RESEAU SOL(ID)AIRE DES ENERGIES !
Controverses transports
Les petits véhicules électriques gagnent du terrain
Extrait de la revue "Sonnen energy solaire" de la SSES (No 2/98)
Anne-Regula Keller
23/3/98
    C’est à tort que les véhicules électriques sont encore considérés loin à la ronde comme des moyens de transport «bricolés» et peu fiables ou même comme véhicules additionnels accroissant les besoins de mobilité. De nombreux fabricants automobiles livrent des limousines satisfaisant aux exigences les plus élevées et offrant peut-être même plus de confort que les modèles correspondants équipés de moteur à explosion. Les petites électromobiles à la mode qui nous viennent d’Extrême-Orient vont être commercialisées sous peu, à côté des scooters et des vélos. Mais dans ce domaine, la Suisse n’est pour une fois pas dépendante de l’étranger.
    A première vue, ce vélo pour hommes ne se distingue en rien d’un modèle conventionnel, sauf peut-être par la petite valise métallique plate intégrée au cadre trapézoïdal qui le rend relativement lourd. Cette bicyclette robuste a besoin d’utilisateurs correspondants. Si vous n’arrivez pas à lancer votre jambe par-dessus la selle et si vous ne mesurez pas au moins 1,60 m, il vous faudra renoncer à cette bicyclette volante. En outre, pour autant que le poids assez imposant de 33 kg du Flyer ne suffise pas à vous dissuader d’enfourcher ce vélo, vous vous étendrez sans doute en louanges sur ce véhicule high-tech qui nous vient de Burgdorf.

Le Flyer vous procure le sentiment de voler
    L’utilisateur n’a pas le choix: c’est à lui d’effectuer les premiers mouvements de jambes sur les pédales qui sont nécessaires au déplacement du Flyer. Ces mouvements mettront le moteur électrique en marche et ce dernier doublera désormais la puissance fournie par le cycliste. Au début d’une course à vélo, le sentiment de conduite est donc identique à celui que procurent les fameux vélos anglais – jusqu’à ce qu’une poussée supplémentaire inhabituelle vienne s’ajouter aux propres efforts du cycliste. Plus ce dernier mettra d’énergie à pédaler, plus la force fournie par le moteur d’appoint s’accroîtra. Lorsque le cycliste réduit son effort, la force d’appoint se réduit elle aussi. Le moteur électrique qui fournit cette énergie supplémentaire ne s’entendpresque pas. Des diodes lumineuses vertes sur la tranche supérieure du petit coffre abritant à la fois le moteur, la batterie et l’accumulateur indiquent le niveau de chargement de la batterie. Dès que le moteur se met en marche, le mode change. Les diodes indiquent désormais le nombre de tours: si seules des diodes vertes s’illuminent, il est possible d’engager une vitesse supérieure. Si des diodes rouges s’allument, il faut engager l’une des vitesses inférieures.Par rapport à un vélo conventionnel, le cycliste pédale à un rythme beaucoup plus régulier, avec une résistance agréable qui ne devient pénible que lorsque l’on a engagé une vitesse inadaptée ou lors des premiers efforts à la montée. Les côtes perdent leur aspect dissuasif. Alors que sur une bicyclette traditionnelle, une telle côte devient rapidement une véritable torture, le Flyer donne l’impression dès les premiers coups de pédale plus conséquents de se faire porter par le vent – oui, effectivement, on peut le dire: il vous donne l’impression que vous vous envolez! La topographie très accidentée de notre pays n’est désormais plus un handicap et certainement plus une excuse pour tous les peureux de l’exercice sur deux-roues. Le Flyer permet désormais également de prendre le vélo pour aller travailler puisqu’il vous évite de transpirer. Seule exception: étant donné que l’accumulateur est intégré avec le moteur électrique, l’ordinateur de bord et les 12 kilos de batteries de manière fixe au cadre du vélo, il faut amener soit le Flyer vers la prise électrique, soit un fil électrique vers le Flyer.

Par monts et par vaux, sans transpirer
    L’histoire du Flyer à elle seule prouve que ce nouveau type de bicyclette n’a rien en commun avec le Solex de grand-papa. Elle a commencé lorsque quelques-uns des jeunes employés sportifs de la société solaire Jenny à Oberburg à Burgdorf sont arrivés à la conclusion commune qu’à la longue, le trajet qu’ils parcouraient à bicyclette pour se rendre à leur place de travail était relativement pénible. L’employé de commerce technique Philippe Kohlbrenner reprenait ainsi chaque soir la montée en direction de la Lueg d’où l’on a une merveilleuse vue sur tout l’Emmental. Quant à Reto Böhlen, il parcourait chaque jour 70 kilomètres entre Oberburg et son domicile dans le Gürbetal. C’est ainsi que ces deux collègues ont commencé à mettre au point un vélo équipé d’un moteur d’appoint.Au même moment, Christian Häuselmann, de l’Université de Berne, travaillait à son mémoire de licence dédié aux vélos électriques – sur l’exemple du «Velocity» du pionnier bâlois Michael Kutter. Ces trois sportifs quotidiens ont alors fait connaissance par hasard avant de commencer à mettre au point un premier prototype Flyer qui a décollé pour la première fois en automne 1993.

Prix Vigier 1996
    Deux ans plus tard, à l’automne 1995, ce trio réuni sous la raison sociale BKTech GmbH. présentait pour la première fois leur bicyclette électrique dûment homologuée. En l’espace de trois ans, R. Böhlen âgé, de 30 ans, P. Kohlbrenner, âgé de 33 ans, et C. Häuselmann, âgé de 29 ans, ont mis au point un vélo électrique tout à fait unique du point de vue des concepts d’entraînement et de construction. Contrairement à d’autres vélos électriques dont le moteur s’éteint lorsque la vitesse atteint les 20 km/h, le moteur du Flyer double la puissance propre du cycliste. Il est ainsi possible de continuer à faire du véritable vélo sportif sur le Flyer.L’histoire de ce beau succès a débuté lorsque l’équipe a commercialisé par vente directe la première série de Flyers au mois de mars 1996. Au mois de juin, ce modèle gagnait le Prix Vigier doté de 100 000 francs attribué aux jeunes entrepreneurs. La société BKTech GmbH. est alors transformée en BKTech SA. Depuis 1997, le Flyer est vendu par l’intermédiaire d’un réseau de revendeurs. Le capital actions a été augmenté et l’idée de base, à savoir faciliter le déplacement vers le lieu de travail sans renoncer au vélo en tant que moyen de transport, avait entre-temps donné naissance à une société employant six collaborateurs. La société BKTech produit aujourd’hui ce véritable produit suisse au dernier étage rénové avec soin d’une ancienne fabrique de laine dans le centre de Burgdorf, à trois minutes à peine de la gare.Le Flyer constitue le porte-bannière en Suisse d’un nouveau type de bicyclettes électriques. L’on constate de plus en plus que le Flyer, désormais disponible en trois versions de base et en une version spéciale se modifiant sans cesse, répond à des besoins très larges. Il est avant tout conçu pour des courses quotidiennes entre 5 et 50 kilomètres. Il permet de raccourcir les trajets quotidiens entre le domicile et le lieu de travail et facilite les trajets comportant des côtes de manière à éviter au cycliste de transpirer, du moins aussi longtemps qu’il n’est pas nécessaire de porter le vélo.

Emploi rationnel de l’énergie et caractère favorable à l’environnement
    Le Flyer ne consomme que 1 kWh d’électricité aux 100 km. Cela correspond à 0,1 l de benzine à peine. Sur une même distance, un vélomoteur consomme environ 15 fois plus d’énergie. Un plein – à la prise électrique – coûte 10 centimes et dure trois heures. Un seul mètre carré de capteur photovoltaïque permet de produire le courant nécessaire à 10 000 km/an.S’il est vrai que les utilisateurs de Flyer ont besoin d’une plaque et d’un permis pour vélomoteur – ce qui est incompréhensible et semble toucher à l’honneur de certains cyclistes –, il faut néanmoins souligner que le port du casque n’est plus obligatoire (comme pour tous les autres vélos électriques en Suisse d’ailleurs) même si tout le monde sait qu’un casque protège les têtes intelligentes! Mais il faut bien reconnaître qu’on le porte tellement plus volontiers lorsque ce n’est pas obligatoire!Mais ce n’est pas que par monts et par vaux que le plus fringant des vélos électriques sur le marché démontre sa supériorité. En effet, un projet de réinsertion de chômeurs dans la vie professionnelle englobant plusieurs Flyers est actuellement en cours à Burgdorf. Afin de répartir les gros achats des ménages du week-end sur l’ensemble de la semaine – et en plus de manière favorable à l’environnement – les magasins de Burgdorf proposent à leurs clients un service de livraison gratuite à domicile au moyen de Flyers équipés de remorques.

Les adeptes des vélos électriques conquièrent le monde
    Si le Velocity de Michael Kutter permet lui aussi de doubler la force musculaire du cycliste, sa roue monobloc arrière et son dispositif technique visible nuisent à son élégance. Les autres vélos électriques disponibles en Suisse éteignent automatiquement le moteur dès qu’ils atteignent une vitesse de 20 km/h. Ils s’adressent ainsi à une clientèle moins sportive. Une caractéristique commune de tous les vélos électriques est qu’ils contribuent à faciliter considérablement les trajets comportant des côtes que l’on hésiterait à gravir avec un vélo usuel. Dans le monde entier, l’on constate un net accroissement de la demande de vélos électriques. C’est tout particulièrement le cas du Japon, de la Chine et de la Californie où le trafic motorisé s’étouffe lui-même mais où le vélo est pour beaucoup un moyen de transport trop fatigant sur des distances relativement grandes. En raison de la pollution locale de l’air et par la nécessité de réduire les émissions de CO2, les autorités publiques en charge de la santé et de la protection de l’environnement commencent à s’activer dans ce domaine. Il faut toutefois également mentionner l’intérêt que commencent à montrer d’importantes sociétés (telles qu’AeroVironment en Californie) à ce marché. Il faut ajouter à cela un large assortiment de produits à des prix variant entre 300 et 2500$. Sur la côte ouest des Etats-Unis, le vélo électrique connaît actuellement une véritable percée commerciale, que ce soit sur les campus des universités ou auprès des forces de police. Dans ce domaine, le marché a atteint une ampleur telle que même le célèbre fabricant de revolvers Smith & Wesson s’est lancé dans la production de vélos de police. Divers experts considèrent d’ailleurs les vélos électriques comme les précurseurs des véhicules électriques en général.