L’ASN fait le point
sur la situation de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi,
les conséquences au Japon et la situation en France.
I. Situation de la centrale de Fukushima
La situation reste précaire. De nouvelles
défaillances de matériels ne sont pas à exclure et
les mesures publiées au cours du week-end des 26 et 27 mars confirment
un état très fortement dégradé des réacteurs
2 et 3, avec un endommagement des trois barrières
de confinement:
* l’eau présente dans le hall des turbines
a fait l’objet d’une analyse qui montre une très forte contamination,
conduisant à un débit d’équivalent de dose de 1.000
mSv par heure pour le réacteur n°2 et 750mSv par heure pour
le réacteur n°3. Pour rappel, la limite annuelle de dose pour
les travailleurs en situation d’accident nucléaire au Japon a été
relevée à 250mSv par an. Ces niveaux de dose rendent très
difficile toute intervention humaine dans cette partie du bâtiment.
Des opérations de pompage de l’eau fortement contaminée seraient
en cours;
* ces analyses, associées aux valeurs de
pression mesurées dans les cuves semblent permettre de conclure
à la perte d’étanchéité des cuves 2 et 3
ou de leurs circuits de connexion;
* les relevés de pression au sein des enceintes
semblent permettre de conclure, pour les réacteurs 2 et 3, à
une perte d’étanchéité de l’enceinte métallique;
* les combustibles contenus dans la cuve ont été
endommagés à la suite des fortes montées en températures
consécutives au séisme et aux accidents successifs.
Les données actuellement disponibles
ne permettent pas de confirmer l’intégrité des cuve et enceinte
du réacteur n°1, dont le combustible a été fortement
dégradé.
Les progrès techniques constatés ces derniers jours
sont:
* l’ensemble des 6 bâtiments réacteurs
sont connectés au réseau et les vérifications des
matériels préalables à leur raccordement se poursuivent;
* les 6 piscines dans lesquelles est entreposé
du combustible sont désormais refroidies et ne présentent
pas de risque immédiat d’ébullition;
* les cuves des réacteurs 1, 2 et 3 sont
refroidies par injection d’eau douce. Le fait de ne plus recourir à
de l’eau de mer pour le refroidissement permet de réduire sans le
supprimer le risque de dépôt de sel en fond de cuve. L’eau
douce a été apportée par une barge depuis la région
de Tokyo;
* les réacteurs 5 et 6 continuent à
être refroidis normalement.
Le pronostic d’évolution des réacteurs
n°1 à 3 devrait rester très incertain pendant les prochaines
semaines.
II. Conséquences radiologiques de l’accident
a. Conditions de travail sur le site et
situation aux alentours de la centrale
Les débits d’équivalent de doses
relevées sur le site de la centrale restent élevés
mais montrent une grande variabilité. Les conditions de travail
des travailleurs sur le site restent très difficiles. Deux travailleurs
ont dû être pris en charge à la suite de lésions
cutanées aux jambes après un contact avec de l’eau contaminée
dans le hall des turbines du réacteur n°2.
Des nouvelles mesures réalisées
en mer indiquent que la contamination du milieu marin est importante et
en augmentation. Le 26 mars, la radioactivité de l’eau prélevée
à 300 mètres au large de la centrale de Fukushima était
environ 1.850 fois supérieure à la valeur relevée
en temps normal.
Au Japon, les rejets provenant de la centrale
de Fukushima Daiichi ont entraîné des dépôts
de radioactivité au sol et sur les végétaux, y compris
au-delà de la zone d’évacuation (20 km) et de mise à
l’abri (30 km). Ces dépôts conduisent à dépasser
dans certains cas les valeurs admissibles pour les denrées alimentaires
définies par la réglementation japonaise.
b. Situation dans la région de Tokyo
Les mesures disponibles dans la région
de Tokyo réalisées par les autorités japonaises et
par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) ne montrent
pas d’évolution significative et demeurent faibles. Des valeurs
de contamination surfacique, relevées dans un quartier de Tokyo,
ont sensiblement augmenté du fait de la pluie le 22 mars et restent
à présent stables.
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suite:
III. Les conséquences en France
a. Les masses d’air en France
La radioactivité
émise par la centrale de Fukushima au Japon s’est répandue
et s’est diluée dans la plus grande partie de l’hémisphère
Nord.
L’appui technique de l’ASN, l’IRSN, procède
à l’analyse de prélèvements dans l’environnement en
France métropolitaine (notamment dans des eaux de pluie, de l’herbe,
différents types de laits). Conformément aux prévisions,
des résultats publiés par l’Institut montrent la présence
d’iode radioactive à des niveaux très faibles. Ces valeurs
sont sans impact sanitaire pour les populations ou l’environnement.
Comme anticipé, la radioactivité
des masses d’air est actuellement trop faible pour être détectée
par les balises radiamétriques Téléray, tant en métropole
qu’outre-mer. Des analyses complémentaires sont réalisées
pour quantifier la présence de substances radioactives dans l’atmosphère
sous forme gazeuse ou particulaire.
Les résultats des mesures dans les
pays étrangers confirment que ces masses d’air sont sans aucune
conséquence sur la santé des personnes.
Aucune mesure de précaution particulière
n’est à prendre pour le public ou les personnes fragiles tant en
France métropolitaine que dans les départements et territoires
d’outre mer.
Afin de répondre aux questions du public
sur les enjeux sanitaires et la circulation des masses d’air, l’ASN a ouvert
une rubrique Questions fréquentes sur son site www.asn.fr.
Elle a également mis en place un centre d’information accessible
de 8 h - 22 h au 08 05 33 34 35 (appel non surtaxé depuis une
ligne fixe).
b. Qualité radiologique des denrées
en provenance du Japon
Denrées alimentaires
Les importations de denrées alimentaires
en provenance du Japon sont d’ordinaire très limitées. Certains
systèmes de production autour de la zone de Fukushima ont été
détruits par le séisme et le tsunami. Les flux d’importation
de denrées animales et végétales (fruits, légumes)
sont interrompus.
Un règlement européen[1]
a été publié au Journal officiel des communautés
européennes le 26 mars 2011 pour imposer des conditions particulières
pour l’importation de produits alimentaires et pour l’alimentation animale
en provenance du Japon, en prévoyant des contrôles systématiques
au départ pour vérifier le respect des normes admissibles
en césium 134 et 137 et de l’iode 131 et un contrôle par échantillonnage
à l’arrivée.
En France, les services des douanes et les
services en charge du contrôle de la qualité des denrées
se préparent à la mise en application de ce règlement
et ont mis en place un système de contrôle aux frontières.
Les césiums et l’iode-131 seront systématiquement recherchés.
Importations non-alimentaires
En l’état actuel des connaissances,
le niveau de contamination des produits non alimentaires en provenance
du Japon devrait être nul ou très limité. Des démarches
sont entreprises pour que les contrôles de contamination puissent
être réalisés sur les marchandises au départ
du Japon.
Dans l'attente de mesures harmonisées
à l'échelle européenne, les autorités françaises
ont demandé aux compagnies aériennes desservant la France
depuis le Japon de contrôler la radioactivité du fret entrant
en France par voie aérienne. Des mesures du même type sont
à l’étude pour le fret maritime.
Les contrôles complémentaires
sur le contenu des colis relèvent de la responsabilité des
destinataires de ces colis.
IV. La réponse de l’ASN au courrier adressé par le
Premier Ministre
Le Premier Ministre avait demandé à
l’ASN de réaliser une étude complémentaire de la sûreté
des installations nucléaires françaises au regard de l’accident
de la centrale japonaise de Fukushima. L’ASN, par courrier du 25 mars 2011,
a confirmé son accord pour prendre en charge cette démarche
qui trouve sa place dans le cadre plus global du retour d’expérience
que l’ASN va organiser à la suite de l’accident de Fukushima.
* Lire le courrier
du Président de l’ASN en réponse à la lettre du Premier
Ministre
[1] Le règlement est disponible à l’adresse: http://eur-lex.europa.eu/
Contact service presse ASN: Tél. : 01 40 19 86 61 |