Pour la troisième fois en quelques
mois, le ministère de la Défense dépêchait à
Tahiti son «Délégué à la sûreté
nucléaire de Défense», M. Jurien de la Gravière.
En mai, le Délégué apportait des «documents»
destinés selon lui à «faire l'histoire des essais aériens
de 1966 à 1974»
En fait d'informations, les Polynésiens ont appris avec plus de détails ce que les Armées ne pouvaient plus cacher. Les témoignages, les documents photographiques et le rapport de la Commission d'enquête étaient si précis qu'il était impossible de nier tout en bloc. · On connaît maintenant les sites d'immersion de déchets radioactifs et les quantités rejétées au large de Moruroa et de Hao entre 1966 et 1982. · On a des indications sur les dates des l96 retombées radioactives mesurées sur des îles habitées de l'ensemble de la Polynésie entre 1966 et 1974. · On a même des «re-calculs» d'impacts dosimétriques de retombées sur Mangareva en 1966, sur Tureia en 1971 et sur Tahiti en1974. Mais ces aveux demandent absolution pour des «péchés» aussi véniels. M. Jurien de la Gravière affirme en effet qu'il s'agit de «retombées très faibles ou sans signification» et que «très peu de Polynésiens, sinon aucun, ont pu recevoir ces doses»... |
Quand les Polynésiens apprennent que le petit
atoll de Tureia a été «gratifié» de 33
retombées ou Tahiti de 23 de ces retombées, ils sont plutôt
inquiets et ne s'étonnent plus de la recrudescence des cancers de
la thyroïde et autres qui affectent de nombreuses familles.
Quand les Polynésiens apprennent que les déchets radioactifs ont été rejetés dans leur océan, malgré la Convention de Londres qui interdisait une telle pratique, pour la seule raison que la France avait ratifié cette convention en 1977 si cela «ne contrevenait pas aux intérêts de la défense nationale», cela les scandalise tout de même et cela les inquiète. Le Conseil d'orientation sur le suivi des essais nucléaire, organe du gouvernement polynésien, a donc voulu taper le poing sur la table devant tant de mépris et de désinformation. Assez de tergiversations. Le ministère de la Défense qui clame se volonté de transparence doit ouvrir ses archives des essais aériens comme les Etats-Unis ont su le faire depuis plus de 10 ans. La destination des déchets radioactifs produits à Moruroa après 1982 doit être connue. La liste aes anciens travailleurs polynésiens - totalement ignorés par le Délégué - doit être publiée. Les sites militaires laissés dans un état environnemental déplorable doivent être nettoyés. Bruno Barrillot
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