Les retombées radioactives de la centrale nucléaire de Fukushima s’étendent bien au-delà de la zone d’évacuation de 20 km autour du site. Comment évaluer le danger pour la population et décontaminer les zones polluées? Voici l’avis d’experts français qui travaillent, depuis 2005, sur les mesures à prendre en cas d’accident nucléaire. Quelle sera l’ampleur de la contamination?
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Pour d’autres zones, on peut envisager de permettre aux habitants de conserver une vie normale en s’abstenant de consommer les denrées alimentaires produites localement. Pour d’autres zones encore, plus épargnées, la population pourra vivre et cultiver moyennant des contrôles de radioactivité sur les produits. Cela fait partie du «retour d’expérience» de Tchernobyl et des projets menés dans certaines zones contaminées, comme en Biélorussie. Les habitants sont associés à l’évaluation des risques radiologiques et savent par exemple qu’ils ne doivent pas se rendre dans le bois X mais qu’ils peuvent traverser la forêt Y à condition de ne pas s’y attarder et sans y ramasser de baies ou de champignons. En revanche, tout le monde dans le village sait qu’on peut sans danger laisser paître les animaux dans la prairie Z. Dans tous les cas, différentes techniques de nettoyage existent pour réduire les risques. Quels sont les moyens de décontamination? Les experts préfèrent employer le terme de «réhabilitation» pour insister sur le fait qu’il est impossible de revenir à la situation d’avant l’accident, même si la contamination peut être fortement réduite. D’après les travaux menés en France depuis 2005, le plus urgent est de traiter les zones les moins touchées, car c’est là où la population sera demeurée. Dans cette optique, les autorités nucléaires françaises recommandent de nettoyer en priorité les «milieux bâtis» où la vie se concentre. Toits et murs des habitations, routes et trottoirs peuvent ainsi être nettoyés à la lance à incendie ou à haute pression, autant de fois que nécessaire. La végétation, qui piège beaucoup de dépôts radioactifs dans son feuillage, peut représenter jusqu’à 20 à 30% de l’exposition en milieu urbain. Il faut donc envisager la tonte des pelouses et l’élagage des arbres, voire l’arrachage des buissons. À plus long terme, et dans certaines zones sensibles (cour d’école, hôpital, etc.), il est possible de réduire la contamination en décapant les sols ou en les recouvrant avec d’une nouvelle couche de terre ou d’asphalte. Quant aux zones agricoles, on peut y retourner la surface du sol pour diluer la radioactivité et enfouir les dépôts de surfaces, et les résidus végétaux contaminés, tout en y incorporant des engrais potassiques qui limitent l’absorption du césium par les racines des cultures. (Sources: Thierry Charles, directeur de la sûreté de l’IRSN, Jean-Luc Godet, directeur des rayonnements ionisants et de la santé à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), Dr Michel Bourguignon, commissaire de l’ASN, Isabelle Mehl-Auget, chargée de mission pour la préparation au post-accident nucléaire à l’ASN.) |