Des scientifiques et des représentants
de l'industrie se sont rencontrés à l'Empa à l'occasion
du symposium international ,Hydrogen & Energy' organisé par
le laboratoire du même nom de l'Empa pour faire le point sur l'état
de la recherche dans le domaine de la technologie de l'hydrogène
et pour discuter aussi du potentiel de l'hydrogène comme énergie
durable de l'avenir.
La conclusion de cette manifestation: l'hydrogène en tant qu'énergie propre possède effectivement le potentiel pour changer profondément notre alimentation en énergie dans quelques décennies. Vu la raréfaction des ressources fossiles, il s'agit de faire avancer la recherche afin de parvenir aussi rapidement que possible à une utilisation efficace et économique de l'hydrogène. Actuellement nos relations avec l'énergie sont tout sauf placées sous le signe de la durabilité: Nous brûlons toujours davantage d'énergies fossiles telles que le pétrole, le gaz naturel et le charbon qui ne sont pas inépuisables et libèrent le gaz à effet de serre qu'est le dioxyde de carbone (CO2). Avec cela nous réchauffons toujours davantage l'atmosphère terrestre. Le dernier rapport de la commission d'experts de l'ONU IPCC («Intergovernmental Panel on Climate Change») prédit une augmentation globale de la température qui pourrait atteindre jusqu'à 4,5°C d'ici 2100. A cela vient encore s'ajouter le fait que les réserves d'énergies fossiles - y compris celles d'uranium - touchent à leur fin. Une diminution de notre «fringale d'énergie» n'est pas en vue si l'on considère que la consommation d'énergie de pays tels que la Chine et l'Inde est en forte croissance. La recherche travaille certes sur les sources d'énergie renouvelables telles que l'énergie solaire, l'énergie éolienne et la géothermie mais ces énergies ne sont pas toujours en tout temps disponibles et sont de plus difficiles à stocker. Des éponges métalliques pour stocker l'hydrogène C'est précisément ici que l'hydrogène entre en jeu: comme support énergétique pour les énergies renouvelables. Comme il n'est pas présent à l'état naturel dans l'atmosphère, il faut tout d'abord le produire par électrolyse, la décomposition électrochimique de l'eau en oxygène et en hydrogène. L'énergie nécessaire pour cela sera fournie par des sources d'énergie renouvelables. Jusqu'ici tout va bien, mais ce qui cause encore des tracas ce sont le transport et le stockage de ce gaz. Actuellement on le stocke sus forme gazeuse dans des bouteilles haute pression ou sous forme liquide à -253°C dans des réservoirs spécialement isolés. Une possibilité intéressante est le stockage de l'hydrogène dans certains métaux qui emmagasinent l'hydrogène dans leur grille cristalline où il est chimiquement lié. Ces métaux peuvent «aspirer» de l'hydrogène comme une éponge et peuvent le recéder à la demande. Il reste toutefois encore quelques problèmes à résoudre avant de pouvoir utiliser pratiquement ces «éponges métalliques» pour le stockage de l'hydrogène. L'Empa - plaque tournante suisse de la technologie de l'hydrogène C'est afin de se consacrer à la résolution des ces problèmes que l'Empa a créé l'année dernière son laboratoire, Hydrogen & Energy' sous la direction de Andreas Züttel. «Le défi le plus important consiste à empaqueter l'hydrogène dans les hydrures métalliques de manière à atteindre une densité d'énergie optimale» explique cet expert de l'hydrogène. Pour cela il étudie par exemple avec son équipe quelles sont les modifications structurelles que l'hydrogène provoque lors de son stockage dans le métal ou comment l'hydrogène se comporte dans des nanostructures de carbone ou dans des nanoclusters métalliques. A l'occasion de l'inauguration de son nouveau laboratoire, Züttel à organisé vendredi dernier un symposium international de l'hydrogène à l'Empa. Ses collègues chercheurs d'Allemagne, du Danemark, de Grande Bretagne, de Hollande et du Japon ont présenté les derniers résultats de leurs travaux, par exemple de nouveaux hydrures qui, grâce à leur capacité de stockage particulièrement élevée, pourraient permettre de réaliser des voitures exemptes d'émissions, des appareils électroniques portables ou encore assurer une alimentation en énergie décentralisée. Ronald Griessen de la Vrije Universiteit Amsterdam a présenté une technique optique qui permet d'examiner simultanément les propriétés de milliers d'hydrures différents et qui constitue une base pour la réalisation de détecteurs à hydrogène ou de collecteurs solaires intelligents. Rex Harris de l'University of Birmingham a montré comment on peut récolter sans grandes dépenses des expériences sur les transporteurs d'hydrogène avec un exemple de péniche transformée pour laquelle Züttel a développé un accumulateur à hydrure métallique d'une capacité de 5 kg d'hydrogène. Quatre collaborateurs d'Andreas Züttel ont ensuite présenté les activités de ce nouveau laboratoire de l'Empa. |
Le groupe d'Andreas Borgschultes travaille à l'amélioration
de la stabilité des hydrures et à l'approfondissement des
connaissances des processus de l'adsorption de l'hydrogène pour
diminuer l'énergie demandée par la charge et la décharge
de l'accumulateur à hydrogène. Zbigniew Lodziana et ses collègues
se consacrent à la modélisation théorique des hydrures
métalliques complexes. Le calcul sur ordinateur des structures atomiques
et électroniques permet aux chercheurs de décrire les phénomènes
observés au moyen de modèles théoriques et de déceler
de nombreux alliages métalliques prometteurs. L'équipe de
Michael Bielmann développe de nouvelles méthodes et appareils
pour suivre par exemple l'absorption de l'hydrogène dans les hydrures.
Et Arndt Remhof étudie avec son équipe les propriétés
physiques des métaux accumulateurs sur la base de l'agencement structurel
de leurs atomes.
L'hydrogène, un support énergétique au fort potentiel Lors de la discussion finale animée par le chef de la communication de l'Empa Michael Hagmann, les représentantes et représentants de la recherche, de l'industrie et de la politique ont discuté des chances technologiques et économiques de l'hydrogène pour la Suisse et l'Europe. Le débat fut lancé avec la question sciemment provocatrice: Quand débutera enfin l'ère de l'hydrogène? Selon Ronald Griessen, qui s'est vu décerné lors de ce symposium le «Science of Hydrogen & Energy»-Award» attribué pour la première fois, cela pourrait encore durer des années mais à long terme l'hydrogène jouera certainement un rôle important dans notre approvisionnement en énergie. «Des initiatives ont déjà été prises aux USA et en Europe, par exemple le Citaro-Bus de Daimler Chrysler mis en service par les transports publics de Reykjavik», explique Griessen. Pour le CEO de l'Empa, Louis Schlapbach, il faut différencier entre économie de l'hydrogène et technologie de l'hydrogène. «Nous sommes encore bien éloigné d'une utilisation de l'hydrogène comme support énergétique. Mais aujourd'hui déjà il est possible d'utiliser la technologie de l'hydrogène, par exemple dans la technique des capteurs ainsi que dans la transformation et la fonctionnalisation des matériaux» a expliqué Louis Schlapbach. A considérer le rapport sur le climat de l'IPCC et l'épuisement prochain des ressources énergétiques naturelles il estime qui y a «nécessité d'action urgente». Schlapbach explique: «Nous devons aider les pays émergents tels que la Chine et l'Inde dans le développement de technologies énergétiques efficaces. Il ne faut pas que les erreurs commises en Europe ou aux USA viennent se répéter dans ces pays.»Le Conseiller national zurichois et Conseiller communal de Dübendorf Martin Bäumle a plaidé en faveur d'un engagement accru sur le plan politique. Vu les prix croissants de l'énergie, la Suisse devrait agir rapidement, effectuer le passage à l'hydrogène et investir à grande échelle dans cette technologie. C'est à cette condition seulement que l'économie suisse pourra conserver à l'avenir sa base existentielle. Les deux représentants de l'industrie se sont eux aussi exprimés en faveur d'un rôle actif de la Suisse dans le domaine de l'hydrogène. «Partout en Europe on construit des installations pilotes pour l'hydrogène, ce n'est qu'en Suisse qu'on ne constate aucune volonté d'action, déclare Ernest Burkhalter, CEO de IHT SA à Monthey. Et pour Friedolin Holdener, directeur de l'entreprise WEKA AG à Bäretswil, l'hydrogène recèle aussi finalement une chance politique: «Nous avons en Suisse le potentiel pour développer des modèles possédant un caractère de pionnier mais nous risquons une fois de plus de rater cette occasion.» Ronald Griessen a relevé qu'il ne faut pas seulement de l'argent mais aussi du temps et des conditions de promotion stables pour aider une nouvelle technologie à faire sa percée. «En Hollande nous considérons la recherche en matière d'énergie comme de la recherche fondamentale à long terme. Les moyens de financement disponibles pour la promotion de la technologie de l'hydrogène se montent à 18 millions € dont un tiers en provenance de l'industrie.» Ce pionnier de l'hydrogène mise sur une communication ouverte pour amener le consommateur à modifier sa façon de penser. «Il est possible d'enthousiasmer les gens pour une chose utile lorsqu'on leur en explique les tenants et les aboutissants et qu'on effectue le travail de persuasion nécessaire.» Car s'ils peuvent contribuer par l'utilisation d'une énergie encore plus propre à réduire la pollution de l'environnement, ils sont aussi disposés à payer un prix plus élevé pour l'énergie. Contact:
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