C'est une
"Première" que viennent de réaliser des chercheurs français
de deux grands laboratoires réputés mondialement, le LGGE-OSUG
[1]
et le LSCE-IPSL [2], en collaboration avec plusieurs partenaires
internationaux, en particulier l'Institut de Physique et le Centre Oeschger
sur la recherche climatique de l'Université de Berne, en Suisse.
Ils sont parvenus en effet à reconstituer sur une période
de 800.000 ans l'évolution des teneurs en dioxyde de carbone (CO2)
et méthane (CH4), les deux principaux gaz à effet
de serre après la vapeur d'eau, dans l'atmosphère. Pour ce
faire, ils ont analysé les bulles de gaz piégées dans
la glace extraite lors du forage glaciaire effectué dans le cadre
du projet EPICA (European Project for Ice Coring in Antactica), soutenu
financièrement par l'Union européenne et les dix pays européens
qui y participent. Rappelons qu'en décembre 2004, une carotte de
glace forée en Antarctique, à proximité de la base
franco-italienne Concordia (Dôme C) a alors atteint une profondeur
de 3.270 mètres, s'arrêtant à quelques mètres
au-dessus du socle rocheux.
Les résultats de
ce nouvel enregistrement de la composition de l'atmosphère en dioxyde
de carbone et méthane jusqu'à 800.000 ans, soit 150.000 ans
de plus que le précédent, font l'objet de deux articles dans
la revue Nature du 15 mai 2008. Plusieurs avancées fondamentales
sont à noter. Tout d'abord, ces travaux confirment, tout en l'étendant,
l'étroite corrélation observée entre les températures
enregistrées en Antarctique dans le passé et les teneurs
atmosphériques en CO2 et CH4. Par ailleurs,
jamais, sur les derniers 800.000 ans, n'ont été relevées
des teneurs en gaz à effet de serre aussi élevées
qu'aujourd'hui. Les chercheurs ont également mis en évidence
une modulation des teneurs moyenne en CO2 atmosphérique
sur une échelle de temps relativement longue de plusieurs centaines
de milliers d'annnées. Inédit, ce phénomène
pourrait résulter de l'intensité, plus ou moins importante,
de l'érosion continentale qui affecte le cycle du carbone sur de
grandes échelles de temps. |
Concernant le méthane
atmosphérique, les enregistrements ont permis de constater une augmentation
de la périodicité de la composante dite "de précession"
au cours du temps. Parfaitement corrélé aux intensités
de la moussion relevée en Asie du Sud-Est à travers les millénaires,
ce signal reflète sans doute une intensification des moussons en
régions tropicales sur les 800.000 dernières années.
La courbe du méthane révèle également des fluctuations
rapides à l'échelle millénaire, récurrentes
au cours de chaque glaciation. Cette variation climatique pourrait être
liée aux fluctuations du courant thermohalin. Cela dit, il reste
à expliquer pourquoi celle-ci se manifeste dès le début
des glaciations.
Pour en savoir plus, contacts:
- [1] Laboratoire de Glaciologie et Géophysique
de l'Environnement (LGGE), Jérôme Chappellaz : tél.
+33 (0)4 76 82 42 64 - email : jerome@lgge.obs.ujf-grenoble.fr
- [2] Laboratoire des Sciences du Climat
et de l'Environnement (LSCE), Jean Jouzel : tél. +33 (0)1 69 08
77 13 - email : jouzel@lsce.ipsl.fr
Rédacteur:
ADIT - Jean-François Desessard - email
: jfd@adit.fr
Origine:
BE France numéro 210 (26/05/2008) - ADIT
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