Les industriels
français du nucléaire ont désormais un calendrier.
Le degré de sévérité des "stress tests" européens
fait toujours débat entre Bruxelles et la France.
La France continue d’avancer ses pions pour
décider du périmètre de l’audit de son parc nucléaire.
Dans son cahier des charges présenté le 9 mai, l’Autorité
de sûreté nucléaire (ASN) détaille les conditions
dans lesquelles les tests de résistance seront renforcés.
Un regain de précautions tiré de la catastrophe de Fukushima.
En jeu, les différences d’approche
entre la France et l’Europe sur l’évaluation des installations nucléaires.
Pour élaborer son document, l’ASN s’est fondée sur les recommandations
(pdf) publiées fin avril par l’association Wenra qui regroupe les
régulateurs des pays européens dotés de réacteurs
nucléaires. Le but est d’analyser "le comportement des installations
face à des situations extrêmes", explique Jean-Christophe
Niel, directeur général de l’ASN.
Le 1er juin, les exploitants d’installations
jugées «prioritaires» (pdf) devront avoir transmis
la méthode qu’ils comptent adopter avant de rendre leur rapport
le 15 septembre. Une trentaine de sites gérés par EDF, Areva,
le CEA et l’Institut Laue Langevin, dont Fessenheim, Eurodif ou encore
Flamanville, entrent dans cette catégorie. Les autres équipements
nucléaires seront examinés à partir de 2012. L'ensemble
du parc nucléaire français sera donc mis sur le grill, à
l'exception de quelques sites en phase de démantèlement.
Terrorisme
Différents critères de tests
ont été retenus : la simulation de séismes, la perte
de refroidissement ou d’alimentation électrique, les inondations
et la gestion de crise. Ils correspondent aux souhaits exprimés
par le premier ministre François Fillon dans son courrier
(pdf) adressé fin mars à l'ASN.
La prise en compte des risques terroristes
ne sera donc pas au programme des tests français. Elle pourrait
en revanche faire partie des critères souhaités par Bruxelles
pour les "stress tests" européens. Car il y aura bien deux phases
de tests: ceux exercés selon leur bon vouloir par les Etats et ceux
demandés par la Commission européenne, d'après les
instructions des dirigeants européens.
Les chefs d’Etat et de gouvernement européens
se sont accordés le 25 mars sur l’instauration de stress tests européens,
mais "ils ne parlent pas de terrorisme dans leurs conclusions",
se défend le directeur de l'ASN, André-Claude Lacoste.
Intégrer la notion d’attentat
pourrait en outre s’avérer difficilement conciliable avec "l’obligation
de transparence", ajoute-t-il. Elaborer des scénarios sur la
puissance de frappe terroriste et les rendre publics aurait plus tendance
à générer des risques qu’à les réduire.
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A Bruxelles, la prudence est de mise sur ce
sujet délicat. "On réclame un processus qui soit le plus
transparent possible, mais dans des cas spécifiques, des compromis
sont envisageables", objecte l'entourage du commissaire à l'Energie,
Günther Oettinger.
Le Haut comité pour la transparence
et l’information sur la sécurité du nucléaire, qui
a approuvé le cahier des charges de l'ASN, relève en outre
que le champ de l'audit a été restreint par des "contraintes
de calendrier", ce qui n'a pas permis d'inclure les "actes de malveillance".
Pas de contre-expertise
L’examen de sûreté intégrera
toutefois la question du risque socio-professionnel. Une réponse
aux préoccupations croissantes sur le recours à la sous-traitance
dans la gestion des sites nucléaires.
Les évaluations seront faites par les
exploitants des centrales, à l'instar d'EDF. Une situation qui peut
laisser planer le doute sur l'intégrité des résultats.
Mais, rappelle André-Claude Lacoste, "la sûreté
nucléaire relève de la responsabilité de l’exploitant".
Ce principe est consacré par la loi française de 2006 sur
le nucléaire.
La contre-expertise n’aura donc pas lieu au
plan national, sauf exception. Fin avril, un accord de principe a été
conclu entre le premier ministre François Fillon et son homologue
luxembourgeois Jean-Claude Juncker. A la clé, la participation des
experts du Grand Duché pour l’examen de la centrale de Cattenom,
distante d’une quinzaine de kilomètres de la frontière luxembourgeoise.
Délais serrés
La question des tests européens sera
débattue les 12 et 13 mai prochains à Bruxelles, lors de
la réunion de l’Ensrag, où siègent les représentants
des autorités nucléaires des 27 pays de l'Union et des responsables
de la Commission européenne.
Entre les niveaux français et européen
d’intervention, "il n’y a aucune assurance de convergence totale",
prévient André-Claude Lacoste. Faire traîner les débats
rendrait l’exercice d’autant plus redoutable que les
délais sont serrés. Le 9 décembre, la Commission
européenne veut lever le voile sur l'ensemble des risques recensés
lors des tests européens sur les réacteurs nucléaires.
Documents officiels
§ Western European Nuclear Regulators' Association:
Recommandations
pour les stress tests (pdf)
§ Portail du gouvernement - Premier Ministre
Lettre
de François Fillon à l'Autorité de sûreté
nucléaire, 24 mars 2011 (pdf)
§ Autorité de sûreté nucléaire
Liste
des installations concernées par les tests (pdf) |