CONTROVERSES ENERG...ETHIQUES !
Energies renouvelables, environnement-écologie, développement...
2008
Défis et dangers de la course aux hydrocarbures de l'Arctique
ADIT, septembre 2008
WASHINGTON (AFP) 
     L'exploitation des gigantesques réserves pétrolières et gazières de l'Arctique présente d'importantes contraintes et risque d'affecter ce vaste écosystème déjà bouleversé par le réchauffement climatique, estiment des experts.
     La Russie, les Etats-Unis, le Canada, le Danemark et la Norvège sont tous engagés - à différents degrés - dans une course pour exercer et étendre leur souveraineté sur l'Arctique pour des raisons stratégiques, politiques et énergétiques.
     L'agence gouvernementale américaine de recherche géologique (USGS) a récemment estimé à 412 milliards de barils équivalent pétrole les ressources inexploitées d'or noir et de gaz dans le cercle Arctique. Et 84% de ces réserves se situent au large.
     Des sites offshore près des côtes septentrionales de l'Alaska produisent déjà depuis des années du pétrole et du gaz naturel, mais l'exploitation d'hydrocarbures plus au nord dans l'Arctique n'est pas chose facile.
     La gouverneure de l'Alaska, Sarah Palin, choisie par John McCain comme colistière dans la course à la Maison blanche, est une grande partisane de l'extension des forages pétroliers dans cet Etat américain.
     La fonte sans précédent des glaces observée ces dernières années pendant la saison estivale facilite en théorie l'accès et l'exploitation de ces ressources dont une partie se situe dans des zones polaires de l'océan Arctique où aucune puissance nordique n'a pour l'instant de juridiction.
     "Dans certaines régions, comme dans l'Arctique canadien et en Alaska, les glaces posent encore un problème à l'exploitation pétrolière et gazière. Ailleurs, comme au nord-est du Groenland, la fonte facilitera l'accès" aux ressources, explique dans un courriel à l'AFP Don Gautier, spécialiste à l'USGS.
Selon les estimations de glaciologues, l'océan Arctique pourrait être libéré des glaces pendant toute la période estivale d'ici à 2030 en raison du réchauffement climatique, dont l'effet est plus intense aux pôles.
     "Mais lorsque vous parlez d'installations permanentes, que ce soit des structures offshore ou de transport maritime toute l'année, vous faites encore face à un environnement hostile" pendant le reste de l'année, note Hajo Eicken, professeur à l'Université de l'Alaska à Fairbanks.
     Le Fonds mondial de la nature (WWF) juge "dangereuse" l'exploitation des hydrocarbures de l'Arctique, qui accélérera selon ce groupe environnemental les effets du changement climatique.
     "Les dommages dans ces régions pourraient être importants parce que l'écosystème y est plus vulnérable", dit Christian Haas, professeur à l'université d'Alberta, citant le cas éventuel d'une marée noire ou de la modification de la trajectoire de migration des caribous et des baleines.
     Dans l'Arctique, la couche de glace sur l'océan et la neige reflètent les rayons du soleil. Lorsque la fonte des glaces s'accentue, cette chaleur est absorbée par l'océan Arctique et le sol, ce qui amplifie le réchauffement, un phénomène baptisé "ice-albedo feedback" (rétroaction de l'albedo des glaces).
     Ce réchauffement pourrait aussi libérer d'importantes quantités de dioxyde de carbone (CO2) piégées dans l'Arctique. Or une plus grande présence de CO2, le principal gaz à effet de serre (GES) produit dans le monde par la combustion d'hydrocarbures et de charbon, amplifierait le réchauffement planétaire et donc la fonte des glaces.
     Mais "l'exploration des ressources de l'Arctique ne signifie pas nécessairement de plus grandes émissions" de gaz à effet de serre à l'échelle mondiale si d'autres efforts sont entrepris pour les réduire, en développant par exemple des énergies renouvelables en parallèle, tempère M. Haas.
PARIS (AFP) - De nouveaux travaux ravivent les craintes d'une fonte rapide du Groenland

     Les scientifiques n'écartent plus désormais la perspective d'une fonte à grande vitesse des glaces du Groenland, qui entraînerait alors une montée des eaux qui submergerait une grande partie des régions littorales du globe.
     Dans une étude publiée en ligne sur le site de la revue Nature Geoscience, une équipe américaine rapporte qu'à l'ère glaciaire, la grande banquise des Laurentides qui recouvrait alors la majeure partie du continent nord-américain avait fondu beaucoup plus rapidement qu'imaginé, déversant des milliards de tonnes d'eau dans les océans.
     Cette découverte soulève de graves interrogations sur la pérennité future du Groenland, puisque la fonte des Laurentides avait été provoquée par une hausse des températures qui pourrait bien se reproduire d'ici la fin du siècle, expliquent ces chercheurs.
     "La fonte des glaciers était toujours apparue comme un processus extrêmement lent. Mais ces nouvelles preuves surgies du passé, couplées avec les modèles climatiques, nous montrent qu'il est tout sauf lent!", rapporte la climatologue Allegra LeGrande de la New York Columbia University.
     "Par le passé, les banquises se sont montrées très réactives aux changements climatiques, laissant entendre qu'il pourrait en aller de même à l'avenir", ajoute-t-elle.
     Dans son 4e rapport publié en 2007, le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC: expertise croisée multinationale mandatée par l'ONU, Prix Nobel de la Paix 2007, NDR), a renoncé à chiffrer la hausse possible du niveau des océans au 21e siècle du fait des inconnues pesant sur l'évolution du Groenland et sur l'Antarctique, les deux principales réserves de glaces du globe.
     Selon les estimations, une fonte totale du Groenland provoquerait une élévation de la mer de sept mètres.
     Pour explorer le passé, Anders Carlson de l'Université du Wisconsin a fouillé avec son équipe les sédiments laissés par la banquise des Laurentides: à son apogée il y a environ 20.000 ans, cette couche de glace atteignait trois km d'épaisseur et s'étendait du sud de New York jusqu'à l'actuel Ohio. Jusqu'à une vague de réchauffement, semble-t-il causée par une légère déviation de l'axe de rotation de la Terre qui a davantage exposé la Terre aux rayonnements solaires.
     L'équipe du Pr Carlson a recherché des marqueurs radioactifs laissés par les déchets organiques dans les sédiments afin d'établir le rythme et la cartographie de la fonte, puis d'en comparer les données avec les niveaux historiques des océans relevés sur les coraux.
     Selon ces observations, la banquise a fondu en deux phases très rapides: la première il y a 9.000 ans a provoqué une hausse du niveau des océans de sept mètres - à raison de 1,3 cm par an. La seconde, il y a 7.500 ans a rajouté cinq mètres d'élévation (0,4 cm par an).
     Par comparaison, le niveau des mers augmente aujourd'hui de 3,3 mm chaque année.
     Les scientifiques font valoir que le Groenland est une île baignée par des eaux froides et que sa géologie n'est pas celle de l'Amérique du nord: par conséquent l'expérience des Laurentides ne devrait pas se rééditer exactement dans les mêmes termes.
     Cependant, les projections les plus élevées du GIEC pour la fin du siècle sont conformes aux données connues qui ont provoqué la disparition de la banquise aux Laurentides, soulignent-ils. D'autant que le Groenland est de taille nettement plus modeste.
     Pour les spécialistes des sciences de la Terre, Mark Siddall et Michael Kaplan, ces nouveaux travaux "laissent penser qu'une fonte du Groenland de l'ordre d'un mètre par siècle ne peut plus être écartée".