CONTROVERSES ENERG...ETHIQUES !
Energies renouvelables, environnement-écologie, développement...
L'eau: vie, mort, espoir?
juin 2009
http://nouvellecaledonie.info/
SOS-planète, base vivante: http://terresacree.org

L'eau de notre vie
     Si notre belle planète fut créée selon les scientifiques il y a près de 4,6 milliards d'années il faudra néanmoins attendre environ un milliard d'années pour qu'apparaissent les premières espèces vivantes. Ainsi notre plus lointain ancêtre, la première forme de vie sur Terre, a probablement été une cellule simple capable de se reproduire en se divisant.
     La Terre de cette époque était alors bien loin de présenter le même aspect et les mêmes conditions atmosphériques que celles que nous connaissons actuellement. Le lieu d'apparition de ces premières bactéries procaryotes et unicellulaires reste encore de nos jours une énigme : certains chercheurs défendent l'hypothèse que c'est au fond des mers, près de sources hydrothermales, que la vie est apparue, et non en surface, dans des flaques d'eau proches du littoral, sous la lumière intense du soleil.
     Quel que soit le lieu d'apparition de la vie, il est certain que les premiers êtres vivants étaient des bactéries anaérobies, c'est-à-dire pouvant vivre en l'absence d'oxygène, et qu'elles apparurent en milieu aquatique, dans nos océans.
     Ces derniers couvrant 360 millions de km2, soit environ 71%  de la surface de la Terre  pour une quantité d'environ 1,4 milliard de milliard de mètres cube d'eau lui confèrent à juste  titre les appellations de planète océan ou de planète aquatique.
     Si la vie terrestre est apparue dans l'eau notre chemin de vie en tant qu'être humain prend de la même façon sa source dans cet élément. En effet, avant notre naissance nous passons par la phase aquatique lorsque nous baignons dans le liquide amniotique, embryons nous sommes constitués de 94% d'eau pour une fois adulte en être constitués de 65%, étant ainsi un peu à l'image de notre planète.
     De la tête aux pieds, nous sommes en eau. L'eau est donc un élément indispensable à notre corps, à notre vie. En plus d'en être essentiellement constitués nous devons également en consommer 2,5 l par jour car si nous sommes en mesure de vivre environ 3 semaines sans manger, puisque nous stockons des nutriments, en revanche nous ne pouvons nous passer d'eau plus de 3 jours, incapables de la conserver dans notre organisme.
     Ainsi si l'homme perd 2% de son eau, il éprouve le besoin de boire, si il en perd 10%, il a des hallucinations et sa peau se rétracte, si il en perd 15%, il meurt, les cellules s'asphyxiant sous l'effet de leurs propres déchets.
     L'eau est également essentielle à la vie car elle crée le milieu dans lequel toutes les réactions métaboliques se produisent et permet le transport de substances chimiques dont elle assure le bon fonctionnement physiologique.
     Cette eau dont le renouvellement est essentiel au bon fonctionnement de notre corps est tout aussi vitale pour le reste des espèces faunistiques et floristiques  dont est elle le composant essentiel dans des pourcentages en moyenne similaires à celui de notre corps.
     L'eau étant essentielle à notre survie ainsi qu'à notre développement elle suscite par conséquent la convoitise de la part de l'ensemble de l'espèce humaine. Une convoitise qui peut aisément se transformer en conflit tant larvé qu'ouvert lorsque certains veulent en faire un bien exclusif au détriment des autres.

L'eau de la discorde
     Les premières guerres de l'eau connues, l'écriture n'existant pas auparavant, eurent lieu il y a plus de 5.000 ans entre des villes sumériennes, néanmoins il y a fort à penser qu'elles sont aussi vieilles que l'humanité: le contrôle des oasis, des points d'eau dans des régions où il y avait régulièrement des pénuries assurant la pérennité de leurs détenteurs.
     L'histoire retiendra également la disparition de civilisations non moins prestigieuses que celle des Khmers survenue suite à une défaillance en approvisionnement en eau ou encore celle des Mayas en Amérique Centrale. Les civilisations ayant un usage intensif de l'eau se trouvent généralement fort vulnérables aux changements climatiques, nous n'échappons bien entendu pas à cet état de fait.
     Notre époque est également le théâtre de conflits pour le contrôle de cette ressource. Ce fut le cas entre le Brésil et l'Argentine pour le contrôle du fleuve Parana ou encore actuellement entre les Etats-Unis et le Mexique pour l'eau du Rio Grande qui de grand n'a plus que le nom puisque ce fleuve maintes fois évoqué dans les westerns n'atteint désormais plus le Golfe du Mexique.
     La guerre du Cachemire entre Inde et Pakistan trouve également une de ses origines dans le contrôle de la source de l'Indus, seule alimentation viable et suffisante en eau pour ce pays de plus de 150 millions d'habitants.
     Que dire de la guerre de l'eau qu'Israël livre à la Palestine? Depuis des décennies l'Etat hébreux puise des quantités pharaoniques d'eau dans la nappe aquifère située sous ces deux états et interdit à ce dernier de creuser d'autres puits malgré l'augmentation de sa population. Que dire de l'occupation du plateau du Golan par Israël depuis la Guerre des six Jours de 1967 dont le but n'était autre que celui du contrôle de  la source du fleuve Jourdain?
     La situation au Proche Orient est sans doute la plus catastrophique que l'on puisse rencontrer sur notre planète étant donné qu'y ont été dores et déjà épuisées les réserves d'eau, premier cas dans l'histoire de l'humanité.
     Que penser de la bande de Gaza, en plein désert de Palestine qui est l'entité politique qui souffre le plus cruellement du stress hydrique, avec tout juste 140 l d'eau souterraine saumâtre par an et par habitant!
     Alors que nous ne buvons en moyenne guerre plus de 2 litres d'eau par jour, nous en consommons dans les pays industrialisés en moyenne 150 l /jour par personne. Cependant en moyenne dans certains pays comme l'Australie ou les USA il s'agit de 350 à 400 l pers/jour.
     Comment éviter des conflits lorsque la répartition de cette ressource est de loin inéquitable puisque six pays, Brésil, Canada, Russie, Indonésie, Chine et Colombie se partagent à eux seuls la moitié des ressources en eau renouvelables de la planète. On assiste à une crise mondiale de l'eau, qui se manifeste à travers la pénurie croissante d'eau potable et la multiplication des maladies hydriques, causées par la pollution industrielle, la contamination des lacs et rivières, le traitement insuffisant des eaux usées, l'assèchement des sources, etc. Selon une estimation des Nations Unies, 36.000 personnes meurent chaque jour, soit 6% de la mortalité mondiale, par manque d'eau potable ou par ingestion d'eau contaminée. Environ 80% des maladies des pays en développement (diarrhées, choléra...) sont liées à l'eau.
     Environ 1 milliard de personnes dans le monde n'ont pas accès à l'eau potable et 2,5 milliards n'ont pas accès à un système sanitaire et ce chiffre atteindra en 2025 les deux tiers de la population mondiale.
     Au sein même de  nos sociétés la répartition et l'utilisation de l'eau sont inégales puisque les agriculteurs consomment actuellement les deux tiers de l'eau puisée dans les fleuves et nappes de la planète. D'ici 2025 la raréfaction de l'eau entraînera une baisse de la production mondiale de 350 millions de tonnes par an, soit la production annuelle en céréales des USA, alors comment nourrir la planète? Malheureusement il ne faudra pas attendre 2025 puisque début 2008 nous avons vu dans de nombreux pays subvenir des émeutes de la faim, alors que dans d'autres l'ignominie humaine pousse à la spéculation sur les denrées alimentaires pour s'enrichir davantage. Le programme alimentaire mondial précisait qu'en 2008 se sont ainsi 50 millions supplémentaires de personnes qui souffraient de la faim.
     Désormais le facteur limitant la productivité alimentaire mondiale n'est plus la terre mais l'eau comme le signale un rapport de la FAO. Les nappes aquifères s'épuisent lentement face à nos besoins pressants et en constante augmentation.
     En Inde dans certaines régions l'eau était puisée à une dizaine de mètres, aujourd'hui on a beau forer à plus de 400 mètres de profondeur  les puits restent secs. Quel avenir se dessine pour la population de la plus grande démocratie de la planète?
     La quête de cette eau vitale pour notre survie nous amène également à commettre des erreurs, des erreurs fatales comme ce fut le cas en Inde où près de 60 millions de personnes  furent empoisonnées par l'eau naturellement chargée en fluorure extraite de puits tubulaires. Ce qui engendra de multiples malformations osseuses et infirmités irréversibles tant chez les enfants que chez les adultes. Une eau que les experts et scientifiques n'avaient pas cru bon d'analyser, une eau responsable du plus grand empoisonnement collectif de tous les temps, une eau extraite de milliers  de puits réalisés dans les années 80 grâce aux fonds du programme des Nations Unies l'Unicef.

suite:
     Que dire des dix millions de personne de l'ouest indien et du Bengladesh qui consomment chaque jour une eau dont la concentration en arsenic est parfois plusieurs centaines de fois supérieure aux normes de l'OMS? Une eau non analysée provenant de puits financés en majorité par des fonds internationaux (ONG, ONU...), une eau qui les fait vivre aujourd'hui mais qui raccourcit à chaque goutte leurs lendemains. Rien qu'en Inde ce sont aujourd'hui près de 800 millions de personnes qui seraient susceptibles de boire cette eau contaminée.
     Si l'absence d'eau potable fait peser une grande menace sur les populations, de trop grosses quantités d'eau, qu'elles soient douces ou salées peuvent tout autant représenter un danger pour notre espèce. Un danger qui s'accroît chaque jour davantage avec le réchauffement climatique. Prenons pour exemple cette exceptionnelle mousson indienne de l'an passé qui a fait des centaines de morts et déplacé des centaines de milliers de personnes. Nous pouvons évoquer de la même façon le problème de la montée des eaux qui provoque le déplacement de milliers de réfugiés climatiques.
     Ainsi l'effet du réchauffement climatique sur les Tuvalu, la plus petite nation du monde après le Vatican, mais certainement beaucoup moins riche, fera des 11.000 Tuvaluens, les premiers réfugiés climatiques de la planète d'ici 2 générations. L'Océanie dans son ensemble sera sans conteste le continent le plus fortement touché par cette catastrophe de la cupidité humaine compte tenu de sa géographie et de ses milliers d'atolls, celui d'Ouvéa n'échappant pas à cette logique.
     Les Nations Unies évaluent à 50 millions le nombre d'habitants qui pourraient être contraints de quitter leur lieu de vie en raison des conséquences du changement climatique D'ici à la fin du siècle, le nombre des réfugiés climatiques pourrait être porté à 150 millions.

L'espoir de notre espèce
La technologie
     Nous avons depuis tous temps eu recours à la science et à la technologie afin de résoudre les problèmes auxquels nous étions confrontés. L'absence ou la raréfaction des ressources aquifères nous amena également, parfois à tord parfois à raison,  à inventer, à innover, ou encore à mettre en place des projets démesurés dans certains domaines.
     C'est sans conteste le cas de la Grande Rivière Artificielle de Muhammad Kadhafi qui a dépensé 27 milliards de dollars pour transporter sur  3500 km de désert une eau puisée à 500 m de profondeur dans une nappe phréatique fossile, donc épuisable, avec l'aide des Américains, ceci afin de faire pousser, entre autre, du blé en plein désert!
     Les Chinois ne sont guère bien loin puisqu'ils ont entamé leur projet Sud-Nord qui détournera une partie du fleuve Yangtsé, 4ème de la planète par le débit, afin d'alimenter le fleuve Jaune quasiment asséché situé près de grandes métropoles pour un coût d'environ 60 milliards de dollars.
     L'Inde quant à elle a une entreprise encore plus démesurée que son géant de voisin puisque son Projet d'Interconnexion des Fleuves prévoit de construire des dizaines de grands barrages, des centaines de réservoirs secondaires afin d'envoyer vers le sud aride les eaux de mousson charriées au nord par les géants que sont le Gange ou encore le Brahmapoutre. Un projet titanesque, pour ne pas dire emprunt de mégalomanie qui va changer la carte hydrographique de ce pays et coûter de 110 à 200 milliards de dollars selon les estimations, soit 40% du PIB de l'Inde.
     Notre caillou (la Nouvelle-Calédonie) n'échappe pas à ce genre de projet avec son Grand Tuyau dont l'utilité et la viabilité financière, pour la population bien sûr, et non pour certains élus, ont été très fortement remis en cause par un récent rapport de la cours des comptes.
     L'impact financier et surtout écologique de tels projets est plus que discutable quand il semble que d'autres moyens plus viables écologiquement, financièrement et moralement peuvent être mis en œuvre.
     Certaines sociétés comme la Comex ont déjà mis en place et améliorent des procédés de récupération des eaux de source jaillissant en plein océan grâce à la différence de densité entre eau douce et eau salée.
     Les usines de désallement, qui produisent 10% de la consommation mondiale d'eau sont également une option, néanmoins leur coût de fonctionnement en limite l'implantation aux pays disposant d'importants moyens financiers. Qui plus est n'oublions pas que la source d'énergie utilisée qu'est le pétrole augmente la pollution atmosphérique de notre planète.
     Pour les populations plus isolées des solutions viables ont déjà été proposées. C'est le cas notamment d'un genre de toile ombrière en polypropylène capable de récolter les 2/3 de l'humidité des brouillards, une quantité suffisante pour s'alimenter et même recréer un écosystème. L'humidité de l'air représente en effet plus de six fois le contenu de tous les cours d'eau de la planète. Dans de nombreux pays on revient à des méthodes ancestrales que sont le captage de l'eau de pluie, ou encore le système des qanâts utilisés par les Perses et qui sont à l'origine de leur richesse agraire durant l'antiquité.
     A défaut de revenir à des méthodes ancestrales ou de s'appuyer, une fois n'est pas coutume, sur la science ou la technologie pour résoudre les problèmes que nous-mêmes, notre société créons depuis des siècles n'existe-t-il aucune autre alternative?
     Ne serait-il pas plus judicieux, plus réaliste, plus efficace, plus pragmatique d'utiliser ces différences avec le reste du règne animal dont nous n'avons de cesse de nous vanter, de nous targuer? Ne devrions nous pas simplement, humblement regarder l'histoire de ces civilisations disparues pour des erreurs semblables et en tirer des leçons? Ne devrions nous pas nous comporter en êtres humains que nous nous revendiquons et utiliser ce que nous nommons l'intelligence ou encore la cognition? Ne devrions nous pas faire preuve tout simplement de bon sens?
     Mais est-ce réellement le chemin que prend la communauté internationale en favorisant la création du nouveau marché de l'or bleu?
     En effet, lors du dernier Forum Mondial de l'Eau à Istanbul en mars dernier, la version finale du projet de déclaration, négocié depuis de longs mois, stipule que l'accès à l'eau potable et à l'assainissement est un "besoin humain fondamental", et non pas un "droit". Légalement, un besoin humain n'a aucune valeur ce qui permet d'en faire désormais une marchandise soumise aux lois de l'offre et de la demande. Comment parler de droits de l'Homme si on ne parle pas de droit à l'accès à l'eau? De leur côté les entreprises privées intéressées par le marché de l'eau soutiennent activement ce programme qui leur ouvre des possibilités de profit énormes. Il s'agit d'une part des sociétés transnationales de distribution d'eau, que nous connaissons également très bien en Nouvelle Calédonie, Suez et Veolia, d'autre part quatre multinationales qui se partagent le marché de l'eau en bouteille: Nestlé, Danone, Coca-Cola et PepsiCo.
     D'autres sociétés se réjouissent d'ores et déjà du réchauffement climatique qui leur permet de récupérer les icebergs du Groenland dérivant en eau internationale afin d'embouteiller cette eau gratuite.
     N'est-ce pas là, une fois de plus, sacrifier sur la table du sacro saint libéralisme des millions de vies humaines ?
     D'ici 2050 il y aura près de 9 milliards d'habitants sur terre, et une augmentation d'environ 80% de notre consommation actuelle, comment ferons nous alors pour subvenir à nos besoins en eau? Les scientifiques prévoient que les îles du Pacifique seront parmi les premières terres de la planète touchées par la sécheresse suite au réchauffement climatique. Et nous, êtres humains, calédoniens, citoyens, quelle réponse apportons-nous à ce problème? Que faisons-nous au quotidien pour préserver cette ressource? Quelle politique de gestion de cette ressource renouvelable proposons-nous pour le pays et les générations futures?
     L'eau c'est le sang de la Terre, quand les dernières larmes de Gaïa seront asséchées nous n'aurons dés lors plus que nos propres yeux pour pleurer la fin de l'humanité.

Arnaud FUENTES
citoyen de la Terre