David Dickson
Directeur du Réseau Sciences et Développement
24 mars
L'énergie solaire
est la réponse quasi parfaite aux besoins énergétiques
des pays en développement
Les obstacles à l'utilisation efficace
de l'énergie solaire disparaissent, mais les défis d'ordres
économique et politique freinent son adoption à grande échelle
par les pauvres.
«Le soleil est au centre, comme il
se doit, puisqu'il est littéralement la source de toute énergie»
déclarait le Premier ministre indien Manmohan Singh lors de la présentation
du plan d'action dans le cadre de la stratégie nationale de l'Inde
sur les changements climatiques en juin 2008.
Il avait alors promis que l'Inde rassemblerait
«les compétences scientifiques, techniques et managériales
ainsi que les ressources financières pour développer l'énergie
solaire, une source d'énergie abondante, pour faire tourner notre
économie, transformer les vies de nos populations et changer la
face de l'Inde».
En principe, l'énergie solaire est
la solution quasi parfaite aux problèmes énergétiques
des pays en développement. Elle est disponible universellement et
gratuitement, surtout au voisinage de l'équateur, où sont
concentrés un certain nombre de pays en développement.
L'énergie solaire est la source d'énergie
renouvelable par excellence, du moins à l'échelle de la durée
de vie de l'être humain. Son utilisation n'épuise pas les
réserves naturelles et émet peu de dioxyde de carbone dans
l'atmosphère, ce qui en fait la réponse idéale au
défi posé par le changement climatique.
Inégalité des armes
Jusqu'à une date récente, le
principal obstacle à l'utilisation de l'énergie solaire résidait
dans la faible efficacité et le coût relativement élevé
de sa conversion dans sa version consommable. Mais les progrès scientifiques
ont rapidement fait disparaître ces obstacles. Les technologies photovoltaïques,
qui transforment la lumière du soleil en électricité
au moyen de réactions chimiques, progressent rapidement, et des
batteries permettent de stocker l'énergie électrique dans
la perspective de nos besoins.
A mesure que les coûts de transformation
et de stockage baissent, le potentiel de l'énergie solaire pour
les communautés démunies croit inévitablement. En
Inde, les coûts à long terme de l'utilisation d'ampoules alimentées
par l'énergie solaire sont déjà considérablement
inférieurs à ceux de l'éclairage traditionnel de la
lampe à pétrole.
Si l'économie offrait des conditions
égales à tous, l'équation besoins élevés/forte
demande et baisse des coûts permettrait d'imposer rapidement l'utilisation
de l'énergie solaire dans le monde en développement.
Malheureusement, l'égalité des
chances n'est pas garantie pour tous. Les coûts des équipements
solaires restent élevés, surtout pour les plus démunis.
Et les subventions de l'Etat à l'énergie produite à
partir de sources non renouvelables, destinées manifestement à
garder les prix à un niveau abordable, créent trop souvent
des distorsions du marché au profit des fournisseurs des énergies
conventionnelles.
En conséquence, l'utilisation
de l'énergie solaire, particulièrement par les communautés
rurales qui devraient le plus en bénéficier, est freinée
plus que de raison.
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suite:
L'énergie solaire sous le feu des
projecteurs
Cette semaine, le Réseau Sciences et
Développement informe sur les opportunités technologiques
et les défis sociaux et politiques que posent la fourniture de l'énergie
solaire aux pauvres, à travers une série d'articles d'opinion
et d'articles de fond.
Un article introductif plante le décor,
en résumant les options technologiques et scientifiques de mise
en valeur de l'énergie solaire, ainsi que leurs nombreuses applications,
notamment les clôtures électriques solaires et le wifi solaire
(Voir L'énergie
solaire pour les pauvres: faits et chiffres).
Trois articles d'opinion parlent des perspectives
régionales en matière de fourniture d'énergie solaire
aux pauvres. Banji Oyelaran-Oyeyinka, de l'ONU-HABITAT au Kenya, appelle
les gouvernements africains à renforcer les capacités du
continent à développer et produire sa propre énergie
en investissant dans l'innovation, la production et la demande d'énergie
solaire (voir Afrique:
Il est temps de passer au solaire).
Vishaka Hidellage de Practical Action Asie
du Sud, fait écho à cet appel en faveur de l'appui des Etats,
en mettant l'accent sur la nécessité de subventions et d'infrastructures
pour apporter l'énergie solaire aux pauvres dans sa région
(voir La
fourniture de l'énergie solaire aux pauvres nécessite l'appui
de l'Etat).
Huang Ming, président de Himin Group
en Chine et Gong Yidong, coordonnateur du Réseau Sciences et Développement
pour la Chine, démontrent que chez eux, l'appui financier seul ne
suffit pas, et expliquent qu'il faudrait réfléchir a une
réorientation de la production d'énergie photovoltaïque
destinée aux marchés d'exportation vers le développement
de l'énergie thermosolaire afin de répondre aux besoins en
énergie (voir MING OP TITLE TO BE CONFIRMED).
Certes, les subventions peuvent contribuer
à rendre l'énergie solaire plus abordable. Mais il existe
d'autres mécanismes financiers efficaces. Pinaki Roy et Katherine
Nightingale montrent comment diverses options de financement, principalement
la microfinance, aident les Sud asiatiques à accéder aux
technologies solaires et a se l'approprier (voir Le financement de l'énergie
solaire pour les pauvres).
La politique énergétique
L'une des retombées les plus méconnues
de la conférence de Copenhague de décembre dernier est l'accord
pour la mise en place d'un Fonds vert pour le climat. Ce fonds est destiné
à recueillir et distribuer environ US$ 30 milliards par an pendant
les trois prochaines années afin d'aider les pays en développement
à accroître leur utilisation des énergies renouvelables
et les intégrer dans les programmes de développement (voir
Climate accord offers some grounds for hope, say analysts).
La mise en place de ce fonds prouve que les
sources d'énergie renouvelables, notamment l'énergie solaire,
sont de plus en plus perçues comme essentielles pour l'environnement
mais aussi comme une arme qui permettra aux pauvres de sortir de leur condition.
Mais l'incapacité des gouvernements
à respecter l'engagement pris par la communauté internationale
de réduire les émissions de carbone souligne à quel
point la politique énergétique est, et a toujours été,
une question hautement politique. De puissants intérêts (pouvant
inclure ceux des consommateurs du monde développé) influent
sur cette politique autant que les progrès technologiques.
Pour que l'énergie solaire contribue
efficacement au développement durable, elle doit faire partie intégrante
des stratégies d'innovation communautaires. Et ces stratégies
doivent à la fois promouvoir les besoins locaux et combattre les
forces extérieures contradictoires. Nous espérons que notre
sélection vous éclairera sur certaines des stratégies
susceptibles de permettre d'y parvenir. |