BE France - Les activités de l'INES s'articulent
aujourd'hui autour de trois plates-formes. Quelle est la mission de chacune
d'entre elles?
Jean Therme - Il existe en effet trois plates-formes,
baptisées "INES Education", "INES RDI" et "INES Démonstration",
qui travaillent en synergie. La première d'entre elles, INES Education,
qui prend progressivement son rythme de croisière, recouvre la formation
et l'information. A mon sens, elle est essentielle puisque c'est grâce
à elle qu'il sera possible de déployer dans la société
la totalité des solutions technologiques et industrielles.
La seconde, dont l'appellation "RDI"
associe à la fois "R&D" et "Innovation industrielle", va permettre
à cet institut de faire de la science et de développer des
technologies tout en initiant des partenariats entre le public et le privé
de manière à réaliser des transferts en direction
des industriels, voire à créer de nouvelles entreprises dans
le secteur de l'énergie solaire.
Grâce à la troisième
plate-forme, celle dite de "démonstration", nous allons pouvoir
mettre en situation réelle des résultats de la recherche,
mais aussi des outils pédagogiques, de manière à ce
que l'on puisse tester leurs performances en environnement réel.
Nous pourrons également tester la façon dont les utilisateurs
accepteront ou pas ces technologies, voire les faire évoluer. Il
faut préciser que le développement de cette plate-forme suit
celui de la plate-forme RDI qui nécessite elle-même la mise
à disposition de bâtiments par le Conseil Général
de la Savoie et la mise en place des infrastructures de recherche nécessaires
par la Région Rhônes-Alpes.
BE France - Quelles sont les priorités de l'INES dans le domaine
du photovoltaïque?
Jean Therme - La première est liée à la
pénurie de silicium à destination du photovoltaïque.
C'est un silicium qui est issu des déchets du silicium utilisé
pour la microélectronique. Or ce dernier marché ne croit
pas à la vitesse de celui du photovoltaïque. Dans ce contexte,
nous avons développé un deuxième axe de production
du silicium à partir du silicium dit "métallurgique" que
l'on trouve dans la pâte de silicone ou les alliages à base
d'aluminium. Il en existe une quantité illimitée à
l'échelle du photovoltaïque qu'il suffit de purifier pour obtenir
de bonnes performances des cellules photovoltaïques. Un pilote industriel,
utilisant un procédé très innovant qui permet d'enlever
certaines impuretés avec une torche plasma, a donc été
mis en place. Dès les premiers essais, nous avons obtenu des rendements
de 14%, seuil à partir duquel ce procédé devient économiquement
rentable et performant sur le marché. Rappelons que les meilleures
cellules photovoltaïques sur polycristallin disponibles sur le marché
ont un rendement de 16%.
Une fois fabriqués, ces cellules
et ces modules doivent être testés sur des toits. Aussi avons-nous
transféré à l'INES nos activités de Cadarache.
Les chercheurs disposent ainsi de bancs tests de modules photovoltaïques,
en ensoleillement réel, qui leur permettent de tester leurs performances
mais aussi leur fiabilité. Parfois, le photovoltaïque n'est
pas couplé au réseau mais utilisé en mode autonome.
C'est la raison pour laquelle les équipes du CEA de Cadarache spécialisées
dans le domaine des batteries ont aussi été transférées
à l'INES, notre objectif étant de constituer un laboratoire
de référence européen dans ce domaine. |
Dans un premier temps, celui-ci s'intéressera
essentiellement au stockage électrique de l'énergie photovoltaïque.
Mais à terme, ce laboratoire travaillera également sur les
applications transports. Nous croyons beaucoup en effet au couplage entre
l'habitat et les transports.
Enfin, l'activité sur les cellules
solaires de génération future basée jusqu'à
présent au centre de Saclay du CEA a été transférée
aussi à Chambéry. Il s'agit de cellules organiques qui se
présenteront sous la forme d'un revêtement plastique pouvant
être installé sur toutes les vitres afin de récupérer
l'énergie solaire. A plus long terme, elle pourrait même prendre
l'aspect d'une peinture qu'il suffira alors d'étendre sur un mur
ou sur un toit. Aujourd'hui, les rendements que nous avons obtenus, de
l'ordre de 3 à 4%, représentent les meilleurs résultats
au monde. Cela dit, cette technologie n'apparaîtra pas sur le marché
avant dix ou quinze ans.
BE France - Comment allez-vous tester les performances de ces technologies,
qu'il s'agisse du solaire photovoltaïque ou du solaire thermique,
quand elles sont introduites au sein de l'habitat?
Jean Therme - Là encore, nous allons créer une
plate-forme de test et de démonstration qui regroupe de petites
maisons individuelles que nous instrumentons. Les deux premières
représentent les référentiels européens dans
ce domaine, c'est-à-dire l'allemand et le suisse. Notre objectif
est de les adapter au confort d'été. En effet, ce sont des
maisons à très basse consommation d'énergie. Or leur
isolement trop parfait fait qu'il est difficile de gérer leur température
intérieure sous certaines latitudes européennes.
L'INES disposera également d'une
maison dite "très hautes technologies" dans laquelle seront mis
en place les meilleurs outils technologiques, les solutions matériaux
les plus performantes, tout comme les solutions de gestion d'énergie.
D'autres maisons, celles-ci de démonstration, réalisées
en collaboration avec des industriels, permettront de tester leurs solutions
technologiques. Par la suite, nous travaillerons également sur le
tertiaire où nous souhaitons apporter de véritables solutions.
Enfin, cet établissement va mener
des recherches, d'une part sur la rénovation de l'habitat, d'autre
part sur le couplage entre l'habitat et le transport. Il est en effet essentiel
de réfléchir à la manière de produire l'énergie
nécessaire au mode de transport de chacun et à la façon
d'utiliser ce dernier comme moyen de stockage ou source d'énergie
dans une maison. C'est un axe de recherche très innovant qui passe
par le vecteur électricité mais aussi l'hydrogène.
Or ces solutions, nous les testerons sur plusieurs démonstrateurs
de l'INES.
Pour en savoir plus, contacts:
- INES: secrétariat général tél. +33(0)4
79 26 55 90 - email: info@ines-solaire.fr - http://www.ines-solaire.fr
- CEA - Jean Therme, directeur de la recherche technologique: tél.
+33(0)4 38 78 35 19 - email: jean.therme@cea.fr
Rédacteur:
ADIT - Jean-François Desessard - email: jfd@adit.fr
Origine:
BE France numéro 193 (6/06/2007) - ADIT |
Le CEA participe au développement de l'INES
thttp://www.enviro2b.com
Fortement impliqué dans les recherches
sur l'énergie solaire photovoltaïque, le Commissariat à
l'Energie Atomique (CEA) participe au développement de l'Institut
National de l'Energie Solaire (INES), à Chambéry. Il en est
le principal contributeur pour les activités de recherche, aux côtés
du CNRS, du CSTB et de l'Université de Savoie.
A l'invitation du Conseil général
de la Savoie, le Premier ministre François Fillon a visité
le 9 novembre l'INES. Le Premier ministre a dévoilé le projet
du futur bâtiment principal de l'institut, dont l'ensemble des besoins
énergétiques seront assurés par des énergies
renouvelables.
Créé en 2005 à l'initiative
de la région Rhône-Alpes et du département de la Savoie,
l'INES regroupe les principaux acteurs français de la recherche
et de l'industrie de la filière énergétique solaire.
Deux thématiques de recherche sont
menées à l'INES:
- l'énergie solaire, thermique et photovoltaïque;
- la gestion de l'énergie dans le bâtiment.
La plateforme dédiée à
la recherche vise au développement de technologies et de produits
innovants tout en répondant aux enjeux de la filière : baisse
des coûts, diversification de l'approvisionnement en silicium, amélioration
de l'intégration des technologies au bâti.
Doublement des effectifs d'ici à 2009
65 chercheurs du CEA travaillent aujourd'hui
à l'INES; ils seront le double d'ici à 2009. Le CEA a transféré
à Chambéry plusieurs de ses programmes autrefois menés
sur ses centres de Cadarache, Grenoble et Saclay:
- développement de cellules solaires;
- stockage électrochimique de l'énergie;
- systèmes solaires et gestion de l'énergie dans le bâtiment.
Par ailleurs, le financement des équipes
de recherche de l'INES et de leur fonctionnement représente aujourd'hui
quelques 10,5 M€, dont 10 M€ proviennent du CEA. Le CEA apportera
15 M€ supplémentaires sur 2007 et 2008 pour poursuivre l'équipement
des laboratoires.
L'implication du CEA dans l'INES participe
à son objectif de développement des technologies des énergies
non émettrices de gaz à effet de serre, en soutien à
l'industrie française et européenne. Les recherches sur l'énergie
solaire prennent place aux côtés de celles développées
pour le nucléaire, la filière hydrogène et les biocarburants
de deuxième génération. |