Des soldats ayant pris part à des essais
nucléaires poursuivent Ottawa
SASKATOON — Des soldats canadiens qui ont pris part à des essais
d'armes nucléaires durant la Guerre froide ont déposé
une poursuite en recours collectif contre le gouvernement fédéral.
La poursuite allègue qu'Ottawa était
au courant des risques pour la santé des participants quand il a
ordonné à des soldats canadiens de prendre part à
ces essais. Elle soutient aussi que le gouvernement n'a pas fait ce qu'il
fallait pour protéger les soldats.
Environ 700 militaires canadiens ont participé
à près de 30 essais d'armes nucléaires aux Etats-Unis
et dans le Pacifique Sud entre 1946 et 1963. Les tests avaient été
commandités par les Etats-Unis et le Royaume-Uni.
L'automne dernier, Ottawa a annoncé
le versement de 24.000 $ en compensations aux "vétérans du
nucléaire".
Mais selon l'avocat Tony Merchant, de Regina,
ce ne sont pas tous les soldats qui sont admissibles à ce règlement,
et le montant n'est tout simplement pas suffisant.
"Si vous avez le cancer, alors 24.000 $
est une somme dérisoire, a fait valoir Me Merchant. Ces soldats
ont servi de cobayes."
En 1990, le gouvernement américain
a offert 75.000 $ US aux soldats qui ont pris part aux essais. Me Merchant
soutient que cela équivaut à environ 200.000 $ en dollars
canadiens aujourd'hui.
Un vétéran âgé
de 72 ans, George Clarke, qui est cité dans la poursuite, a soutenu
qu'environ une douzaine de confrères sont morts du cancer et d'autres
maladies qui pourraient être reliées aux émissions
radioactives.
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Plus de 13.000 Américains morts des
suites des essais
Trois experts du National Cancer Institute
ont publié des estimations relatives aux cancers provoqués
par les tests nucléaires atmosphériques, rapporte Philippe
Jamet, de l'ambassade de France aux Etats-Unis, dans un bulletin de 2006.
«Selon les auteurs, entre 13.695 et 16.390 Américains sont
morts des suites de ces essais. Ils estiment que 49.000 cas de cancers
de la thyroïde liés à l'ingestion d'iode 131 issus des
retombées atmosphériques sont susceptibles de se déclarer
chez des sujets âgés de moins de 20 ans entre 1951 et 1957.
Par comparaison, le nombre de cancers de la thyroïde d'origine non
nucléaire s'établirait à 400.000 pour cette tranche
d'âge. Les cancers causés par les rayonnements (gamma) sont
estimés à 22.000, dont la moitié fatals. 1.800 morts
par leucémie pourraient être attribuées aux essais
nucléaires.»
A l'étranger,
une longueur d'avance
Les Etats-Unis, la Grande-Bretagne
ou encore l'Australie ont déjà une longueur d'avance
en terme de reconnaissance. Depuis la fin des années 1950, Les Etats-Unis
ont mis en place un suivi médical spécifique et ont créé
un fonds d'indemnisation pour les populations des îles Marshall.
En 1988, le Sénat a adopté une loi d'indemnisation pour les
vétérans malades ayant été exposés aux
radiations, en établissant une présomption d'un lien avec
le service. Vingt-neuf maladies cancéreuses ont été
recensées.
En Nouvelle-Zélande, un système
de prise en charge des vétérans et de leurs descendants a
également été mis en place.
En Australie, le gouvernement a adopté
en juin 2006, une loi d'indemnisation. Il avait préalablement publié
la liste nominative des personnes affectées aux essais britanniques
sur son territoire (environ 16.500).
Au Canada, le gouvernement canadien
vient de créer, le 2 septembre 2008, un fonds d'indemnisation de
22,4 millions de dollars pour le millier de vétérans canadiens
exposés dans les années 50 aux armes atomiques dans le désert
du Nevada.
En Grande-Bretagne, le gouvernement
a accordé en février dernier le financement d'une étude
radio-biologique indépendante sur la santé des vétérans
anglais. |