La G@zette Nucléaire sur le Net! 
G@zette N°262, décembre 2011

Evaluations complémentaires de sûreté post-Fukushima:
Comportement des installations nucléaires françaises en cas de situations extrêmes et pertinence des propositions d’améliorations
 

1. INTRODUCTION 
     Suite à l’accident survenu le 11 mars 2011 dans la centrale de Fukushima Dai-ichi, le Premier Ministre a demandé à  l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) de procéder à un audit de la sûreté des différentes installations nucléaires françaises. Le 5 mai 2011, l’ASN a pris douze décisions demandant aux exploitants nucléaires français de réaliser des évaluations complémentaires de sûreté (ECS) de leurs installations, sur la base d’un cahier des charges annexé aux décisions précitées et cohérent avec le cahier des charges retenu pour les «stress-tests» demandés par le Conseil Européen. 
     Les ECS visent à prendre en compte les premiers enseignements des événements survenus sur la centrale de Fukushima Dai-ichi, en évaluant la résistance des installations nucléaires françaises à des scénarios extrêmes, allant au-delà des situations prises en compte pour leur dimensionnement. Ces évaluations concernent en 2011 les réacteurs de puissance en exploitation (REP de 900, 1.300 et 1.450 MWe), ou en construction (EPR), ainsi que certaines installations nucléaires jugées prioritaires par l’ASN (le Réacteur à Haut Flux de Grenoble, le Réacteur Jules Horowitz, le réacteur OSIRIS, l’installation MASURCA, l’Atelier de Technologie du Plutonium, la centrale PHENIX, l’usine MELOX, les établissements de La Hague, de FBFC et, sur le site du Tricastin, les établissements d’AREVA NC, COMURHEX, EURODIF, Georges Besse II, SOCATRI). 
     Dans ce cadre, l’ASN a demandé aux Groupes Permanents pour les réacteurs (GPR) et pour les laboratoires et usines (GPU) de lui faire part de leur avis sur ces évaluations complémentaires de sûreté et sur la pertinence des propositions d’amélioration visant à renforcer la sûreté de ces installations en cas de situations extrêmes (séisme, inondation, perte de sources électriques, perte de sources froides), sur la base de l’analyse critique par l’IRSN de ces propositions. Une première réunion des Groupes Permanents d’experts s’est tenue le 6 juillet 2011 pour examiner la démarche proposée par chacun des exploitants, à l’issue de laquelle un avis a été remis à l’ASN. Cette dernière a alors indiqué aux exploitants concernés par ces évaluations les points sur lesquels une vigilance particulière devait être portée. 
     L’analyse par l’IRSN des ECS réalisées et transmises par les exploitants le 15 septembre 2011 fait l’objet d’un rapport transmis le 4 novembre 2011 à l’ASN et aux membres des Groupes permanents. 
     Ce rapport est disponible en langue française et anglaise (sur le site internet www.irsn.fr). 
     Le présent rapport constitue une synthèse du rapport précité. 
2. CONTEXTE INTERNATIONAL
     À la connaissance de l’IRSN, seuls les réacteurs de puissance font l’objet d’évaluations complémentaires de sûreté à l’étranger. Pour fournir quelques éléments de comparaison des démarches suivies, le rapport IRSN présente de manière synthétique les prises de position, suite à l’accident de Fukushima, des autorités compétentes de trois pays nucléarisés, à savoir les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la Finlande. 
     Même si, de leur point de vue, la poursuite de l’exploitation des réacteurs ne présente pas de risque imminent, certaines situations induites par des agressions, ou des cumuls d’agressions, doivent être renforcées. En outre, elles estiment que certaines questions sont à réexaminer, ce qui peut conduire à la mise en place de dispositions complémentaires (organisationnelles, matérielles ou procédurales). 
3. DEMARCHE D’ANALYSE DE L’IRSN 
     Compte tenu de l’approche de sûreté, des méthodes de conception mises en œuvre jusqu’à présent en France et des réexamens de sûreté décennaux, les installations devraient pouvoir être considérées comme robustes pour les aléas considérés dans le référentiel de sûreté. En effet, le niveau des aléas de dimensionnement fait l’objet de réévaluations périodiques au titre des réexamens de sûreté, qui assurent dans la durée, la robustesse des installations aux aléas, dont les agressions externes. Toutefois, l’état réel des installations peut affecter, de façon temporaire, cette robustesse du fait de l’existence d’écarts de conformité au référentiel. De même, l’évolution des connaissances en matière d’aléa peut remettre en cause cette robustesse. En tout état de cause, les démonstrations de sûreté actuellement disponibles ne permettent pas de garantir a priori le bon comportement des installations pour des aléas dépassant ceux prescrits dans leur référentiel de sûreté.


     Aussi, l’approche imposée dans les ECS consiste à considérer que des situations accidentelles graves sont possibles du fait d’une agression externe naturelle ou que, indépendamment de toute agression, elles peuvent présenter des caractéristiques (durée, nombre d’installations concernées...) dépassant les exigences du référentiel actuel. À cette fin, les ECS doivent permettre d’identifier les fonctions de sûreté qui doivent être assurées dans ces situations accidentelles graves (séisme, inondation, perte de sources de refroidissement, perte de sources électriques, accidents graves) pour éviter la survenue de situations redoutées (fusion du cœur, dénoyage des assemblages entreposés dans une piscine, rejets importants...).

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Cette démarche, menée dans l’objectif d’éviter des conséquences graves pour l’environnement et les populations pour une agression ou une situation accidentelle au-delà du référentiel, se décompose en deux phases: 
     - la vérification de la conformité au référentiel actuel, qui constitue un préalable à la recherche de la robustesse des installations; 
     - une approche sur la base de la défense en profondeur au-delà du référentiel.
     L’IRSN a examiné les approches retenues par les exploitants pour l’élaboration des dossiers transmis dans le cadre des Evaluations Complémentaires de Sûreté. Les démarches mises en œuvre ont été jugées globalement satisfaisantes et les compléments éventuels jugés nécessaires ont été identifiés et pris en compte. 
     L’IRSN a fait le choix de construire son rapport autour des thèmes d’analyse, plutôt qu’autour de chaque exploitant. De plus, afin d’analyser de manière cohérente la pertinence et la suffisance des propositions faites par les exploitants, l’IRSN a défini une démarche d’analyse fondée sur le principe de la «défense en profondeur». 
     Cette démarche conduit à proposer, en complément des dispositions de sûreté actuelles, que soit identifié un «noyau dur» de structures, systèmes et composants (SSC) dont la disponibilité, dans tous les scénarios envisagés, permet d’assurer la maîtrise des trois fonctions essentielles de sûreté: la maîtrise de la réaction nucléaire, l’évacuation de la chaleur produite par cette réaction et le confinement des matières radioactives. 
     Ainsi, à la problématique de l’évaluation du caractère opérationnel de l’ensemble des systèmes et équipements concourant à la sûreté et à la radioprotection, caractère opérationnel toujours discutable compte tenu des différentes sources d’incertitudes (aléas, comportement des installations en situation extrême...), se substituera une problématique de protection déterministe d’un périmètre réduit de SCC pour des aléas au-delà de ceux retenus pour le dimensionnement de l’ensemble de l’installation. 
     À la suite des conclusions des Groupes permanents d’experts, et des décisions de l’ASN, il reviendra à chaque exploitant, à partir des évaluations déjà réalisées, à compléter le cas échéant, de proposer une définition précise du «noyau dur» à retenir pour chacune de ses installations en identifiant le niveau des «aléas ECS» pour lesquels les SSC de ce noyau dur doivent être dimensionnés. Un calendrier de mise en œuvre, tenant compte de la sensibilité particulière de certains sites ou installations devra être proposé. 
     En parallèle, le retour d’expérience de l’accident de Fukushima ainsi que les ECS ont mis en évidence certaines limites des référentiels de sûreté actuels. Par exemple, le référentiel actuel ne postule pas, ou de manière ponctuelle, la survenue de perte totale de refroidissement ou de sources d’énergie affectant plusieurs installations d’un site. L’IRSN estime qu’il est nécessaire de se réinterroger sur ces référentiels sans attendre les prochains réexamens de sûreté. 

4. L’ETAT DES INSTALLATIONS
     La maîtrise de la conformité des installations aux exigences de sûreté qui leur sont applicables est une condition sine qua non de leur sûreté. La conformité des installations permet en effet de s’assurer de la capacité des installations à faire face aux accidents postulés dans le cadre du référentiel de sûreté et constitue ainsi un pré-requis à la robustesse des installations pour les situations considérées dans les ECS. Dans le cadre des ECS, l’ensemble des exploitants se sont engagés à compléter, pour la fin de l’année 2012, les examens de conformité menés dans le cadre des évaluations complémentaires de sûreté afin de confirmer l’absence d’écarts de conformité sur les structures, systèmes et composants participant à la gestion des situations accidentelles de perte de refroidissement ou de sources d’énergie. 
     De manière plus générale et concernant le maintien en conformité des installations, la pérennité des choix de conception, mais surtout de leurs effets sur la robustesse de l’installation, doit être maintenue grâce à des processus conçus, pilotés et animés avec rigueur. 
     Les éléments fournis par les exploitants sur les dispositions organisationnelles sont peu détaillés et orientés par le respect des exigences réglementaires. Toutefois, l’IRSN estime que l’intégration des processus nationaux et de ceux propres à chaque site, le pilotage opérationnel des processus, la gestion de la traçabilité requise aux différentes étapes des processus, la pérennité de la qualification des équipements et des systèmes sont des éléments importants pour renforcer la confiance en la connaissance de l’état réel des installations. L’IRSN estime que les réflexions et les actions engagées par les exploitants sur ces aspects doivent se poursuivre.

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     L’IRSN considère que les principaux écarts de conformité connus et ayant un impact sur la sûreté ont bien été pris en compte par EDF. L’IRSN confirme toutefois la nécessité d’anticiper les actions correctives au vu du retour d’expérience de l’accident de Fukushima pour certains écarts de conformité. Par exemple, la prise en compte de l’insuffisance des réserves d’eau d’alimentation de secours des générateurs de vapeur pour replier la tranche en cas de manque de tension externe devrait faire l’objet d’une modification des procédures de conduite incidentelle. Par ailleurs, l’absence d’exigence sismique du système de ventilation des générateurs électrogènes de secours sur certains réacteurs de 1.300 MWe devrait faire l’objet de corrections rapides.
     Enfin, comme un certain nombre de contrôles sont programmés lors des examens de conformité, que des modifications et des nouveaux référentiels sont prévus d’être intégrés lors les visites décennales, EDF doit mettre en œuvre, en priorité, les contrôles et les modifications permettant de garantir la conformité, d’une part des SSC participant à la gestion des installations en cas de perte totale des alimentations électriques, d’autre part des SCC qui garantissent l’absence d’agressions induites qui rendraient inefficace la conduite des installations prévue dans ces situations. À ce titre, l’IRSN a noté que la robustesse des installations à l’égard de certaines agressions induites (explosion d’hydrogène notamment) repose sur le déploiement des référentiels associés, à ce stade, aux troisièmes visites décennales sur les paliers 900 et 1.300 MWe et à la première visite décennale sur le palier 1.450MWe.

5. LA ROBUSTESSE DES INSTALLATIONS POUR DES ALEAS DE NIVEAU SUPERIEUR A CEUX RETENUS POUR LEUR DIMENSIONNEMENT
     Concernant l’aléa sismique, l’IRSN constate que les connaissances sismiques évoluent rapidement (révision des estimations des caractéristiques des séismes historiques tels que celui de Bâle en 1356 ou de Lambesc en 1909, connaissance des failles actives, amélioration des méthodes de calcul, etc.). À la lumière de l’amélioration des méthodes et des connaissances, du retour d’expérience de l’application de la règle fondamentale de sûreté RFS 2001-01, et des conclusions du séminaire international organisé par l’ASN en 2009, l’IRSN considère d’une manière générale que trois axes d’amélioration de l’appréciation de l’aléa sismique peuvent être identifiés
     - l’amélioration continue des données de base (afin d’améliorer l’évaluation de l’aléa sismique et de réduire les incertitudes associées), 
     - l’intégration explicite des incertitudes dans le calcul de l’aléa sismique: à cet égard, l’IRSN préconise l’utilisation conjointe d’une approche déterministe et d’une approche probabiliste qui sont complémentaires, 
     - la prise en compte de la diversité des avis d’experts: les données géologiques et sismologiques peuvent conduire à de multiples interprétations; l’IRSN estime qu’il convient de faire peser les avis multiples dans le calcul de l’aléa sismique. 
     Ces aspects devraient être investigués pour quelques sites en priorité. 
     Pour des niveaux de séisme au-delà du référentiel, les exploitants ont présenté, en se fondant notamment sur les éléments actuellement disponibles en matière de sismologie et sur un «jugement d’ingénieur», des méthodes de calcul simplifiées et des résultats d’essais, des méthodologies visant à une évaluation de marges globales pour les ouvrages de génie civil et les systèmes et composants (SSC). Tout en soulignant la difficulté de mener à bien cet exercice dans les délais impartis, l’IRSN constate que les incertitudes, concernant la caractérisation des mouvements sismiques à retenir dans le cadre des ECS et le caractère simplifié des démarches proposées pour apprécier le comportement sismique des installations, ne permettent pas d’évaluer, avec un degré de confiance suffisant, la robustesse de chacune des installations.

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     Notamment, le caractère simplificateur des méthodes proposées n’autorise pas à considérer les valeurs des facteurs de marge globaux, mis en avant par les exploitants comme représentant de façon fiable la robustesse des installations en cas de séisme. Pour pouvoir juger de la robustesse effective, il aurait fallu pouvoir identifier les éléments les plus faibles qui tendent à limiter la robustesse de l’installation, ce qui n’était pas compatible avec les délais impartis aux ECS.
     De façon générale, même si les évaluations des exploitants laissent présager l’existence de marges, la prise en compte des incertitudes, dont celles relatives au niveau d’aléa sismique mises en évidence, et l’impossibilité de considérer que les marges identifiées par les exploitants puissent être uniformes à l’échelle des ouvrages, imposent d’effectuer des vérifications complémentaires pour s’assurer de l’aptitude des ouvrages de génie civil à contribuer à la disponibilité des SSC devant constituer le noyau dur ECS (protection, supportage des équipements, participation au confinement). 
     Au titre de la défense en profondeur, l’IRSN estime nécessaire de vérifier la robustesse des SSC contribuant à prévenir les situations de perte totale de source froide (station de pompage) ou d’alimentation électrique (locaux électriques, locaux des groupes électrogènes de secours...). 
     L’inondation peut résulter de phénomènes très divers; la prise en compte de cet aléa lors du dimensionnement est fondée sur l’identification de l’ensemble des sources d’inondation possibles. L’évaluation des conséquences au cas par cas permet alors de considérer que certaines situations sont couvertes par d’autres. Il existe deux types de phénomènes: l’un conduisant à des quantités d’eau importantes sur les sites (crues...), l’autre conduisant à des quantités plus faibles (pluies...) mais directement à proximité des bâtiments. Les protections adaptées vis-à-vis d’un type de phénomène ne sont pas nécessairement efficaces vis-à-vis de l’autre. 
     Compte tenu de la diversité des configurations de site et des conjonctions d’aléas possibles, ainsi que des délais impartis, l’IRSN considère que l’analyse de la robustesse d’une installation au-delà du dimensionnement peut être menée de façon pragmatique, en identifiant quelques aléas représentatifs des risques d’arrivée d’eau massive ou locale sur les sites et en appréciant la capacité du site à résister à des niveaux d’inondation supérieurs à ceux provoqués par les aléas de dimensionnement. Cette appréciation dans les ECS peut être menée en envisageant des scénarios d’aléas majorés (démarche retenue par EDF, l’ILL et AREVA pour le site du Tricastin) ou en valorisant des marges significatives vis-à-vis des aléas de dimensionnement (approche retenue par ailleurs). 
     Dans le premier cas, il est nécessaire de s’assurer que les scénarios majorés envisagés sont bien représentatifs et enveloppes puis d’étudier s’il existe des effets falaise pour ces scénarios majorés. Dans le second cas, il est nécessaire d’apprécier la suffisance de la marge en regard de la survenue d’un effet falaise (2). Dans les deux cas, l’objectif est d’identifier les mesures à mettre en œuvre pour améliorer la robustesse de l’installation au-delà du référentiel. Cette approche doit être complétée par la prise en compte des effets liés à l’inondation et des conditions météorologiques extrêmes souvent concomitantes avec les inondations. 
     Au cours de son évaluation, l’IRSN a souligné la nécessité d’approfondir certaines analyses des exploitants afin de conforter leurs conclusions et de définir les améliorations à mettre en œuvre. Dans la plupart des cas, les  exploitants ont présenté des compléments globalement satisfaisants. Cependant, concernant les risques liés aux pluies, l’IRSN considère que les propositions d’EDF relatives aux hypothèses retenues pour la caractérisation du phénomène et les propositions du CEA pour la prise en compte des conditions d’écoulement ne sont pas totalement satisfaisantes.
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     Par ailleurs, au titre de la défense en profondeur, l’IRSN a estimé nécessaire de renforcer dès à présent la prise en compte du risque d’inondation au-delà du référentiel actuel, par exemple par la rehausse de la protection volumétrique. Cette disposition permet en effet de renforcer la robustesse des installations pour éviter les situations de perte totale de source froide et de sources électriques, en cas d’inondation pouvant aller au-delà des aléas du référentiel, sans toutefois atteindre le niveau envisagé dans les ECS. 
     Le rapport traite aussi des risques d’agression des installations nucléaires par les effets induits par les agressions externes abordées dans le cadre des ECS sur des installations industrielles ou des voies de communication situées à proximité. L’IRSN souligne que les analyses des exploitants sont fondées sur les éléments en leur possession, puisqu’ils ne disposent pas de l’ensemble des informations nécessaires pour juger de la robustesse des installations industrielles externes au site à l’égard d’un séisme et d’une inondation. Il estime que les exploitants devraient: 
     - prendre en compte les phénomènes dangereux associés aux sources d’agression des installations industrielles de manière déterministe et évaluer leurs conséquences sur les INB, 
     - évaluer les conséquences sur les INB des agressions liées aux voies de communication, en tenant compte de l’état de leurs installations suite à un séisme ou une inondation. 
     Ces évaluations devront être menées sur certains sites tels que Gravelines, Saint Alban ou encore le site du Tricastin de façon prioritaire. Elles participeront à la définition des exigences à retenir sur les éléments participant au «noyau dur ECS», en particulier pour ce qui concerne les moyens de gestion de crise. 
     Enfin, l’IRSN a examiné la démarche de prise en compte d’événements ou d’effets induits dans les installations (incendie, explosion...) par des agressions naturelles d’un niveau supérieur à celui retenu dans leur référentiel de sûreté. 
     Il souligne qu’EDF n’a pas postulé d’incendie, ou d’explosion induits par un séisme. En outre, le niveau sismique retenu pour le dimensionnement de la sectorisation, des moyens de détection et de lutte contre l’incendie varie d’un palier à l’autre. L’IRSN estime qu’EDF devrait réaliser des études visant à justifier la robustesse de ses installations vis-à-vis d’un incendie (ou d’une explosion) induit par un séisme de niveau supérieur à celui retenu dans les référentiels de ses installations, et a fortiori l’absence d’effet falaise sur les SCC. 
     Il constate également que le CEA, AREVA et l’ILL ont examiné l’incendie ou l’explosion en tant qu’aggravant direct des effets d’un séisme ou d’une inondation et ont jugé que ces situations ne conduiraient pas à des effets falaise. 
     Toutefois, l’IRSN considère que les démonstrations devraient être complétées en examinant les risques de propagation d’un incendie ou d’explosion, initiés suite à un séisme, ou une inondation, pouvant affecter les SSC essentiels à la maîtrise des fonctions de sûreté.

6. LE COMPORTEMENT DES INSTALLATIONS EN CAS DE PERTE TOTALE DES SOURCES DE REFROIDISSEMENT OU DES SOURCES D’ENERGIE DE LONGUE DUREE AFFECTANT PLUSIEURS INSTALLATIONS D’UN MEME SITE REACTEURS EDF
     EDF a analysé des situations de perte de la source froide et de perte des alimentations électriques des réacteurs qui vont au-delà des situations étudiées dans le référentiel actuel, en considérant en particulier que les situations postulées sont supposées, d’une part, affecter tous les réacteurs d’un site et de façon durable, d’autre part, être éventuellement induites par un séisme ou une inondation externe, y compris d’un niveau supérieur à celui considéré dans le référentiel actuel. Pour ces situations, les rapports fournis par EDF montrent que certains scénarios peuvent conduire à un début de fusion du cœur dans un délai court (de quelques heures à une journée)

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     Ces scénarii nécessitent, selon l’IRSN, de prévoir des moyens supplémentaires sur les sites ainsi que des moyens de secours extérieurs. Il importe que ces moyens permettent en priorité d’éviter un accident grave avec fusion du cœur plutôt que de se limiter à gérer les conséquences d’un tel accident. 
     Sur la base de ce constat, EDF a proposé un certain nombre d’études et d’améliorations matérielles et procédurales en ce sens. Ces dispositions qui contribuent à éviter la fusion du cœur dans les situations postulées dans les ECS seront robustes à des niveaux d’agression supérieurs à ceux du référentiel (futur «noyau dur» à définir). L’IRSN estime cette démarche positive; toutefois, la suffisance, la définition précise et la planification des dispositions ainsi envisagées devront faire l’objet d’échanges ultérieurs avec EDF, afin de s’assurer que celles-ci apporteront bien la robustesse attendue dans des délais adaptés aux enjeux de sûreté. 
     Pour ce qui concerne plus particulièrement les piscines de désactivation de ses installations, EDF a examiné les conséquences d’une agression naturelle majeure sur les systèmes de refroidissement en examinant les conséquences de la perte de la source froide ou des alimentations électriques. Dans ces situations, EDF conclut, pour ce qui concerne l’évacuation de la puissance résiduelle du combustible, qu’un appoint en piscine doit être garanti dans la durée, afin de compenser l’effet de l’ébullition induite par la perte de refroidissement. Ceci est intégré au plan d’actions d’EDF. L’IRSN estime cependant que la démarche d’examen de la robustesse des installations demandées par les ECS doit également considérer, en cas de séisme de niveau supérieur à celui de dimensionnement, le risque de fuite des équipements pouvant mettre en cause l’inventaire en eau dans les piscines des bâtiments du réacteur et de stockage du combustible. En effet, ces situations peuvent conduire à un effet falaise compte tenu, notamment de la possibilité de diminution significative de l’inventaire en eau présent, de la réduction induite des délais avant découvrement du combustible et des contraintes particulières associées sur la gestion opérationnelle des accidents. À cet égard, l’IRSN souligne que, sur les réacteurs en exploitation ou en cours de construction, la limitation des conséquences d’un accident grave en piscine serait très difficile. Dans le cadre des ECS, l’IRSN estime ainsi nécessaire la mise en œuvre de contrôles et modifications des SSC visant à éviter tout dénoyage des assemblages combustibles dans une situation accidentelle où une fuite interviendrait sur les équipements constitutifs des piscines et sur les circuits qui y sont reliés. 
     Concernant la gestion des accidents graves sur les REP, EDF a: 
     - explicité  les situations considérées dans le référentiel existant (risques considérés, parades existantes ou en cours de déploiement), 
     - évalué la robustesse des réacteurs en exploitation pour les situations d’accident grave considérées (enceintes de confinement de grande dimension, présence de recombineurs d’hydrogène, d’un système d’éventage-filtration pour les réacteurs en exploitation...), 
     - proposé des dispositions complémentaires pour prévenir ou limiter les conséquences d’un accident grave qui serait induit par un des scénarios extrêmes considéré dans les ECS, 
     - proposé la réalisation d’études complémentaires pour mieux cerner certains risques ou pour apprécier la robustesse de certains équipements au-delà de leurs hypothèses de dimensionnement.
     L’IRSN rappelle que les dispositions implémentées à ce jour sur les réacteurs en exploitation ou prévues à la conception sur le réacteur EPR sont le résultat des efforts accomplis depuis l’accident de Three Mile Island. L’IRSN rappelle par ailleurs que la limitation des rejets radioactifs dans l’environnement pour tout accident (avec ou sans fusion du cœur) est un objectif majeur du processus d’amélioration continue de la sûreté des installations. Ce processus s’organise en France autour, en particulier, des réexamens décennaux visant à rehausser périodiquement les exigences du référentiel de sûreté des installations. 
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     Dans le contexte des ECS, EDF a examiné des situations pour lesquelles les principaux systèmes de sauvegarde seraient durablement en défaut et l’enjeu principal devient la limitation des rejets à l’extérieur des installations et la maîtrise du site en «situation précaire» (du fait de l’agression initiale et d’éventuelles conditions radiologiques dégradées). L’IRSN a souligné la pertinence des propositions d’amélioration faites par EDF pour ces situations extrêmes; ces propositions restent néanmoins à consolider. L’IRSN a de plus formulé des demandes additionnelles concernant notamment: 
     - l’identification des scénarios à risque notamment pour les états à l’arrêt des installations, les matériels permettant, dans ces situations, de limiter les conséquences d’un accident de fusion du cœur, 
     - l’anticipation de certaines modifications programmées lors des visites décennales des réacteurs en exploitation, 
     - le renforcement des dispositions de conduite (moyens humains et matériels) pour pouvoir gérer ces situations extrêmes sur l’ensemble des réacteurs d’un même site, y compris si la situation radiologique est dégradée. 
     Ces dispositions prévues pour éviter les rejets importants dans l’environnement dans les situations postulées dans les ECS seront robustes à des niveaux d’agression supérieurs à ceux du référentiel. De manière générale, l’IRSN considère que l’ensemble des propositions d’EDF, complété par les recommandations de l’IRSN relatives à la gestion d’un accident grave, est de nature à renforcer significativement le niveau de sûreté des installations existantes. 
     En conclusion, l’IRSN estime que la démarche d’EDF visant à intégrer les dispositions de prévention de la fusion du cœur et de limitation des rejets dans l’environnement dans la démarche «noyau dur ECS» contribuera de manière importante à l’amélioration des performances de sûreté. La suffisance, la définition précise et la planification des dispositions ainsi envisagées devront faire l’objet d’échanges ultérieurs avec EDF, afin de s’assurer que celles-ci apporteront bien la robustesse attendue dans des délais adaptés aux enjeux de sûreté. L’IRSN considère qu’il conviendra d’engager, à la lumière du retour d’expérience de l’accident de Fukushima, des réflexions sur l’intégration de ces situations dans le référentiel. 

Le cas de l’EPR
     Le réacteur EPR a bénéficié, dès sa conception, de dispositions supplémentaires par rapport aux réacteurs en exploitation pour prévenir la survenue de situations de perte totale des sources froides (source froide principale et source froide diversifiée) et des sources électriques (6 groupes électrogènes de secours contre 2 sur les réacteurs du parc) ainsi que pour la gestion d’un accident grave. Il est également mieux protégé vis-à-vis des agressions externes que sont le séisme (radier commun à l’ensemble de l’îlot nucléaire par exemple) et l’inondation (calage de la plateforme prenant en compte l’évolution prévisible du niveau de la mer jusqu’en 2080). EDF a toutefois proposé des améliorations ponctuelles de la conception de ce réacteur pour limiter le risque d’accident en cas de situations extrêmes et définir un «noyau dur» au même titre que pour les réacteurs existants.

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RHF (ILL)
     L’ILL estime que la perte généralisée des alimentations électriques cumulée à la perte de la source froide ne peut pas mener à court terme à des situations redoutées (accident de réactivité de type BORAX ou fusion à l’air de l’élément combustible en pile), compte tenu que les délais disponibles pour intervenir sont supérieurs à 4 ou 5 jours. L’analyse effectuée par l’ILL conduit à retenir que seuls les scénarios de brèche sur le circuit primaire, de rupture de canaux expérimentaux ou de perte d’étanchéité du canal d’entreposage sont susceptibles d’initier les situations redoutées. 
     En l’état actuel, l’installation n’apparaît pas correctement protégée pour les séismes relevant du référentiel de sûreté vis-à-vis du risque de fusion à l’air dans le bloc pile. En outre, le circuit mis à contribution pour limiter les rejets dans l’environnement dans cette situation présente également, dans sa configuration actuelle, des faiblesses pour ce niveau de séisme. Enfin, en cas de rupture de barrages induite par un séisme, le poste de repli de l’installation serait noyé et les alimentations électriques seraient perdues; la surveillance et le pilotage des moyens actifs de mitigation seraient inopérants. La maîtrise de la situation accidentelle deviendrait donc très délicate. 
     Suite à son analyse, l’ILL s’est engagé à ne redémarrer le réacteur à l’issue de l’arrêt d’hiver 2011-2012 qu’après avoir effectué des renforcements visant à améliorer la gestion de ces situations. En complément, afin de renforcer la robustesse de l’installation à des aléas naturels extrêmes, l’ILL a présenté un programme d’amélioration dont la mise en œuvre s’étalera jusqu’en 2014, pour renforcer sa capacité à gérer un accident grave et pour améliorer la robustesse de l’installation face à un séisme cumulé à une inondation correspondant à la rupture en cascade de quatre barrages situés sur le Drac.

INSTALLATIONS DU CEA
     Concernant la centrale Phénix de Marcoule, les risques majeurs sont liés en particulier à la présence de sodium pouvant conduire à des feux dégageant des aérosols toxiques (réaction sodium-air) ou à des réactions sodium-eau avec dégagement d’hydrogène. Étant donné que la limitation des conséquences des réactions sodium-eau de grande ampleur est difficilement envisageable, ce risque doit pouvoir être écarté. En conséquence, le CEA s’est engagé à analyser plus finement le comportement des équipements mécaniques présentant les marges les plus faibles en cas de séisme. Par ailleurs, concernant le risque d’inondation, le CEA s’est engagé à présenter les dispositions de protection retenues pour les locaux sensibles de l’installation, ainsi que l’échéancier de mise en œuvre associé. Concernant les risques liés au sodium, le CEA envisage à ce stade d’utiliser des moyens complémentaires d’extinction des feux de sodium qu’il s’est engagé à définir plus précisément. Concernant le réacteur OSIRIS du CEA-Saclay, le CEA considère qu’en cas de perte généralisée des alimentations électriques et d’appoint d’eau, le délai de grâce est très important avant un risque de fusion du cœur (plusieurs dizaines de jours) et est compatible avec une injection d’eau provenant d’une source extérieure à l’installation.

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     Pour ce qui concerne le risque sismique, le CEA a identifié des améliorations pour conforter le délai de grâce annoncé. Le risque d’inondation n’est pas de nature à affecter les équipements indispensables à la gestion de ces situations.
     L’ECS du réacteur RJH du CEA-Cadarache, en cours de construction, tient compte des dernières évolutions de l’installation. Les situations redoutées identifiées par le CEA sont la fusion à l’air et la fusion sous eau, cumulée à une dégradation de l’enceinte de confinement qui conduiraient à un impact radiologique. Le CEA postule que ces situations redoutées seraient initiées par une perte des systèmes de refroidissement du cœur ou des piscines.
     L’IRSN estime que les propositions du CEA de disposer d’une réserve d’eau interne à l’installation, ainsi que d’étendre le rayon d’action du circuit de recirculation ultime doivent être mises en œuvre. À ce stade, l’IRSN relève que le CEA n’a pas défini les équipements à valoriser dans la phase «court-terme» de l’accident et qui constitueront le «noyau dur». Vis-à-vis du risque sismique, le CEA s’engage à évaluer la robustesse au séisme du bloc-pile et du circuit primaire, ce qui est satisfaisant.
     Enfin, le CEA a présenté les dispositions retenues pour gérer un accident grave de fusion du cœur. Le cœur du réacteur MASURCA du CEA-Cadarache a été déchargé en 2007; les matières fissiles se trouvent actuellement dans le bâtiment de stockage et de manutention (BSM). Compte tenu de l’état actuel de l’installation, le principal risque identifié par le CEA est l’effondrement partiel ou total du BSM à la suite d’un séisme. Étant donné le niveau de séisme pour lequel le confinement de la matière ne serait plus assuré, le CEA a décidé de construire un nouveau bâtiment de stockage et de transférer la matière fissile dans l’attente de ce nouveau stockage (prévu fin 2017). Dans l’attente de ce transfert, il s’est engagé à mettre en œuvre des dispositions palliatives pour limiter en cas de séisme la dissémination des matières, ainsi que les risques de criticité. 
     L’Atelier de Technologie du Plutonium (ATPu) du CEA-Cadarache, à l’arrêt depuis 2003, est en cours de démantèlement. Or, l’ATPu ne résiste pas au séisme de dimensionnement du site. Cette installation étant en cours de démantèlement, le CEA considère que des renforcements sismiques ne sont pas envisageables. Aussi, l’IRSN considère que la diminution de l’encours en plutonium est la première disposition à mettre en œuvre afin de limiter les conséquences de la ruine du bâtiment. À la demande de l’IRSN, le CEA s’est engagé sur un certain nombre d’actions concernant le suivi des matières encore présentes dans l’installation, l’identification des locaux les plus sensibles en termes de dissémination et de risques de criticité et d’incendie en cas de séisme, ainsi que les moyens susceptibles de réduire les conséquences sur l’environnement.

LABORATOIRES ET USINES D’AREVA
     Même si la démarche d’AREVA appelle des réserves, notamment sur le nombre de configurations étudiées et sur l’identification, fondée essentiellement sur le jugement d’ingénieur, des différents niveaux d’aléas entraînant la perte des fonctions de sûreté, AREVA propose pour les sites des améliorations, structurelles ou organisationnelles, qui devraient renforcer à terme la robustesse des installations et des moyens de gestion de crise. Aussi, l’IRSN estime que la démarche d’AREVA, centrée sur l’analyse des situations redoutées conduisant à des conséquences importantes à court terme, constitue une première étape satisfaisante dans la prise en compte du retour d’expérience de l’accident de Fukushima. Cependant, un élargissement de l’analyse, en tenant compte des recommandations détaillées ci-après, apparaît nécessaire à l’IRSN en appui notamment aux études sur la gestion de crise qu’AREVA s’est engagé à réaliser d’ici mi-2012 pour l’ensemble des établissements:
     - le prolongement de l’étude à d’autres situations redoutées, aux SSC clés et «noyau dur ECS» associés, 
-la prise en compte dans l’analyse d’aggravants (incendie, explosion, accident de criticité...), en intégrant la défaillance des dispositions visant à les prévenir,
     - l’étude de la suffisance et de la robustesse des moyens de diagnostic des installations (état des procédés et installations avant et après aléas),
     - des moyens de détection d’un événement ou d’un sur-accident et des moyens de limitation des conséquences, L’IRSN estime que les propositions du CEA de disposer d’une réserve d’eau interne à l’installation, ainsi que d’étendre le rayon d’action du circuit de recirculation ultime doivent être mises en œuvre. À ce stade, l’IRSN relève que le CEA n’a pas défini les équipements à valoriser dans la phase «court-terme» de l’accident et qui constitueront le «noyau dur». Vis-à-vis du risque sismique, le CEA s’engage à évaluer la robustesse au séisme du bloc-pile et du circuit primaire, ce qui est satisfaisant.
     Enfin, le CEA a présenté les dispositions retenues pour gérer un accident grave de fusion du cœur. Le cœur du réacteur MASURCA du CEA-Cadarache a été déchargé en 2007; les matières fissiles se trouvent actuellement dans le bâtiment de stockage et de manutention (BSM). Compte tenu de l’état actuel de l’installation, le principal risque identifié par le CEA est l’effondrement partiel ou total du BSM à la suite d’un séisme.

suite:
Étant donné le niveau de séisme pour lequel le confinement de la matière ne serait plus assuré, le CEA a décidé de construire un nouveau bâtiment de stockage et de transférer la matière fissile dans l’attente de ce nouveau stockage (prévu fin 2017). Dans l’attente de ce transfert, il s’est engagé à mettre en œuvre des dispositions palliatives pour limiter en cas de séisme la dissémination des matières, ainsi que les risques de criticité.

8. RECOURS A LA SOUS-TRAITANCE 
     Le recours à la sous-traitance, composante de la politique industrielle des exploitants, constitue un sujet complexe à la croisée de contraintes multiples, d’ordre réglementaire, socio-économique et sociotechnique, qui soulève des questions sociétales. L’IRSN a eu pour objectif d’évaluer les impacts concrets du recours à la sous-traitance sur la sûreté des installations et la radioprotection des travailleurs et d’examiner la pertinence des dispositions mises en œuvre par les exploitants pour organiser et maîtriser les activités sous-traitées. L’IRSN estime que l’examen des dossiers transmis dans le cadre des ECS n’est qu’une première étape et que l’identification de la nature et l’ampleur des effets du recours à la sous-traitance sur la sûreté et la radioprotection constitue un enjeu fort qui nécessitera des investigations complémentaires.

9. CONCLUSION 
     Les évaluations complémentaires n’ont pas visé la complétude de l’analyse en termes de réponse au cahier des charges de l’ASN, mais se sont plutôt intéressées à faire ressortir les points faibles majeurs des installations qu’il conviendra de traiter au plus tôt. À ce titre, l’IRSN souligne que des éléments ou des démonstrations qui ont jugés recevables et acceptables à ce stade pourront nécessiter des analyses ultérieures plus approfondies. 
     Aussi, l’IRSN considère que l’objectif de son analyse consiste à identifier, dans un premier temps, les principaux éléments participant à la robustesse des installations (à l’égard des situations considérées dans le cahier des charges de l’ASN) et de définir les priorités en termes de modifications ou d’approfondissements nécessaires ou souhaitables en termes d’études, voire de démonstration de sûreté; ceci passe, entre autres, par la recherche des scénarios ou phénomènes susceptibles de conduire à des situations redoutées, pour les situations extrêmes spécifiées dans le cahier des charges de l’ASN. Ces principaux éléments d’améliorations (modification des installations ou approfondissements d’études) sont notamment identifiés sur la base de l’existence ou non de marges, identifiées par jugement d’ingénieur, permettant de garantir le caractère opérationnel des systèmes, structures et composants (SSC) pour les niveaux d’aléas envisagés, de la pertinence des scénarios considérés ou de la mise en évidence de scénarios insuffisamment traités à ce jour (prise en compte de certaines configurations particulières de l’installation, cumul de situations accidentelles sur plusieurs installations, prise en compte de l’ambiance radiologique pour la réalisation des actions de terrain...). 
     Huit mois après la catastrophe de Fukushima, les évaluations complémentaires de sûreté, bien que menées dans des délais extrêmement contraints, ont permis:
     - d’évaluer la conformité des installations aux exigences qui leur sont applicables au regard des agressions externes de type séisme et inondation ainsi que des pertes de sources de refroidissement et d’énergie et d’identifier un certain nombre d’actions correctives prioritaires; cet examen sera complété, pour les installations ayant fait l’objet d’une ECS en 2011, pour la fin de l’année 2012;
     - de définir une démarche innovante, découplée de la démarche de sûreté habituelle (réexamens de sûreté),  visant à compléter les dispositions de sûreté existantes et à conférer aux installations une meilleure robustesse pour faire face à des situations non considérées jusqu’à présent dans les référentiels de sûreté susceptibles d’engendrer des effets falaise, par la définition d’un «noyau dur» assurant, même en cas de survenue d’aléas bien au-delà du dimensionnement de l’ensemble de l’installation, une protection des structures, systèmes et composants jouant un rôle essentiel dans la maîtrise des fonctions de sûreté;
     - d’identifier d’ores et déjà des limites dans les référentiels de sûreté actuels qui devront être revus à court terme, sans attendre les réexamens décennaux (règles retenues pour la détermination du niveau d’aléa sismique et inondation, protection contre l’incendie, agressions externes et combinaison d’agressions à considérer, hypothèses retenues pour définir les dispositions de gestion de pertes de refroidissement et de sources électriques...). 
     Compte tenu des échanges tenus par ailleurs, dans le cadre des réexamens périodiques mais également, pour les REP, dans le cadre des discussions sur l’extension de la durée de fonctionnement des installations au-delà de 40 ans, les exploitants ont été en mesure de proposer des améliorations concrètes de leurs installations qui, du point de vue de l’IRSN, amélioreront de manière significative, la sûreté des installations nucléaires françaises. 
     L’IRSN salue à cet égard la qualité des analyses conduites par les exploitants dans un délai très court, qui conduisent à un certain nombre de constats et de propositions concrètes présentées de manière synthétique dans le rapport.

p.19-20

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