30/04/2011
Pour Bernard Laponche, Docteur ès sciences en physique des réacteurs nucléaires, expert en politiques de l'énergie, il faut tirer les conséquences de la catastrophe de Fukushima. Le nucléaire, tel qu'il a été développé depuis la découverte de la fission, comme celui que l'on nous promet doit être abandonné. Du point de vue énergétique,
un
réacteur nucléaire est comparable à une chaudière
classique. Au lieu d'être produite par la combustion du charbon,
la chaleur, ensuite transformée en électricité, y
est produite par la fission de noyaux d'uranium (et de plutonium produit
dans le réacteur). Les fragments issus de la fission et les transuraniens
sont des produits radioactifs extrêmement dangereux. Des dispositifs
de protection considérables sont nécessaires pour éviter
qu'ils ne s'échappent du réacteur: gaines des combustibles,
cuve du réacteur, enceinte de confinement, systèmes de sécurité...
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Les causes possibles sont multiples: rupture de la cuve ou du circuit de refroidissement, dysfonctionnement de vannes, perte du réseau électrique et non-fonctionnement des diesels de secours, séisme, inondation noyant les systèmes d'alimentation électrique, erreurs dans la conduite du réacteur, acte de sabotage ou de piraterie informatique déréglant le système de contrôle commande (le cerveau du réacteur). Chaque type de réacteur peut avoir des «faiblesses» différentes: par suite d'une expérience ratée, un accident de criticité (emballement de la réaction en chaîne) s'est produit à Tchernobyl en 1986. La confiance en l'accumulation des «barrières» ou des systèmes de secours se heurte à ce que l'on reconnaît aujourd'hui: la possibilité de l'accident grave. La mesure des conséquences d'un tel accident nous est donnée par ceux de Tchernobyl et de Fukushima dont la caractéristique est qu'ils se perpétuent dans l'espace et dans le temps, sans que l'on puisse véritablement dire un jour - sinon très lointain - que «l'accident est terminé.» Il faut en tirer les conséquences. Le nucléaire, tel qu'il a été développé depuis la découverte de la fission, comme celui que l'on nous promet (une «génération 4» basée sur l'utilisation banalisée du plutonium, le corps le plus dangereux que l'on connaisse), doit être abandonné. Et ce n'est pas Iter, expérience de laboratoire pharaonique d'essai de « maîtrise » de la fusion et dont le physicien Pierre-Gilles de Gennes disait que c'était justement ce qu'il ne fallait pas faire, qui peut nous donner quelque espoir. Comme on l'a fait après une vingtaine d'années de fonctionnement pour les réacteurs à uranium naturel, graphite, gaz construits en France dans les années 1960, il va falloir arrêter définitivement les réacteurs actuels à uranium enrichi et eau ordinaire sous pression de deuxième génération au bout d'une trentaine d'années de fonctionnement et ne pas construire le réacteur EPR qui n'en est que le dernier modèle et qui présente les mêmes défauts intrinsèques. Le XXIe siècle a les moyens de se passer de ce nucléaire-là. Surtout lorsqu'il est appelé à se développer dans un univers concurrentiel. La sécurité a ses contraintes que la compétition ignore parfois. Mais rien n'empêche de penser que des savants pourraient un jour découvrir une façon moins violente d'utiliser l'énergie nucléaire. |