Pour transformer une habitation "courant
d'air" en une maison à basse consommation, la pierre angulaire réside
dans une isolation performante.
Pour donner à sa maison un air futuriste, il ne suffit pas de planter des éoliennes au beau milieu de son jardin, entre les parterres de fleurs multicolores et les haies de conifères. Il faut d'abord rendre son habitation plus économe en énergie. Si la France est partie avec dix ans de retard dans la chasse au gaspillage par rapport à des pays comme l'Allemagne ou la Suisse, on est aujourd'hui capable de transformer une "épave" énergétique en une maison à basse consommation dans l'Hexagone. A l'image du label Minergie qui estampille les bâtiments performants en Suisse, il existe depuis peu en France le label Effinergie pour les constructions neuves. L'équivalent pour les bâtiments existants sera a priori mis en place à la rentrée de septembre. "C'est une reconnaissance officielle de leur performance énergétique qui leur donne une plus-value sur le marché de l'immobilier", souligne Jean-Christophe Visier, directeur du département énergie, santé et environnement du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), l'un des 10 partenaires impliqués dans l'association Effinergie, créée en mai 2006. Pour être éligible à ce label, une construction neuve ne doit pas consommer plus de 50 kW/m2/an et une habitation ancienne moins de 80 kW/m2/an. Quels travaux entreprendre pour qu'une maison "courant d'air", qui brûle plusieurs centaines de kilowattheures par mètre carré et par an, ne dépasse pas ce seuil? La pierre angulaire d'une maison à basse consommation est d'éviter au maximum les pertes de chaleur. La solution la plus efficace passe avant tout par une isolation performante. A commencer par le toit sous lequel il est préconisé de doubler la couche isolante de 20 à 40 centimètres. Même mesure conseillée pour les murs dont l'épaisseur atteint aujourd'hui 20 centimètres. Pour un bâtiment à plusieurs étages, on privilégiera une isolation extérieure qui évite des ruptures thermiques à chaque étage. En revanche, pour une maison de plain-pied, le principe d'une isolation intérieure est tout aussi efficace et moins coûteuse. |
Pas de matériaux de rupture
Pour "calfeutrer" nos intérieurs, les matériaux les plus répandus restent toujours les classiques, tels que la laine de verre ou le polystyrène. "On peut aussi utiliser des matériaux plus performants pour en réduire un peu l'épaisseur, mais ce sont pour l'instant des dérivés de ces matériaux classiques dont on a augmenté la densité pour améliorer les propriétés isolantes de 20%", explique Jean-Christophe Visier. Il n'existe pas encore sur le marché de matériaux de rupture, plus minces et nettement plus isolants, qui sont encore au stade de l'expérimentation et que l'on emprisonne, par exemple, sous vide entre deux plaques d'aluminium. Pour l'heure, c'est le principe somme toute simple de l'augmentation de l'épaisseur de la couche isolante qui a fait ses preuves, notamment en Allemagne et en Suisse. Mais une isolation performante des murs et du toit ne suffit pas. Il faut aussi s'attaquer à la principale source de déperdition de chaleur pour ne plus jeter l'énergie par les fenêtres! A titre comparatif, le coefficient de perte était de 5 pour celles réalisées par un menuisier d'antan, de 2 pour le standard des années 2000 et de 1,2 pour une fenêtre high-tech. Que les encadrements soient en PVC, en bois ou en aluminium, elle comporte au minimum un double vitrage avec un verre technologique de 12 à 18 millimètres d'épaisseur (contre 6 millimètres auparavant), devenu standard, et un gaz du type de l'argon emprisonné entre les deux parois. Reste qu'à vouloir rendre une fenêtre étanche à quasi 100%, elle s'est transformée en capteur solaire qui, par fort ensoleillement, gagne davantage d'énergie qu'elle n'en perd. D'où la nécessité d'installer un système de protection comme un volet ou un store, pour assurer la régulation de la température. Dans le même registre, à vouloir faire d'un bâtiment un bunker thermique, il faut absolument prévoir une ventilation efficace. Car, tout naturellement, pour aérer son intérieur et profiter de la meilleure qualité de l'air extérieur, on a tendance à ouvrir largement les fenêtres, même en plein hiver. Afin de ne pas perdre le bénéfice d'une maison à basse consommation, l'une des idées astucieuses est de mettre en place un système de tuyauterie avec un échangeur de chaleur pour réchauffer l'air entrant. |
Pour tenir son engagement de réduire
ses émissions de CO2 de 75% d'ici à 2050, la France
doit investir massivement dans la rénovation de son parc immobilier,
qui absorbe 46% de la consommation énergétique nationale.
Quelles sont les fondations d'une industrie
du bâtiment construite sur le terrain du développement durable?
Responsable de 21% des émissions de dioxyde de carbone (CO2)
et de 46% de la consommation énergétique en France, selon
un état des lieux récent de l'Agence de l'environnement et
de la maîtrise de l'énergie (Ademe), ce secteur est au coeur
de cette problématique. L'objectif vise à limiter le réchauffement
climatique et à sécuriser les approvisionnements en ressources
fossiles épuisables à long terme, sur fond de flambée
du prix du baril de pétrole. Pourtant, depuis une trentaine d'années,
on a bien enregistré des gains d'énergie importants avec
une baisse de la consommation moyenne de l'ordre de 30% par logement. Même
constat pour les constructions neuves qui, au fil des réglementations
thermiques successives mises en oeuvre depuis 1975, ont vu leurs consommations
diminuer d'un facteur 2 à 3. Néanmoins, "en raison de
l'extension du parc immobilier, de l'élévation du niveau
de confort avec la multiplication des appareils électroménagers
ou de l'apparition de nouveaux besoins comme la climatisation, la consommation
d'énergie totale a augmenté de plus de 20% entre 1973 et
2005", explique Pierre Hérant, chef du département bâtiment
et urbanisme à l'Ademe.
Pour sortir de cette impasse, il est donc
incontournable d'accélérer la rénovation et le renouvellement
du parc immobilier sur la base de fondations qui reposent sur un bâti
fortement isolé, une bonne aération, un niveau d'éclairage
naturel plus élevé, des équipements moins gourmands
en énergie, dont l'origine devra être de plus en plus renouvelable.
Ce chantier énergétique est
gigantesque vu l'état des lieux actuel. Sur les 30,2 millions de
logements répartis sur le territoire national, qui absorbent 68
% de la consommation énergétique nationale (le solde réside
dans le tertiaire), 63% ont été construits avant la première
réglementation thermique entrée en vigueur en 1975. Si l'on
considère que le taux de renouvellement annuel du parc est inférieur
à 1 %, il restera environ 40 % de constructions de ce type en 2050,
date à laquelle la France s'est engagée à diviser
par un facteur 4 ses émissions de CO2. C'est-à-dire
à réduire ses émissions de gaz à effet de serre
de 75% d'ici à cette échéance.
Des investissements par foyer trop faibles
Autant dire que pour remplir cet objectif,
il est absolument nécessaire de mettre les bouchées doubles
en matière de réhabilitation pour améliorer les performances
thermiques des bâtiments existants. Mais ce n'est pas gagné
d'avance. Car, selon une enquête récente de la Sofres, les
investissements consentis par les ménages dans les travaux de maîtrise
de l'énergie se chiffrent pour l'instant à 25 € par
mètre carré. Au rythme auquel les Français s'attellent
à ce type de chantier, en moyenne tous les huit ans, chaque foyer
est parti pour investir 125 € par mètre carré en 2050.
"Mais le flux de l'investissement de la moyenne des Français
est nettement insuffisant et il faudra a minima tripler cet effort financier",
estime Pierre Hérant. En effet, pour atteindre collectivement le
fameux facteur 4, il faudrait que chaque ménage porte cette enveloppe
entre 200 et 400 € par mètre carré en fonction de l'état
de vétusté et de l'ancienneté de son habitation. Ce
qui revient pour chaque propriétaire d'un logement existant de 100
mètres carrés à planifier un investissement entre
20.000 et 40.000 € sur quarante-cinq ans pour gagner progressivement
en efficacité énergétique.
Si le principal gisement d'économie
d'énergie se trouve dans le parc existant, la pression réglementaire
s'accentue aussi sur le plan des constructions neuves (résidentielles
et tertiaires). Il est prévu de revoir à la hausse tous les
cinq ans les exigences de la nouvelle réglementation thermique entrée
en vigueur le 1er septembre 2006, en vue de parvenir d'ici à 2020
à une baisse de la consommation de 40% par rapport à 2000.
C'est le début d'une nouvelle ère immobilière: "Nous
sommes en train de prendre conscience qu'il va falloir réinvestir
régulièrement dans son habitation. Chacun s'y retrouvera
sur la facture énergétique ainsi que sur le prix de le revente",
conclut Pierre Hérant. Sur le même modèle que les équipements
électroménagers, il existe aujourd'hui une "étiquette
énergie" pour le bâtiment qui va favoriser la prise de
conscience du grand public. Reste que la facture n'est pas à la
portée de toutes les bourses et que l'Etat devra mettre la main
à la poche.
Elaboré par BASF pour la
rénovation énergétique des bâtiments anciens,
le concept de " la maison 3 litres " est aujourd'hui mis en oeuvre dans
des construction neuves de très basse consommation.
Selon de nombreux experts, l'un des concepts de réhabilitation énergétique des bâtiments anciens les plus novateurs, réside dans la "maison 3 litres" de BASF. Autrement dit, après rénovation, la consommation d'une habitation qui brûle en moyenne 20 litres de fuel par mètre carré et par an, fond à 3 litres. Bilan: pour une superficie de 100 m2, les coûts de chauffage chutent de 1.000 à 150 € par an et les émissions de CO2 sont réduites de 80%. Pour atteindre cette performance thermique, le groupe chimique allemand a mis en oeuvre deux innovations majeures, qui sont les piliers porteurs de ce concept baptisé "Génération E". Une sorte de manteau d'isolation, confectionné en Neopor, emmitoufle les murs extérieurs, le plafond de la cave ainsi que le toit, avec des plaques d'une épaisseur de 20 centimètres. Qu'est-ce qui confère à ce matériau, pourtant composé à la base d'un polystyrène très classique, un tel pouvoir isolant? L'idée astucieuse est d'y avoir incorporé des réflecteurs infrarouges qui réfléchissent les rayons de la chaleur et les emprisonnent ainsi à l'intérieur. A pouvoir isolant égal, on peut ainsi réduire l'épaisseur du matériel de 15 à 20%. La deuxième innovation majeure se niche dans l'utilisation de produits chimiques dits à changement de phase (Micronal), qui confèrent à des matériaux de construction courants, comme des plaques de plâtre, la capacité de réguler la température ambiante à l'intérieur du bâtiment. Le secret? Des billes de polymères microscopiques contiennent une cire qui, sous l'effet de la chaleur ou du froid, fond ou se solidifie. L'action de ces microcapsules se déclenche dès que la température dans la pièce dépasse le point de fusion de la cire (26°C). La chaleur excédentaire se diffuse dans le mur et s'y accumule. De cette manière, les pics de chaleur sont absorbés pendant la journée et évacués grâce à la fraîcheur nocturne. |
Il en résulte une régulation
constante sans aucun coût. A titre comparatif, un panneau en Micronal
de 1,5 cm d'épaisseur, dont chaque mètre carré renferme
3 kilos de microcapsules, présente la même capacité
d'accumulation de chaleur qu'un mur de béton de 9 cm ou de briques
de 12 cm.
Des expériences en Allemagne et en France
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