc. Ces statuts précisent les mesures proposées par l'ANCLI pour assurer une garantie d'indépendance à son Conseil Scientifique (durée des mandats, déclaration d'intérêt...) et pour garantir le cas échéant la confidentialité de certaines informations qui pourront être communiquées au Conseil Scientifique.
     Haut-Comité de la Transparence
     L'ANCLI est favorable au Haut-Comité de la Transparence dans sa définition du projet de loi 2002. L'ANCLI souhaite que le Haut-Comité puisse lui faciliter l'accès à l'information, notamment pour les besoins de ses activités d'expertise. Le cas échéant, une convention entre le Haut-Comité, l'ANCLI et le titulaire des données pourrait définir les modalités de diffusion sur lesquelles les parties s'accordent.
     4.2.2  Le rôle des CLI et de l'ANCLI au niveau international
     Comme mentionné plus haut, l'ANCLI est habilitée à représenter les CLI auprès de l'Union Européenne et des instances internationales.
     En ce qui concerne l'accès à l'information sur les activités nucléaires à l'étranger, plus particulièrement pour les installations à proximité des CLI frontalières, l'ANCLI entend s'appuyer sur la Convention d'Aarhus. Par ailleurs, si cela s'avère nécessaire, l'ANCLI pourra demander des informations par l'intermédiaire du Gouvernement français sur la base du traité Euratom et des conventions internationales (Convention Internationale de l'AIEA sur la gestion des déchets, Convention d'Espoo sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière). 
     Il entre dans les missions de l'ANCLI de participer à des actions et réflexions internationales sur des problèmes communs aux territoires accueillant des installations nucléaires (vieillissement des centrales, transport de matières radioactives, gestion des déchets, gestion post-accidentelle…) pour faciliter le développement de solutions qui prennent en compte les attentes des territoires, et pour favoriser la coordination notamment sur les questions transfrontalières.
p.11

CNDP: CAHIER D'ACTEUR
Le débat public peut-il aider à une meilleure gestion de tous les déchets?
GSIEN
     Le GSIEN considère qu'un débat public sur les déchets ne peut pas être mené à son terme si ces déchets sont analysés indépendamment de la politique énergétique, car chimiques ou radioactifs ils en dépendent étroitement.
     Comme "Le gouvernement a d'ores et déjà identifié quatre thèmes sur lesquels le débat pourrait porter, sans exhaustivité", le GSIEN va s'attacher à analyser ces quatre thèmes.
     Quelle(s) solution (s) de gestion retenir pour les déchets existants et à venir?
     En l'état de la problématique "déchets", il est urgent d'en limiter les quantités et de conditionner correctement ceux qui existent et qui vont résulter du programme actuel de réacteurs.
     Les solutions à cette problématique vont dépendre étroitement de la politique énergétique de la France: les 2 sujets sont liés et ne peuvent être traités séparément.
     La loi du 30 décembre 1991 ne traite que de la partie la mieux connue des déchets : les combustibles usés. Celle de 2006 doit traiter l'ensemble des déchets : ceux du passé encore à découvrir, ceux déjà existants et ceux à venir du fait du programme en cours.
     Cette nouvelle loi devra s'appuyer sur l'inventaire de l'ANDRA, sur le plan national de gestion des déchets radioactifs (PNGDR-MV) en ce qui concerne les quantités et localisation.
     Elle doit donner des échéances claires de rendez-vous (recherches, inventaire, limitation des quantités) et ce d'autant plus qu'il n'existe pas de solution satisfaisante: le stockage en couches géologiques profondes n'est pas suffisamment sûr pour l'adopter dès maintenant et cette option doit encore être étudiée de nombreuses années avant de conclure à sa faisabilité. N'oublions pas l'irréversibilité de décisions prises trop hâtivement. 
     La loi de 1991 impliquait la réversibilité des stockages. La réversibilité est la seule option qui garantit une reprise des colis si un problème se fait jour. Il faut impérativement définir ce qu'on appelle réversibilité : depuis le début d'exploitation, jusqu'à la fermeture du site ou pour un futur plus lointain, sachant que, de toute façon, ce principe devra être mis en oeuvre à la conception.
     Cette loi se décline selon 3 axes (séparation-transmutation, stockage réversible en formations géologiques profondes, conditionnement et entreposage de longue durée). Ces 3 axes ne s'appliquent pas à tous les déchets sauf le dernier. En effet, le conditionnement des déchets est incontournable à leur gestion. Par contre le premier axe fait croire à la possibilité de diminuer la radiotoxicité or on ne transmutera jamais les résidus de mines, les produits de démantèlement ni les aciers contaminés, etc. Quant au deuxième axe, s'appuyant sur les travaux encore à venir d'un seul laboratoire, il n'offre aucun choix de site hormis celui de Bure (Meuse Haute-Marne) ni surtout aucun choix d'études approfondies et contradictoires sur le stockage géologique.
    Pour les sites d'entreposage de Marcoule et de la Hague (sans oublier Cadarache, Valduc,...) il est impératif de les assainir,  de reprendre et de conditionner tous les déchets anciens qui y sont entreposés dans de mauvaises conditions. 
     Quelles étapes après 2006?
     Il faut reprendre tous les sites pollués et les décontaminer. Il est impératif de réussir et mener à bien cette reprise du passé. Ces actions conditionneront la prise en charge des déchets par les citoyens, mais cette prise en charge ne signifie nullement acceptation d'un programme imposé sans réelle concertation. Crédibiliser un plan de gestion des déchets signifie que les citoyens peuvent intervenir et peser sur les décisions.
suite:
      Il est aussi indispensable de mener les recherches avec circonspection et dans le pluralisme des avis afin de fournir des dossiers explicitant les diverses options et répondant aux questions des citoyens. Même s'il existe une loi et des décrets il est toujours indispensable de dialoguer. 
     Contrairement à l'avis de la CNE et de l'Office Parlementaire d'Évaluations des choix scientifiques et techniques, il faut se donner les moyens de faire des choix. Un seul laboratoire n'est sûrement pas la meilleure façon d'y parvenir. Si des recherches sont menées sur des sites étrangers, elles ne pourront que caractériser une famille de matériau (argile, granite, schistes, sel) et certainement pas un site. 
     Un point particulièrement important est de parvenir à concevoir des conteneurs et emballages les plus résistants possible, premiers garants du confinement. Ces emballages doivent aussi servir en entreposage. En effet, l'entreposage doit être étudié avec soin car il sera la première phase incontournable.
     Il faudra se donner des rendez-vous pour suivre ce dossier aussi bien au niveau local que national. La loi de 2006 doit traiter de tous les déchets mais de plus organiser la consultation et le suivi des dossiers. 
     Quelle information sur le sujet?
     L'information doit être pluralisme, adossée à des dossiers étayés et contradictoires. Il faut accepter les questionnements et y répondre. Mais le dialogue c'est aussi savoir écouter, répondre et après avoir pris une décision venir expliciter ses choix. Il ne suffit pas d'impliquer le CEA et l'ANDRA, d'autres organismes doivent intervenir. De plus les citoyens doivent pouvoir se faire entendre et faire le choix d'experts qui leur semble approprié.
     La démocratie représentative dans laquelle nous sommes doit savoir s'appuyer sur la démocratie participative. Ceci suppose une consultation locale et l'écoute de ses demandes, le tout à traduire au niveau décisionnel. L'information est une chose indispensable à la connaissance des dossiers. Mais encore faut-il qu'il y ait une expertise pluraliste pour que les citoyens puissent s'approprier les dossiers. Il faut aussi, compte tenu de l'importance des sujets savoir se donner le temps : temps pour faire les recherches, temps pour consulter les dossiers et temps de discussions. Certes il faut savoir décider, mais pour des problèmes qui vont s'étaler sur des générations, il est bon d'en analyser tous les tenants et aboutissants, avant de trancher dans le vif.
     Les CLIS peuvent être un lieu d'échange et d'élaboration des questions, de transmission des dossiers de réponses.
     Quel accompagnement économique pour les territoires concernés?
     La question du développement local doit être étudiée. Comment réussir une insertion du ou des laboratoires et de leurs suites éventuelles dans le tissu social ? Il est certain que ce poids sera plus facile à accepter si le problème est géré dans son ensemble : une politique énergétique respectueuse des choix des humains et de leur environnement. On ne peut pas tout acheter par contre on peut discuter, chercher les solutions les moins déplaisantes mais en sachant les revoir dans le temps et ne pas s'imaginer être en pays conquis (extensions de la Hague, de Cadarache, de Flamanville,...).
     Comment concilier la mise en oeuvre d'une activité présentant un risque certain contre le développement d'une région? 
     Sujet difficile: il est certain que dialogue et concertation y aideront mais...
 p.12

Commission Nationale d'Évaluation

RÉSUME ET CONCLUSIONS
Rapport n°11 - Juin 2005

     L'an dernier en préambule à son rapport annuel la CNE avait fait une synthèse provisoire des résultats des recherches conduites dans le cadre de la loi de 1991 par le CEA, pilote des recherches des axes 1 et 3, et par l'Andra, pilote de l'axe 2. Cette synthèse mettait en perspective les recherches conduites depuis 1992 sur la gestion des déchets de haute activité et à vie longue (MAVL et HAVL). La CNE y avait évalué, axe par axe, les résultats obtenus à cette époque au regard de l'échéance de 2006. Cette synthèse faisait aussi état de la nécessité de poursuivre certaines recherches, au-delà de 2006, afin d'achever des expériences en cours et d'en prolonger d'autres vers des réalisations concrètes. Elle évoquait enfin les domaines de recherche non couverts jusque-là en relation avec la gestion des déchets relevant de la loi (radioprotection, sociologie, économie). 
     Le CEA a diffusé en décembre 2004 deux rapports de synthèse exposant l'ensemble des résultats obtenus à cette date sur la séparation, la transmutation, le conditionnement et l'entreposage. Ces rapports présentent toutes les recherches conduites par le CEA en collaboration avec une large communauté scientifique nationale, voire internationale. La CNE a évalué en détail ces recherches depuis 1994 dans ses dix rapports annuels. Dans le présent rapport, elle peut donc donner une évaluation globale de l'ensemble des résultats obtenus à ce jour sur les axes 1 et 3. L'Andra n'a pas encore communiqué à la CNE un rapport de synthèse des recherches qu'elle a pilotées, également dans le cadre de larges programmes nationaux ou internationaux, mais elle lui a fourni de nombreux documents préparatoires. La CNE est par ailleurs restée très attentive à l'avancée continue des connaissances acquises à Bure et à la préparation des expériences à venir. Dans le présent rapport, elle évalue à la fois les récents résultats obtenus à Bure et la somme des résultats acquis relatifs à l'axe 2. 
     La synthèse provisoire établie l'an dernier contient l'essentiel de l'évaluation de la CNE. Elle est reprise ici et complétée en tenant compte des nouveaux éléments portés à la connaissance de la CNE par les pilotes des recherches de la loi. 

     AXE 1 - SÉPARATION 
     Dans sa synthèse de 2004 la CNE avait ainsi résumé son évaluation sur la séparation poussée: globalement, les recherches françaises sur la séparation ont été innovantes et ont conduit à des résultats suffisants pour envisager une mise en application industrielle. Elles se situent au meilleur niveau international. 
     Cependant la CNE faisait remarquer que la démonstration de la faisabilité technique de la séparation poussée était en retard sur le planning initialement annoncé par le CEA. Cette démonstration est une étape importante, qui, après celle de la faisabilité scientifique franchie avec succès en 2001, ouvre la voie à des démonstrations sur pilote industriel. Elle nécessite la mise en oeuvre de nouvelles installations de génie chimique en milieu actif à Atalante, dont il convient, en premier, que le fonctionnement soit assuré.

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     Les tests de fonctionnement de ces installations ont été achevés début 2005 et les expériences proprement dites sont en cours. Le CEA est confiant dans l'aboutissement des expériences programmées, mais il n'attend pas de résultats complets sur les procédés de séparation poussée mis à l'épreuve de la faisabilité technique avant la mi 2006. Fin 2005, le dossier de la faisabilité technique de la séparation poussée ne pourra donc faire état que de résultats partiels. La CNE constate que la preuve de la faisabilité technique risque de ne pas être totalement établie à cette date. 
     Un long chemin reste donc à parcourir pour développer, jusqu'au stade industriel, la séparation poussée, parallèlement au développement des systèmes de transmutation et en considération de leurs exigences et leur disponibilité. De nouvelles orientations pour la transmutation incitent à examiner des inflexions dans la façon d'aborder la séparation des actinides du combustible usé. Quoi qu'il en soit, les expériences de séparation poussée devraient être poursuivies, après 2006, pour prendre progressivement plus d'ampleur vers une démonstration de faisabilité de type industriel. Cependant, une mise en oeuvre anticipée de la séparation poussée par rapport à l'échéance de la mise en oeuvre de la transmutation poserait le problème de l'entreposage des éléments séparés sur quelques décennies. Les premières études du CEA sur un tel entreposage font apparaître des difficultés. 
     En conclusion, la CNE confirme son évaluation précédente sur les recherches conduites en séparation poussée qui ouvrent des perspectives concrètes. 

     AXE 1 - TRANSMUTATION 
     En ce qui concerne la transmutation l'évaluation de la CNE dans sa synthèse de 2004 avait été résumée de la façon suivante: il n y aura pas, en 2006, d'arguments décisifs pour prendre une décision de nature scientifique, technique ou industrielle sur la transmutation. Quoi qu'il en soit, toute stratégie à cet égard engagera la France, en étroite coopération internationale, dans un long processus de R & D de plusieurs décennies, avec l'incertitude inhérente aux grands projets nucléaires actuels. 
     Les informations recueillies depuis l'an dernier confirment cette évaluation. 
     Les conclusions sur les possibilités de transmutation en réacteur critique demeurent inchangées. Le multi-recyclage du plutonium et des actinides mineurs dans les réacteurs REP est une opération techniquement très difficile et aux performances médiocres. La faisabilité scientifique de la transmutation en spectre de neutrons rapides des actinides mineurs (sauf du curium) a été établie expérimentalement sur des aiguilles placées dans des assemblages du coeur du réacteur Phénix, pour le domaine reconnu par l'expérience.

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     Pour être efficace, la transmutation doit se poursuivre sur des durées nettement supérieures à celles d'un cycle d'irradiation en réacteur et suppose donc plusieurs recyclages des radionucléides à transmuter. La démonstration de la faisabilité technique nécessitera de multiples et longs essais sur aiguilles, puis à l'échelle de l'assemblage. Le CEA fonde de grands espoirs sur le RNR-gaz, retenu dans le programme international Génération IV et choisi par le CEA, mais ce réacteur n'est qu'à l'état de concept. La CNE ne dispose d'aucun élément d'appréciation quant à sa faisabilité et à ses performances de transmutation. 
     Les systèmes sous-critiques pilotés par accélérateur (ADS) sont potentiellement intéressants en ce qu'ils permettraient la destruction des actinides mineurs en évitant de compliquer le cycle du combustible des réacteurs électrogènes. Des études théoriques et expérimentales sont menées depuis plus de dix ans (Europe, USA, Japon). Le rapport de synthèse du projet PDS-XADS visant à la construction d'un démonstrateur expérimental "XAD " vient d'être établi. Les "verrous technologiques" concernent les techniques du réacteur, du combustible et des installations du cycle. L'avènement de ces équipements pourrait, selon le CEA, se situer à l'horizon 2045. 
     L'étude des combustibles et cibles pour la transmutation, thème commun à tous les systèmes de transmutation, est un des points forts des recherches menées par le CEA depuis longtemps, mais la faisabilité technique n'est acquise que pour les combustibles à base d'oxydes peu chargés en actinides mineurs (pour REP, RNR-Na). Les expériences pour tester des concentrations plus élevées ou de nouveaux composés sont en cours ou programmées. 
     Les sérieuses difficultés inhérentes à la transmutation des actinides mineurs, qui se posent au sujet de la fabrication, de l'irradiation et du retraitement des cibles ou combustibles supports de la transmutation, suscitent, à juste titre, un regain d'intérêt pour le cycle du thorium qui réduit fortement la production des actinides supérieurs. Mais la reprise des recherches sur le cycle au thorium, interrompues il y a 30 ans, n'en est qu'à ses débuts ; ces recherches mériteraient un effort plus important que celui qui lui est actuellement accordé. 
     En l'état actuel des connaissances, seule, parmi les produits de fission à vie longue, la fraction soluble du technétium pourrait être transmutée. 
     Enfin la transmutation n'est guère envisageable pour les actinides déjà vitrifiés. La reprise des colis de verre n'est pas techniquement impossible, mais elle conduirait à des opérations complexes et lourdes. Le statut des colis de verre est quasi scellé comme colis de déchets ultimes. Ces colis relèvent alors, avec les colis de déchets MAVL, sur lesquels il n'y a pas d'ambiguïté de statut, du stockage géologique. 
     Ainsi pour la transmutation, on ne dispose pas à ce jour d'un système dont la faisabilité technique en situation de transmutation est démontrée. Un long chemin reste à parcourir : La transmutation est un espoir qui repose sur des machines qui n'existent pas à ce jour, qu'elles appartiennent à la (aux) filière(s) des réacteurs de génération IV ou à celle des ADS. 

     AXE 2 
     Dans sa synthèse de 2004 la CNE avait résumé son évaluation des recherches de l'axe 2 en trois points : recherches concernant le site de Bure, possibilités ouvertes par ces recherches et lien entre stockage et entreposage. 
     Pour les recherches concernant le site de Bure, elle a écrit: en conclusion, le site de Bure est marqué par la présence de caractères favorables et l'absence, en l'état actuel des connaissances, de caractères défavorables rédhibitoires. Une liste de questions scientifiques encore à étudier peut être dressée. Le programme de l'Andra pour le délai restant est pertinent et dense, même si certaines durées d'expérimentation et d'observation sont trop courtes pour aboutir à des résultats d'ici 2006. Sauf éléments nouveaux résultants de ce programme, le Parlement devrait recevoir en 2006, les données suffisantes pour décider ou non de la poursuite de la reconnaissance du site et du secteur en vue de la création éventuelle d'un stockage souterrain.

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     Les résultats acquis cette année sont marqués par la fin des programmes de forages de reconnaissance, par le creusement des puits et des premières dizaines de mètres de galeries du Laboratoire souterrain. Le creusement de la niche à 445m a permis de lancer une série d'observations et d'acquisitions de données sur la caractérisation de la zone endommagée par l'excavation (EDZ) au droit de zones potentielles de scellement d'un puits et sur le comportement différé du massif suite au creusement du puits. Cependant l'analyse de l'endommagement et du comportement mécanique des argilites dans les conditions mêmes du laboratoire et d'un site de stockage devra être approfondie. Les recherches menées dans la niche permettront également de compléter les mesures de perméabilité et de pression et de mettre en place les expériences de diffusion et de prélèvement pour l'analyse des eaux et des gaz. Le programme expérimental prévu dans la galerie creusée à 490 m, dans la couche cible du Callovo-Oxfordien, devrait pouvoir être mené conformément au calendrier prévisionnel de l'Andra, jusqu'à la fin 2006. 
     L'évaluation de la CNE concernant les possibilités ouvertes par les recherches concernant le site de Bure était la suivante: on peut estimer qu'au terme de la loi, en 2006, il n'existera pas d'obstacle dirimant qui empêcherait le Législateur de décider du principe du stockage des déchets à vie longue dans le secteur étudié. La qualification de la roche est dès maintenant en bonne voie d'être acquise et celle du secteur devra être confirmée à l'issue des travaux de 2006. Mais il restera néanmoins des questions techniques de génie minier et de matériaux qui devront recevoir une réponse en temps utile. 
     Sur ce point, la CNE a eu connaissance des résultats des 27 forages qui ont été réalisés. Les résultats de la campagne de forages, verticaux ou dirigés, réalisée dans le secteur de Bure a en particulier apporté une moisson d'informations considérable sur la couche-hôte et sur le site. L'examen de l'ensemble des données a permis d'améliorer le modèle géologique et hydrogéologique du secteur et de récupérer par carottage vertical ou horizontal 4,2 km de roche dont 2,3 km dans le Callovo-Oxfordien. Ces échantillons ont été à l'origine de nombreux travaux de laboratoire faisant intervenir, outre les contractants de l'Andra, la communauté scientifique française et européenne. Les chercheurs impliqués ont mis en oeuvre les techniques les plus modernes, notamment pour les diagraphies, les essais dans les forages et l'analyse géochimique des eaux. Ils ont interprété les données selon les règles de l'art en utilisant les dernières connaissances et méthodes de la science. 
     La couche d'argilite du Callovo-Oxfordien montre une remarquable continuité latérale et une homogénéité de composition et de structure, qui exclut un changement latéral (comme le passage à un lit de sable ou de silt). Les forages positionnés pour reconnaître en place les anomalies sismiques d'interprétation incertaine ont montré l'absence de failles et l'attribution de ces avènements à des épisodes coralliens lors du dépôt des sédiments. Pour le Callovo-Oxfordien, l'ensemble des résultats témoigne du long temps de résidence des eaux porales des argilites, de la faible perméabilité de la roche, d'une remarquable régularité stratigraphique et minéralogique, ainsi que d'une absence de fractures conductrices dans les zones aujourd'hui reconnues. Les mesures de perméabilité effectuées sur les échantillons ont montré des valeurs extrêmement faibles. Enfin les prélèvements d'eau effectués dans les aquifères situés au-dessus et au-dessous de la couche ont montré des âges très différents des eaux, ce qui est cohérent avec l'hypothèse d'absence d'écoulements convectifs significatifs au sein de l'argilite et de traversée de la couche par les eaux. 
     À l'échelle de la zone de transposition d'environ 200 km2 étudiée par l'Andra, les travaux effectués permettent de proposer un modèle géologique sur lequel les propriétés de l'argilite, étudiées de manière approfondie au niveau du site, peuvent être transposées. La continuité et l'homogénéité des couches géologiques sont bonnes, les gradients hydrauliques entre les aquifères ont été confirmés comme faibles et aucune faille majeure n'a été identifiée au cours des reconnaissances sismiques ou par forage.
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     Si, à ce jour, aucun élément rédhibitoire à l'implantation d'un site de stockage n'a été mis en évidence, de nombreuses recherches restent encore nécessaires pour qualifier le secteur de Bure. Des résultats préliminaires pourront être acquis d'ici 2006 par les expériences lancées dans les galeries, mais ceux-ci devront être confirmés et précisés dans la durée. Les expérimentations in situ mises en place en 2005 dans le laboratoire souterrain, l'analyse dans le temps du comportement mécanique et thermique de la roche et de l'EDZ, l'étude du devenir des gaz générés par le stockage et leur impact sur la migration des radionucléides nécessitent plusieurs années d'un suivi continu. Néanmoins en décembre 2005, l'Andra devrait pouvoir présenter des éléments scientifiques suffisants pour que le législateur puisse porter un jugement fondé quant à la poursuite de travaux de grande ampleur. 
     Dans toute reconnaissance en milieu souterrain, de mauvaises surprises ne peuvent être totalement exclues. Il sera indispensable de compléter les recherches menées dans le laboratoire souterrain par des études géologiques approfondies couvrant le site envisagé pour un stockage. Un projet de cette ampleur devra donc être mené par étapes, avec une succession de rendez-vous précis permettant de faire le point des acquis, d'évaluer les incertitudes qui demeurent et de définir la stratégie de recherche et d'exploration de la phase suivante si la décision est prise de poursuivre. Chaque étape pourrait avoir une durée de trois à cinq ans, suffisante pour permettre un contrôle optimal des acquis et suffisamment brève pour détecter rapidement les difficultés qui pourraient survenir. 
     Enfin la CNE avait attiré l'an dernier l'attention sur l'interdépendance entre entreposage et stockage en écrivant : il reste aussi une question de stratégie de gestion à examiner : l'emprise du stockage est fonction de l'inventaire des déchets à stocker et du délai alloué pour leur refroidissement préalable. Il faut donc définir la durée d'entreposage des colis thermiques et notamment ceux contenant du MOX usé, si son stockage était décidé. 
     La CNE constate que les concepts et l'architecture du stockage proposés par l'Andra sont considérablement clarifiés en comparaison de ceux présentés dans le dossier 2001. Ils tiennent mieux compte des caractéristiques de la couche (épaisseur, résistance mécanique, propriétés de rétention), ils n'envisagent que deux grands types d'alvéoles et proposent un dessin modulaire, en arborescence, qui permet une implantation rationnelle des bouchons et prend en compte la réversibilité. À cet égard, la CNE rappelle qu'elle a donné en 1998, à la demande du gouvernement, un avis favorable sur la réversibilité. Les concepts et l'architecture du stockage doivent rester modifiables avec les progrès dans la connaissance du milieu et de l'ingénierie. 
     En revanche, la CNE constate qu'il ne lui a pas été présenté d'études approfondies de l'optimisation de la durée de l'entreposage des colis thermiques. 
     La simulation est une nécessité pour étudier le comportement d'un stockage à l'échelle des millénaires et en particulier la migration des radionucléides. Les recherches conduites depuis quelques années à l'Andra dans ce domaine ont abouti à un programme de simulation d'un bon niveau dont les résultats seront présentés dans le dossier “Argile 2005”. 
     En conclusion la CNE confirme son évaluation favorable précédente sur les recherches conduites à Bure au titre de l'axe 2 de la loi. Les qualités de confinement de l'argilite du Callovo-Oxfordien sont confortées par les dernières observations in situ dans le laboratoire et par les résultats obtenus sur les carottes prélevées dans les couches géologiques du site de Bure. Les résultats des premières expériences et mesures réalisées dans le laboratoire seront disponibles fin 2005, comme le prévoyait le calendrier. 
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     AXE 3 - CONDITIONNEMENT DES DÉCHETS
     Dans sa synthèse de 2004 la CNE avait donné une évaluation positive des recherches sur le conditionnement primaire des déchets bruts de retraitement, évaluation qu'elle renouvelle. Il est clair que la fabrication actuelle des colis industriels primaires de déchets MAVL et HAVL et leur entreposage industriel sont maîtrisés. Le CEA et les industriels disposent d'installations performantes pour caractériser tout colis de déchets radioactifs. Les comportements à court et à long terme des colis de déchets et du combustible usé dans diverses situations ont été raisonnablement établis. Les recherches ouvrent de bonnes perspectives pour de nouveaux conditionnements, si cela devenait nécessaire (verres et céramiques à haute température). Il convient cependant de poursuivre des recherches pour consolider certains résultats, notamment sur la tenue de certains verres et sur les possibilités de confinement offertes par les céramiques afin de disposer d'une large panoplie de conditionnements confinant les radionucléides à vie longue sur le long terme. 
     La CNE considère que les recherches de l'axe 3 aboutissant à la fabrication des colis industriels primaires de déchets ont conduit ce domaine à la maturité. Elles ouvrent également des perspectives concrètes pour adapter les conditionnements à de futurs déchets et aux déchets non encore conditionnés.

     AXE 3 - ENTREPOSAGE DE LONGUE DURÉE DES COLIS PRIMAIRES DE DÉCHETS 
     L'évaluation que la CNE avait portée dans sa synthèse de 2004 sur les recherches pour l'entreposage était nuancée. Elle était formulée ainsi : la possibilité pour un entreposage de durer au-delà du siècle n'a pas été prouvée. La CNE est donc conduite à exprimer une opinion issue de sa réflexion : un entreposage à durée limitée, dans des conditions proches des entreposages industriels récents et perfectionnés, paraît la solution optimale, suivi d'un transfert - si possible sans reconditionnement - dans un site de stockage, dès que ce dernier sera agréé par l'autorité de sûreté. La réversibilité du stockage, si elle est assurée, permettrait encore pendant plusieurs décennies d'apporter des corrections au projet initial de gestion des colis de déchets. 
     Les éléments dont la CNE a eu connaissance au sujet de l'entreposage de longue durée (ELD) apportent les compléments suivants. 
     L'entreposage de longue durée (de l'ordre de 300 ans) des colis primaires de déchets ou d'assemblages de combustible usé mis en étui, ou leur stockage en formation géologique, demandent la réalisation de conteneurs durables. Des conteneurs pour de tels objets à usage mixte ELD/stockage ont été conçus par le CEA qui en a réalisé des démonstrateurs technologiques. La durabilité de ces conteneurs reste à établir. Ceci a débuté pour les conteneurs métalliques et reste à faire pour les conteneurs en béton. La CNE a examiné en janvier 2005 ces démonstrateurs. Elle note qu'il s'agit d'objets dont elle ne connaît pas encore de façon précise les spécifications imposées au constructeur, ni les essais à mener pour en caractériser toutes les propriétés, essais qu'il sera nécessaire de mener dans un proche avenir. La CNE ne peut donc pas évaluer leur aptitude à remplir les fonctions qu'ils doivent assurer dans la longue durée. 
     L'entreposage des colis primaires de déchets est possible pendant une centaine d'années dans les installations industrielles récemment réalisées auprès des usines de retraitement. Ces installations ne semblent poser aucun problème. Les déchets vitrifiés sont entreposés à sec. Tous les colis de verre issus du retraitement du combustible usé du parc actuel de réacteurs pourraient être entreposés (éventuellement jusqu'à un siècle) moyennant des travaux d'extension et de maintenance des entrepôts industriels existants. De leur côté, les combustibles usés sont entreposés en piscine, dans l'attente de leur retraitement, pour une ou plusieurs décennies.

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     Des modèles d'installations d'entreposage de longue durée en surface ou en sub-surface ont été proposés et une nouvelle installation expérimentale pour l'étude en vraie grandeur du refroidissement naturel des entrepôts a été réalisée. La durabilité du béton des ouvrages de génie civil des entrepôts ne peut être garantie (au sens habituel de ce terme en construction) au-delà d'une centaine d'années, que ce soit vis-à-vis d'une température de l'ordre de 80°C, des cycles thermiques ou des interactions avec le milieu naturel environnant. Toutefois, le CEA, après avoir avancé dans ses études d'altération du béton, pense que cette durée peut être dépassée. L'étude des ouvrages de génie civil n'a pu être qu'ébauchée. Nul ne pouvant réellement s'avancer sur la durabilité des bétons au-delà du siècle, il en découle que, pour une durée supérieure, une surveillance active et, si nécessaire, une reconstruction des installations doivent être envisagées. Une autre difficulté est de nature différente : l'existence d'un dépôt de matières radioactives nécessitant une surveillance et une maintenance continues exigent une continuité de l'édifice social. 
     L'entreposage en sub-surface est une installation discrète, résistante aux agressions extérieures naturelles ou accidentelles. Mais toute étude approfondie nécessitera de prendre en compte les particularités de sites d'application. Le gros oeuvre d'un entreposage de sub-surface devrait être réalisé par creusement au sein d'une formation géologique dont la stabilité est avérée. 
     La fonction principale de l'entreposage est d'assurer la compatibilité entre des procédés de gestion des déchets dont les échelles de temps sont très différentes, de la décennie aux siècles. Il peut aussi être considéré comme une possibilité de différer les décisions de gestion, mais il amorce alors un processus de transfert de responsabilité sur les générations à venir. 
     En conclusion, les recherches conduites dans l'axe 3 de la loi ne sont pas achevées, hormis pour l'entreposage industriel des déchets actuels de retraitement. Les programmes en cours sur les conteneurs d'entreposage et de stockage doivent se poursuivre. Pour aller plus loin que des études génériques sur les entrepôts de longue durée, il conviendrait de sélectionner un site potentiel d'entreposage.
     CONCLUSION GÉNÉRALE 
     La CNE rappelle qu'un résumé de son évaluation des résultats acquis dans les trois axes de recherche, a été présenté à l'Office parlementaire lors des auditions publiques des 20, 27 janvier et 3 février 2005. 
     La CNE publiera en janvier 2006 son rapport global. Elle évaluera ensuite, conformément à sa mission, les résultats qui pourraient lui être présentés durant l'année 2006. 
     La synthèse de 2004 comportait deux appréciations sur l'ensemble des recherches, que la CNE reprend cette année: Les dossiers qui seront soumis en 2006 au Parlement par les acteurs de la loi devraient fournir au Législateur les éléments techniques lui permettant de choisir une stratégie globale de gestion des déchets et du combustible usé. 
     La CNE souligne que des recherches scientifiques et techniques associées aux objectifs choisis par le Parlement seront nécessaires dans la durée et qu'elles devront être menées dans un cadre international, tout particulièrement européen. 
     La CNE considère que c'est dans l'axe 2 que les progrès les plus significatifs ont été accomplis an cours de la dernière année. Les informations recueillies par l'Andra permettront aux Pouvoirs publics, s'ils le souhaitent, de retenir le principe du stockage géologique profond pour les déchets ultimes.
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Quelques réflexions en lisant l'amusant tome I de "Dossier 2005 Argile" (Attention: 500 pages pdf)
Des géologues indépendants du coin de Bure
 
     Descenderies ou puits?
     Bien sûr, on peut dire que dans un puits la charge hotte+déchet "B" de 100t pourrait descendre un peu plus vite que prévu. Bien sûr, on peut dire que la descente en puits implique des manutentions en plus. Certes. 
     Mais n'empêche que depuis le rapport Goguel de mai 1987, (soit 18 ans), il n'a jamais été question d'autre chose que de puits dans les terrains sédimentaires (au contraire des granites). Et l'ANDRA de montrer du doigt : regarder les Américains au WIPP, ce sont des puits, regarder les Allemands à Gorleben, ils ne veulent mettre que des puits.
     Mais bon sang alors, qu'est ce qui s'est mis à chatouiller l'ANDRA et le petit monde qui pousse derrière? Pourquoi expriment-ils soudain tout à coup en 2005, en sifflotant, que peut-être, si on voulait, vous savez, on pourrait toujours mettre une, voire deux descenderies hein, pourquoi pas après tout, vous savez, nous on est ouvert à tout... Une ou des descenderies dont la pente est inférieure à 15% et même plutôt à 10% (p.303) ça veut quand même dire que pour arriver à - 500m, il faut creuser sur une longueur de 5 km (sans compter les nombreuses niches échappatoires de sécurité), autant que pour 10 puits d'un seul coup et pour un seul tuyau (et pas mal de m3). D'ailleurs, il faut un petit puits d'aération rien que pour la descenderie. Les conseillers personnels de l'agence lui ont donc soufflé que ("si ça gueule pas trop") on garde quand même uniquement des puits en "solution de référence" (p. 64, 295)
     Dans un puits, le système ascenseur par câble est en soit beaucoup plus long que les deux niveaux desservis: la surface et l'accostage au dépôt. La poulie sommitale autour de laquelle tournent les câbles est positionnée "au sommet d'une tour d'une cinquantaine de mètres de haut". Mais la poulie de fond doit également être quelques décamètres sous le niveau du dépôt (fig. 9.2.4. p. 344). Il faut donc creuser un "puisard" profond de 35m sous le niveau du dépôt (fig. 7.3.1 p. 298). Very interesting ce détail là.
     A Gorleben ils ont un diapir de 80 km3 de sel (Géochronique n°31 p. 17) et beaucoup moins de déchets, ça ne les a même pas effleurés qu'on puisse être radin au point de compter à 100 mètres près (je n'ai pas de données pour le WIPP, déjà ce sont des "B" et même "faiblement" radioactifs ?).
     A Bure même, le faciès à dominante argilite est épais de 106,5 m (et ça c'est en comptant dedans le 1/4 inférieur de la "zone A"). S'il faut en plus soustraire 35 mètres sous le dépôt et ajouter encore la EDZ du puisard (de l'ordre du diamètre excavé, soit 14 m) au bout de ces 35 mètres...: si on veut pas avoir les pieds dans l'eau du Dogger, il faut sérieusement remonter le dépôt dans la couche d'argilite. C'est ce qui a toujours été un peu fait d'ailleurs et je n'avais jamais compris pourquoi. Bon, mais alors la EDZ supérieure des alvéoles et galeries, elle se rapproche sérieux de la "zone A" (ces 3/4 supérieurs qui sont des marnes). Et dans la moitié supérieure de la "zone A", il y a de l'eau à Lezéville à 7 km de là, et il y a eu une petite venue d'eau aussi dans le forage EST311 de l'Andra... Donc avec des puits pour porter les charges lourdes, chaque mètre d'argilite compte, bientôt les décimètres, sinon ça risque de faire très short. C'est vrai qu'avec une descenderie, qui n'a pas besoin de puisard, ça donnerait un peut d'air. Mais l'équivalent de 10 puits pour un seul tuyau, ça se mérite...
     A propos, l' "argilite" de "la niche" en "zone A" (sous la surface "S2"), elle contient 70% de carbonates et moins de 13% de minéraux argileux (FRF: Forages de Reconnaissance de la Formation, Synthèse, Andra 08/12/04), fig. 9-1 p. 265), il est même écrit que le taux de carbonate à ce niveau dépasse 80% sous le grillage Ouest du site (EST361 très incliné vers le site FRP p. 141). C'est pour ça que ceux qui l'ont vu la décrive "grise et dure comme du béton" (Libération 15/01/05).
p.16b

     Soyez pas vaches, comprenez les, mettez vous à leur place, si ça c'est pas de l'argilite, il reste quoi comme "garde" d'argilite, hein? Et si on avait dit aux journalistes que s'en était pas alors qu'ils étaient déjà descendus dedans (l'argilite) en ascenseur depuis 20m, ils auraient dit quoi aux français?
     - Selon la terminologie adoptée par l'Andra, mais dans la profondeur de ses rapports (FRF p. 87), une argilite a moins de 10% de carbonate, de 35 à 65% de carbonate ce sont les marnes, au dessus de 65% de carbonate c'est du calcaire (marneux puis pur).
     En fin du t.I de "Dossier 2005 Argile", il y a un schéma du système de réception de l'ascenseur (fig. 11.7.1 p. 474). Ca n'est pas 35 m qui est indiqué entre "la recette de fond" (= le labo/dépôt à "-490m") et le fond du puisard mais... 40 m. Là on est sur la dalle de béton. Encore dans le texte de la page suivante expliquent-ils qu'il "faudrait" en plus de celui présenté, un système d'amortisseur plus souple à rajouter au dessus pour qu'il y ait une déformation plus progressive en cas de non arrêt de l'ascenseur. Autrement dit, 40 m, c'est pas de trop.
     Pour la tenue mécanique du puits vide au niveau de l'argilite, il faut déjà 0,25 + 1,35 ("soutènement" +  "revêtement") = 1,6 mètre d'épaisseur de béton. Mais la dalle de fond du puisard qui supporte toute la base de l'ascenseur, poulie de renvoi, amortisseur de chute, etc. c'est clair qu'elle doit être beaucoup plus épaisse que ça. Donc on est au delà de 40m, proche de 45m peut-être en terme de profondeur excavée.
     Et il reste la EDZ dont la perméabilité est multipliée au moins par 100. Elle est d'à peu près un diamètre est-il écrit ou dessiné un peu partout dans le "Dossier 2001 Argile" et le "Référentiel Géologique" 2001. Cela ne peut pas changer comme cela d'un coup de baguette, seul le dépouillement de l'expérience REP (qui doit être en cours) pourrait changer cela, mais ça ne sera pas forcément en plus court...
     Le diamètre intérieur du puits est 11,5 m + (2 x 1,6 de béton) = 14,7m de diamètre excavé = taille EDZ à rajouter au 40-45m du puisard : total 55 à 60 mètres!
     Bon, ces chiffres varieront. En tirant un peu sur la sécurité, on doit pouvoir descendre à 35 mètres (hors dalle de béton) mais restera toujours la EDZ...

     Le problème est absolument majeur. "Leur problème", il est bien là.
     C'est seulement sous ces 55 m que commencerait la "garde" d'argilite qui séparerait une des cavités liée aux déchets, le puits, de l'aquifère Bathonien/Dogger...
     (Je rappelle que tous les calculs officiels de diffusion sont ceux d'une garde d'argilite de 50m; que le Callovo-Oxfordien fait 135m à Bure dont 106m à dominante argilite et une trentaine de mètres de marnes au dessus incluant notamment le niveau calcaire de "la niche").
     Voilà pourquoi ils commencent à inclure la base des calcaires Oxfordien, le niveau C3 peu poreux (mais qui a des diaclases!), dans les calculs de diffusion. Ils sont obligés de remonter tellement le dépôt ! 

Voilà pourquoi aussi, on sait déjà par la CNE que les "scellements" horizontaux, indomptables dans le "Dossier 2001 Argile" (perméabilité 10E-09 m/s) sont devenus d'une redoutable efficacité "conceptuelle" dans "Dossier 2005 Argile" (ça doit être dans les tomes suivants, pas encore lus, mais la réponse est presque certainement une division par 100 de la perméabilité horizontale de l'argilite et du même coup de la EDZ horizontale qui est définie par rapport à elle, et qui doit passer de 10E-09 à 10E-11; très lourdingue comme arnaque), faut bien montrer qu'on peut isoler totalement les puits des déchets... tout se tient dans l'histoire...
     Bon, ça peut passer doivent-ils se dire (et de fait, c'est en train de passer). En comptant C3 dans la diffusion, en disant que les "scellements horizontaux" sont des barrières infranchissables (c'est au niveau de leur EDZ que ça se passe), et si personne ne dit rien...
     Mais pas complètement stupides qu'ils sont, et prévoyants, ils envisagent aussi le cas où "ça passerait pas" (ça ne dépend guère que de la CNE).
     Eh ben si "ça passe pas", il semble qu'il n'y a guère comme solution que la descenderie si on veut rester dans le coin de Bure.
     Donc, ils sortent le grand jeux naïf, disant que dans les mines on hésite toujours un peu entre puits et descenderies..., même si 500m c'est un peu profond..., même si il y a des aquifères à traverser, mais "pas très" aquifères disent-ils...
     Et bon, ils en présentent deux de descenderies: Une pour les gravats, une pour les déchets nucléaires. Car ces deux éléments là transitent dans des puits différents évidemment. Et tous les deux nécessitent des ascenseurs assez costauds donc des puisards profonds.

     La suite... dans les années qui vont suivre...

     Avez vous vu comme les "B" dégagent un agréable parfum?  dégagement (officiel) d'hydrogène + méthane (p. 456):
     Bitumes ("B2.1 + B2.2" = 105 000 fûts, p. 101 : moyenne 10l/fût/an, jusqu'à 57l/fût/an.
     "Coques et embouts" du combustible nucléaire ("B5.1"): moyenne 10l/fût/an, jusqu'à 500l/fût/an.
     Le seuil d'explosivité sera (officiellement) atteint en 30 jours sans ventilation dans une alvéole remplie de "coques et embouts" (p. 457).
     C'est comme à La Hague. D'ailleurs, les portes blindées, les fenwicks sur rail entièrement robotisés à partir de mesures laser et de l'extérieur des alvéoles "B" (où personne ne peut rentrer ni ne voir ce qui s'y passe) et tout çà, ils disent bien que çà fonctionne bien à La Hague et qu'il n'y a qu'à répliquer à Bure.
     Autre petit détail intéressant, les bitumes "B2" s'auto-enflamment à partir de 350°C (p. 467).

p.17

COMMUNIQUE DE JEAN-MARC BEN,
adjoint à l'environnement, à l'écologie urbaine et au cadre de vie de Calais

     Aujourd'hui 2 barres, et demain?
     Invraisemblable et inquiétant ! 
     Deux barres d'acier radioactives ont été "égarées" à la centrale nucléaire de Gravelines. Comme souvent, on imputera la faute à une erreur humaine. Mais l'erreur humaine est d'autant plus à prendre au sérieux dans le contexte actuel, et risque bien d'être une conséquence du plan drastique de restrictions budgétaires mis en oeuvre par la direction d'EDF dans les centrales nucléaires depuis début 2002. 
     En effet, un document interne à EDF, rendu public par le réseau "Sortir du nucléaire", énonce précisément ces restrictions budgétaires. 
     Extraits:
     - "Le coefficient de disponibilité et le coefficient d'utilisation des centrales nucléaires doivent être les plus élevés possibles".
     - "L'économie à réaliser pour la Division de production nucléaire est de l'ordre de 200 millions € par an"
     - "baisse du nombre d'embauches prévues de 550 à 175"
     - "économie de 100 millions € (soit 7,2% des dépenses d'achats totales) notamment sur les dépenses de logistique et frais généraux et de maintenance."

     Ces restrictions budgétaires, imposées depuis plus de trois ans maintenant, commencent à se faire sentir dans les centrales nucléaires de façon de plus en plus inquiétante, et sont dénoncées y compris par les syndicats de salariés des centrales.
     J'ai suggéré au maire de Calais de manifester publiquement notre inquiétude, face au danger que court la population, et d'exiger d'être informé sur les suites de cette affaire peu banale:
     Aujourd'hui deux barres radioactives, et demain?
     Quand on sait que les préfets nous refusent toujours la distribution de pastilles d'iode sur Calais (malgré mes incessantes demandes ces dernières années dans les réunions ad hoc), au seul prétexte que cela affolerait les populations et que nous ne sommes pas, de toute façon, dans le périmètre de sécurité (en cas d'accident nucléaire le nuage radioactif s'arrêterait probablement encore une fois aux frontières départementales!), il y a vraiment de quoi ne pas être rassuré sur les propos toujours lénifiants d'EDF, de l'Etat et du lobby nucléaire en général.

La Tribune de Genève - 2 août 2005
 Le site du Bugey hérite de déchets radioactifs

     La nouvelle ne suscite pour l'instant que peu de réactions. Le site nucléaire de la centrale du Bugey dans l'Ain pourrait être utilisé d'ici 2011 comme aire d'entreposage pour des déchets «moyennement» radioactifs à vie longue, dont la radioactivité mettra des dizaines ou des centaines d'années à décroître. 
     En plein été, l'information est sortie presque accidentellement. C'est la Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (Drire) en charge de la surveillance des installations classées qui a évoqué l'existence d'un projet jusque-là ignoré de la population. Le directeur de la centrale, Michel Huart, a confirmé l'info-rmation.
     Pas de centre de stockage. 
     Un peu embarrassé, le maire de la commune de Saint-Vulbas, 950 habitants, dans l'Ain a dû admettre qu'il avait été avisé début juin, d'une possible utilisation du site comme plateforme d'entreposage. EDF devrait déposer un dossier d'ici la fin de l'année pour obtenir l'autorisation des ministères concernés.
     Pour l'instant, la France ne dispose pas de centre de stockage pour les déchets à vie longue. En 2006, le parlement français va devoir se prononcer sur le choix d'une filière. Le débat portera sur les solutions envisagées, notamment l'enfouissement. Ce choix fait, il faudra attendre une vingtaine d'années avant que les installations ne soient opérationnelles. Pendant ce temps, les centrales françaises vieillissent. Les réacteurs de première génération comme Bugey 1, démarré en 1972, sont l'arrêt depuis 1994.
     Coulés dans du béton. 
     Le 28 juin dernier, la France a obtenu que le site de Cadarache dans les Bouches-du-Rhône soit retenu pour la construction du premier réacteur expérimental de fusion nucléaire (ITER). Une victoire avec à la clef des milliers d'emplois. En attendant, le problème des déchets est loin d'être résolu. EDF a donc imaginé une solution de transition qui passe notamment par le site du Bugey qui emploie 1.200 personnes et dont les quatre réacteurs en fonctionnement produisent 40% des besoins énergétiques de Rhône-Alpes.
     La centrale, dont les tours de refroidissement laissent s'échapper un long panache de vapeur blanche qu'on voit depuis Lyon, pourrait accueillir les déchets «moyennement radioactifs» issus du démantèlement de ses propres installations mais aussi de huit autres réacteurs français dont Superphénix. Pour l'essentiel, des pièces métalliques coulées dans des fûts en béton. Des containers qui ne nécessiteront pas de système de refroidissement mais juste «la construction en surface d'un hangar de confinement», confirme le directeur de la centrale.

p.18

Office fédéral de l'énergie
COMMUNIQUE DE PRESSE
    
    Berne, le 28 avril - 
     Démonstration de la faisabilité du stockage géologique: premières expertises réalisées.
     Le Groupe de travail de la Confédération pour la gestion des déchets nucléaires (AGNEB) a publié son 27e rapport d'activité. L'ssentiel des travaux a porté en 2004 sur l'examen de la démonstration de la faisabilité du stockage géologique dans les Argiles à Opalinus du Weinland zurichois.
     Selon ce rapport, la Commission pour la gestion des déchets nucléaires (KNE) de la Confédération considère les conditions géologiques du Weinland zurichois comme favorables à l'entreposage de déchets radioactifs. Selon les experts de la KNE, les conditions géologiques sont correctes Après examen approfondi des données géologiques disponibles et des aspects techniques, la KNE a conclu que la démonstration de l'existence d'un site approprié et de la faisabilité technique était réalisée pour le projet «Argiles à Opalinus dans le Weinland zurichois».
     Les propriétés des Argiles à Opalinus les rendent, aux yeux des experts, favorables à l'entreposage de déchets radioactifs. Les données d'évolution  géologique ne révèlent aucun événement susceptible de provoquer une érosion des roches barrières du dépôt profond au cours du prochain million d'années. La KNE a cependant formulé différentes questions qui, si le projet est poursuivi, devraient encore être examinées par des expériences effectuées dans un laboratoire souterrain.

     L'AEN rend un bon rapport
     L'année dernière, un groupe international d'experts de l'Agence pour l'énergie nucléaire (AEN) de l'OCDE a par ailleurs examiné et validé la démonstration de la sûreté de la Nagra. Les experts sont d'avis que la démonstration repose sur des données et des arguments équilibrés et qu'elle satisfait aux recommandations et pratiques internationales actuelles. Ils estiment que les propriétés favorables des Argiles à Opalinus du Weinland zurichois, ainsi que la sûreté du système de barrières techniques, sont démontrées sur le plan scientifique.
     Ces deux rapports sont intégrés à l'examen en cours de la démonstration de la faisabilité du stockage géologique par les autorités chargées de la sûreté, la DSN et la CSA. Tous les rapports et expertises pertinents seront publiés à l'automne 2005. Ils constituent la base sur laquelle le Conseil fédéral se déterminera quant à la faisabilité du stockage géologique et à ses suites. Le Conseil fédéral doit se prononcer à ce sujet en 2006.

     Ouvrage de référence et compte rendu
     Le 27e rapport d'activité contient des informations sur les travaux de la Confédération, de la Nagra et de l'Institut Paul Scherrer dans le domaine de l'évacuation des déchets radioactifs. La liste des principales adresses Internet, abréviations et publications qui complète le rapport en fait un précieux ouvrage de référence. D'autres informations sur ce thème sont disponibles sur le site Internet :
http://www.entsorgungsnachweis.ch

     Institué par le Conseil fédéral en 1978, l'AGNEB réunit des représentants de l'OFEN, de la DSN, de l'ARE, de l'OFSP, de l'OFEFP, de l'OFEG et de l'IPS. Ce groupe de travail est chargé de suivre les questions liées à l'évacuation des déchets radioactifs, de prendre position à ce sujet, de superviser les procédures d'autorisation à l'échelon fédéral et d'étudier ce qui se fait à l'étranger en la matière.
     Le 27e rapport d'activité de l'AGNEB peut être téléchargé sur Internet à l'adresse citée plus haut.
     Renseignements: Marianne Zünd, cheffe de la communication de l'OFEN, tél. 031 322 56 75
     Peter Hufschmied, président KNE, tél. 079 300 50 33

Abréviations:
AGNEB Groupe de travail de la Confédération pour la gestion des déchets nucléaires
AEN l‚Agence pour l'énergie nucléaire
CSA Commission fédérale de la sécurité des installations nucléaires
DSN Division principale de la sécurité des installations nucléaires
IPS Institut Paul Scherrer
Nagra Société coopérative nationale pour le stockage géologique de déchets radioactifs
ARE Office fédéral du développement territorial
OFEFP Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage
OFEN Office fédéral de l‚'nergie
OFEG Office fédéral des eaux et de la géologie
OFSP Office fédéral de la santé publique

p.19a

Canada - 2005
les écologistes s'opposent au projet de gestion des déchets nucléaires
    
      Toronto/Ontario, 24 mai 2005 - PR Direct - 
     Diverses organisations canadiennes de protection de l'environnement s'opposent aux recommandations du rapport préliminaire de la Société de gestion des déchets nucléaires (SGDN) publié aujourd'hui, parce qu'il ne tient pas compte de la priorité des Canadiens: cesser la production de déchets hautement radioactifs.
     «Ils refusent d'envisager la possibilité de réduire les déchets radioactifs en optant pour des modes de production d'électricité plus écologiques et plus sûrs» explique Shawn-Patrick Stensil, de la campagne énergie pour Greenpeace Canada. «On dirait qu'ils ne réalisent pas que personne ne veut de déchets radioactifs dans sa cour
     En 2002, le gouvernement fédéral a donné un mandat de trois ans à la SGDN pour déterminer quelle était la meilleure façon de gérer les déchets radioactifs parmi les trois possibilités suivantes: «évacuation en couches géologiques profondes dans le Bouclier canadien, entreposage à l'emplacement des réacteurs nucléaires et entreposage centralisé». Toutefois, comme l'admet elle-même la SGDN, chacune de ces méthodes pose de sérieux problèmes.
     Dans ses recommandations préliminaires, la SGDN propose d'utiliser successivement ces trois méthodes problématiques, sur une période de 300 ans. On ferait d'abord le stockage sur le site des centrales, puis on passerait au stockage centralisé et, finalement, à l'évacuation géologique dans le Bouclier canadien. Coût projeté: 24 milliards $. La SGDN estime que le site de dépôt des déchets hautement radioactifs devrait être situé soit au Québec, en Ontario ou en Saskatchewan. Elle fera sa recommandation finale au gouvernement fédéral le 15 novembre 2005.
     Selon Brennain Lloyd, coordonnatrice de Northwatch, une coalition de citoyens et d'organisations sociales et écologistes du nord-est de l'Ontario,  la Société de gestion des déchets nucléaires essaie de peindre la réalité en rose, mais elle ne fait que combiner les trois méthodes classiques de gestion des déchets de l'industrie. En réalité, l'utilisation successive de ces trois méthodes est la pire des solutions parce qu'elle combine les désavantages de chacune.»
     «Il n'y a aucune façon sûre d'enfermer des poisons qui demeurent actifs pendant un million d'années», explique pour sa part Gordon Edwards du Regroupement pour la surveillance du nucléaire. «La priorité, ce n'est pas de trouver comment éliminer encore plus de déchets radioactifs, c'est d'éliminer l'énergie nucléaire.».
     Selon les écologistes, la stratégie à suivre commence par la réduction des déchets produits chaque année, et donc par la fermeture graduelle, d'ici 2020, des 22 réacteurs nucléaires du Canada à mesure qu'ils atteignent la fin de leur vie utile. La SGDN explique qu'elle «n'a pas examiné ni porté de jugement sur le rôle de l'énergie nucléaire».
     Pourtant, les membres du conseil d'administration de la SGDN (Hydro-Québec, Ontario Power Generation et Énergie Nouveau-Brunswick) font actuellement ou prévoient bientôt faire la réfection de leurs réacteurs les plus âgés, ce qui pourrait faire doubler la quantité de déchets radioactifs au Canada.
p.19b

L'Arménie va construire un nouveau dépôt pour les déchets nucléaires
     25/05/2005 - AFP - Le parlement arménien a donné mercredi son feu vert pour la construction d'un nouveau site de stockage des déchets nucléaires de la centrale de Metsamor (près d'Erevan), exploitable pendant 50 ans.
     Le nouveau site sera construit en trois tranches qui seront mises en exploitation en 2007, 2012 et 2018, a souligné le ministre arménien de l'Énergie Armen Movsissian.
     Le coût total de la construction est de 10 millions €.
     Avant 1989, le combustible usagé arménien était stocké en Russie. Et le premier site de stockage construit en 2000 par la compagnie française Framatome est plein.
     L'Union européenne demande à Erevan de fermer son unique centrale nucléaire, mais le gouvernement arménien refuse en l'absence de sources d'énergie alternatives.
     La centrale de Metsamor, construite en 1977, produit 40% de l'énergie de la république. Elle avait été fermée en 1988 après le tremblement de terre de Spitak qui avait dévasté l'Arménie, et n'avait été relancée qu'en 1995 en raison d'une crise énergétique.
     La centrale munie de deux réacteurs à eau pressurisée de type VVER-440 est gérée depuis 2003 pour cinq ans par le monopole d'électricité russe SEU.
p.19c

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