La Commission européenne
a dévoilé mercredi un plan "historique" d'action contre le
réchauffement climatique mais s'attend à d'âpres négociations
avec les pays de l'UE, car nombre d'industriels y voient une menace face
à une concurrence étrangère moins soucieuse de l'environnement.
Il s'agit du "paquet
de mesures le plus complet au monde" en matière de climat, pour
un coût estimé à "3 € par semaine et par
personne" d'ici 2020, a déclaré José Manuel
Barroso, son président, en présentant au Parlement européen
le projet à Bruxelles, finalisé à l'issue de longues
et difficiles tractations.
"Il y a un coût
mais il est gérable", a assuré M. Barroso. Globalement, il
a estimé qu'il serait de "moins de 0,5% du PIB d'ici 2020", soit
60 milliards €.
Le projet, qui a suscité
de nombreuses réactions , entend donner à l'Union européenne
les outils pour atteindre l'objectif qu'elle s'était fixée
en mars 2007: réduire ses émissions de gaz à effet
de serre de 20% par rapport à leurs niveaux de 1990 d'ici à
2020 et, sur cette même période, de porter à 20% la
part des énergies renouvelables dans la consommation.
L'une des mesures phare
consiste à faire payer, à partir de 2013, aux industries
les plus polluantes de l'Union européenne des "permis de polluer"
jusqu'ici gratuits.
Le secteur de l'électricité,
d'où proviennent une grande partie des émissions de CO2,
va devoir intégralement payer pour obtenir des droits à polluer
vendus aux enchères à compter de cette date.
Les autres secteurs
d'activité concernés, comme les industries de l'aluminium
et les producteurs d'ammoniaque, ainsi que le transport aérien,
rentreront dans ce système payant "graduellement", a souligné
la Commission.
M. Barroso, a néanmoins
précisé que s'il n'y avait pas d'accord international sur
le climat, incluant les Etats-Unis et les pays émergents, pour réduire
les émissions de CO2, l'Europe "agirait". |
Concrètement,
les industries les plus "énergivores" obtiendraient dans ce cas
"gratuitement" leurs permis de polluer et les importateurs de produits
concurrents non-européens seraient obligés d'acheter des
permis de polluer. Une forme de taxe aux frontières.
Les secteurs d'activité
non inclus dans ce système d'échanges, comme les transports,
l'habitat et l'agriculture, ont eux aussi des objectifs de réduction
déclinés par pays, calculés en fonction de la richesse
de chaque pays.
Ainsi la France et l'Allemagne
devront réduire leurs émissions de 14% d'ici 2020, le Danemark
de 20%, la Belgique de 15%, la Suède de 17%.
Les pays en phase de
rattrapage économique pourront eux les augmenter de façon
limitée: pas plus de 14% pour la Pologne, 9% pour la République
tchèque, 20% pour la Bulgarie.
Une autre mesure clé
vise à attribuer à chaque pays des objectifs contraignants
en matière de part des énergies renouvelables dans la consommation:
la France devra ainsi les faire passer de 10,3% en 2005 à 23% en
2020, l'Allemagne de 5,8% à 18%, la Suède de 39,8% à
49% et la Pologne de 7,2% à 15%.
Les pays membres de
l'UE, qui vont devoir remplir des objectifs nationaux stricts, et les industriels
ont multiplié les pressions, souvent avec succès, pour atténuer
la portée des dispositions jugées les plus pénalisantes.
Le ministre allemand
de l'Environnement Sigmar Gabriel a salué mercredi un plan "très
courageux". "Cela nous réjouit particulièrement que les
réclamations allemandes sur les industries gourmandes en énergie
et exposées à la concurrence internationale aient été
prises en compte," a-t-il souligné.
Le président
de la Commission européenne espère un accord du Parlement
européen et des Etats membres pour la fin de l'année. Il
a assuré que les deux pays qui assurent la présidence de
l'Union, la Slovénie, puis la France "sont déterminés
à aller vite". |