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TOUT CE QUE VOUS VOULIEZ SAVOIR SUR
L'ÉNERGIE DES VAGUES ET DES COURANTS MARINS
Actualité internationale
2007
L'énergie des océans, 20.000 watts sous les mers
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ADIT (décembre)

     Mouvement des vagues, courants provoqués par la marée, amplitude thermique entre la surface et le fond des océans… les sources d'énergie potentielles présentes dans les mers sont diverses et mettent en œuvre des technologies extrêmement variées. Souvent présentées comme le domaine d'avenir en matière de production d'énergie, les électricités issues des océans n'en sont pourtant qu'à la phase expérimentale et certaines d'entre elles sont déjà confrontées à de sérieuses critiques.
     L'exploitation des énergies issues de la mer est particulièrement compatible avec les préoccupations liées au développement durable, puisqu'elle représente une source d'énergie renouvelable dont la production ne génère absolument aucun gaz à effet de serre. On comprend bien le potentiel immense que ces ressources renferment, et leur conquête a déjà commencé.
     Cependant, de nombreuses questions se posent encore, notamment à propos des coûts de production de ces énergies qui demandent la mise en œuvre de technologies poussées et l'installation de structures off-shore dont la maintenance pourrait s'avérer particulièrement onéreuse. D'autre part, ces techniques interagissent avec les milieux marins et leur impact environnemental est toujours sujet à débat. Il se pourrait bien, en fait, que toutes ces méthodes de production d'énergie ne soient pas aussi écologiques qu'elles en ont l'air. Une source d'électricité potentiellement immense, donc, mais qui reste aujourd'hui encore au stade de l'expérimentation…
L'énergie des vagues
     La première source potentielle d'énergie issue des océans, c'est l'énergie houlographique, qui utilise la puissance du mouvement des vagues en surface. La récupération de cette énergie mécanique et sa transformation en électricité ont été particulièrement étudiées en Angleterre, où des projets on vu le jour sous forme de dispositifs flottants agités par les vagues et qui actionnent par leur mouvement une pompe productrice d'électricité. Mais de nombreux problèmes pratiques freinent toujours le développement de ces structures.
     Aujourd'hui, l'avenir se trouve dans l'utilisation du mouvement de pendule créé par les vagues. C'est une voie développée depuis 2003 par le Laboratoire de Mécanique des Fluides de l'École Centrale de Nantes et le département mécatronique de l'École Normale Supérieure de Cachan. Le dispositif, baptisé Searev (Système Autonome Électrique de Récupération de l'Énergie des Vagues), se présente comme un petit sous-marin. Celui-ci renferme un système de poids qui va osciller avec le phénomène de houle, remplissant puis vidant alternativement des pompes hydrauliques, ce qui a pour effet final de charger des accumulateurs à haute pression et d'entraîner des générateurs d'électricité. Déjà testé en laboratoire, un exemplaire du Searev va être mis en service à une dizaine de kilomètre des côtes françaises pour une deuxième phase de tests, entre 2008 et 2009. Cette expérience est très attendue, car la puissance des vagues est considérée comme l'une des sources d'énergie hydraulique les plus puissantes.
L'énergie marémotrice
     Les marées sont issues de l'effet conjugué des forces gravitationnelles de la Lune et du Soleil. Elles créent un mouvement de l'eau qui peut être capté sous deux formes : énergie dite « potentielle » en utilisant les variations du niveau de la mer ou énergie cinétique en utilisant les courants de marée qui vont actionner des turbines sous-marines. L'énergie des marées est utilisée au moins puis le Moyen-Age, puisque l'on connaît des moulins à marée construits en 1120, en Bretagne.
     Peu de sites dans le monde sont susceptibles d'être équipés de centrales de production marémotrices, car celles-ci nécessitent pour être rentables des conditions hydrodynamiques particulières, qui amplifient l'amplitude de l'onde de marée. On peut citer en France l'usine de la Rance installée en baie du Mont Saint-Michel (plus grande installation à énergie potentielle du monde), ou au Canada la baie de Fundy. Cependant, on sait aujourd'hui que les installations d'exploitation de l'énergie potentielle nécessitent des aménagements importants, qui perturbent les équilibres écologiques des sites d'implantation. Cette forme d'énergie marémotrice devrait donc être abandonnée. En réponse, les recherches se concentrent maintenant vers l'énergie marémotrice cinétique et les turbines marémotrices se développent depuis 2002, date de la première installation dans les Shetland, au Royaume-Uni.
     Le grand intérêt de cette énergie issue des marées, bien qu'elle ne représente potentiellement qu'une infime partie des besoins de l'humanité, est d'être totalement prédictible (à l'inverse des autres énergies renouvelables). Cependant, la nécessité de mettre en place des aménagements sous-marins importants fait grimper le prix de l'électricité produite, à des tarifs supérieurs au nucléaire et à l'éolien.
     Il existe un autre problème qui commence à peine à être soulevé et qui n'a pas encore été vraiment étudié : quand on freine le mouvement des marées, on freine par ricochet le mouvement de rotation de la Terre, ce qui a pour deuxième conséquence d'éloigner la Lune de l'orbite terrestre… Il ne s'agit pas de science-fiction : si le freinage provoqué par des installations massives d'usines marémotrices resterait infime, on sait qu'il serait bien réel. Or, une baisse même légère de la vitesse de rotation de la Terre pourrait avoir des conséquences des plus désastreuses sur le cycle thermique terrestre (succession de la chaleur du jour et de la fraîcheur nocturne), entraînant notamment de lourds bouleversements atmosphériques (multiplication des tempêtes). Autant dire que la généralisation des turbines marémotrices n'est pas pour demain…
Les hydroliennes
     L'énergie hydrolienne (ou hydrocinétique) fonctionne grâce à une turbine sous-marine actionnée par l'énergie des courants marins (énergie cinétique). En faisant tourner les turbines, la force des courants produit de l'électricité grâce à un alternateur. On peut facilement décrire ce type d'installation comme une éolienne sous-marine. Ces hydroliennes peut être actionnées par des courants marins classiques ou par les mouvements de la marée (énergie marémotrice).
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     Le principe en est donc très simple, et sa faisabilité a été largement prouvée. Cependant, cette technologie provoque de nombreuses inquiétudes, notamment auprès des pêcheurs, car les turbines auraient tendance à créer des zones de turbulences qui empêcheraient le dépôt naturel des sédiments et le développement de la flore. Le phénomène pourrait aller jusqu'à entraîner la désertification du plancher sous-marin environnant. On évoque aussi les risques d'aspiration d'animaux par le mouvement des pales, ce que contestent certains scientifiques. Toujours est-il que l'impact environnemental de l'énergie hydrolienne est encore à l'étude.
     D'autre part, l'énergie hydrocinétique peut être produite à partir des courants sous-marins classiques ou à partir des courants de marée, en utilisant la force de l'océan qui se retire. Jusqu'à maintenant, la recherche s'est surtout développée autour de l'utilisation des courants de marée (énergie marémotrice), car ceux-ci permettaient de disposer de courants de forte intensité à proximité de la côte. Or, on sait aujourd'hui que cette énergie marémotrice pourrait présenter de lourds inconvénients. L'avenir de l'énergie hydrolienne devra donc passer par l'exploitation des autres types de courants marins, plus difficiles d'accès.
L'énergie thermique des mers (E.T.M.)
     L'énergie thermique des mers, ou énergie maréthermique, exploite la différence de température entre les eaux superficielles des océans, chauffées par les rayons du soleil, et les eaux profondes, beaucoup plus froides. Dans les pays anglophones, on parle généralement d'OTEC, pour « ocean thermal energy conversion ». L'idée n'en est pas récente, puisque le premier prototype d'usine productrice d'énergie maréthermique remonte à 1930, quand le français George Claude construit une centrale de 50 kW au large de Cuba. Aujourd'hui, ce sont surtout les Etats-Unis et le Japon qui développent des programmes de recherche dans ce domaine, notamment à cause des chocs pétroliers des années 1970.
     Dans leur conception actuelle, les techniques générant de l'E.T.M. ne sont vraiment exploitables qu'en zones intertropicales, car la différence de température entre le fond et la surface n'est pas suffisante ailleurs. Les usines se composent d'un ensemble évaporateur-turbine-condenseur (la centrale de production d'électricité proprement dite), et de conduites et de pompes d'alimentation pour récupérer et acheminer les eaux froides des profondeurs et les eaux chaudes de la surface. La différence thermique entre les différents niveaux des océans représente une source d'énergie renouvelable stable et surtout disponible en permanence. Mais on critique beaucoup son très faible rendement, notamment à cause de la grande quantité d'énergie qu'il faut utiliser pour pomper les eaux froides et chaudes et les amener jusqu'à l'installation. En plus, le pompage des eaux risque fort d'entraîner et de tuer les petits animaux présents au niveau des captages. Et puis il faut aussi noter que les installations déjà mises en place utilisent pour la plupart du chlore pour éviter la formation de dépôts à l'intérieur de la machinerie, ce qui est dommageable pour l'environnement sous-marin.
L'énergie osmotique
     Enfin, l'énergie osmotique représente la voie de recherche la plus récente. Elle se base sur le principe de l'osmose, qui veut que, quand on met en présence deux liquides de concentrations en sel différentes, le liquide le moins salé va avoir tendance à se fondre dans le liquide le plus salé. Des scientifiques ont donc eu l'idée d'utiliser ce principe en enfermant de l'eau salée dans un contenant semi-perméable contre lequel on va faire circuler de l'eau douce. Le principe de l'osmose fait que l'eau douce pénètre peu à peu la membrane pour se mêler à l'eau salée. Résultat : le volume d'eau contenu dans la membrane devient plus important, ce qui augmente la pression sur les parois du contenant. Et cette pression peut être récupérée pour actionner une turbine qui va générer de l'électricité. Or, il existe un endroit où l'on trouve en permanence une ressource gratuite d'eau salée et d'eau douce : l'estuaire des fleuves.
     La grosse problématique de cette technologie, c'est la mise au point de membranes de grande échelle, qui allient à la fois des qualités de porosité nécessaires au passage du flux d'eau douce et une robustesse suffisante pour une utilisation sur de grandes surfaces, et sur le long terme. En dehors de ce problème technique, l'énergie osmotique représente une énergie renouvelable et permanente, ce qui est un avantage essentiel comparé au solaire ou à l'éolien. Les coûts d'exploitation seraient d'ailleurs minimes. Cependant, cette énergie impliquerait des infrastructures à grande échelle dans des zones déjà très urbanisées, et l'installation de centrales osmotiques pourrait rentrer en compétition avec d'autres activités humaines.
     Enfin, pour l'anecdote, sachez que l'arrivée d'eau douce dans l'eau salée au niveau des estuaires provoque aussi un phénomène d'ionisation (des ions sont libérés par les molécules d'eau) et que des chercheurs travaillent actuellement à produire de l'énergie à partir de ces ions. Encore une nouvelle piste de recherche, donc…
Le saviez-vous?
     L'idée d'utiliser l'énergie des océans n'est pas récente puisqu'on sait qu'il existait déjà des moulins à marée au Moyen-Age. Même des technologies aussi pointues que l'énergie thermique des mers ne datent pas de la dernière pluie, puisque la première mention d'une machine produisant de l'électricité grâce a la différence de température entre la surface et le fond des océans apparaît dans les écrits de Jules Verne, quand celui-ci publie en 1869 « Vingt mille lieues sous les mers ». 

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